Comment réussir à être un bon imam en occident

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Comment réussir à être un bon imam en occident
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‫بسم هللا الرحمن الرحيم‬
‫كيف تكون إماما ناجحا في الغرب؟‬
COMMENT RÉUSSIR A ÊTRE UN BON IMAM EN
OCCIDENT ?
CONSEILS PRATIQUES ISSUS DE L’EXPERIENCE
Écrit en arabe par Ahmed El Habti (Abou Khalid)
Traduction : professeur Mohammad Lazrak
Louange à Allah et bénédiction et salut sur l’ensemble de ses prophètes et
de ses messagers
I NVOCAT IONS
Ô Allah, notre Seigneur nous nous réfugions auprès de Toi pour nous
préserver de nous égarer ou d’égarer, de pécher ou d’inciter aux péchés,
d’être injustes ou victimes d’injustice, d’être violents ou victimes de
violence. Ô Allah Toi qui inspire la droiture, Toi qui fais descendre le
Coran, inspire nous dans ces lignes des paroles raisonnables dont profiteront
les gens et qui demeureront sur terre. Donne- nous Ô Allah la beauté de la
sincérité et embellit nos cœurs par Ta crainte. Mets- nous sur la bonne voie
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et achève notre vie dans la bonté et le bonheur de Ton agrément. Ô Celui
dont Tes trésors sont inépuisables, satisfait la demande de chacun de Tes
serviteurs. Me concernant, ma requête aujourd’hui est de me préserver de la
méchanceté de mon être, de ma langue, de ma plume et de faire en sorte que
cet écrit soit voué à Toi, Allah le Généreux. Ô Seigneur Ô Seigneur Ô
Seigneur. ... ! Je viens à Toi, Tout miséreux, Toi qui détiens la richesse. Et
c’est Toi L’Eternel Bienfaiteur.
P REAMBULE
En Islam, la fonction d’imam est une mission auguste, une lourde
responsabilité qui n’est confiée qu’à des hommes exceptionnels, éminents,
choisis par Allah l’Exalté, pour son message et sur lesquels Il a veillé de Son
œil. Il a dit, Exalté soit-Il, louant les imams qui guident sur la bonne voie :
« Et nous avons désigné parmi eux des dirigeants qui guidaient (les gens)
par Notre ordre aussi longtemps qu’ils enduraient et croyaient fermement
en Nos versets » (Sourate As Sajdah).
Il ne fait pas de doute, que la réussite ou l’échec des imams se répercutent
sur leur entourage, car l’imam soit être suivi, selon le propos du prophète
(prière et bénédiction d’Allah sur lui) (PbAsl) (rapporté par Al Boukhari). Si
la fonction de l’imam se limitait seulement à présider la prière et à prononcer
le sermon, la tâche aurait été simple, mais c’est loin d’être le cas. Mais, elle
est plus profonde, plus large, plus grave. C’est d’ailleurs peut-être pour cela
que notre maître, le compagnon du prophète Abdoullah Bnou Omar –
qu’Allah l’agrée – avait dit : « Je n’arbitrerai pas un litige opposant deux
personnes et je ne ferai pas l’imam devant deux hommes ».
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La fonction d’imam est un héritage légué par le prophète ; c’est un modèle
spirituel complet et global, à suivre, spécialement dans le contexte
occidental ; un contexte épineux et spécifique dans lequel l’imam représente
énormément de choses et assume des fonctions multiples difficiles à gérer
tout seul. En effet, il est le guide et le symbole ; il préside la prière, prononce
les prêches, oriente, exhorte et guide les croyants. Il est le père qui éduque,
l’autorité en matière de jurisprudence, le conseiller social. Il reflète l’image
de l’Islam dans la société occidentale ; bref, ici, l’imam est ce qu’est le soleil
pour la terre ou la santé pour le corps. C’est cette image qu’a utilisée l’imam
Chafii en parlant de l’imam Ahmed – qu’Allah les agrée –. Qu’Allah agrée
aussi celui qui a dit dans une poème : « On t’a proposé pour une tâche qui, si
tu en entrevoyais l’ampleur, tu te cacherais pour ne pas avoir à brouter avec
des chameaux livrés à eux-mêmes ». En connaissance de l’importance de la
fonction des imams, le prophète (PbAsl) a demandé à Allah qu’Il leur
accorde la guidance dans ces termes : « ... Ö Allah, guide les imams et
pardonne aux muezzins » (rapporté par Abou Daoud).
Nous sommes persuadés qu’il est du devoir des imams expérimentés,
d’épauler leurs nouveaux confrères et de leur tendre la main pour les
assister, afin qu’ils prennent leurs fonctions sur des bases saines et solides.
De leur côté, les nouveaux imams doivent écouter leurs aînés et profiter
pleinement de la richesse de leur expérience pour éviter de tomber dans les
mêmes erreurs que leurs prédécesseurs. Il est dit dans une sagesse courante :
« Ne répète l’expérience déjà testée que celui dont l’intelligence est en
panne ». Dans cette optique, on retrouve les paroles suivantes du pionnier de
la langue arabe Mostapha sadeq Arrafii – Qu’Allah le comble de sa
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miséricorde – à savoir : « Si tu recherches la rectitude dans le jugement
adresse-toi à celui qui a fait des erreurs ».
Les prophètes nous ont légué le bien et nous ont conseillé de le transmettre
– fasse Allah que nous suivions leur voie –. Allah dit dans le Coran (les
recommandations qu’Ibrahim et Jacob ont faites à leurs enfants) : (Ô mes
enfants certes Allah a choisi pour vous la religion ; ne mourrez point donc
autrement qu’en soumis (à Allah) (Sourate al Baqarah / verset 132). De
même qu’Allah – soubhanah- a dit citant Ibrahim : Et il en fît une parole qui
devait se perpétuer parmi sa descendance : Peut-être reviendront ils. (Sourate
Azzoukhrouf / verset 28). Le Coran nous a rapporté également quelques-uns
des conseils que Loqman, le sage, a prodigués à son fils – conseils combien
précieux et qu’il faut toujours garder à l’esprit – .
Quant
à
la
Tradition
du
prophète
(PbAsl),
elle
regorge
de
recommandations dont nous citons, à titre d’exemple, ce qui suit, rapporté
par le compagnon du prophète Al Irbad Bnou Saarya – Qu’Allah l’agrée – à
savoir : « Le prophète - PbAsl - s’est adressé à nous dans un sermon si
touchant que nous en avons pleuré et que nos cœurs furent saisis d’émotions.
Quelqu’un dit alors : « Ô Messager d’Allah on dirait que cette exhortation
est un adieu, que nous recommandez-vous ? Il dit : Je vous recommande la
crainte d’Allah, de l’écoute et de l'obéissance. ... (Rapporté par Attirmidi).
Suivant la voie des prophètes et des Messagers, nombre de nos éminents
ulémas, ont veillé à transmettre la fonction de l’imamat ainsi que celle
d’enseignant à leurs fils et à leurs étudiants. Ils ont dépensé à cette fin de
l’argent et du temps, tout en étant satisfaits de dédier cette œuvre pour
l’amour d’Allah. En effet, beaucoup d’uléma et des gens de savoir –
Qu’Allah les comblent par sa miséricorde – avaient pris l’habitude d’écrire
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leurs recommandations et leurs conseils destinés initialement à leurs enfants,
puis avec la bénédiction d’Allah cette bonne initiative s’est étendue au profit
de l’ensemble des gens à travers les époques et les contrées.
Parmi ces recommandations, les plus anciennes chez les orientaux, on
relève celles léguées à son fils par Al Imam Jamal Eddinn Al jauzi à savoir :
les conseils de mon cœur à mon fils ; c’est de la sagesse dont aucun étudiant
ne peut s’en passer.
Les ulémas de l'Occident musulman (L’Andalousie et l’Afrique du nord)
ont participé efficacement, aussi, dans ce patrimoine. L’on note dans ce
contexte :
-Le legs de l’imam Abou L'Walid Soulaïmann bnou Khalaf Al Bajji
-Le Legs laissé à son fils par Issa Bnou Imran Alwardmichi.
- Le legs de Hassan bnou Massoud Al Youssi à ses enfants.
- Le legs de Abi Hayyan Al Andaloussi à ses enfants.
- Le legs de Lissann Eddinn Al Khatéb à ses enfants.
- Le legs de Abi Mohammed Abdallah Al Habti à ses disciples.
Tous ces legs sont, grâce à Allah, édités et diffusés.
Outre cela l’on trouve également des mémentos, des journaux, des
biographies récentes, tels les souvenirs du sheikh Ali At Tantaoui ou du
cheikh Abou L’hassan Anna Douai, du professeur El Arbi Al Hilali Al
Filali, du faqih Al Marir Attitouani, du faqih Mohammed Daoud, du
professeur Abou Bakr Al qadiri, etc. Ces legs sont autant de mines de
conseils dont le but est d’orienter les générations futures et de les mettre sur
la bonne voie.
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Nous saisissons cette occasion pour espérer qu’Allah – Exalté soit Il –
fasse que nos ulémas en Occident, écrivent eux aussi, leur autobiographie et
leurs recommandations avant l’ultime voyage vers l’au delà. Leur
expérience est riche et sera – s’il plaît à Allah – d’une grande utilité. Dans
un hadith rapporté par Abou Horaïra, le prophète – PbAsl - a dit : « parmi les
bonnes œuvres qui rejoignent le croyant décédé, il y aura ce qu’il aura
professé ou diffusé comme science ». Les ulémas entendent par ce hadith
qu’ils ont le devoir d’écrire et de diffuser la science utile pour en assurer la
pérennité, comme l’ont souligné les imams Assayouty et Al Zarkashi.
Il n’est pas dit que les recommandations sus- visées soient toujours faites
de l’amont vers l’aval, du transcendant au descendant, mais plutôt dans
l’esprit préconisée par la sagesse de l’imam Al Izzou Bnou Abd As Salam –
Qu’Allah l’ait dans sa miséricorde – à savoir : « Réponds à celui qui t’invite
auprès de ton Maître quel que soit l’invitant, petit ou grand, car tu auras
alors obéi à ton Maître (tiré de l’ouvrage intitulé l’arbre du savoir et des
aspects). Dans le même contexte dans un hadith rapporté par Attirmidi, le
prophète (PbAsl) a dit : « Nombreux sont ceux qui apportent le savoir à plus
savants qu’eux. »
Dans cette perspective, je joins mes recommandations de bonnes œuvres à
celles de mes pairs, les imams dont je ne prétends pas être meilleur, et ce
pour répondre aux vœux de celui dont je ne peux qu’agréer les vœux. Je me
base sur une expérience accumulée sur 25 ans, dans la ville d’Epinal à l’Est
de la France, en tant qu’imam en Occident et durant laquelle chaque jour a
apporté son lot d’édifice. Nous demandons à Allah de nous accorder le
bénéfice des bonnes œuvres et de faire que notre adieu à ce bas-monde se
fasse dans les meilleures conditions. Amen !
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« Nous n’aurions pas été guidés si Allah ne nous avait pas guidés »
(sourate Al A’raf / verset 43). « C’est tout au contraire une faveur dont Allah
vous a comblée en vous guidant vers la foi » (sourate Al Houjourat / verset
17). C’est Allah qui accorde la faveur et le mérite.
Le présent travail représente des pensées cordiales et des réflexions
spontanées que je livre timidement et rapidement. Le but étant que la
personne ne reste pas dans la passivité, qu’elle évite les écueils et qu’elle
tende vers la perfection humaine. « Beaucoup d’hommes sont parvenus à la
perfection humaine » a dit le prophète (PbAsl) d'après un hadith. Ceci dit,
nous sommes sûrs que nos imams sont, grâce à Allah, brillants et parmi les
meilleurs, compte tenu de l’époque et des gens.
J’ai mis l’accent dans cet ouvrage sur les recommandations les plus
essentielles, et j’ai donné exceptionnellement plus de détails dans certains
chapitres du fait - à mon sens - qu’elles touchent à la réalité quotidienne des
imams en Occident, quoique certains les verront comme des évidences. Les
points de suspension «.. » rencontrés dans le texte voudront dire que d’autres
impressions traversent ma pensée, mais que ma langue n’a pu les exprimer.
Ces feuilles, à l’instar des exhortations littéraires anciennes émanent et
s’adressent à notre cœur. Elles donnent libre cours à la plume et sont de ce
fait, loin de la rigueur académique.
Entrons donc dans le vif du sujet..
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RECOMMANDATION 1 : L A
CONV ICT ION QUE LA FONCT ION
D ’ IMAM EST UNE MISSION
Cela veut dire que l’imam doit avoir entièrement foi en sa mission, qu’il ne
doit pas s’en acquitter comme contraint et forcé ou comme une faveur de sa
part ou en s’en plaignant ou encore en la ressentant comme un complexe
d’infériorité. Au contraire, il doit être fier d’assumer la meilleure des
missions, qu’il tient les meilleurs propos en dépit de toutes les difficultés et
de tous les obstacles car :
- Il est porteur du saint Coran qu’il mémorise entièrement, en principe.
- Il assume la mission des prophètes.
- Il veille sur l’héritage prophétique
- Il assure la continuité des Messagers – Que le salut d’Allah soit sur eux –.
Ses paroles et son rang sont les meilleurs qui soient ; sa fonction est la
plus honorable qui soit : « Et qui profère plus belles paroles que celui qui
appelle à Allah » (Sourate Foussélate / verset 33). « Nous t’avons certes
donné les sept versets que l’on répète ainsi que le Coran sublime. Ne regarde
surtout pas avec envie les choses dont nous avons donné jouissance
temporaire à certains couples d’entre eux » (Sourate Al Hijr / versets 87, 88).
L’imam ne pourra jamais obtenir l’effet escompté sur les fidèles et en
devenir l’exemple s’il n’a pas foi en sa mission et s’il répète souvent :
Qu’Allah me fasse grâce et me délivre de cette profession ? La réponse est
évidente, car celui qui ne possède pas un bien ne peut le donner, et le verre
ne déborde pas s’il n’est pas plein – disent les sages.
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Ci-après des versets coraniques qu’il y a lieu de méditer, à savoir : (Le
Messager d’Allah a cru en ce qu’on a fait descendre vers lui venant de son
Seigneur ainsi que les croyants (Al Baqarah / verset 285), ce qui signifie que
le Messager était le premier à croire à son message, en tant qu’exemple, au
même titre que les croyants. Il était donc sans conteste le premier des
croyants de la Oumma, le premier soumis (à Allah), le premier à s’adresser
en prière à Allah, le premier à prodiguer l’aumône et le plus patient. « Et je
suis le premier à m’être soumis (à Allah) » (Sourate Al An'am / verset 163).
Médite aussi la fierté qu’il ressent - PbAsl - à l’égard de la mission dont
Allah l’a investi quand il a dit le jour de la bataille de Hounaïne : « Je suis le
prophète non un mensonge, je suis issu de Abd Al Mouttalib ». L’imam a
donc le devoir de dire tout haut et fort, sans complexe et sans ambiguité : je
suis l’imam, le muezzin, je suis au service de la foi, je suis issu de la
mosquée, je guide vers le bien, je suis « l’assistant »’ « pompier »’ et le
« secouriste ». Ce sont autant de facteurs de fierté, d’honorabilité et de
couronnes que chacun convoiterait de porter : « Seigneur donne nous en nos
épouses et nos descendants la joie des yeux et faits de nous un guide pour les
pieux » (Sourate Le discernement / verset 74). Y-a-il plus grand honneur que
d’exercer la fonction d’imam, fonction remplie par le prophète
personnellement et reprise après lui par les khalifs bien guidés. De tout
temps et partout, les musulmans n’ont choisi pour ce poste que le meilleur
d’entre eux et le plus parfait parmi eux. Dans un hadith rapporté par
Mouslim, le prophète a dit : « Trois personnes prendront place sur des
collines de musc le jour de la résurrection et l’un d’eux est l’homme qui a
été imam et dont les gens étaient satisfaits ». Et dans un autre hadith rapporté
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par Abou Houraïra, le prophète a dit : « L’imam a une rétribution qui vaut la
somme des rétributions de ceux qui ont prié derrière lui ».
Il est opportun de citer aussi que le prophète Ibrahim Al Khalil – Le salut
d’Allah sur lui – quand il avait atteint le rang d’ « imam » dans le sens le
plus large et le plus complet du terme et réalisant cet honneur dont Allah l’a
gratifié, il le sollicita pour sa descendance 1 afin, qu’ensemble, ils s’élèvent
encore plus haut comme exprimé dans le Coran : « Je vais faire de toi un
exemple à suivre pour les gens et parmi ma descendance, demanda -t-il »
(Sourate Al Baqarah / verset 124). Les jurisPrudents musulmans sont
d’accord pour dire qu’il est tout à fait légitime pour les personnes qui sont
persuadées de posséder les compétences acquises et la volonté sincère pour
assurer les fonctions d’imam d’oser le faire, car l’on a rapporté qu’un
compagnon du prophète- PbAsl - lui a dit : « Désigne-moi comme imam des
gens de ma tribu et Il lui a répondu : Tu es leur imam et prends en
1
Il est bien connu par ailleurs que dans les pays Arabes, pendant des siècles des
familles de souche ont, de père en fils, rempli de façon héréditaire les fonctions d’imam,
à tel point qu’elles furent désignées par la dénomination de familles des imams et du
savoir. Les plus illustres parmi elles sont : la famille Asseddiqine Attujkaniène à Tanger,
la famille Al Othmaniène dans le Souss, les chérifs Kettani à Fès, les Al Achour en
Tunisie. C’était un héritage sacré et beau. Toutes les fois qu’on me désigne un imam
émérite, elle traverse mon esprit la phrase par laquelle le prophète Ibrahim (Sur lui le
salut d’Allah) demanda à Allah que sa descendance hérite de cette auguste faveur et
parmi ma descendance ?
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considération le plus faible d’entre eux » (Hadith rapporté par Othmann
Bnou Abi Al Ass).
Un certain imam (qu’Allah l’ait dans sa miséricorde) invoque Allah en
disant : « Ô mon Seigneur, fais que je vive imam, que je meurs imam, et
ressuscite- moi imam le jour de la résurrection » et effectivement Allah l’a
ramené à lui alors qu’il était prosterné en prière, quelques instants avant
d’escalader les marches du minbar pour prononcer le prêche. N’est-ce pas là
la meilleure des fins que peut espérer celui qui a du discernement et de la
clairvoyance. Il y a quelques mois, nous avons appris ici à l’Est de la France,
la mort d’un imam vertueux. Il savait le Coran par cœur et en appliquait les
préceptes. Il avait à cœur sa dignité d’imam et était très attaché à la mosquée
à tel point qu’il en avait presque fait sa maison et son refuge et que c'était làmême qu’Allah avait pris son âme, comme il l’avait souhaité, en imam,
dirigeant la prière du Ichaa et précisément en position de prosternation
devant le créateur. Existe-t-il, mes frères, une fin de vie plus belle ?
