Diapositive 1

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Diapositive 1
2014-05-13
L’aide médicale à mourir fera-t-elle
une différence dans la pratique?
Danielle Blondeau, inf., Ph. D.
UQAC, 1er mai 2014
Objectifs
• Distinguer sur le plan éthique différentes
pratiques cliniques de fin de vie
• Démontrer que l’introduction de
pratiques euthanasiques en tant que
soins de fin de vie s’éloigne de la
philosophie originale des soins palliatifs.
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Pratiques entourant la fin de vie
Plan
1. Euthanasie
1.1 Mise en contexte
1.2 Etat de la question dans le monde, au Canada et au Québec
1.3 Quelques constats
2. Euthanasie et assistance au suicide
3. Cessation de traitements et abstention
thérapeutique
4. Sédation en fin de vie
5. Soins palliatifs
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1.1 Mise en contexte
Définitions
Geste délibéré de donner la mort par
l’administration de drogues à doses létales.
Euthanasie signifie poser un geste
sciemment et intentionnellement dans le
but de explicite de mettre fin à la vie d’une
autre personne (AMC, 2007).
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L’euthanasie n’est pas…
•
•
•
•
Cessation de traitement
Abstention thérapeutique
Refus de traitement
Soulagement de la souffrance
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1.2 État de la question dans le
monde
• Luxembourg, 2009
• Pays-Bas : (1970) 2002
• Belgique : 2002
Assistance au suicide : Oregon, 1997
Suisse, 1990
Washington, 2009
Vermont, 2013
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1.2 État de la question au Canada
• Proscription par le Code criminel
• Art. 222 : Commet un homicide
quiconque, directement ou
indirectement, par quelque moyen, cause
la mort d’un être humain
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1.2 Au Québec - Le CMQ
• Sortir de l’impasse : Une réflexion du
CMQ sur les soins en fin de vie (communiqué
de presse 03-11-2009)
– Le patient demande généralement de mourir
dans la dignité et de ne pas souffrir.
– Mais il y a des situations d’exception où […]
on demande aux médecins de poser des
gestes qui pourraient être interprétés comme
interdits par le Code criminel.
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État de la question : FMSQ
• Euthanasie : la FMSQ dévoile les faits saillants
de son sondage (communiqué, 13-12-2009).
• Taux de réponse : 23 %.
• 76 % est d’avis que la FMSQ doit prendre
position sur le sujet.
• 75 % certainement ou probablement
favorables à l’euthanasie
• Mais 20 % indiquent qu’ils ne le feraient pas.
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Commission sur la question du
droit de mourir de la dignité
• Création en novembre 2009
• Dépôt du rapport Mourir dans la dignité,
22 mars 2012
• 24 recommandations
– Développement des soins palliatifs (6)
– Aide médicale à mourir (12)
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Commission… suites
• Rapport Ménard déposé à l’été 2013
• Dépôt du projet de loi 52: Loi concernant
les soins de fin de vie
• Auditions à l’Assemblée Nationale,
automne 2013
• Dépôt récent en deuxième lecture
• Élections provinciales, 7 avril 2014
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Quelques constats
Chambaere, K., Bilsen, J., Cohen, J, Owuteaka-Philipsen,
B., Mortier, F. & Deliens, L.
Physician-assisted deaths under the euthanasia law in
Belgium: a population-based survey.
CMAJ, 182 (9), 2010
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Constats
• Au sujet des décès impliquant le recours à
des médications visant à terminer la vie.
• Sur 208 décès :
– 142 avec consentement
• Patients de moins de 80 ans
• Avec cancer
– 66 décès sans consentement
• Patients de 80 ans et plus
• Maladies autres que le cancer
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Constats
• Le critère original : en présence de
maladie terminale
• Assouplissement graduel des critères.
Ex. : migration vers le critère de contrôle,
pour les maladies dégénératives
évolutives qui conduisent à une perte
d’autonomie
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Constat…
• Les Pays-Bas «ont évolué de l’euthanasie
des malades terminaux vers l’euthanasie
de malades chroniques, de l’euthanasie
pour des maladies physiques vers
l’euthanasie pour des maladies
psychologiques, et de l’euthanasie
volontaire vers l’euthanasie sans
demande exprimée et contre la volonté
du patient» (Hendin in Montero, 2013, p. 68).
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Constat
• La Belgique vient d’étendre l’euthanasie
aux mineurs, sans limite d’âge (13 février
2014).
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Constats
Aide médicale à mourir
• Un nouveau terme
• «Un soin consistant en l’administration de
médicaments ou de substances par un
médecin à une personne en fin de vie, à
sa demande, dans le but de soulager ses
souffrances en entraînant son décès»
(Projet de loi 52 amendé)
• Aide médicale à mourir = euthanasie
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Conséquences possibles
• Inconfort et détresse chez certains
soignants
• Expression de sentiments d’isolement et
d’obligation sacrificielle
Havernake et el, 2001; Mitchell, 2004; van Marwijk, 2007.
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Conséquences possibles
• La possibilité de « pressions » exercées
par les pairs suite aux objections de
conscience
• Une détresse chez des soignants
pratiquant l’euthanasie
• Un changement craint dans la qualité de
la relation avec les malades (Dierckx de
Casterle, Verport & Gastmans, 2006)
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2. Euthanasie et assistance au
suicide
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Statut légal
Assistance au suicide
• Proscription au Code criminel
• Art. 241 Est coupable d’un acte criminel et
passible d’un emprisonnement maximal de
quatorze ans quiconque, selon le cas :
a) Conseille à une personne de se donner la
mort
b) Aide ou encourage quelqu’un à se donner la
mort
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Question
Quelle est la
différence entre
euthanasie et
assistance au
suicide?
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Assistance au suicide et euthanasie
• Différence sur le plan technique
• Similitude sur le plan éthique
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3. Cessation de traitements et
abstention thérapeutique
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Situation clinique
Monsieur Y, 54 ans, souffre de diabète
insulino-dépendant depuis l’âge de 16 ans.
• A eu une greffe de rein il y a 8 ans, après une
attente de 2 ans pour une greffe.
• Doit être hémodialysé à nouveau depuis 18
mois après que le rein greffé soit devenu non
fonctionnel.
• Amputé au niveau du genou gauche au
printemps dernier.
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Monsieur Y
Monsieur veut mettre fin aux dialyses qui lui
permettent de survivre car il estime qu’il n’a
plus une bonne qualité de vie. Il dit en avoir
assez de cette vie.
• Questions :
– Est-il acceptable d’acquiescer à la demande
de monsieur?
– En vertu de quels principes?
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Le principe de bienfaisance
• Agir dans le meilleur intérêt de la
personne.
• Bénéfices supérieurs aux préjudices (la
mort représente le bénéfice).
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La règle de proportionnalité
• Considère :
– L’utilité ou l’efficacité du traitement sur le plan
thérapeutique.
– Tient compte de la proportionnalité entre les
préjudices et les bienfaits.
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Le respect de l’autonomie
• Respect :
– De la faculté d’une personne de se gouverner par
elle-même.
– De choisir ce qui lui convient.
– D’agir en fonction de ses choix et de ses valeurs.
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Cessation de traitements
Nul ne peut être soumis sans son
consentement à des soins, quelle qu'en
soit la nature, qu'il s'agisse d'examens, de
prélèvements, de traitements ou de toute
autre intervention.
Art. 11, Code civil du Québec
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Abstention thérapeutique
• Ne pas choisir un traitement
• Refus de traitement
• Art. 11 Code civil du Québec
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4. La sédation en fin de vie
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Sédation palliative
Définition
« L’administration d’une médication sédative,
selon des combinaisons et dosages requis
pour réduire l’état de conscience d’un
patient en phase terminale, en proportion
suffisante pour soulager adéquatement un
ou plusieurs symptômes réfractaires».
(Broeckart, 2002; Maison Michel-Sarrazin, 2011)
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Avantages
• Connotation positive qui suggère un effort
actif pour soulager la douleur
• Précision du contexte : milieu palliatif
• Évite la confusion entre sédation et
euthanasie
• Différents types de sédation sont inclus :
sédation continue, intermittente,
profonde légère, etc.
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Euthanasie?
«Slow euthanasia»
• «En définitive, la sédation palliative,
correctement pratiquée, n’abrège pas la
vie»
(Montero, 2013, p.24).
• Supporté par de nombreuses études
(Claessens et al, 2008; Maltoni et al, 2009).
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Projet de loi 52
• Au moment de la consultation à
l’Assemblée nationale, septembre 2013:
Sédation palliative terminale
Mot inexistant dans la littérature
• Projet de loi amendé:
Sédation palliative continue
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Question
Pourquoi encadrer de façon juridique une
pratique médicale connue et reconnue?
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Sédation palliative continue
«Un soin offert dans le cadre des soins
palliatifs consistant en l’administration
de médicaments ou de substances à une
personne en fin de vie dans le but de
soulager ses souffrances en la rendant
inconsciente, de façon continue, jusqu’à
son décès» (Projet de loi 52 amendé).
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Enjeu éthique fondamental
Dans un contexte de fin de vie, doit-on recourir
à la sédation palliative en présence de
souffrance existentielle?
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Sédation en fin de vie :
Résultats de recherche
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La sédation en fin de vie
• Chercheurs :
– Danielle Blondeau, Ph. D., Université Laval
– Louis Roy, MD, CHUQ
– Serge Dumont, Ph. D., Université Laval
– Professionnelle de recherche : Isabelle
Martineau, M. Sc.
Recherche subventionnée par le Conseil de recherche en sciences humaines (CRSH), 2002-2005
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Objectif de l’étude
• Mesurer l’attitude de médecins et
pharmaciens de la province de Québec
face à la sédation en fin de vie
• Mesurer l’influence de deux variables sur
l’attitude : pronostic et type de douleur
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Population à l’étude
• Médecins et pharmaciens
• Diversité des milieux cliniques
• Province de Québec
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L’instrument de mesure
• Quatre vignettes cliniques
• Composition :
– Patient atteint de cancer et en phase terminale
– Condition clinique
– Médication
• Variables étudiées à deux niveaux :
– Douleur
Physique
morale
– Pronostic
Long (4 à 8 semaines)
Court < 10 jours
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Les vignettes cliniques
Nature de douleur
Physique
Morale
Long
1
3
Court
2
4
Pronostic
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La question
Dans cette circonstance, seriez-vous en
accord ou en désaccord avec le fait de
faire dormir le patient jusqu’à son décès?