Qu’Allah t’accorde sa miséricorde, toi notre frère Abdoussalam !!. Quant au
faqih Al Achraoui - surnom qu’il a mérité parce qu’il maîtrisait les dix
modes de lecture du Coran - il était un prédicateur sublime. Il s’appelait
Abdoussalam Houbbouss. Il se déplaçait en plusieurs lieux pour enseigner le
tajwid, malgré le cancer dont il souffrait et il disait au cours de ses
déplacements : « Je désire qu’Allah me rappelle à lui pendant les cours de
mon enseignement du Coran !». Allah lui laissa la vie encore plus de dix ans
et l’a rappelé à lui effectivement pendant un cours de Coran qu’il donnait
dans le cadre d’un examen de maîtrise qu’il passait à ses fidèles ;( le fait
nous a été rapporté par une personne digne de confiance).
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Notre souhait est que la fonction des imams se maintienne en haute estime
quelles que soient les conditions et les circonstances (parfois misérables)
dans lesquelles elle s’exerce, car cette mission est vouée avant tout pour
Allah. Un poète disait à ce titre : « j’ai demandé à la pauvreté : Où résidetu ? – Elle me répondit : « Dans les turbans des faqihs ». Il existe entre eux
et moi une si profonde fraternité – que je ne peux les abandonner ». Pour sa
part, Soufiane Bnou Ouyaïnah – Qu’Allah lui accorde sa miséricorde – a dit
: « Il suffit que ces encriers pénètrent dans la maison d’un homme et voilà
que la vie devient pénible pour la femme et les enfants !! ». Le même
personnage demanda à quelqu’un : « Quelle est ta profession ? » « Je fais de
la recherche dans les sciences du hadiths, lui répondit-il ». Et le personnage
conclut en lui disant : « Annonce alors la bonne nouvelle de la faillite aux
tiens ».
Quant à notre maitre mon père2, qu’Allah fasse qu’il soit satisfait de moi,
il dit : « Si l’on devait jalouser l’imam, il faut le jalouser sur la rétribution
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Oui, cher père, moi j’envie ton parcours : Imam dans une antique mosquée durant
environ 60 ans, ferme et constant tel une immense montagne, insensible aux tempêtes, ne
se laissant pas influencer par les sentiments infâmes, te contentant en ce bas-monde du
strict minimum que t’assurait ton salaire et quand je m’informais de ta situation
(matérielle), tu répondais : « mon fils, ce bas-monde n’est qu’une étape éphémère ».
Durant des décennies, père, les gens ont pu témoigner de ta rectitude, de l’abnégation
avec laquelle tu remplissais tes fonctions d’imam, de ton affection et ton souci pour les
gens et du sentiment de crainte que tu avais de ne pas faire assez. Je ne cherche pas à
attester de l’honorabilité de qui que soit car Allah sait tout. Prions-Le de réserver à tous
les croyants et croyantes la meilleure fin et qu’Il nous place dans la compagnie du maître
des imams, dans l’endroit le plus haut du paradis. Amen.
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que lui accorde Allah et non sur celle que lui donne les gens; le jalouser
aussi sur sa piété, non sur son gain matériel d’ici-bas ».
Il est surprenant de constater que des personnes auxquelles Allah a
accordé la faveur d’être des imams - c’est à dire représentantes et héritières
des prophètes – et qui sont nourris et logées et ont tout ce qu’il faut, et
pourtant, elles s’avisent de concurrencer les gens du commun pour des
miettes de ce bas-monde. Elles croient qu’elles ont été distancées, trahies et
piétinées. Mais la réalité est tout autre : ces gens du commun, ce sont nos
frères, nos parents, qui ont émigré avant nous et ils ont gagné leur vie grâce
à leurs métiers et leurs professions.
Quant à nous imams, Allah nous a assigné une autre mission, à savoir
l’éducation et l’enseignement. Nous assumons ce rôle comme les autres
assument le leur dans les autres domaines. Il nous appartient d’être à la
hauteur de notre tâche et de l’assurer avec sacrifice et abnégation. En effet,
c’est une responsabilité historique que de former les hommes et de protéger
les générations futures. Il ne faut nous assimiler messieurs ni à des
fonctionnaires, ni à des spéculateurs ni à des artisans, bien que nous
percevons un salaire déterminé, quel qu’il soit : nous sommes – avant tout –
les dépositaires d’un message, les porteurs d’une consigne et les
ambassadeurs de la clémence : « Les croyants n’ont pas à quitter tous leur
foyer. Pourquoi de chaque clan quelques hommes ne viendraient-ils pas
s’instruire de la religion pour pouvoir à leur tour avertir leur peuple afin
qu’ils soient sur leur garde ». (Sourate At-Tawba / verset 122).
Notre mission, ici, messieurs consiste à :
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- Corriger les fausses conceptions et combattre les préjugés - dont certains
taxent l’Islam et les musulmans - par les actes et les paroles.
- Servir la Foi ,par l’argument, la preuve et le comportement exemplaire
- Diffuser la sagesse la clémence, et la tolérance
- Instaurer la pratique saine de la religion et en exclure les motifs de
discorde.
- Protéger nos enfants de l'excès, du rejet des valeurs, du fanatisme, de la
violence, de l, extrémisme, de la perversité et du reniement des leurs.
Voilà notre destin, voilà le legs que nous avons reçu des prophètes, la
mission de tout imam agissant dans la voie d’Allah dont il espère le bon
accueil dans l’ultime demeure.
« Ö Allah, fais que nous nous accommodions de ce que tu nous as
accordé, que nous soyons satisfaits de notre lot et aide-nous à nous acquitter
avec sincérité de notre mission ». Amen.
Arrêtons-nous par déférence en face des paroles prodigieuses suivantes
par lesquelles le prophète (PbAsl) a visé certains compagnons (Al Ansar) –
qu’Allah les agrée – qui briguèrent certains biens de ce monde et qui
faillirent perdre de leur haute situation : « Ö communauté des Ansars quelle
est cette rumeur qui m’est parvenue sur vous? Et que vous a insufflé votre
esprit ? Vous préférez, Ö Ansars, en votre for intérieur les biens dérisoires
de ce bas- monde que j’ai offerts à des gens pour les motiver à embrasser
l’Islam, et je vous ai confié à votre Islam que vous avez choisi. Vous n’êtes
pas contents que les autres emportent brebis et chameaux et que vous vous
retourniez, vous, avec le prophète chez vous ? Je jure par Celui qui tient la
vie de Mohammed dans sa main que ce que vous allez ramenez, à votre
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retour, est mieux que le leur ». Ayant entendu ce discours, les gens
pleurèrent jusqu’à mouiller leurs barbes par les larmes et répondirent :
« Nous sommes contents que le Messager d’Allah soit notre lot et la part qui
nous revient » (Hadith cité dans les Œuvres authentiques de Boukhari et de
Mouslim).
RECOMMANDATION
2
:
A CCROITRE
SON
POTENT I EL
SCIENT IFIQUE
Cela semble une évidence, mais certains de nos confrères en Occident
pensent malheureusement que leur « capital » de savoir leur suffit largement
et qu’il est valable quelles que soient les circonstances ! Ils croient
suffisantes des connaissances acquises dans des institutions traditionnelles
ou dans des facultés modernes avec des mentions « bien » ou « honorable » ;
ou ces connaissances glanées dans les recueils des anciens et de leurs
successeurs ! Ils semblent oublier que ceux qui ont besoin plus d’actualiser
en permanence leurs connaissances, ce sont justement les imams, car ils sont
confrontés aux gens à tout moment et pour chaque événement. En effet, à
l’époque des satellites et des nouvelles technologies de l’informatique, les
fidèles de la mosquée, sont parfois plus documentés et informés que l’imam
(en matière de connaissances) dans certains domaines et peut-être même ils
ont plus de motivation et de détermination. Il est donc vital d’enrichir
constamment ses connaissances. Allah Tout Puissant s’adressant à son
prophète Mohammed (PbAsl) lui dit : « … et dis ô mon Seigneur accrois
mes connaissances (Sourate Taha / verset 114). De son côté, Moïse,
l’interlocuteur d’Allah, dans sa soif de connaissances a demandé au serviteur
d’Allah Al Khidr dans les termes rapportés par le Coran : « Puis-je te suivre
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pour apprendre de ce qu’on t’a appris concernant une bonne direction? »
(Sourate Al Kahf / verset 66). Quant au grand uléma et poète Al Khalil Bnou
Ahmed Al Farahidi -qu’Allah lui accorde sa miséricorde - on raconte que
quand il sortait de chez lui, il disait : « Si je tombe sur quelqu’un de plus fort
que moi sur un sujet, j’aurais appris aujourd'hui quelque chose et si je
tombe sur quelqu’un qui rivalise avec moi, je dirais qu’aujourd’hui c’était le
jour de l’échange et du dialogue, mais si je tombe sur quelqu’un plus faible
que moi, je dirais qu’aujourd’hui c’était un jour de rétribution, car je loue
Allah pour la science qu’il m’a donnée ». Par ailleurs, l’imam historien
Addahbi rapporte dans son ouvrage intitulé « biographies d’éminents ulémas
(siyar Alam annoubala) » que ce même Al Khalil suscité ne faisait jamais
cas de ce qu’il apporte à une personne quand il l’a éclairée sur un sujet
donné, par contre quand il a profité du savoir de quelqu’un, il le lui montrait
explicitement. Plût à Allah que nous adoptions cet exemple !
Normalement les imams en Occident devraient s’organiser légalement, et
créer des journées de formations internes afin de se compléter mutuellement
dans tous les domaines, chacun prodiguant à ses confrères ce qu’il possède
de mieux dans diverses matières : psalmodie du Coran, langues,
droit
européen, art de l’expression et de l’écriture, astronomie, art de
communication et de coaching ... C’est dans cet esprit d’entraide pour la
diffusion de la science, recommandé par le Coran, que nous devons
cheminer. Allah Tout Puissant a dit dans le Coran : … Et il y a toujours plus
docte que soi entre les savants » (Sourate Youssouf / verset 76). … Et
dépensent (obéissant à Allah) de ce que Nous leur avons attribué » (Sourate
Al Baqarah / verset 3). Entraidez-vous dans l’accomplissement des bonnes
œuvres et de la piété (Sourate Al Ma’ida / verset 2). S’il se trouve qu’un
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imam n’a pas de compétences personnelles particulières à partager avec ses
collègues, il lui appartient de trouver la voie adéquate pour se perfectionner,
à savoir : s’inscrire dans un cycle d’étude ; multiplier ses lectures ; aller vers
les ulémas ; participer à des sessions de formation et consulter des sites
scientifiques fiables. L’essentiel est de prendre conscience de son déficit en
savoir et de chercher à y pallier en se tournant vers les personnes
compétentes, en vue de combler ses lacunes et en acquérir de nouvelles
compétences. Il faut porter dans son cœur la devise suivante : « Que la
plume et l’encrier nous accompagnent tout au long de notre vie ».
RECOMMANDATION 3 : S’ INVEST IR
PAR L ’ ACT ION ET PROFITER
DES CONSEILS
Méditons dans les versets suivants où Allah soubhanah avertit les gens
dont le comportement est en contradiction avec ce qu’ils disent: « C’est une
grande abomination auprès d’Allah que de dire ce que vous ne faites pas.
(Sourate AS Saf verset 3). Commanderiez- aux gens de faire le bien (zakat,
sadaqate, hajj) et vous oubliez vous-mêmes de le faire alors que vous récitez
le Livre ? Etes-vous donc dépourvus de raison? (Sourate Al Baqarah / verset
44).
N’est jamais raisonnable celui dont les actes contredisent ce qu’il prône.
Allah le met en garde et le menace de sanction. Outre cela, une telle
personne encourt l’ironie des gens. Prions Allah de nous en préserver !!. Il
faut d’abord soi- même pratiquer les prières et les invocations de la nuit pour
s’en assurer le bénéfice avant de les conseiller aux autres ; donner soi-même
l'aumône – l’exemple par l’action –, s’abstenir de calomnier, d’intriguer et
de jalouser les gens si l’on veut que ceux à qui l’on conseille, en tant
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qu’imam, de faire les bonnes œuvres les fassent, sinon ces gens vous
discréditent.
Soyons conscients que nos comportements se révèlent au grand jour
quoique nous fassions pour les masquer et cela aussi est une preuve de la
puissance d’Allah. Voilà pourquoi le fervent adorateur d’Allah qui était un
exemple dans la pratique du culte, Malik Bnou Dinar, – qu’Allah l’ait dans
sa miséricorde – a dit : « Si l'uléma ne met pas lui-même en pratique les
exhortations qu’il recommande, celles-ci glisseront hors des cœurs comme
les gouttes de rosée sur le roc ». (Voir l’ouvrage intitulé Azzouhd /
l’ascétisme de l’imam Malik, tome 1 / 323). Cet état de fait est avéré par
expérience, car certains prédicateurs malgré leur immense talent d’orateur et
leurs efforts, leurs paroles ne vont pas au-delà des oreilles ; leurs
exhortations sont nulles d’effet ou tombent comme une masse de plomb sur
les cœurs – qu’Allah nous en protège –. Par contre le discours des gens
pieux et sincères – qu’Allah nous en fasse profiter – va droit aux cœurs,
même lorsque un tel discours est malmené par des imperfections
linguistiques ou méthodiques. « Ne dit-on pas que la pleureuse vénale ne
vaut pas la femme qui pleure son fils? ». Je rapporte ici qu’un homme ne
rentrait à la mosquée pour participer à la prière avec l’ensemble des fidèles
qu'après que le prédicateur ait terminé son sermon. Il restait à attendre dans
sa voiture car, disait-il, le discours de ce prédicateur n’a le moindre effet
spirituel sur lui, et qu’il le mettait mal à l’aise. Un autre homme m’a confié
qu’il se sentait mal s’il écoutait un certain prédicateur, pourtant bon orateur,
alors qu’il l’appréciait auparavant, profitait de ses paroles et le tenait en
haute estime. Les aveux de ces hommes m’ont donné le frisson et hérissé les
cheveux. J’ai compris qu’ils nous adressaient, à nous autres prédicateurs, un
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message voulant dire : « méfiez-vous messieurs d’être rejetés du cœur des
croyants, sans vous en rendre compte. Craignez messieurs les
prédicateurs la parole adressée par Allah -Tout-Puissant à ses anges au
ciel : « Je déteste untel, détestez le ». Invoquons Allah – Exalté soit-Il – de
nous épargner le dévoiement et de ne pas nous abandonner.
On raconte que l’imam Hassan Al Basri avait écouté quelqu’un prononcer
un prêche sans que son cœur ne soit touché. Il s’adressa alors à cet imam et
lui dit : « Ô toi, ou c’est ton cœur qui est corrompu ou c’est le mien ! ». De
son côté, Al Ghazali, – qu’Allah le comble de sa miséricorde – a dit dans sa
lettre adressée à Abi Hamid Ahmed Ben Salamah, résident à Maoucel en
Irak : « Concernant la prédication et l’exhortation, je ne m’en sens pas apte,
car comme il est exigé un seuil minimum requis (Nissab) pour s’acquitter à
l’aumône obligatoire (zakat), il en est de même, pour l’exhortation. Celui qui
ne possède pas le seuil minimum en termes de conformité aux principes de
la foi, comment s’acquitte t-il à la Zakat, en termes d’exhortation. J’en suis
donc exonéré». « L’on ne donne pas ce que l’on ne possède pas » et
« l’ombre ne sera-t-elle jamais droite si le bâton est coudé ?
Quant à notre Sheikh l’éminent érudit et expert en récitation du Coran le
professeur Aïmen Rochdi Souaïd, il refuse souvent de faire le prêche du
vendredi et diriger la prière. quand il venait parmi nous pour conseil et
exhortation. Il a toujours désigné le meilleur de ses étudiants à cette tâche,
en inculquant ainsi à ses étudiants la modestie et la maîtrise de soi. Il nous
faisait fréquemment part de ses remords pour sa distraction, en termes de
rappels d’Allah, et quand nous lui disions que ces remords n’étaient pas
fondés, il nous répondait qu’il connaît parfaitement soi même. Nous avions
honte de nous-mêmes comparés à lui, l’éminent uléma, tenaillé par des
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remords, lui dont l’activité dans sa demeure à proximité de la sainte
mosquée et de la Kaaba vénérée, est l’écriture des ouvrages sur les sciences
du Coran. Nous sommes persuadés qu’Allah ne l’a créé en cette époque
précise, que pour être au service du son livre (saint Coran).
Que dirions-nous, nous autres, qui ne faisons vraiment pas assez dans la
voie des pieux ? Il ne nous appartient qu’à nous adresser à Lui dans les
termes utilisés par l’imam Ach’chikhir: « Ô notre Seigneur sois satisfait de
nous et si Tu n’es pas satisfait de nous pardonne nous, car le Seigneur peut
pardonner à son serviteur sans qu’il en soit satisfait ». L’imam Ibrahim
An’Nakhà’i a dit : « J’ai parlé, contraint – à défaut d’alternative –, sinon je
ne l’aurais pas fait, et certes une époque qui a fait de moi un faqih, est une
époque affligeante ». C’est pour ces raisons que je m’adresse d’abord à moimême, puis à messieurs les imams afin que nous exhortions plus nousmêmes avant de le faire envers les gens. De cette façon, nous serions plus
crédibles envers nous-mêmes et plus utile aux gents. Ayons toujours à
l’esprit le hadith suivant du Messager d’Allah - PbAsl - : « Celui qui
enseigne aux gens de faire le bien et qui n’applique pas lui-même cet
enseignement est comparable à la mèche d’une bougie qui dispense la
lumière aux gens et se consume, quant à elle » (Rapporté par Attabarani).