Fortement
en désaccord
Moyennement
en désaccord
Légèrement
en désaccord
Légèrement
en accord
Moyennement
en accord
Fortement
en accord






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Résultats
Caractéristiques des sujets : professions
20%
0% 0%
Médecins
Pharmaciens
80%
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Résultats
Caractéristiques des sujets :
expérience en soins palliatifs
34%
36%
0-5 années
6-10 années
11 années
30%
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L’impact des variables
indépendantes
Fortement
en accord
6
5
4
3
2
1
Fortement
en désaccord
Douleur
morale
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Fortement
en accord
Douleur
physique
Px long
Px court
L’attitude des quatre groupes
de sujets
6
5
4
3
2
1
Fortement
en désaccord
© D. Blondeau
1
1
Px long
douleur morale
1
2
Px long
douleur physique
1
3
Px court
douleur physique
1
4
Px court
douleur morale
Blondeau, D., Roy, L., Dumont, S. &
Martineau, I. (2005). Physicians’ and
Pharmacists’ Attitudes Toward the Use of
Sedation at the End of Life: Influence of
Prognosis and Type of Suffering. Journal of
Palliative Care, 21 (4), 238-245.
© D. Blondeau
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Blondeau, D. Dumont, S., Roy, L., &
Martineau, I. (2009). Attitudes of Quebec
Doctors Toward Sedation at the End of Life:
An Exploratory Study. Palliative &
Supportive Care, 7, 331-337.
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Enjeux éthiques de la sédation
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La bienfaisance et la sédation
• Agir dans le meilleur intérêt
• Le bénéfice recherché est le soulagement
• Le préjudice causé est la perte
d’interaction avec l’environnement
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En résumé
• La sédation représente la dernière
solution
• Elle est la dernière solution en présence
de symptômes réfractaires, qu’il est
impossible de soulager
• En conséquence, la sédation ne saurait
être une pratique courante en soins
palliatifs
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5. Les soins palliatifs
• La bonne mort, sans souffrance
• Accompagnement et compassion
• Soulagement de la souffrance totale
• Mourir dans la dignité
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L’euthanasie et les soins palliatifs
Est-ce que l’euthanasie est :
• Une alternative aux soins palliatifs?
• Une option supplémentaire dans les soins
palliatifs?
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Les grands axes de la philosophie
des soins palliatifs (OMS)
1. Reconnaître que la mort et le mourir font
partie du processus naturel de la vie
2. Promouvoir la qualité de la vie de la
personne mourante
3. Axer les soins sur la personne plutôt que
sur la maladie
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Les grands axes de la philosophie
des soins palliatifs (suite)
4. Soulager les souffrances de la personne et
contrôler les autres symptômes
5. Rencontrer les besoins biologiques,
psychologiques, sociaux, spirituels et
affectifs de la personne
6. Favoriser l’expression de l’autonomie de la
personne
7. Assurer le respect de la dignité de la
personne
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Projet de loi 52 amendé
Les soins palliatifs sont «les soins actifs et
globaux dispensés par une équipe
interdisciplinaire aux personnes atteintes
d’une maladie avec pronostic réservé, dans
le but de soulager leurs souffrances, sans
hâter ni retarder la mort, de les aider à
conserver la meilleure qualité de vie
possible et d’offrir à ces personnes et à
leurs proches le soutien nécessaire».
© D. Blondeau
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Soins de fin de vie
• «Les soins palliatifs offerts aux
personnes en fin de vie et l’aide
médicale à mourir» (Projet de loi 52
amendé).
• Deux lois en Belgique
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Conclusion:
des pistes de réflexion
• L’apologie du choix et individualisme
Toutes les options se valent, parce qu’elles se
font librement et que le choix leur confère à
lui seul une valeur […] Mais du coup se trouve
niée l’existence d’un horizon pré-existant de
signification, grâce auquel certaines choses
valent plus que d’autres ou certaines, rien du
tout, préalablement à tout choix (Taylor, C., 1992,
p. 54)
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Taylor…
C’est ce qu’il y a d’autodestructeur dans
les formes de la culture contemporaine qui
se referment sur l’épanouissement de soi
en s’opposant aux exigences de la société
ou de la nature, et qui tournent le dos à
l’histoire et aux exigences de la solidarité
(p.57).
© D. Blondeau
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Quelle société?
«Si l’euthanasie devient la réponse au
problème de la souffrance, cela signifie
symboliquement que la personne malade
et handicapée (vieille et mourante) n’a pas
sa place dans la société» (Pelluchon, C., 2009, p.
55).
© D. Blondeau
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