Pour parvenir à ce travail d’auto-exhortation, il faut s’acquitter de sa tâche
en tant qu’imam et enseignant avec conscience et dévouement. Le grand
érudit ; El Fassi Al Bouchikhi disait : « Lorsque les imams sont bons et
valables, ils rayonnent sur leur entourage. Il suffit seulement qu’ils soient
sincères..». Cependant, il n’est pas jamais facile de parvenir à vouer ses
actions et son travail à Allah, car cela requiert une vigilance accrue et un
effort permanent, sinon, on risque rapidement de glisser dans l’ostentation et
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de tomber dans l’orgueil et la vanité. Les gens qui connaissent le mieux
Allah se rendent compte de ce risque.
Jadis les gens pieux et encore de nos jours -Allah soit loué- contrôlaient
leur intention pour s’assurer qu’elle est sincère et ce avant, pendant et après
l’action ... « le cœur rempli de crainte, sachant qu’ils vont retourner à
Allah » (Coran). Oui, ces imams avaient un comportement merveilleux
envers Allah : Avant de sortir pour aller enseigner ou prononcer un prêche,
ils invoquaient Allah avec beaucoup d’humilité, priaient et imploraient son
pardon et certains d’entre eux donnaient de l'aumône avant d’aller donner
leurs cours, ou buvaient de l’eau de Zemzem (pour la science et sa mise en
œuvre), d’autres demandaient à leurs parents, à leurs sheikhs (maitres), et
même à leurs élèves, de prier pour eux. A la fin de la conférence, ils
invoquaient le pardon d’Allah et le priaient d’être satisfait d’eux. On a
rapporté qu’Abou Is’Haq Ach’Chirazi – imam, guide et chercheur –
qu’Allah l’accepte dans sa miséricorde – précédait ses cours et ses
conférences d’une prière de deux unités et implorait Allah de considérer son
activité en tant qu’une bonne œuvre à rétribuer. Quant à l’imam Ibn Al
Jauzi, il se barbouillait le visage de sable avant de prononcer son prêche et
d’exhorter les gens et ce par humilité devant Allah, en lui demandant de le
protéger et d’agréer son travail.
Les élus d’Allah(les pieux), de tout temps, répugnent de parler de leur
personne, d’utiliser les pronoms « Moi, Je, J’ai, … ». Ils étaient discrets en
tout. D’après l’ouvrage As Sahih, de Boukhari, un jour Omar Bnou Al
Khattab, le compagnon du prophète – qu’Allah soit satisfait de lui – a posé
cette question à Aoussia Al Qarni: « Qui es-tu ? Et ce dernier de répondre :
« Berger, employé chez des gens !. »
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Parmi les paroles lumineuses du savant turc le professeur Saeid Annoursi
– qu’Allah lui accorde dans sa miséricorde – on cite celles-ci : « Ö toi qui
court constamment derrière la réputation éphémère, écoute ce que je te dis :
« cette réputation c’est de le cœur de l’ostentation et c’est la mort du cœur.
Ne la réclame pas, si tu ne veux pas devenir l’esclave des gens ; mais si
malgré tout tu y accèdes, dis : Nous appartenons à Allah et à Lui nous
retournons. ». Invoquons Allah de nous accorder protection et qu’Il soit
satisfait de nous. Il n’y a pas mieux que de vivre sous l’ombre d’Allah
jusqu’à ce qu’Il vous auréole ou votre tombe vous accueille. En effet, il n’y
a aucune comparaison entre la réputation recherchée par soi-même et
celle dont Allah vous accorde. Personne ne conteste cette évidence, mais il
est tellement dur de se dépouiller de la tentation suscitée par cet appel et par
satan. Mais Allah sauvegarde qui Il veut de la tentation.
Celui qui court avidement derrière la réputation est dans un état grave.
Pour satisfaire son ego, il dépenserait volontiers de l’argent, se
compromettrait, s’allierait avec le diable et il prendrait même ses distances
avec ses proches. Il affectionnerait l’ignorant et exprimerait de l’animosité
pour le savant. Qu’Allah nous guérisse de telles déviations.
Chers confrères, nous nous plaignons et nous souffrons tous du mal de
l'égoïsme et de la vanité ; persuadons-nous, nous autres imams, que nous ne
possédons pas le pouvoir de guider les gens, de les amender ni de les sauver,
si nous voulons qu’Allah nous accorde sa grâce et son soutien. La
délivrance, messieurs les imams, se trouve dans la sincérité « ikhlas » et
dans le fait de préférer Allah aux personnes. La sincérité est la condition
Sine qua non pour être musulman et l’imam n’est plus rien sans cette vertu
et ne peut prétendre ni à la religion ni à l’au-delà. Sa faillite est sans appel,
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même s’il a reçu en legs la mission d’imam et de prédicateur de ses aïeux et
de ses parents !
RECOMMANDATION 4 : L A
RETENUE ET LA SOBR IETE
L’imam qui se passe des autres, satisfait de sa situation et se retient de
briguer quoi que ce soit appartenant à autrui garde l’estime des gens, en tant
qu’imam. Par contre si l’imam est avide, sans élévation d’âme, corrompu –
qu’Allah nous en préserve – il perd toute crédibilité et n’occupe plus de
place dans le cœur des gens. Lorsque les mecquois s’attardaient à croire en
la mission du prophète, le Coran les a interpellés en ces termes : « ... ou bien
est-ce que tu leur demandes un salaire les accablant comme une lourde
dette? (Sourate Al Qalam – La plume – / verset 46). En outre, Allah Tout
Puissant-dit à l’endroit de Mohammed (PbAsl), dans un autre contexte :
« S’il – le prophète – vous demandait vos biens importunément, vous
deviendrez avares et vos haines apparaîtront au grand jour » (Sourate
Mohammed / verset 37). Pour sa part l’imam Hassan Al Basri -qu’Allah lui
accorde sa miséricorde - a dit : « L’homme demeure généreux et respecté
dans l’esprit des gens tant qu’il ne s’avise pas de convoiter le moindre de
leurs biens, mais dès qu’il le fait, ils le discréditent, s’en détournent et le
haïssent ».
Que de pseudo prétendants prédicateurs ici en Occident, eurent un énorme
succès et attirèrent de loin des foules pour écouter leurs prêches et en tirer
des leçons ; ils furent traités généreusement, mais les voilà qui se dévoilent
et montrent une vénalité sans limite : Ils ne s’intéressent plus qu’aux
cadeaux et aux gratifications. Ils s’accaparent de l'aumône obligatoire
destinée normalement aux huit catégories de gens énumérés par Allah dans
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le Coran. Ils vont même plus loin, revendiquant une part de l’argent à
attribuer aux pauvres ou aux ayants-droit de ceux qui le versent en expiation
de certaines infractions aux prescriptions du fiqh ; même l'aumône ordinaire,
destinée aux démunis, n’échappent pas à leur convoitise. Ils ne répugnent
pas à tendre la main comme des mendiants. Ils recourent aussi à la fraude et
à la simulation et abusent de la bonne foi des occidentaux dans certains
centres sociaux sous des prétextes fallacieux. Ils se présentent en qualité
d’imams, de prédicateurs, d’hommes de religion. Qu’Allah nous protège du
savoir qui conduit à sacrifier sa dignité et sa réputation pour satisfaire des
convoitises. Ö Allah, prends acte que nous condamnons les agissements de
ces gens-là. Nous vous implorons de nous rendre meilleurs, de même que
ces gens, qui ont desservi la religion et les musulmans et ont sciemment
porté préjudice à ce qui est naturellement de toute beauté, selon l’expression
du philosophe français La Montaigne.
Certains « Hommes religieux » étaient des modèles d’intégrité ;
malheureusement le démon eut raison d’eux et les a entraînés au pire. Ils
sont devenus imposteurs, escrocs. Ils se font accorder des prêts et
disparaissent. Si la Religion ne nous enjoignait pas de ne pas divulguer ce
qu’Allah n’a pas dévoilé, nous aurions cité dans ce contexte des choses à
même de susciter autant de rires que de larmes. Nous implorons Allah de
nous accorder abri et sérénité !.
Chuchotements
Permets-moi, frère,-toi qui es dans cette épreuve que je chuchote ces
quelques mots dans ton oreille (sachant que le conseil de l’ami est comme le
soleil de l’hiver qui illumine et ne brûle pas) à savoir :
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- Je te demande, frère, instamment, par Allah qui t’a créé, qui pourvoit à ta
subsistance, qui couvre tes fautes et t’accorde son indulgence, je te demande
de te repentir avant qu’il ne soit trop tard. Sors, s’il te plaît des ténèbres et
regarde la lumière, car tu es dans l’erreur et l’illusion, je te le jure par Allah.
- Pourquoi ne tires-tu pas la leçon des malades que tu visites ; du mort à qui
tu fais la dernière toilette, du cercueil que tu aides à porter à la dernière
demeure?
- Ne redoutes-tu pas les invocations, la nuit, contre toi, de la part des
victimes de tes abus ?
- Comment arrives-tu à supporter cette situation et à dormir tranquillement,
alors que tu es inondé dans les méfaits de telles attitudes ?
- Un homme comme toi, frère, peut-il emprunter des chemins aussi
malfamés, se hasarder, jouer, voler et piller, alors qu’Allah t’a honoré de
son Livre, de sa parole et t’a accordé sa subsistance licite.
- Que pourras-tu faire de cet argent empoisonné, miné, douteux, que
réclament mille requérants ?
- Avec un tel argent tu nourris ton corps, tu habilles les tiens et tu as
l’impudence de t’adresser à Allah et lui demander : « Améliore-moi ma
descendance ? » ! Avec de l’argent acquis illicitement, il n’y a rien à
espérer d’Allah !
- Libère ta conscience sans attendre, frère : Restitue leur dû aux pauvres et
aux riches, débarrasse-toi de tout ce que tu as acquis illicitement, car
sincèrement, il est à craindre que tu ailles au-devant d’Allah en pleine
faillite de toutes bonnes œuvres, « couvert d’opprobres, le visage décharné
et sans une goutte de sang » (Hadith) !
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- Résous-toi à ne plus rien briguer des biens des gens et frape à la porte du
Créateur, c’est Lui qui pourvoit à notre subsistance, qui donne
gracieusement et dont les réserves sont inépuisables. Que ma devise et la
tienne soient la parole du chaste compagnon du prophète, le commerçant
Abdourrahman Bnou Awf quand il a dit à son frère Saad Bnou Ar Rabii
(qui voulait l’héberger) : « Qu’Allah bénisse ta famille et ton bien! Montremoi le chemin du souk » ! (Rapporté par Al Boukhari).
Mon conseil, d’abord à moi- même qui suis gourmand, puis à messieurs
les imams, est que nous accomplissions notre tâche avec amour ; que nous
ne convoitions pas les biens des gens, ne rien leur demander ni
implicitement ni explicitement. Et que notre devise soit :
1 / : La parole d’Allah prononcée par le prophète Chouaïb – que le salut
d’Allah soit sur lui – « Les bonnes œuvres dédiées à Allah sont meilleures
pour vous si vous êtes croyants » (Sourate Houd / verset 85)
2 / : Le Hadith du Messager d’Allah (PbAsl) : « Si on t’apporte un peu de
cet argent, alors que tu n’en as rien demandé ni rien fait qui suggérerait que
tu en voulais, alors tu le prends ; autrement, maîtrise ton envie ». (Rapporté
par Boukhari).
C’est dans cet esprit que le compagnon du prophète, Ibn Omar – Qu’Allah
soit satisfait de lui et de son père ne demandait rien à personne, mais, ne
refusait pas les présents qui lui étaient offerts.
Nul doute que les tentations à notre époque sont partout alléchantes ; c’est
pourquoi nous prions Allah de nous affermir pour dominer nos faiblesses ; et
nous nous joignons à notre grand imam Al Hassan Al Basri – Qu’Allah soit
satisfait de lui – pour implorer Allah dans les termes et la forme qu’il a
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utilisés : « Ö Allah, notre Seigneur, ne nous mets pas à l'épreuve de la
tentation, car nous y éprouver c’est démasquer nos faiblesses ». Amen.
Il est vrai que l’imam perçoit un salaire, soit du fonds des waqfs (fondation
de bienfaisance des legs pieux), soit en tant que fonctionnaire, soit de
l’institution qui gère la mosquée, soit par la méthode traditionnelle connue
au Maroc sous l’appellation de « Achart » - c’est à dire que ce sont les
familles du village qui coopèrent selon les moyens de chacun pour payer
celui qui se met au service de l’imamat -. Mais, il est de devoir des
responsables des services précités d’assurer à leurs imams tout ce dont ils
ont besoin sans les léser d’aucune façon, afin qu’ils n’aient pas de soucis
matériels et qu’ils prospèrent. Libre à eux, s’ils le désirent de demander
augmentation, promotion ou démission. Tout cela est logique et acceptable,
mais de briguer autre chose serait de la servitude, de l’humiliation et de la
mauvaise foi. L'expérience vécue en est la meilleure preuve. L’on sait, chers
confrères imams que plus les ulémas sont chastes et désintéressés, plus ils
jouissent de l’estime et de la considération des gouvernants et des
gouvernés, des pauvres et des riches, des musulmans et des non-musulmans.
Par contre, plus ils sont avides des biens de ce bas-monde, plus ils sont
mésestimés, indexés et fuis. La convoitise et la dignité sont deux lignes
parallèles qui ne se croisent jamais, comme de l’eau et le feu, le lézard et
le poisson selon l’expression d’Ibn Al Qaïm. Il n’échappe à la tentation que
celui qu’Allah en préserve !
Ce qui nuit, ici, en Occident, à la profession des imams, paraît-il, c’est
l’absence de biens immobiliers ou autres dédiés aux mosquées -ce qui
s’appelle Waqf dans les pays arabes- et dont les recettes servent entre autre,
à couvrir la rémunération des imams et des ulémas et partant à préserver leur
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dignité. Cette carence a fait que nombre de ceux qui participent
financièrement
au
fonctionnement
des
mosquées
en
profitent
malheureusement pour occuper le premier rang, alors que leurs aptitudes ne
les place même pas pour le dernier rang – selon l’expression d’un homme de
grande vertu. Par arrogance, ils sont mêmes prêts à vouloir dicter aux nobles
Imams et ulémas leurs points de vues et à imposer leur volonté. C’est pour
ces raisons, messieurs, qu’il devient impératif de renouer avec la culture ou
la Sunnah du Waqf dans nos sociétés et d’en renouveler le concept dans les
consciences et les cœurs, car semble-t-il, la majorité des musulmans en
Occident ignorent tout à ce sujet pourtant fondamental. Sachant par ailleurs
que probablement l’avenir des institutions religieuses en Occident ne serait
assuré que par le retour sans délai au waqf – désigné également dans nos
pays du Maghreb par le terme de Habouss-.
RECOMMANDATION
5
:
C ONNAIT RE
OBJECT IV EME NT
LA
REALITE
Cette recommandation est peut-être la plus importante et la plus appropriée
en Occident – après le fait de vouer son œuvre sincèrement à Allah ToutPuissant –, car ignorer la réalité (le contexte) ou l’imaginer autrement cause
beaucoup de dégâts à l’imam, en termes d’interprétations et de
comportements. Les psychologues disent que : « nos actes sont les reflets de
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nos conceptions ». C’est ainsi que pour remplir pleinement son auguste rôle,
l’imam doit connaître : Allah, sa religion, et le la réalité des gens, sinon ce
rôle perd son versant prophétique et sa déclinaison divine.
Qu’entend-on par la connaissance objective de la réalité ?
D'après le professeur Al Bouchikhi, il s’agit d’une : « connaissance précise
et approfondie des contours de son environnement et des circonstances ».
Une autre personne en a donné la définition suivante : « Connaître le vécu
des gens et ce qui se passe à la même époque dans le monde, loin des
suppositions et des fantasmes ; de l’imagination et des illusions »
A souligner que ce concept, qui connaît aujourd’hui sa vulgarisation dans
le discours des imams n’est pas étranger à la pensée islamique et à notre
culture jurisprudentielle (Fiqh), contrairement à ce que certains pensent.
Déjà, l’imam Ibn Al Qaïm y recourait et en a parlé, en disant : « Le véritable
jurisconsulte est celui qui concilie l’idéal et le vécu réel, c’est à dire qu’il ne
doit pas se focaliser sur ce qui doit exister idéalement, mais qu’il faut qu’il
prenne en compte le contexte réel ». Concrètement, tous les jurisconsultes
tenaient compte de leur contexte social du fait de l’intérêt qu’ils attachaient
aux circonstances et aux causes spécifiques ayant motivé la révélation de
chacun des versets coraniques et aussi de par leur intérêt à la jurisprudence
statuant sur les événements et les problèmes. (Lire aussi l’ouvrage intitulé :
Le critère analytique de son auteur Al Winshrissi) (ou encore l’ouvrage
intitulé : Des fatwas qui fustigent le manque d’importance qui frappe
Chéfchaouen et les montagnes qui l’entourent de son auteur Al Mawahibi Al
Habté). (A travers Ces lectures on trouvera l’étroite relation entre la théorie
de la jurisprudence et la réalité contextuelle).
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Le fiqh réaliste, qui essaye de concilier entre le texte et le contexte, fait
partie de l’ijtihad – effort intellectuel d’interprétation des textes à la lumière
de la réalité -, qui est une procédure qui vivra jusqu’à la fin des temps, selon
les termes d’Abou Is’haq Ach Chatébi dans son ouvrage « Les
convenances ». Ceci parce que les fatwas exigent du moufti qu’il connaisse
le Coran, la Sounnah et tout ce qui a fait l’unanimité. En outre, il doit
connaître le contexte dans lequel se trouve la personne qui sollicite l’avis,
son état, l’époque et le lieu, sinon la fatwa serait non circonstanciée et
inappropriée. Le jurisconsulte est comme le médecin qui ne prescrit le
médicament qu'après avoir soigneusement ausculté son patient.
De nombreuses fatwas, émises ici en Occident, sont aberrantes et
répréhensibles, non que leurs auteurs ignorent ou méconnaissent les textes,
mais parce que leur vision de la réalité est erronée ; ils n’avaient pas
consulté au préalable les spécialistes et les experts. C’est ainsi que des
fatwas sur des questions comme l’allégeance, le reniement, la paix, la
guerre, la famille, la société, la politique et la gouvernance, la finance et
l’économie étaient faussées, parce qu’elles n’avaient pas tenu compte des
conditions de vie des minorités. Les auteurs devraient comparer les
conditions de vie des minorités et des pays à majorité musulmane pour
constater les différences. Ces fatwas mal fondées ont causé des préjudices
dont les gens souffrent et se plaignent toujours.
Le jurisconsulte ou l’imam ne peut cerner par son seul effort personnel la
réalité ou à la lecture de quelques articles de journaux. Il est indispensable
de recourir à l’expertise des spécialistes à l’instar, actuellement, des
assemblées de jurisprudence et des conseils des ulémas. Beaucoup de
courants rigoristes, ici et là, étaient et restent encore victimes de leur
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méconnaissance de la réalité contemporaine du fait de leur repli sur euxmêmes, alors que ce n’est ni le dévouement ni le dynamisme qui leur font
défaut. A ce sujet, je citerai les paroles de l’imam Ibn Mas'oud – qu’Allah
soit satisfait de lui – à savoir : « Allah accorde sa grâce à celui qui parvient à
connaître la réalité de son époque et qui agit en conséquence ».
La vie nous a enseigné que celui qui tente de réformer sans connaître
suffisamment la réalité et s’y inscrire concrètement, court vers l’échec et son
ambition se heurte au même sort que la Cité Vertueuse des philosophes,
restée au rayon de l’utopie. Bien souvent, nous entendons des discours
idéalistes prononcés par certains de nos imams. Je leur dis : Est-ce que vous
avez les pieds sur terre ou êtes-vous sur un nuage ? Est-ce que vous êtes
dans l’univers des hommes ou dans celui des anges ? Réveillez-vous et
soyez conscients des normes divines et des moyens légaux. Le professeur
Ben Abdassalam Ar Raissouni avait raison quand il a dit, il y a longtemps :
« Le faqih (jurisconsulte) n’arrivera à maturité que s’il allie la théorie à la
pratique ».
Nous citons ci-après quelques exemples démontrant comment d’éminents
imams ont agi en symbiose avec le texte et les circonstances qui prévalaient
dans leur époque, pour montrer le lien étroit qui doit exister entre la
connaissance du contexte social et la jurisprudence en Islam.
1) Voici notre imam Malik – qu’Allah lui accorde sa miséricorde – qui
observe et étudie profondément la société musulmane à Médine et en
écrit l’ouvrage intitulé : « La vie pratique des gens de Médine » ; ouvrage
dont-il fera l’un des fondements de sa doctrine.
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2) Voici l’imam Malik junior, Ibn Abi Zaïd de Qérouan, auteur de l’ouvrage
intitulé : « Arris sala (Le Message) » : Il achète un chien de garde et
l’attache à la maison contrevenant ainsi à la prescription du grand imam
Malik. Les gens lui reprochèrent le fait et il leur répondit : « Si Malik
vivait à notre époque, il aurait mis un lion féroce en guise de garde »,
voulant dire que la réalité a changé et que l’époque n’est pas la même.
3) Voici l’imam Ach Chafi'i – Qu’Allah le comble par sa miséricorde – qui
interprète les prescriptions en fonction du vécu des gens, de la manière
dont ils traitent leurs affaires et de leurs us et coutumes. C’est ainsi qu’il
avait deux doctrines – connues sous l’appellation : L’Ancienne et la
Nouvelle. Il appliquait la première en Irak et l’autre en Egypte.
4) Quant au imam Abou Hanifa – Qu’Allah le comble par sa miséricorde –
Il fréquentait les souks et y pratiquait lui-même du commerce. Ce fut
aussi le cas de son élève le cadi et jurisprudent Abou Youssef, l’auteur de
l’ouvrage intitulé : « Le tribut », et aussi du grand imam Allaïth Bnou
Sa’ad – qu’Allah lui accorde sa miséricorde. Et la liste est longue.
Beaucoup d'ulémas ont exercé des fonctions dans la justice, les ministères,
l’administration dans le but de faire du bien et d’être au service des gens et
le résultat a été l’enrichissement de la jurisprudence, le traitement objectif et
réaliste de l’ensemble d’événements et de problématiques générés par leur
époque, qui ont fait l’objet de livres bien pensés et de fatwas rapportées,
d’une valeur inestimable, basées sur la science et la sagesse. Parmi ces
ténors citons :
- Les qadis : Ibnou Al Arabi ; Ayyad ; Ibnou Hajar Al Askalani ; Ach
Choukani ; Ibnou Rochd, etc.
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- Les ministres : Ibnou Hazm ; Abou Chouaïb Addoukkali ; Al Hajoui
Tha'alibi Al Fassi ; Mohammed Al Arbi Al Alaoui ; Abdallah Guennoun ;
Abdallah Bnou Biah etc.
- L’ambassadeur Ibnou Khaldoun.
Nous rencontrons dans nos lectures des biographies de certains interprètes,
de chercheurs et de savants qu’untel était vertueux, pieux, chaste, occupé par
ce qui l’intéresse, partageant son temps entre la lecture, l'écriture et la
mosquée et qu’untel, saint homme, fuyait les gens, ne s’associait à eux ni
pour vendre ou acheter, ni pour gouverner ou occuper un poste de juge.
Nous rencontrons de tels cas et même pire, mais pour rester honnêtes envers
nos savants, il est important de relativiser de tels constats. En effet, ces
attitudes et comportements sont motivés par des raisons plausibles, liées
principalement aux facteurs contextuels de leur époque, car nous ne
connaissons de nos grands savants que l’esprit positif et participatif au bien
être des autres, quoique l’erreur est humaine et nul n’est infaillible.
Néanmoins, l’exemple à suivre reste naturellement celui des Messagers et
des Prophètes – que le salut et la paix soient sur eux – qui, ainsi que décrits
dans le Coran : « Se nourrissaient et fréquentaient les souks » (Sourate Al
Fourqaan), ce qui veut dire qu’ils se mêlaient à la foule et intégraient
effectivement la réalité de leur société civile. Comment le prophète
Chouaaïb (Paix sur lui) pouvait-t-il lutter contre l’avidité de l’argent, la
fraude sur les poids et les mesures, s’il ne fréquentait pas les souks pour
constater par lui -même ces irrégularités. Et comment Moïse – Paix sur lui –
l'interlocuteur d’Allah, aurait-il pu libérer son peuple de la tyrannie de
Pharaon et de ses ministres s’il ne confrontait la réalité du pays ? Il en est de
même du Messager d’Allah, Mohammed – PbAsl – : Comment aurait-il pu
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gouverner les gens s’il n’avait pas une profonde connaissance de leurs
conditions de vie et des circonstances qui prévalaient à l’époque sur les
lieux. ? Mieux encore, il suivait les nouvelles des pays étrangers aussi bien
les limitrophes que les lointains tels la Perse, Byzance, l’Ethiopie et il
connaissait leur réalité. La preuve est qu’il avait orienté ceux de ses
compagnons devant s’exiler, précisément vers l’Ethiopie, en leur disant :
« Personne ne subit d’injustice sous le règne du roi de ce pays ». Il avait dit
aussi, parlant du Yémen : « Les gens du Yémen sont parmi vous ; ils sont
les plus sensibles et leur cœur est les plus doux ; la jurisprudence est
yéménite et la sagesse est yéménite ». C’était là la preuve qu’il connaissaitPbAsl – -les particularités des peuples et c’est cela qui manque énormément
à nos imams en Occident ! Le prophète – PbAsl – connaissait aussi le
tempérament ; les mœurs, et les dispositions naturelles des individus. Il
disait – PbAsl
– -de ses compagnons : « Le plus compatissant de ma
communauté pour ma communauté est Abou Bakr ; celui qui a la meilleure
lecture du Livre d’Allah est Oubay ; Celui qui est le plus exigeant sur les
préceptes est Zaïd ; celui qui connaît le mieux ce qui est licite de ce qui ne
l’est pas est Mou’àd ; toute communauté a un homme probe et l’homme
probe de cette communauté est Abou Obaïda (Hadith rapporté par Attirmidi
et Ahmed, d'après une chaîne sûre de garants). On rapporte que ce qui avait
justifié le choix d’Abou Bakr, comme chef suprême de la communauté
islamique après la mort du prophète est qu’il était parmi les Compagnons,
celui qui connaissait le mieux la généalogie des arabes, leur histoire, leurs
conditions de vie, leurs préférences. ... Et tout cela relève de la
compréhension de la réalité des gens qui s’impose pour tout leader.
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Connaître le tempérament des gens, leurs aspirations, leurs tendances, est
un devoir pour les imams pratiquant en particulier en Occident, en raison de
la diversité des races, des couleurs, des ethnies, des goûts, des possibilités,
des potentialités, cohabitant au sein de la même mosquée. C’est pourquoi la
sagesse et le tact exigent de fructifier cette aptitude, afin que placer l’homme
qu’il faut à la place qu’il faut. Voici comment le prophète Mohammed PbAsl - considérait les gens selon leur personnalité et leur statut :
1) Il a élevé Abu Soufiane au même rang que lui, étant le Sheikh de
Qoraich, ceci au moment où il avait annoncé aux gens lors de la conquête
de la Mecque : Quiconque rentre dans la maison d’Abi Soufiane sera en
sécurité (Hadith rapporté par mouslim d'après Abi Houraira).
2) IL a désigné à sa place Sa’âd Bnou Mouâd qui était le leader des Aouss,
ceci quand il avait dit aux Ansars : Levez-vous et allez vers votre chef.
(Hadith rapporté par Al Boukhari d'après Abi Saeed Al Khoudhri)
3) Méditons ce qu’il a dit - PbAsl - en parlant de Othmane Bnou Affane- qu’Allah soit satisfait de lui : Comment ne rougirais-je pas, par respect,
devant un homme vénéré par les anges ? (Hadith rapporté par Mouslim).
4) Dans sa lettre adressée à Héracle, le prophète - PbAsl -, s’était exprimé
ainsi en introduction : De Mohammed serviteur d’Allah et son Messager
à Héracle le grand de Byzance (Rapporté par Mouslim). Il savait - PbAsl
-que les byzantins vouaient une grande considération à Héracle et lui
donnaient la préséance, c’est pourquoi il y a ce terme de « grand » ,
comme marque de bienveillance.
5) Il était - PbAsl - très doux avec les enfants ; c’est ainsi qu’Anass Bnou
Malik – qu’Allah soit satisfait de lui – a dit : Le Messager d’Allah se
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joignait à moi et à mon jeune frère en traversant les rangs pour lui parler
comme à un grand avec un langage d’enfant : Ö père de Omeir comment
fait le petit du rossignole? (Hadith rapporté par Al Boukhari)
6) Le prophète - PbAsl - avait beaucoup de déférence pour les femmes :
D'après les deux Sahih, Anass Bnou Malik – qu’Allah soit satisfait de lui
– a dit : le prophète - PbAsl - est arrivé et avec lui une de ses femmes. Il
s’adressa à la monture, qui transportait des femmes, et lui dit : Malheur à
toi ô Anjachah ! Fais Attention car tu conduis de précieux trésors.
(Hadith rapporté par Boukhari et Mouslim).
Pour celui qui regarde de près les paroles du prophète - PbAsl - il trouvera
parfois des réponses multiples à une même question, qui prête à
contradictions ou confusions, ce qui n’est pas du tout le cas. Il s’agit de la
sagesse et du tact : Il parlait aux gens - PbAsl - en tenant compte de leurs
mentalités, leur maturité et leur contexte. Bénédiction et salut d’Allah sur le
prophète dont la moralité et la conduite étaient sublimes.
Le meilleur modèle qu’il faut suivre par nos imams vis à vis des fidèles
dans leurs prédications et leurs discours, c’est L’imam prophète – PbAsl .
N’est-il pas (PbAsl) le premier imam de la communauté musulmane?
Voici un autre exemple qui illustre comment les compagnons du prophète
ont hérité de lui la perception des particularités des peuples et des contrées et
l’ont intégrée de façon étonnante : D’après le Recueil Authentique de
Mouslim, le compagnon nommé Al Moustaourid Al qorachi, qui se trouvait
chez Âmr Bnou Al Âss, dit à ce dernier : J’ai entendu le prophète - PbAsl dire : « Quand l’heure ultime de la fin du monde viendra, les Occidentaux
seront démographiquement les plus nombreux ». « Fais attention à ce que tu
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dis », lui répondit A’mr . Je confirme, dit Al Moustaourid que j’ai dit ce que
j’ai entendu dire le Messager d’Allah (PbAsl). Puisque tu le dis, dit Âmr, je
conclus que ces gens possèdent cinq qualités, à savoir :
- Ils sont les plus endurants en cas d’épreuve
- Les plus prompts à se ressaisir après une catastrophe
- Les plus rapides à revenir à la charge s’ils se replient
- Les plus bons envers le pauvre, l’orphelin et le faible
- Et la cinquième de ces qualités n’est pas celle des moindres : Ce sont eux
qui résistent le plus contre l’oppression des gouverneurs.
Certains de nos imams – qu’Allah en soit loué- sont conscients de cette
partie du fiqh et l’appliquent en général, mais il leur arrive d’en méconnaître
les caractéristiques, les normes et les antagonismes.
Ci-après certaines caractéristiques de cette réalité objective :
La réalité est sujette au changement, à l’évolution, à la variation et à la
multiplication, ce dont on doit toujours se rappeler et tenir compte. La réalité
au Maroc n’est pas celle en Orient ; la réalité du monde musulman n’est pas
celle du monde occidental et la réalité de l’Angleterre n’est pas celle de la
France. Il en va de même de la fonction des imams en Europe comparée à
celle exercée dans les pays de l’Orient et du Maghreb. La réalité de la
première génération des émigrés n’est pas celle de leurs enfants et leurs
petits enfants devenus européens de langue et de. ... La réalité des
travailleurs n’est pas celle des étudiants. La réalité de l’Islam avant les
événements de Septembre 2001 n’est pas celle d’après, et la laïcité de la
France est différente de celle de l’Espagne de l’Angleterre ou de la Belgique.
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Et c’est valable pour les jeunes et les vieux ; la femme et l’homme. Et ce
qu’il est permis de dire dans les pays musulmans ne peut l’être ici, en
Occident, quels que soient le prétexte ou l’intention, car les conséquences
seront dramatiques, à en juger par l’expérience qui est la meilleure preuve.
Nous constatons ainsi que la réalité est constamment en mouvement : Elle
varie, se transforme, se renouvelle… aucune situation, aucun état de chose,
n’est jamais définitif. Les grandes et profondes transformations influent
naturellement sur les fatwas, les préceptes, les attitudes, les décisions. Elles
changent les mœurs, les habitudes, les équilibres et les priorités. Par exemple
les fatwas traitant de l’adoption, de la nationalité et la résidence dans les
pays d’Europe, changent en fonction de la paix ou de la guerre, de la liberté
ou des persécutions, de la situation d’émigré ou de celle de citoyen stable et
permanent. Si le Moufti ne prend pas en compte toutes ces variantes, il se
compromettra lui-même et causera un grand préjudice aux autres sans que
cela ne change quoi que ce soit à la réalité.
Les médias – télés, journaux, revues - sont un moyen efficace pour
connaître le courant des événements et les imams seraient bien inspirés s’ils
parcouraient quotidiennement journaux et magazines et écoutaient les
informations de l’audiovisuel sans abus toutefois. Si on se coupe de ces
sources ne serait-ce que pour une courte durée, on perd sa réactivité aux
événements et par conséquent la maîtrise d’analyse pour relier spontanément
et logiquement les faits – Qu’Allah soit satisfait de Houdaifa Bnou
L'Yamane – qui a dit : les gens questionnaient le Messager d’Allah (PbAsl)
sur le bien, tandis que moi, je le questionnais sur le mal de peur que le mal
ne me rattrape (Hadith rapporté par Boukhari). et c’est cela l’attitude du
croyant comme le confirme Attabarani – qu’Allah l’ait dans sa miséricorde –
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en expliquant les paroles suivantes d’Allah –Exalté soit-IL— : « C’est ainsi
que nous détaillons les versets afin qu’apparaisse clairement le chemin des
criminels » (Sourate les Bestiaux / verset 55). Lorsque, dit Attabarani, le
croyant sait clairement la nature du mal, il reste vigilant et prévoyant pour
s'en prémunir. On le croyerait très méchant à l’entendre parler avec
virulence du mal et de ses causes, mais en le fréquentant, on s’aperçoit sa
bonté »
Comment mieux comprendre la réalité :
- Faire preuve de sagesse.
- Ne pas céder à ses impulsions.
- Savoir faire la part juste des choses par le biais d’une interprétation critique
et objective.
- Asseoir son jugement sur les conseils des gens de l’expérience et de
l’expertise
- Lire les mémoires, les biographies et les publications de façon critique et
constructive, afin d’en garder l’essentiel, d’être à même d’éviter les faux
pas et de ne pas rester simplement sur la défensive.
Quels sont les antagonismes de la réalité? Ou quels sont les signes qui
indiquent que l’on n’a pas compris la réalité?
Ces signes sont multiples et variés, mais les plus évidents consistent à
minimiser des faits importants ou à dramatiser des faits minimes. On
constate par exemple que des gens bataillent pour des choses secondaires
que l’on peut tolérer, négocier, reporter ou exclure définitivement. Par
contre, ils négligent des causes vitales, qui mettent en jeu leur existence,
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l’avenir de leur famille, leur société et de leur pays. Ces gens-là s’ils sont
Imams en titre, ils ne méritent pas l'appellation de faqih(Alim) - comme a dit
un grand homme-. Parmi ces signes on peut encore citer : l’idéalisme abusif
; le repli sur soi ; le sentiment de sainteté et de pureté absolue ; la mentalité
des derviches (mesquinerie) et l’indifférence des pieux ; le complexe de
supériorité vis à vis d’autrui ; l’esprit de domination et de défi ; le non prise
en compte des normes universelles courantes. ... ; les préjugés ; les recettes
toutes faites ; le point de vue unique ; le simplisme et la superficialité ;
l’improvisation hasardeuse ; la mauvaise interprétation des textes relatifs à
l’allégeance et au reniement ; le refus catégorique ou l’acceptation
inconsidérée ; l’intolérance à l’égard des personnes, des idéologies, des
affiliations etc. ...
Par ailleurs, certains imams comprennent bien l’importance de la réalité
objective, y attachent beaucoup d’intérêt, mais malheureusement ils utilisent
cette connaissance à mauvais escient, ce qui a poussé des extrémistes
fanatiques, ici et là, à refuser catégoriquement ce concept dans sa forme et
son contenu, accusant ses adeptes d’hérésie religieuse et de reniement. Ils
traitent les imams qui suivent l’actualité et en tiennent compte dans leur
discours qu’ils sont de formation journalistique, non universitaire et qu’ils
n’ont rien à voir avec la jurisprudence musulmane. A vrai dire, ce sont ces
imams eux-mêmes, qui à force de se référer abusivement aux médias, en y
faisant la matière de leurs discours et leurs exhortations, qu’ils finissent par
déclencher des réactions extrémistes ! Et c’est normal, car le fanatisme
génère le fanatisme et l’exclusion entraîne l’exclusion !
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Ci-après quelques-unes des déviations sources d’abus :
A / L’orientation des laxistes qui consiste à fonder tous les préceptes ou
presque, sur la connaissance de la réalité(le contexte) sur son interprétation
et sa pression, sans se baser sur les textes, (Coran , Sunnah , ni sur le fiqh). Il
n’y a pour lui ni conseil des oulémas ni les quatre ou huit madahibs (Ecoles
juridiques). Sa seule référence, c’est cette « réalité » et l’interprétation qu’il
en a ; il en fait même un refrain et l’on finit par ne plus savoir de quelle
réalité il parle. Les adeptes de ce courant finissent par qualifier les vrais
oulémas d’ignorants de la réalité qui les entoure, en sont déconnectés ou en
ont été éloignés. Ils les taxent péjorativement d'oulémas du passé ou des
amis des livres aux pages jaunies ! ; avec un peu de chance ils leur
endosseraient la responsabilité historique du retard pris par les musulmans
dans tous les domaines ! C’est là une conception malsaine à la fois de la
religion et de la réalité et une déviation des vrais principes de la
jurisprudence et ce à l’unanimité des sages, car la compréhension de la
réalité est indissociable du dogme dans sa globalité, à l’image du lien qui
relie l’édifice à sa base ou encore celui qui relie les ablutions à la prière,
selon la comparaison de notre défunt professeur Farid Al Ansari – qu’Allah
illumine sa tombe.
B / L’orientation des légitimistes qui imputent toutes les infamies, tous les
péchés et toutes les folies au « fiqh de la réalité ».
C / L’orientation des pessimistes : Ce courant considère « le fiqh de la
réalité » de façon superstitieuse, comme un mauvais présage, sans aucun
espoir que la situation se rétablira et s’assainira. Ses adeptes oublient
qu'après la pluie vient le beau temps et qu’aucun état n’est jamais permanent
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comme nous lisons dans le noble Coran : « Ainsi faisons nous alterner les
jours (bons et mauvais) parmi les gens ... » (Sourate Al Imra’n / verset 140).
D’autres auteurs ont signalé d’autres sources d’abus telles :
D/ Les comploteurs : Ce courant fait sans doute allusion à ceux qui
expliquent tous les désastres - si minimes soient elles - qui frappent les
musulmans à l’Est et à l’Ouest par la théorie des « complots » et
l’intervention étrangère, dissimulée, dans toutes les affaires. Mais ce n’est là
qu’une « illusion tranquillisante », car le musulman partout où il se
trouve, comme toute personne, est à la fois acteur et spectateur,
influençant et influencé. Il est responsable de ses actes et est appelé à
s’amender et à se remettre en cause spontanément. L’expérience nous a
appris ici, en Occident, que les arabes et les musulmans, sont les artisans de
la plupart des catastrophes qui les touchent.
E/ L’orientation des isolationnistes : Soit ceux qui ont choisi de s’isoler
complètement de la société pour échapper au prix à payer pour la réforme et
le pogres.
F/ L’orientation de la confrontation : soit ceux qui ont choisi l’option de la
confrontation et du choc comme attitude et voie, épousant la doctrine de
Huntington, à la place du dialogue, de la patience et de la longue haleine. ...
Et ce courant est inacceptable logiquement et légalement.
Concernant les spécificités de la réalité musulmane occidentale et ses défis,
elles sont multiples, variées, complexes, parfois positives et parfois
négatives :
A/ Les aspects positifs : La liberté, la pluralité, les droits sociaux, l’aisance
matérielle, l’incitation à la recherche scientifique, l’exigence de la qualité,
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l’existence en quantité des écoles, des universités, des Centres de recherches
et d’études, l’application stricte de la loi, l’indépendance de la justice et la
stabilité politique ...
B/ Les aspects négatifs dont : L’absence d’une référence au fiqh qui permet
de trancher les différends et à laquelle devraient recourir tous les
musulmans en Occident ; l’absence des moyens d’information sur la
religion à travers lesquels il sera possible de transmettre l’image exacte de
l’Islam et des musulmans ; l’incapacité des musulmans de financer leurs
œuvres religieuses ; l’aggravation des problèmes familiaux ; l’augmentation
du taux de célibat prolongé et des divorces ; la division et les désaccords qui
se créent au sein des mosquées et des établissements religieux à cause des
tiraillements et des conflits que les communautés des différents pays
colportent avec eux ; l’émergence de courants fanatiques et de groupes
extrémistes à cause de l’impact des médias, du vide spirituel et de la rareté
des oulémas ; l’expansion du racisme, de l’islamophobie et l’augmentation
des sentiments de xénophobie contre les arabes et les musulmans ; la pénurie
des imams, des prédicateurs et des récitateurs du Coran, ce qui oblige à faire
assurer ces tâches par des prétendants dans nombre de mosquées et de
centres ; etc.
Enfin, il n’est pas demandé à l’imam dans son exercice plus que de servir
la bonne cause ou d’y apporter sa contribution et de corriger les défauts ou
de les atténuer. Ce fut-là, la mission de Choua’ïb, l’orateur des prophètes
quand Allah lui a prêté dans le Coran les paroles suivantes : « … je ne veux
que la réforme autant que je le puis » (Sourate Houde / verset 88).
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RECOMMANDATION 6 : S E
DIST INGUER PAR LA SAGESSE ET LA
BIENVEILLANCE
Peut-être
que
dans
les
recommandations
précédentes,
quoique
importantes, l’allusion s’est substituée à l’expression et la théorie à la
pratique, mais pas dans celle -ci ni dans la dernière, car elles ne pourront être
correctement comprises, à mon sens, qu’avec d’amples détails et de
profonde réflexion.
Permettez-moi donc chers amis par obligation ici de faire une œuvre de
longue haleine, car j’aimerais, si Allah le permet, apposer mon empreinte
dans les conseils destinés à mes frères avant que la mort ne m’emporte.
Commençons par la définition de la sagesse : Les savants l’ont définie
comme étant « le fait de mettre les choses à leur place ; de tenir compte de
leurs aspects et leurs aboutissants ; de faire preuve de courage à bon escient
et de s’abstenir quand il le faut. Ce n’est donc absolument ni de la flatterie ni
de la tromperie ni de l’hypocrisie ni de l’adulation ni des manœuvres ni tout
ce qui s’apparenterait aux mœurs des renards – Qu’Allah nous en préserve –.
Le contraire de la sagesse donne : La démesure, la frivolité, la précipitation,
la tyrannie, l’injustice, l’ignorance. ... D’autres personnes la définissent
comme étant « le fait de dire ou de faire ce qu’il faut, avec la meilleure
des façons requises et en temps opportun ». Il n’y a pas d’objection à ces
définitions.
Quant à la bienveillance, elle suppose douceur et facilitation, ce qui
s’oppose à la brusquerie et à la violence. Dans un Hadith rapporté sur Aïcha,
l’épouse du prophète -qu’Allah l’agrée-, le prophète (PbAsl) a dit : « la
douceur donne de la beauté à tout et son absence enlaidit tout »
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(rapporté par Mouslim). Dans un autre Hadith rapporté sur Aïcha, également
– qu’Allah l’agrée – le prophète – PbAsl – a dit : « Allah est bienveillant et
aime la bienveillance et Il en donne en rétribution ce qu’Il ne donne ni
pour la violence ni pour nulle autre chose » (Rapporté par Mouslim.). Et
d’après Jarir – qu’Allah l’agrée –, le prophète – PbAsl
– a dit :
« Quiconque est privé de bienveillance ne peut prétendre à aucun bien »
(Rapporté par Mouslim).
La sagesse est le socle de toutes les qualités, la source de tous les
avantages et le creuset de toutes les bénédictions. Celui à qui Allah a
accordé la sagesse, il en a en réalité reçu la bienveillance et donc tous les
biens ; en outre il a été préservé de tout mal. ... « Et celui à qui la sagesse
est donnée, vraiment c’est un bien immense qu’il a reçu » (Sourate Al
Baqarah / verset 269).
L’imam, surtout dans les contrées occidentales a particulièrement besoin
de cette précieuse qualité qu’est la sagesse. Beaucoup de situations et de
décisions exigent, ici, des analyses profondes, un sens de priorité et une
preuve d’équilibre et d’exhaustivité, loin de l’improvisation et des
impulsions. La sagesse pourrait parfois te dicter de prendre la parole dans
une situation donnée ou de t’abstenir de le faire en une autre. En d’autres
termes, la sagesse veut que tu fasses parfois deux pas en avant et un en
arrière, ce qui te fera traiter d’indécis par des inconscients ici, mais qui
témoignera de ta sagesse, ailleurs.
Le sage, messieurs, ce n’est pas celui qui exhorte, ni le prédicateur brillant
ni le chercheur consacré à l’étude d’un art déterminé ou d’une science
donnée, loin de la réalité des gens, de leurs préoccupations, de leurs espoirs
et de leurs douleurs. Le sage est un être raisonnable, désintéressé, penseur,
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ayant une mission, modéré, sociable : Il dose, compare, rapproche, prévoit
l’avenir, médite sur le passé et le présent ; il lit sur les visages, analyse le ton
des voix, lit entre les lignes et garde son silence... Ne l’influencent ni les
tempêtes ni les sentiments. Il décline les improvisations et les réactions
négatives, ne se laisse provoquer ni entraîner par personne; il se focalise
sur le fond et ne se laisse pas leurrer par le titre. Il relie les résultats aux
préambules et les conséquences à leurs causes. Il devance les événements. Il
respecte les normes et évite la zizanie. Les gens n’ont aucune raison de se
plaindre de lui. Il se préoccupe des sujets dans leur globalité plutôt que de
verser dans le détail et il réfléchit aux conséquences avant de répondre aux
questions, très passionné par la jurisprudence traitant des objectifs, des
finalités, et des priorités des textes. Il se réfère beaucoup aux livres retraçant
la vie des grands hommes et ceux à thèmes d’histoire, de société,
d’éducation, de psychologie, de littérature et d’art. Il reste près des gens de
science et des philosophes et affectionne les experts et les gens d’expérience.
Il lit la presse et suit les événements de prés. Il est à l’affût pour découvrir
ceux qui sont meilleurs que lui en savoir et en pureté de l’âme, ceux qui sont
plus sont plus dans le besoin que lui et ceux qui sont plus méritants. Ses
objectifs, son plan et ses moyens légaux sont définis à l’avance. Les gens le
regardent avec étonnement, réprobation, appréhension et doute, alors qu’il
ne fait qu’à penser à l’amélioration de leur condition, leur réussite, leur
épanouissement et leur sécurité.
La sagesse n’est pas une cassette que l’on écoute ou des recettes toutes
faites. C’est à la fois l’expérience, la subtilité, l’endurance, la pondération, la
modération, la prière, la concertation. C’est avant et après tout un don
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d’Allah ; « Et celui à qui la sagesse est donnée, vraiment c’est un bien
immense qui lui est donné » (Sourate Al Baqarah / verset 269).
Ö notre Seigneur, nous t’implorons par l’un de tes noms qui est le SAGE
afin de nous apporter la sagesse, d’ouvrir pour nous les portes de la
miséricorde, de nous compter parmi les raisonnables et ce par faveur et grâce
de Ta part. Amen.
Celui dont sa sagesse est inférieure à son savoir et dont sa colère est
supérieure à sa sérénité, il vaudra mieux pour celui-là de s’excuser de ne
pouvoir assurer la fonction d’imam ni d’enseigner, d’éduquer ou d’orienter.
Allah pourvoira pour lui ; sinon il causera plus de méfaits que de bien et
nuira sans s’en rendre compte. Un tel personnage pourrait effondrer des
familles et provoquer la séparation des frères pour des futilités. Il
prendra les décisions les plus singulières et commettra les sottises les
plus inattendues. La réalité quotidienne en est la meilleure preuve !
La sagesse veut que soient préservés les grades et les rangs, les us et
coutumes ; c’est pour cela qu’il est opportun pour l’imam de s’informer sur
les fidèles non par curiosité ou pour s’immiscer dans leurs affaires, mais
simplement afin de mettre chacun à la place qui lui est dû sans abus et
négligence. Ainsi, il ne se comportera pas de la même façon par exemple,
avec l’intellectuel et le marchand, le patron et le subordonné, le familier et le
lointain, l’ancien et le nouveau, l’occidental et l’oriental etc. ... Il doit
consacrer spécialement du temps à l’étude de la langue, de la culture et des
coutumes de l’Occident et ce de façon à les bien maîtriser ou du moins
moyennement, dans le but de pouvoir communiquer sans interprète et sans
peine avec l’interlocuteur occidental. Certes, ne pas posséder la langue du
pays est un lourd handicap et conduit l'étranger à l’isolement - et Allah
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sait que j’en ai fait les frais comme les émigrés de mon genre-. J’ai recueilli
par hasard de la bouche d’un touriste une parole qui fut pour moi une
moralité. Il m’avait dit : « le pays est une vipère qui tue celui qui ne le
connaît pas ! ». Le prophète Moïse – que la paix d’Allah soit sur lui – a
souffert lui aussi de cette difficulté de la parole comme il est illustré dans le
Coran : « Seigneur rends mon cœur apte à recevoir ta révélation, facilite
ma mission et dénoue un nœud en ma langue afin qu’ils comprennent
mes paroles » (Sourate Tà’Hà / versets 25 à 28). Invoquons donc Allah de
dénouer les nœuds de nos langues pour nous faire comprendre ! Ou assurenous un retour paisible à notre bercail, à la terre de nos racines !
Parmi les qualités de sagesse et de bienveillance de l’imam est qu’il doit
peser ses mots, retenir sa langue et ne parler des gens qu’en bien, même s’ils
ont été malveillants envers lui pour éviter tout prétexte à la zizanie et aux
questionnements. Il est évident que l’une des fonctions de l’imam est de
résoudre les problèmes et non de les créer, de calmer les esprits et non
de les enflammer. Et la rétribution viendra d’Allah – Exalté soit-Il –. Le
pire des épreuves est que le prédicateur exploite le privilège du minbar pour
régler ses comptes et fustiger ses adversaires sous prétexte de : rappeler le
commandement du bien et de l’interdiction du répréhensible. Dominant les
fidèles du haut de son minbar - un jour de leur fête-, il accable les gens et
insulte les adversaires et ceci par caprices et par esprit partisan. Il aura
profité du fait que le musulman doit observer le silence absolu prescrit par la
jurisprudence, pour commettre son méfait. En ce qui me concerne, si je suis
mis à l’épreuve d’écouter un tel imam, – Qu’Allah me préserve de parler de
moi par vanité – je me couvrirais la tête de mes vêtements et me boucherais
les oreilles de mes doigts pour signifier mon mépris de la malfaisance d’un
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tel prédicateur, et refaire ma prière en dohr s’il le faut, car, il s’agit d’un
prône illégal, indécent, futile et laid, qui ne doit pas se produire. Les ulémas
disent ; « Ce qu’il faut éviter à la langue de dire, il faut aussi éviter que
les oreilles ne l’entendent ».
Oui messieurs, il ne relève ni de la sagesse ni de l’esprit chevaleresque
de profiter, lors du sermon du vendredi, du minbar ou de toute autre
chaire religieuse ou scientifique pour : imposer ses idées ou la doctrine
de son parti ; susciter l’orgueil et l’animosité entre les gens ; vider ses
querelles ; provoquer des présomptions et transformer le sermon en
bulletin d’information de la mi-journée: Sermon austère, pessimiste,
dénué des citations des textes sacrés et des invocations consacrées qui
stimulent et éveillent, ce qui fait qu’à la fin, le fidèle s’en trouve dépité,
frustré et regrette d’y avoir assisté 3.
Chers frères, ce qui est requis d’un imam ordinaire - comme moi - partout
dans le monde, c’est simplement de commander le convenable
(convenablement !) et interdire le blâmable (sans blâmer !) comme de dire :
3
Un professeur digne de confiance nous a confié que parfois il préfère rester dans sa
voiture le vendredi,, à proximité de la mosquée, attendant que le prédicateur ait terminé
son prêche et que la prière soit sur le point de commencer avant d’y entrer. Ceci dit-il :
parce qu’il n’est pas d’accord avec le contenu (les idées personnelles) exposé. Voilà
pourquoi, vertueux prédicateurs, vous devez vous préoccuper de cette situation et
consacrer l’allocution à tout ce qui rapproche d’Allah, à son invocation : « Ö vous qui
avez cru ! Quand on appelle à la salât du vendredi accourrez à l’invocation d’Allah, et
laissez tout négoce. Cela est bien meilleur pour vous, si vous saviez ! » (Sourate Al
Joumouah / verset 9).
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« Pourquoi certaines gens pensent… ». Quant aux sujets brûlants, sensibles
et délicats ou qui requièrent une spécialisation, ils doivent être laissés à
ceux qui en ont les aptitudes et les dispositions. Des adages arabes disent :
« Ceci n’est pas ton nids femelle, éloigne toi ! ».
Personne ne doit dire : moi, je suis les événements de près, je lis les
journaux et je connais bien la réalité, car ce n’est pas cela le savoir requis ni
la science telle que définie par l’américain Sarton, : « Le savoir est un
ensemble de connaissances vérifiées et ordonnées. », tandis que les
hypothèses, les pronostics, les suppositions, les impressions et les bribes
disparates de connaissances ne relèvent d’aucune façon du savoir même si
les gens du commun nous applaudissent.
Tu ne voudrais pas, monsieur, que nous soyons un précédent et un
exemple pour les autres tel ce sheikh pieux et âgé à qui on demanda son avis
sur « la mondialisation » et qui répondit : « nous en avons parlé avec le
responsable qui nous a promis qu’il y mettra un terme ! ». ! Et tu ne voudrais
pas non plus que nous soyons comme ce prédicateur rustre et spontané que
des gens du commun l’ont excité, le poussant à prononcer un prêche
enflammé dans lequel il a critiqué inéquitablement et arbitrairement un état
occidental. Convoqué par les autorités, il fut soumis à l’interrogatoire
suivant:
- Est-ce que tu connais, monsieur, sur la carte du monde la situation du pays
que tu as critiqué ?
- Non, par Allah, je n’en ai aucune idée !
- Ne sais-tu pas, monsieur, que tu as porté préjudice à des millions de gens
dans ton discours ; que tu as généralisé et injurié tous les citoyens de ce
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pays ? Que deviendrais-tu si ces gens t’assignaient en justice, car à coup sûr
ils gagneront le procès ? Le prédicateur baissa la tête et dit : Il n’y a de
force ni de puissance qu’en Allah, je suis désarmé face à cette calamité ! Et
l’agent d’autorité de poursuivre :
- Dis-moi, monsieur, qui-est-ce qui t’a mis dans cette situation ? qui t’a
compromis et jeté dans cette mer de difficultés ?
- C’est Satan, maudit soit-il, répondit les sheikh, avec candeur4.
Méfie-toi, confrère imam, de tomber dans le tort dans lequel se mettent
certains prédicateurs, quoique vigilants et sincères, à savoir : gesticuler,
battre le sol du pied, déchirer les feuilles que l’on a entre les mains, pousser
les gens à hurler. Ces comportements, s’ils sont tolérés par les gens accablés
en Orient et dont les raisons sont compréhensibles, ils restent condamnables
et inacceptables en Occident. Ils dénotent du déséquilibre existant entre le
cœur et la raison et c’est très préjudiciable dans ces contrées, ainsi que nous
l’a enseigné l’expérience ... Je rapporterai ici comme une anecdote, ce qu’a
dit le philosophe et diplomate allemand converti à l’islam, Mourad
Hoffmann, dans un article publié, à savoir que : « L’homme occidental
s’offusque des cris que l’imam lui adresse à la face et il les sent comme
une humiliation, une agression et un manque de respect ! ». Il suffit
d’ouvrir les ouvrages de la jurisprudence musulmane pour voir qu’il est
recommandé au prédicateur de neutraliser son corps et ses mains et d’en
limiter les mouvements (Voir en particulier l’ouvrage intitulé Al Maghna de
son auteur Ibnou Qudamah).
4
NB : C’est une histoire vraie. Elle nous a été rapportée par un professeur chercheur
exerçant en Europe.
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Par ailleurs chers amis, nul ne doute que nous ne vivons pas sur une île
isolée et que nous n’avons pas l’exclusivité des prêches et du rappel dans ce
vaste monde et particulièrement dans la société occidentale ouverte. Cette
société, et ce n’est pas un secret, abrite toutes les confessions religieuses,
toutes les doctrines, toutes les cultures, tous les goûts et toutes les races et
chacun agit en conséquence dans la limite garantie par la loi. Ici vous
trouverez le prêtre dans son église, le rabbin dans sa synagogue, le
professeur dans son amphithéâtre, le laïc dans son institut, le bouddhiste
dans son temple, le journaliste sur le lieu de son travail et le politicien dans
ses réunions … ! Il faut voir, par exemple, ces vastes assises ouvertes qui
se tiennent au cœur de Londres et où chacun s’exprime par sa propre
langue. N’oublions pas non plus qu’il y a là aussi le malékite, le hanafite,
le chafiite, le hanbalite, le dhahiriste, le chiite, le kharégiste, le zaïdiste,
le soufiste, le salafiste, l’abyssin … ! Il est quasi impossible en Occident
de trouver une mosquée ou un centre islamique où tu ne rencontres pas
toute cette diversité. L’on constate même que dans certaines mosquées
et centres islamiques ici, qu’on trouve, réunies, jusqu’à trente
nationalités ! Et chacun vogue dans une orbite !
Ce qui est requis de l’imam raisonnable est qu’il fasse passer son message
à travers son prêche en toute sérénité, sans défier quiconque, ni nuire à
ses opposants ou éliminer ses adversaires ! Pour le reste, c’est à chacun
d'interpréter selon son jugement, son cœur, son écoute et sa vision ! ...
« L’écume (du torrent et du métal fondu) s’en va au rebut, tandis que (l’eau
et les objets utiles aux hommes) demeurent sur la terre. Ainsi Allah propose
des paraboles » (Sourate le Tonnerre / verset 17). De toute façon, personne
ne s’est jamais départi, ne serait-ce que d’un pouce, de son legs culturel
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ou religieux sous l’effet des injures, de cris, de la pression ou de la
contrainte. Epargnons-nous donc cette peine, d’autant plus qu'Allah
nous a créés différents et nous le resterons jusqu’à la fin des temps
qu’on le veuille ou non : « Et si ton Seigneur avait voulu il aurait fait des
gens une seule communauté. Or ils ne cessent d’être en désaccord (entre
eux) sauf ceux à qui ton Seigneur a accordé miséricorde. C’est pour cela
qu’Il les a créés » (Sourate Houd / verset 118). « Est-ce à toi à contraindre
les gens à devenir croyants ? » (Sourate Younès / verset 99).
J’ai parfois l’impression que si nous nous consacrions maintenant en
Occident à nous corriger et à éduquer nos enfants, il ne nous resterait ni
du temps ni de l’énergie pour penser ni du mal ni du bien des autres. ...
Et permettez-moi de dire que la meilleure invitation que nous puissions
adresser à la société occidentale qui nous accueille est une invitation
tacite, où la langue cède la place au cœur, en se comportant avec
dévouement et bonté.
Il n’est ni sage ni bienveillant aussi que l’imam qui est le modèle à suivre,
traite les fidèles de sa Mosquée(Awa mm) d'enturbannés somnolents ou de
racaille tumultueuse, termes que reprennent certains ! As-tu jamais vu –
qu’Allah te pardonne – un médecin se moquer de son patient et aggraver son
mal ? Ainsi donc par précaution et par principe les gens doivent être traités
avec
considération
et
être
pardonnés
quand
ils
ont
agi
par
ignorance. « Repousse le mal par ce qui est meilleur. ... » (Sourate Les
Croyants / verset 96). Ces gens du peuple, avec ce que nous avons – moimême et eux – de défauts, sont ceux-là mêmes qui ont hébergé, protégé et
initié ceux qui sont devenus l’élite. Ce sont ceux-là qui veillent sur les
mosquées, qui en sont les piliers et qui les fréquentent le plus. C’est grâce à
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eux que nous avons traversé les mers, construit les contrées, éteint l’incendie
et sauvé le naufragé. C’est grâce à eux que nous sommes reconnus, qu’il se
trouve parmi nous des gens qui maîtrisent la récitation du Coran et des
sheikhs ; ce sont eux qui ont permis que nous puissions effectuer les prières
collectives et la prière du vendredi et c’est grâce à eux nous pouvons
multiplier les pèlerinages aux lieux saints de l’Islam et même y assurer le
service de guide de nos pèlerins. C’est grâce à leurs petits revenus que nous
avons réalisés des économies, atteint le seuil de la zakat, construit les
logements, acquis le moyen de transport, voyagé par avion et par bateau,
assuré la tutelle des orphelins et maintenu les liens familiaux. Bref, comme
nous dirions en dialectal : « Nos ventres se sont gonflés de bonne bouffe et
nos poches de sous » ... La moindre des choses est de témoigner de notre
reconnaissance à ces hommes, ces champions qui ont réalisé des prouesses
avec leur peu de savoir et leur vision limitée !
L’élite a-t-elle accompli quoi que ce soit sans ces hommes du commun ?
Et pourquoi cet élitisme, alors que nous parlons le même langage
courant, que nous sommes tous de culture modeste – et loin de moi
l’idée de me mettre au-dessus du lot – car parmi ces gens du commun il
y en a qui nous dépassent dans nombre de nobles actions et de hautes
qualités ! Parmi eux il y a :
- L’homme qui jeûne le jour et prie longuement la nuit
- L’homme patient qui s’en remet à Allah
- L’homme qui dépense sans compter dans l’action humanitaire.
- L’homme sincère.
- L’intelligent, Celui qui comprend à demi-mot
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- L’homme d’expérience et de génie
- L’apôtre éclairé.
- Etc...
Ne ferons-nous donc pas mieux de cesser de médire, et de rendre le bien
par le bien ? « … Y a-t-il d’autre récompense pour le bien que le bien ? »
(Sourate Ar Rahman / verset 60).
Ne ferons-nous donc pas mieux de cesser de nous plaindre, nous qui
vivons dans l’abondance et la joie pendant que certains de ceux dont nous ne
valons pas un bout d’ongle en matière de foi et de savoir, vivent dans l’enfer
de la pauvreté et de la privation, patients. Nous ne les avons entendu ni se
plaindre ni pleurer leur sort.
Une autre preuve de sagesse de la part de l’imam dévoué est qu’il doit
s’entourer de gens forts et honnêtes qui sauront le défendre s’il se trompe et
le remettre sur la bonne voie s’il dévie. Cette précaution est bénéfique pour
l’imam et l’ensemble des fidèles. Un entourage qui serait composé de gens
ordinaires et simples ne serait peut-être pas en mesure de relever les
dérapages éventuels de l’imam et le remettre en selle : Ils lui seraient plus
nuisibles qu’utiles. Nous avons appris une multitude de choses, ici, de gens
qui se sont érigés contre nous en critiques ou en animosité ou en jalousie.
Puisse Allah leur pardonner et faire qu’ils s’amendent. Par contre, de
nombreuses personnes analphabètes, bonnes, confiantes, nous faisaient des
éloges, mais ils n'ont produit sur nous que l’effet négatif de nous rendre
passifs et de nous gonfler d’orgueil ! Je cite ici quelques mots d’une grande
beauté :
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- « L’ami, ce n’est pas celui qui authentifie ce que tu dis, c’est plutôt
celui qui est front envers toi »
- « La concordance permanente est une hypocrisie »
- « Les erreurs non corrigées s’accumulent et interagissent telle la
pression de la vapeur et une fois atteint le point critique, elles se
libèrent dans une explosion destructrice effroyable"
Je te demande donc instamment cher frère imam de t’entourer de
personnes lucides, qui veillent sur toi et qui soient capables de te dire
opportunément : Ceci est une erreur ; ceci est arbitraire. ... ; ceci ne
convient pas. ... Ceci est bon ou bien ou mal ou utile ou nuisible ou
meilleur. ... Rien ne vaut mieux que la critique constructive et la
concertation sérieuse et personne ne peut se passer de l’avis des autres
et de l’expertise des spécialistes, fût-il un prophète qui reçoit la
révélation divine et à plus forte raison quand il s’agit des étudiants
pauvres et des imams récemment désignés qui ignorent tout, sinon des
surprises peuvent les guetter, spécialement dans les pays occidentaux !
Et Allah sait que ce sont des surprises de taille !
Allah nous a dit dans son Livre, s’adressant à son prophète : … et
consulte-les à propos des affaires (Sourate Al Imrane / verset 159) et Il a dit
–Exalté soit Il— dans un autre verset : … se consultent entre eux à propos
de leurs affaires (Sourate Ach Chourah / verset 38).
Dans le fiqh, il est expressément montré les différentes manières, toutes
discrètes, d’attirer l’attention de l’imam en cas d’oubli de sa part au cours de
l’exercice de ses fonctions (prière, prêche, récitation du Coran). Ces
recommandations restent valables pour toutes les disciplines dans lesquelles
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l’imam est amené à intervenir, que les erreurs portent sur la foi, la pensée ou
le comportement.
Nous sommes drôles, nous autres imams : Nous adressons aux gens des
centaines de prêches et autant d’attaques à de nombreuses occasions, ils les
encaissent patiemment, sereinement, de bon gré, mais il suffit qu’un homme
sage et modéré - parmi eux - attire notre attention, pourtant avec tact, sur une
de nos failles ou nous suggère une idée, pour l’accabler de nos imprécations,
invoquer le mauvais sort contre lui et puis saisir les occasions pour clamer
haut et fort la formule consacrée : « chaire (viande) des ulémas est
empoisonnée, la chaire des ulémas est empoisonnée. ... ».
Il ne faut pas en vouloir - cher imam - à ceux qui voudraient discuter plus
profondément une idée avec toi, ou qui réagiraient à la suite d’une
affirmation ou qui te feraient une réflexion désobligeante ? Ne sais-tu pas
que tu exerces dans une société européenne, rationaliste, matérialiste,
critique et cartésienne pour laquelle il n’existe rien de sacré ou
d’inviolable. Ici les rapports entre l’imam et les gens, entre l’éducateur
et l’élève ou l’étudiant, sont tout autre chose que ceux qui prévalent en
Orient, car le contexte scientifique et religieux diffèrent de fond en
comble et la vision que nous en avons n'existe plus que dans des esprits
idéalistes, tels le mien et le tien. Et quiconque contrarierait ce courant
ou ne tiendrait pas compte de cette spécificité irait vers l’échec, la
déception et s’apercevrait que les jeunes désertent ses audiences sans
regrets et personne ne s’apitoierait sur son sort. Tout ce constat est le
fruit de l’expérience. La seule alternative donc est de faire preuve de
patience, de s’adapter, d’avancer doucement, de s’ouvrir au dialogue et
de rester irréprochable en tant qu’enseignant et modèle.
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A-t-on jamais vu un imam attester lui-même de son honorabilité ? Ou un
homme pieux dire : Je suis le pieux, reconnaissez moi ? Ou l’homme de
noble lignée, propre, qui dit : Baisez mes mains ? Ne nous convient-il pas
d’implorer le pardon d'Allah et de nous repentir de tels excès et de cet
orgueil qui musèle les voix, accable les esprits et freine les énergies ?
Qu’Allah nous en préserve.
Le prophète, maître des imams et leader de la Umma, n’était point
vindicatif et ne se préoccupait guère de ses adversaires : La ligne de conduite
du prophète doit nous inspirer pour améliorer notre comportement de tous
les instants. Nous sommes vraiment très éloignés de l’amour que nous
devons vouer au Messager d’Allah (PbAsl).
Personne n’a le droit de dire : je me conforme aux méthodes héritées de
nos sheikhs, car ces étaient avec tous leurs mérites sont le produit de leur
société et les hommes de leur époque et personne parmi eux n’avait
prétendu être infaillible ni parfait, et s’ils pouvaient prévoir les défis du
temps et de l’époque où nous vivons, ils changeraient d’avis sur bien des
comportements, des pratiques et des goûts, à l’instar des savants de
grande renommée.
Ci-après quelques mises en pratiques de la sagesse par l’imam :
- Respecter les spécialités
- Connaître les potentialités des gens
- Ne t’invite pas, toi, modeste imam comme moi, sur la table des grands
- N’oublie pas les anciens dignitaires ni ceux qui mémorisent le coran par
cœur.
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- Ne discute pas de sujets qui ne relèvent pas de ta compétence
- Ne te prends pas pour l’Imam des croyants ou le lion dans sa tanière
- Et mets-toi dans la tête que les autres sont là et ne sont pas de simples
figurants.
Car le manquement à ces règles te dévalue, prouve que tu es frivole et
ignorant des bonnes manières et cela hâtera ton départ.
Il faut aussi se rappeler qu’exceller dans une science donnée ne signifie pas
que l’on maîtrise toutes les autres et ne nous permet pas de se revendiquer de
tous les arts. A souligner que sont considérées comme spécialités : les
différentes méthodes de réciter le Coran, le Fiqh, l’éducation, l’économie, la
politique etc. Ce serait de l'illusion que de se donner bonne contenance et
prétendre ridiculement un savoir que l’on ne possède pas. Il faut admettre
qu’ignorer une chose c’est l’ignorer, et ce n’est ni la notoriété dans une
discipline ni la renommée ni le prestige ni l’âge ni l’ancienneté ni la
dignité de sheikh ni le doctorat, ne pourront changer cet état de fait. Il
faut dire les choses explicitement et franchement pour gagner du temps
et servir la vérité.
- Sibawaïh était par exemple, une sommité en grammaire arabe mais ignorait
tout du Hadith ;
- Mohammed Bnou L’Hassan Ash Shibani était une sommité en matière de
Fiqh (Jurisprudence) et ne savait rien des règles de la récitation du Coran.
- Hafss était expert en matière de récitation de Coran mais faible en Hadith
(ainsi que rapporté par Addhahbi dans son ouvrage intitulé As Siar (les
lignes de conduite).
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- Le professeur allemand Schmidt, médecin de renommée mondiale, ne
connaissait rien en matière d’histoire, il pensait que les Ottomans étaient
contemporains du 20ème siècle.
- Mon Maitre, (bien aimé) qui nous a éduqué, qui nous a enseigné la
calligraphie et la ponctuation du Coran – Qu’Allah rehausse son rang –, ne
différenciait pas entre le hadith authentique et celui qui est faible en tant
que spécialité (par rapport à la chaîne garantie de transmission) et disait que
le hadith faible convenait mieux aux faibles que nous sommes !
J’ai écouté - Allah m’est témoin - de la bouche d’un homme considéré
comme éminent en matière de jurisprudence et de fatwa à notre époque,
je l’ai écouté attribuer au prophète (PbAsl) un hadith, alors qu’il s’agit d’une
simple strophe d’un poème, chantée par tous, dans les pays arabes. De telles
erreurs de la part des ulémas et de personnes marquantes en religion ont de
tout temps existées, car personne n’est parfait et la perfection absolue
appartient à Allah, l’Unique, Qui n’a pas d’associés. Cette vérité
incontestée est illustrée dans le Coran dans le verset suivant : « Vous vous
êtes bel et bien disputés à propos d’une chose dont vous avez
connaissance. Mais pourquoi vous disputez- pour des choses dont vous
n’avez pas connaissance ? » (Sourate Al Imrane / verset 66).
L’imam titulaire est censé être un modèle en matière de courtoisie, de bon
goût, de respect des personnes et d’humilité vis à vis des fidèles et cela ne
lui vaudra que plus d’élévation et de considération dans les cœurs. Soyons
vigilants sur ce point, car de nombreux imams en Occident sont jaloux
de leurs pairs, ignorant la présence des invités à la mosquée. Par
modestie et par tact, il serait meilleur et plus convenable pour eux,
d’accueillir leurs invités, mais le démon – Qu’Allah nous en préserve –
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leur fait croire qu’untel va les supplanter et les priver de leur gagnepain. Implorons Allah de nous préserver du démon.
Appel et espoir :
- Ö toi qui est initié dans les affaires de la religion (Faqih) ! Sois généreux
envers tes invités et Allah le sera envers toi ; certes la générosité à l’égard
des invités est l’une des voies les plus simples pour accéder à la foi.
- Exprime tes bons sentiments de façon audible et claire aux personnes qui
t’ont été dépêchées par les ministères des affaires religieuses, les diverses
universités (Al Qarawyène, Al Azhar, Azzaïtouna …), les centres
islamiques ou toute autre institution religieuse reconnue, ou encore les
personnes invitées officiellement par la mosquée ou le centre dont tu
relèves, ce sont généralement des personnes qui récitent le Coran, ou qui
sont chargées de missions d’exhortations.
- Sois au premier rang de ceux qui les accueillent aux aéroports et aux gares
et le dernier à les saluer en les raccompagnant, à leur départ.
- Propose de leur céder le minbar et le mihrab, si tu le juges opportun et
sage.
- Sois convaincu que la visite des élus d’Allah illumine et ne brûle point,
élève et ne dévalue point. A-t-on jamais vu des lumières se bousculer ou
des fleurs se chamailler? N’est-ce pas que les beaux bouquets se composent
de fleurs diverses et de roses variées !
Jure-moi par Allah imam, toi qui es issu d’une généreuse lignée, que tu ne
priveras pas les gens de ta mosquée et de ton quartier de la bénédiction des
gens du Coran et particulièrement pendant le mois de Ramadan. Mais sois
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aussi prévenu que priver les musulmans de cette bénédiction est une trahison
et un aveuglement, un signe de despotisme et de faillite de la conscience et
sois sûr qu’une fin déplorable s’en suivra pour son auteur. Qu’Allah nous
sauvegarde.
La sagesse de l’imam visiteur se manifestera comme suit :
- Il ne doit pas dépasser sa limite et sa mesure.
- Il ne doit de lui-même, ni présider une prière, ni exhorter ni donner un
discours ou promulguer des fatwas, sauf à la demande explicite de l’imam
titulaire, mais jamais à la demande du publique. Dans ce cas, il devra
faire preuve de réserve et de prudence pour ne pas porter préjudice à
l’imam titulaire ou le discréditer aux yeux des gens. Le prophète (PbAsl) a
dit dans un hadith rapporté par Mouslim : « L’on ne doit pas guider dans
la prière, chez-lui, un homme dont on est l’invité, ni s’asseoir à la place
du maître de maison, sauf à la demande expresse de celui-ci ».
- S’il fait l’éloge de l’imam titulaire quand il a été autorisé à prendre la
parole ce serait louable de sa part et une preuve de sagesse, car finalement
seuls les gens de valeur savent apprécier la valeur des autres et ont le
courage de le dire.
- Qu’Allah nous préserve de cette catégorie de gens qui, quand tu leur
accordes de l’importance ils te dénigreront ; quand tu leur donnes
l’avantage, ils te désavantageront ; et ainsi que de ceux qui médisent de
toi dès qu’ils te tournent le dos. Qu’Allah agrée Ach Shafi'i qui a dit : « Je
n’ai jamais élevé quelqu’un plus haut que le rang qu’il mérite sans
qu’il ne me rabaisse autant ». C’est à ce genre de personnes que nous
penserons en lisant les versets du Coran suivants : « Dis : je cherche
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protection auprès du Seigneur de l’aube naissante contre le mal des
êtres qu’il a créés. » (Sourate Al Falaq / versets 1et 2).
L’imam pertinent doit aussi :
- Centrer son sermon sur l’essentiel et faire abstraction du reste
- Parler seulement de ce qui recueille l’adhésion de tous et éviter ce qui ne
fait pas l’unanimité.
- Traiter de la réalité, non de ce qui est censé ou supposé être, ni de théories
ou de polémiques ni de récits ou de jérémiades inutiles.
Quel intérêt y a t- il à consacrer plusieurs sermons consécutifs pour
polémiquer sur des sectes telles :
Al Mouâtazilah, Azzaïdia, Al Ebadéa, le Salafisme, le Soufisme, le
Wahhabisme ou des successeurs des Bani Umayyad. Quel intérêt cela
présente-t-il pour le musulman vivant en Occident ? Pourquoi lui exposer le
différend qui oppose sunnites et shiites ? Penses-tu que mille fois mille
sermons pourront trancher ce vieux différend qui divise et angoisse la
communauté ? Quel intérêt y a-t-il à axer des discours sur la zakat (aumône
obligatoire) concernant les ovins, les bovins, le maïs, l’orge, alors que des
milliers de kilomètres nous séparent du Sahara et du désert ? et ce, au
moment où les commerçants, les ouvriers et les fonctionnaires dans les
centres urbains ici en Occident attendent de nous de leur détailler ce qu’ils
doivent savoir sur la zakat qui concerne l'Euro, la Livre Sterling, le Dollar,
l’or, l’argent, les marchandises, les titres boursiers
...
ainsi que les
problèmes qui nous interpellent de façon persistante et urgentes tels :
l’éducation des enfants, la protection de la famille, l’assistance à la jeunesse
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; les dangers de la drogue, la manière de se comporter vis à vis des nonmusulmans, l’enseignement de la culture du dialogue et du bon voisinage ...
A quoi sert-il aussi chers confrères, de focaliser nos sermons et nos
exhortations sur des thèmes tels : l’étroitesse et l’isolement de la tombe,
son austérité, ses affres, la mélancolie et la tristesse que tout cela suscite
? Les gens repartent avec la phobie de la mort, de l’enterrement, et que
leurs biens seront entre d’autres mains et que leur corps sera livré aux
serpents, aux scorpions et aux vers ! Un tel discours provoquera
probablement aussi des maladies psychiques chez les femmes, les
enfants, ceux qui souffrent de maladies chroniques et les vieillards : le
désespoir pourrait s’en emparer, les faire douter de la miséricorde
d’Allah et prendre en désaffection les mosquées.
Pourquoi, chers frères, n’imiterions-nous pas le prophète (PbAsl) dont
les surnoms sont à eux seuls une ouverture sur la vie, l’optimisme et
l’espoir : (Al Bachir = qui annonce la bonne nouvelle. Annadir = qui
met en garde contre les actions et les paroles qui pourraient
compromettre la personne dans sa foi en Allah. Assiraj = la source de la
lumière. Al Mounir : l’illuminant). Il (PbAsl) émaillait ses exhortations
de bonnes nouvelles et d’avertissements édifiants, inculquant ainsi la
confiance en la clémence et la miséricorde d’Allah, tout en débordant de
larmes de clémence et d’amour pour les créatures d’Allah (PbAsl).
Obéissons aux recommandations que nous adresse Allah dans les
versets ci-après : (Ceux qui disent : Notre Seigneur est Allah, qui se
tiennent dans le droit chemin, les anges descendent sur eux au moment
de la mort et leur disent n’ayez pas peur et ne soyez pas affligés mais
ayez la bonne nouvelle du paradis qui vous était promis (Sourate
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Foussélat / verset 30). Le prophète (PbAsl) a dit dans ce sens : « celui qui
a aimé aller à la rencontre d’Allah, Allah a aimé sa rencontre ».
Voilà la sagesse dont nous avons tant besoin !
Et retrouvons encore une fois le verset 269 de Sourate Al Baqarah dans
lequel Allah nous souligne l’extrême valeur de la sagesse : « ... et celui à qui
la sagesse est donnée, vraiment c’est un bien immense qui lui est donné. »
Il n’est ni sage ni du bon sens : d’exporter les tares et les désordres des
pays musulmans à nos jeunes en Occident ou de leur amplifier une facette de
la religion au détriment des autres facettes, ou de faire l’impasse sur le fiqh
des priorités, des buts, des avantages, des inconvénients. ... La priorité est de
commencer par :
- Sauver la foi
- Commencer par les obligations et les piliers au lieu de sauter d’emblée à la
voie de l’excellence dans l’adoration et s’intéresser aux subtilités du savoir,
car parmi nos jeunes, ici en Occident, il y en a dont les cartes se sont
brouillées et qui sont dans un embarras de choix entre les différents
courants répandus. Ils s’affairent autour du soufisme, du salafisme ;
balancent entre les doctrines, fréquentent des groupes de discussion alors
qu’ils connaissent difficilement la sourate des Louanges « Fatiha » et qu’ils
n’ont même pas le duvet à la place de la moustache. La grande part de
responsabilité de cet état de chose incombe à toi, frère imam, car c’est toi
qui as la science en tant que fqih : Tu es la personne mûre, le conseiller,
l’éducateur !
Ta fonction frère imam, consiste à démontrer à nos innocents enfants les
fondements de la religion et l’ordre de leur priorité, la manière de pratiquer
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leur Islam de façon saine et exempte des malfaçons. Sinon, ce serait les
abandonner à leur propre sort avec tous les risques qui les guettent. A quoi,
messieurs, servirons à notre nation, des jeunes qui, s’ils sont pratiquants ils
deviennent moines ; s'ils dévient, ils tombent dans le fanatisme ; s’ils
fréquentent les mosquées, ils en font leur demeure et quand ils en sortent
c’est pour n’y plus retourner. Ces comportements extrémistes sont bien
connus en Occident. Il faut donc retrouver le juste milieu, l’équilibre et la
modération. Quelle utilité pour le monde, cher imam, représente un jeune
qui pratique la religion, mais dont il n’a de la rectitude que le port du turban
et le qamiss , la pratique des incantations (roqya) pour éloigner le démon,
l’usage du musc comme parfum, le bâtonnet d’Arak pour se nettoyer les
dents, le port du chapelet à la main.., les compliments à l’adresse de tel ou
tel sheikh, la navigation sur le web – sans but ni considération de temps –
pendant que sa maman, la veuve âgée, travaille péniblement à l’atelier ou au
champ pour subvenir aux besoins de son fils fainéant. Et si on lui demandait
de cesser cette ingratitude et de se rendre sur le marché du travail – comme
ordonné par Allah – il mettra en avant des prétextes tels : la corruption de
l’époque, la situation de l’émigré, le danger de la séduction des femmes ! Par
contre, il se permet volontiers et sans gêne de tendre la main, de bousculer
les pauvres dans les centres de bienfaisance quitte à justifier cela, sans
réserve, de licite ou en tant que butin acquis contre l’ennemi et pour lequel il
pense qu’il sera particulièrement rétribué par le ciel !
Cela ne s’appelle, messieurs ni de la droiture ni de la dignité ni du
soufisme ni non plus de l’extrémisme. C’est une crise d’adolescence
religieuse ou d’identité qui passera sans laisser de séquelles, si elle
rencontre un imam à la hauteur de sa mission, dévoué à Allah, modéré,
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ayant le sens du dialogue, patient, cultivé, conscient de son rôle social,
qui fasse la part de la religion et de la vie ici-bas, qui sache inculquer les
fondements et leur saine mise en pratique, qui traite les problèmes avec
savoir et tact, sans émotion ni irritation.
Vous êtes, messieurs les imams les dépositaires d’une lourde confiance :
Vous avez entre les mains la jeunesse de la nation, soyez en dignes.
L’imam sage qui ambitionne de corriger les mœurs doit commencer par sa
propre famille puis sa tribu puis ses amis, afin qu’il ne s'entendra pas dire un
jour : Retourne chez- toi, car les tiens ont plus besoin de tes exhortations que
nous ! Et ces paroles auraient alors sur tout cœur sensible et clément l’effet
le plus pénible. Implorons Allah – Exalté soit-Il – afin que rien ne soit
dévoilé de nos tares et de nos secrets !
Il est clair que plus l’entourage du prédicateur est sain et irréprochable,
particulièrement l’épouse et les enfants, plus la tâche de l’imam sera aisée et
sa parole plus utile et plus efficace. Méditons dans ce sens le verset
coranique suivant : ... qui disent Seigneur donne-nous en nos épouses et nos
descendants la joie des yeux et fais de nous un guide pour les pieux (Sourate
le Discernement / verset 74). L’on ne peut devenir un véritable guide pour
les pieux que si notre propre capital est sain et que nous sommes réjouis
quand nous voyons que notre famille et nos enfants sont tels que nous
espérions, - ainsi qu’illustré par le verset précité. Le professeur Barghout,
spécialiste des problèmes de la famille a traduit cette condition impérative
par l’équation suivante : (Mariage réussi + enfants bien éduqués =
Aptitude à guider les gens pieux).
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Pitié donc cher frères pour ce précieux capital que sont les épouses et les
enfants, sachant que même si par la grâce d’Allah nous réussissions à
ramener sur la bonne voie des millions de gens, mais qu’un seul de nos
enfants en tant qu’imams est dévoyé, notre crédit serait réduit à néant et la
terre nous deviendrait inhospitalière et ce, quelle que soit notre importance
au plan culturel, de la piété, du prestige ou de la richesse !
Le conseil suivant n’est pas à écrire en lettres d’or mais bien à mettre en
pratique : Regarde autour de toi et rends-toi compte du résultat auquel sont
parvenus tes frères qui ont choisi de dépenser leur temps à se distraire et à
voyager au moment où leurs obligations familiales sont négligées. La famille
est la fondation de bonnes œuvres, où chacun de nos efforts envers nos
familles sont rétribués par Allah, selon l’expression d’un écrivain. Prends
exemple sur mon cas et évite mes erreurs : En plein âge mûr, les cheveux
gris et le dernier enfant déjà là, j’ai relâché ma vigilance à tel point que
comme on dit : Omar a trop grandi pour être cerné et si ce n’était la
miséricorde de mon Seigneur, j’aurais sombré. Mais je reste encore au bord
du précipice et j’implore Allah pour moi-même et pour les autres en répétant
: « Ö Allah ! Que notre mission réussisse sans encombre ! »
Le but de mes conseils, cher imam – toi qui a des enfants –, est que tu
restes vigilant, méfiant, présent, au courant des dossiers de ta femme et de
tes enfants un par un sur les plans de l’éducation et de l’enseignement –
matériellement et moralement ! Tu dois être plus proche d’eux que toutes
leurs connaissances et amis et les placer en priorité quant à tes projets et
programmes ; surveiller aussi la qualité des camarades et des voisins et
veiller à ce que les conditions de vie soient valables : nourriture, hygiène,
transport ainsi que l’origine des ressources. ... Enfin, invoquer Allah pour
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eux matin et soir et supporter patiemment les épreuves qu’ils pourraient
susciter, suivant en cela les prophètes et les pieux. Si, pour des causes
extérieures et malgré tous les efforts, l’on ne réussit pas cette éducation, il
n’y a pas lieu de se tourmenter et de se laisser envahir par le désespoir et la
frustration, car Allah a ses raisons et ses secrets et c’est lui le Guide, nulle
divinité en dehors de Lui. La liste des personnes qui ont été éprouvée dans
leurs enfants est trop longue pour être rapportée. Le récit de l’histoire du
prophète Noé – Que le salut soit sur Lui – avec son fils est à la fois une
leçon et un soulagement. La compensation vient des petits-fils qu’Allah nous
donne, sinon directement d’Allah ... N’est blâmable que celui qui a été
négligeant, incapable ; qui a lâché les rênes et baissé les bras se contentant
d’adresser des vœux pieux à Allah ! Que la prière d’Allah soit sur notre
seigneur et père le prophète Ibrahim qui a dit : « ... celui qui me suit fait
partie de moi-même et celui qui me désobéit – c’est Toi le Pardonneur et le
Miséricordieux » (Coran / Sourate Ibrahim). Allah a aussi loué et salué son
prophète, Issa fils de Marie, qui a dit : « J’étais le témoin de leurs actes tant
que je vivais parmi eux et depuis que Tu m’as rappelé à Toi, c’est Toi qui en
es l’observateur » (Sourate Al Mà-idah).
Sache, cher imam, que l’éducation est axée sur l’exemple que nous
représentons nous mêmes puis sur :
- l’accompagnement
- l’adhésion
- le suivi
- l’explication par la preuve
- la spontanéité
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- la tolérance
- la sagesse
De même qu’il faut savoir fermer les yeux quand il le faut. Il ne s’agit
donc pas d’interdire, de donner des ordres, de sévir, de dominer ni de
soumettre ou de contraindre ! Ces méthodes brutales ont montré leur
stérilité ; elles ne produisent – expérience à l’appui – que des êtres
déformés, complexés, effondrés et faibles, à nul usage utiles. Ne
t’acharne donc pas sur ton enfant et ne le dévalue pas parce qu’il n’est
pas imam comme toi et qu’il n’a pas accumulé autant de connaissances
livresques et de savoir-faire que toi.
Nos enfants ne sont pas notre possession et ne sont pas une pâte
malléable à soumettre à notre gré – comme certains le croient et il n’est
pas requis pour qu’ils soient une photocopie conforme du père ou de la
mère. Aucune civilisation, messieurs, ne se fonde uniquement sur la
fonction d’imam ou sur le savoir religieux, mais, il exige d’autres
connaissances et spécialités. Et au final, chacun est prédisposé pour les
fonctions pour lesquelles il est créé. (Partie d’un hadith cité dans les
Deux recueils authentiques – Assahihain – de Boukhari et Mouslim).
Ne te fie pas cher imam à un critère unique pour mesurer le progrès de tes
enfants – comme le font certaines personnes –, il faut multiplier et varier les
critères ; faire dérouler les tests sur plusieurs années et tenir compte des
circonstances et des lieux. A titre d’exemple, ne pas évaluer son enfant
uniquement sur le critère de mémorisation du Coran ! Qui de nous ne
voudrait-il pas que le Coran fasse partie de son foyer ? Néanmoins l’imam
cultivé ne doit pas mesurer le progrès de ses enfants et de ses petits enfants
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en fonction du nombre de sourates ou de chapitres qu’ils ont mémorisés. Je
rappelle cette citation de nos sheikhs, à savoir : La personne qui apprend
ne serait-ce qu’un seul verset et qui le traduit en actes dans sa vie est
meilleure que celle qui mémorise le Coran en entier et n’en applique pas
les recommandations !
L’essentiel, selon notre modeste expérience est que l’éducation aboutisse
aux résultats suivants :
- un esprit équilibré et sûr
- de bonnes manières morales
- un raisonnement sain et judicieux
- la santé psychique
- la motivation accrue
- la sagesse qui permette de réussir ici-bas tout en préparant son succès dans
l’au-delà .
Celui qui n’a pas la chance d’avoir une femme pieuse, honnête, bonne
conseillère et bonne éducatrice, on peut affirmer que sa fonction d’imam
sera comme amputée et que tous ses efforts seront vains. A celui-là nous
présentons toutes nos condoléances ! Car les deux tiers de l’éducation des
enfants sont dispensés par la maman, surtout si l’imam en question est
titulaire dans son poste. Cet imam-là est à considérer comme absent de
la maison même lorsqu’il y est présent. Sa vie ressemble à celle des
ambulanciers et des pompiers qui peuvent être requis à tout moment.
Dans ce pays les problèmes et les cas d’espèces auxquels l’imam est
appelé à répondre ne peuvent être pertinemment compris et résolus
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qu’à travers l’intervention de l’épouse et sa participation dans la
recherche du remède. C’est Allah qui conduit à la réussite et c’est lui qui
nous arme de patience.
Une autre preuve de sagesse et de finesse de la part de l’imam est le fait
d’attacher beaucoup d’importance à sa santé et à sa condition physique ce
qui lui permettra d’assurer sa tâche régulièrement et de façon optimale.
Nombreux sont les imams et les prédicateurs – et je n’en fais pas
exception – qui se sont laissés aller à la tranquillité et à l'inaction et qui en
sont devenus obèses ; en outre les voyages, les longues veilles et les soucis
des émigrés ont fini par les briser. Ils ne pratiquent pas d’exercices
physiques pour tonifier leur corps et en évacuer les toxines. Ils ne prennent
pas en considération la partie du fiqh traitant de la santé et des mesures
préventives destinées à la préserver. De par la nature de la formation
traditionnelle qu’ils ont reçue dans les mosquées ils n’ont aucune notion de
l’importance de l’activité physique et personne n’a dû les conseiller, ce qui
fait que le mal s’est très tôt installé entraînant les signes de la vieillesse
précoce : Arthroses, tension artérielle, diabète, arthrites, ... Et qu’Allah
accorde sa miséricorde à Omar Al Faroq, le compagnon du prophète, qui a
dit : « Quiconque abandonne la marche, c’est la faculté de marcher qui
l’abandonnera ». En conséquence cher frère imam regarde les victimes de
cet aveuglement, dont je fais partie, et exhorte-toi. Commence sans tarder à
faire de la marche ; fais-en une sorte d’activité très régulière et fais-toi suivre
par un médecin spécialisé – non par n’importe qui - . Méfie-toi du livre
intitulé : « Médecine et sagesse » attribué par Assayouté, et qui ne relève ni
de la médecine ni de la sagesse.
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La médication par Ar Roqia – incantations et récitation de versets du
Coran pour se préserver ou guérir de la maladie – est une pratique
conforme au droit en islam et ses effets bénéfiques sont connus, mais elle
ne remplace pas la médecine et le médecin et les associer donnera le
meilleur résultat.
Distrais-toi cher frère imam et mets ta famille à l’aise ; sors, respire l’air
pur, profites des espaces verts, des forêts, des lacs, des fleuves, des
montagnes, de la neige et des parcs des pays de l'Occident qui sont
vraiment d’une réelle beauté ! Gloire à Allah qui les a créés et leur a donné
cette splendeur. Eloigne-toi un peu de la pollution des grandes villes, de la
fumée des usines, des ondes des ordinateurs et des GSM, des poisons de
la TV, des pressions de l’exil, des soucis de la famille et de la compagnie
des lourdauds ! Délivre-toi de cet empâtement et de la paresse qui aura
raison de toi tôt ou tard, car la norme d’Allah – Exalté soit-Il – est
inexorable concernant la santé, la maladie, la force ou la faiblesse ...
Cette norme ne privilégie personne et a raison de toute résistance.
Suis régulièrement le régime alimentaire prescrit aussi strict soit-il. Ne
prends pas à la légère tes problèmes de santé et traite les loin des
recettes populaires et rappelle-toi que tu incarnes le modèle sur lequel
converge les regards et que tes moindres faits et gestes sont passés au
crible de la critique : le rôle assigné à l’imam est qu’il soit l’exemple à
suivre. ... (Hadith). Si tu n’accordes pas à ton corps les soins auxquels il a
droit tu seras suivi en cela par les gens du commun et tu en répondras alors
doublement.
Si tu es dans les conditions requises pour le mariage, cher jeune imam,
marie toi et appelle les enfants de tes vœux, car c’est là le moyen de
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préserver ta chasteté, de trouver la tranquillité d’esprit et de nombreux autres
bienfaits, en particulier dans ces contrées ! Mais si tu n’as pas encore réuni
les conditions du mariage, patiente dans la chasteté et Allah te comblera de
ses bienfaits, car Allah est généreux et omniscient. Ne rode pas autour des
interdits sinon tu tomberas dans leur filet, sachant qu’à notre époque tout le
monde navigue dans les milieux des plaisirs et de la luxure où l’attirance est
partout. Si tu ne fais pas attention et si tu cèdes sache qu’Allah est puissant
et sage. Préserve ton honneur mon fils car les regards convergent vers toi à
l’instar des gens qui sont en haut de l’affiche et qui prêchent la vertu et
combattent les vices. Ne te laisse pas trahir par ton regard car les regards
illicites privent le savant de son secret et lui ôtent son auréole et son
charisme – comme l’ont dit des gens très pieux. Invoquons Allah de nous
guérir de tels travers.
Gare à toi de vivre loin de ton épouse et de tes enfants sous prétexte de les
préserver contre la perdition et de les laisser baigner dans la bénédiction de
la terre de leurs ancêtres. Sache monsieur que la terre ne vénère ni
éduque personne, en particulier à l’époque de la mondialisation, de la
globalisation, de la privatisation, du sms, du Facebook, de Twitter, du
iPhone, de l’opium, etc. L’éducation des enfants, après l’assistance
d’Allah, ne peut être assurée que par les parents réunis sous le même
toit, conjuguant leurs efforts pour affronter les mêmes difficultés et
suivre la même ligne de conduite ... Par contre vivre des années, voire
des dizaines d’années en tant qu’émigré loin des siens, ne peut générer,
à notre avis, que des barrières psychologiques entre le père et le fils, en
plus de l’impossibilité de concilier entre les fonctions maternelles et
paternelles qu'exige notre époque, sans parler de la souffrance des
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époux eux-mêmes, privés de la vie en commun – avec les dangers que
cela entraine et que personne n’ignore.
Cher frère imam je veux, sans détour, te demander instamment, une fois
de plus, de ne pas vivre éloigné de ton épouse et de tes enfants pendant une
longue période- -sans nécessité impérative – sinon, crois-moi, tu n’auras pas
assez de ton cerveau pour résoudre ton problème et à plus forte raison ceux
des autres. Le tiers de ta vie sera perdu dans les communications
téléphoniques, les lettres postales et électroniques, les questionnements, les
réponses, les discussions inachevées, le ton tantôt tumultueux, tantôt agressif
! Et l’anxiété ou autre maladie psychique s’emparera de toi le jour de l’Aïd
au matin lorsque, voyant El Haj Untel s'en retournant chez lui, accompagné
de son épouse et de ses enfants, tout joyeux, alors que toi tu te retrouves seul
dans ta chambre, déplorant ton sort dans l’attente que quelqu'un ait la
générosité de venir te dire : Tu as passé une bonne nuit, sheikh ? Ou :
Rejoins-moi à la maison pour manger une soupe ou une grillade. Mais cette
grillade ne fera qu’attiser encore plus ta douleur et ton mal ! Cette ambiance
familiale chaleureuse fera émerger en toi l’épreuve de ton éloignement de tes
enfants. Tu te demanderas si tu ne t’es jamais marié et si tu as des enfants ou
si ta femme ne serait pas comme veuve dans ton pays et tes enfants des
orphelins et que c’est ton gendre qui en est le tuteur et qui pourvoit à leurs
besoins. Si El Haj dont tu es l’invité savait ta détresse il tenterait volontiers
de t’aider pour ton regroupement familial, s’il le pouvait, sinon il te
conduirait sans tarder à l’aéroport le plus proche afin de retrouver famille et
maison.
Sans verser dans un idéalisme utopique, je te dis, cher imam, que tu as
besoin plus que quiconque d’une bonne épouse, une femme qui te conseille,
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qui reste proche de toi, qui cicatrise tes blessures et soigne tes douleurs, et
qui te console par ces mots : « Non et non, Allah ne te désavouera jamais ! »
Chaque année que tu passeras sans une telle femme est une année très triste
malgré ton apparence trompeuse, le large sourire que tu afficheras quand tu
nous reçois ou nous raccompagnes ou encore malgré la blague fade que tu
nous débites et qui ne reflète rien de toi.
Je ne te dicte pas ici ce que tu dois faire concernant le résidanat ou le
retour au pays ‘ou ... cela ne regarde que toi et tu es le fqih et le maître de toi
même ; néanmoins je te recommande seulement le regroupement familial et
de veiller sur ta femme et tes enfants là où vous vivrez ... « Vous vous
rappellerez ce que je vous dis » (Sourate Ghafir).
Quant au sheikh qui a atteint la soixantaine, dont les os deviennent séniles
et dont les enfants ont grandi, son cas n’est pas si grave. Il peut résider là où
il veut, quand il veut à condition qu’il soit le sheikh qui ait toute sa maîtrise
et qui soit très pieux ! Il sera toutefois préférable qu’il n’ait pas un cheveu
noir à la tête et à la barbe ! Sinon il y a à craindre qu’il ne veuille épouser
une deuxième! Et tant pis pour l’Hajja, la mère des enfants restée au bled qui
n’a ni le statut de mariée ni celui de divorcée et qui ne garde du mariage que
les tristes souvenirs, les soupirs enfouis ou une terne copie de l’acte du
mariage au fond du coffret noir ! Avant toi un certain imam a essayé une
telle solution et il s’est trouvé si enlisé dans la boue qu’il s’est écrié : Où
avais-je la tête ? – Ainsi Allah accorde sa miséricorde à celui qui tire la
leçon des erreurs des autres et évite de les subir.
Par sagesse et par courtoisie, l’imam doit utiliser le langage des gens
auxquels il s’adresse – ce qui est déjà un signe de piété – Il doit éviter toute
affectation dans ses paroles et donc ni emphase ni grandiloquence ni poésie
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dans les sermons adressés aux gens du commun et à ceux ne parlant pas
l’arabe – Ils représentent la majorité dans les mosquées en Occident – sinon
ce serait comme profaner un bienfait d’Allah et bafouer le droit des fidèles.
Le bon sens et la sincérité doivent dicter au prédicateur de s’imposer un
arabe simplifié ou le dialectal ou l’amazigh ou une langue dérivant du latin
selon les circonstances car le but du sermon selon le droit islamique, c’est
d’avoir un discours compréhensible, en clarifiant ses propos peu importe la
langue utilisée5. Un discours en arabe littéraire peut s'avérer parfois vain et
ne présenter que des paroles en l’air et tout abus dans le langage ressemble à
des actes insensés. Mais quand tu es avec des universitaires comme toi et des
académiciens (cher imam), tu pourras alors donner libre cours aux
discussions les plus approfondies, car nos besoins sont énormes en termes de
conception, d’innovation, de recherches approfondies et des gens qui
manient la langue avec la plus grande rigueur.
Il n’y a pas de doute que l’aptitude à simplifier et à clarifier de manière à
parvenir à éduquer les gens au moyen des notions de base avec un souci de
progression, est une grande qualité dont n’use que celui qui en a reçu la
permission du Tout-Miséricordieux. Les expressions et les paraboles de
celui-là sont alors parfaitement comprises par tous ceux qui les entendent – a
5
Je regrette sincèrement mon manque de maîtrise de la langue Amazigh malgré mon
amour pour sa communauté et mes relations avec elle – liens familiaux et voisinage. De
même que je souffre de n'avoir pas pris l’habitude de m’exprimer couramment en
français dès mon enfance malgré que j’en aie une connaissance générale (lecture et
écriture). J’invite donc instamment les doués dans les langues et les dialectes de faire
œuvre utile du don dont Allah les a gratifiés et ce pour leur amour d’Allah, car le jour où
l’expression ne subsistera plus et que nul ne saura parler sauf celui à qui le ToutMiséricordieux aura accordé la permission et qui dira la vérité (Sourate la Nouvelle), ce
jour-là ces personnes seront interrogées car elles devront avoir mis leurs dons au service
des autres ?
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dit Ibnou Ata Allah Askandari (Qu’Allah l’ait dans sa miséricorde). Fasse
Allah le Généreux que nous soyons de ceux à qui IL accorde ce don et leur
en permet l’usage.
Prononce cher imam ce qui sera utile aux gens et qui demeure sur la terre.
Evite tout style affecté et ne philosophe pas. Ne t’inquiète pas si tes
confrères te taxent de manque de correction linguistique, de peu d’éloquence
et de science. Ces personnes devraient cesser de tels propos qui ne peuvent
leur être dictés que par satan : « Ceux qui pratiquent la piété, lorsqu’une
suggestion du diable les touche, ils se rappellent (le châtiment d’Allah) et les
voilà devenus clairvoyants » (Sourate Al Araf / verset 201).
Je témoigne ici d’après ce que j’ai pu constater, que la plupart des
musulmans en Occident apprécient bien les imams qui parlent les
langues d’ici ou l’amazigh ou l’arabe dialectale. Ils se plaignent de ceux
qui compliquent les choses et ne se mettent pas à leur niveau.
Donc cher frère, fait l’effort dans tes sermons, dans tes conférences et tes
exhortations d’expliquer les choses le plus simplement possible ; ne perds
pas de vue que tu officies dans les mosquées de l'Occident qui sont
fréquentées en majorité par des ouvriers, des commerçants et par des
générations qui parlent les langues d’origine latine.
Si tu es purement arabisant ou comme moi à cheval sur l’arabe et le
français, fais-toi assister par un interprète fidèle, qui transmet tes paroles et
tes propos. Quant à la transmission de l’émotion imprégnant ton discours, le
chemin est long : Nous sommes au pays de Molière et de Shakespeare, loin
des contrées d’Ibnou Katir et de Bnou Jérir.
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Il n’est non plus ni sage ni courtois que l’imam s’engage avec des hommes
du commun dans des détails complexes du droit islamique même avec
l’intention de les traiter simplement et avec des exemples. Parmi de tels
sujets on peut citer : les versets abrogatifs et ceux abrogés, les différentes
lectures et interprétations du Coran ; la multiplicité des doctrines et des
sectes ; la logique et la sémantique ainsi que d’autres problématiques que le
commun des hommes ne peut comprendre et discuter même s’il en fait
semblant pour garder la face, car il existe dans le droit islamique des cas et
des particularités si subtiles et si complexes qu’il n’est pas donné à tout le
monde de les saisir.
On ne finit pas de s’étonner en constatant que certains de nos professeurs
universitaires – Qu’Allah nous fasse profiter de leur science – qui
s’adressent aux gens du commun dans les mosquées, le font sur un ton
professoral tout comme s’ils se trouvaient dans l'amphithéâtre de leur
université ou en conférence dans des cercles traitant de la sagesse. S’ils
pouvaient se concerter avec le serviteur que je suis je leur dirais sous
serment, en prenant Allah à témoin, que la majorité des gens qui sont en face
n'écoutent et ne comprennent que ce qui les motivent et suscite leur
curiosité, que leur but est de bénéficier de la baraka recueillie par les prières
sur le prophète (PbAsl) et celle qu’Allah accorde à ceux qui restent à la
mosquée attendant la prochaine prière prescrite.
J’ai écouté une fois un de nos éminents professeurs et j’ai apprécié sa
conférence qui était d’une profonde portée. A la fin de la conférence j’ai lu
de la déception sur le visage des gens ordinaires – et ils étaient majoritaires
dans la mosquée –, et l’un d’eux m’a dit avec ironie : Je vous félicite pour
cette conférence dont le bénéfice vous était exclusivement destiné. Ces
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sheikhs sont venus parait-il, spécialement pour vous autres, les imams ... et
tout le profit était pour vous, Quant à nous autres les illettrés, cela ne nous a
rien dit et nous a même nui, car ces paroles ont créé en nous le doute et la
zizanie. Ces propos m’ont gâché le délicieux plaisir que j’avais gardé de la
conférence. Ils m’ont attristé, fait mal et m’ont rappelé le hadith du prophète
(PbAsl) : « L’on n’est véritablement croyant que si l’on désire pour son frère
ce l’on désire pour soi-même ».
Il est également sage et courtois que l’imam fasse bonne figure envers tous
les croyants, qu’il leur témoigne de sa sympathie pour tout le monde et qu’il
ne prenne parti ni pour une race ni pour une couleur ni pour une tribu ni pour
une langue. Il ne doit favoriser ni secte, ni parti politique, ni proche, ni
gendre, car l’imam est à la fois le frère, le père et le médecin de tous. Voilà
ce que doit être le comportement de l’imam qui a reçu cette mission en
héritage et voilà ce qui a été de tout temps et partout son destin. Le prophète
(PbAsl) regardait en face la personne qui lui était hostile quand il lui parlait
afin de gagner sa confiance (Hadith authentique rapporté par Attabarani
d’après une chaîne crédible de garants), quel devait être alors le degré de la
qualité de son accueil quand il s’agissait d’une personne de noble lignée ou
de celle qui s’approchait craintivement de lui.
Nul doute que la persévérance dans la justice est plus aisée que la
persévérance dans la douleur qui suit l’injustice. Veille donc sur la justice et
Allah veillera sur toi. Mon sort et le tien cher frère imam est d’être une
nation en un homme tout en restant un homme dans une nation, de nous
acquitter de notre devoir et en réclamer notre rétribution à Allah, notre
soutien. Soyons intransigeants messieurs en ce qui concerne la justice et
l’équité si nous voulons être de ces imams qui feront partie des sept
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catégories de gens qu’Allah a promis de protéger de son ombre le jour où il
n’y aura nulle autre ombre que la sienne (Hadith).
Méfions-nous de toute partialité ; c’est assurément l’une des causes de la
discordance et de la mésentente dans les mosquées de l’Occident. Le constat
est la meilleure des preuves. Il y a des imams nobles et de vertueux
récitateurs du Coran que les gens ont boudés et désertés et ce pour un seul
motif, à savoir : Ces imams s’affichent trop avec une personnalité riche, un
ami intime, un bon voisin ou une personne généreuse et serviable ... Les
gens regardent, jasent, interprètent et médisent. Il s’agit donc d’être
raisonnable, de prévoir les conséquences, de faire preuve de réserve et de
résister à ses penchants et ses fantaisies – Et Allah accorde son pardon à
quiconque se repent.
Il est également sage et courtois de la part de l’imam de se montrer jovial
et enjoué avec les gens et de savoir les distraire pour éviter la monotonie et
l’ennui et ce surtout en présence d’autres imams et de savants qui le
respectent. Il a été rapporté dans l’ouvrage Sahih Mouslim, que les
compagnons du prophète (PbAsl) bavardaient pendant qu’il était assis parmi
eux et riaient quand ils évoquaient des choses relevant de la période
antéislamique et Il en souriait (PbAsl). Et le meilleur exemple de
comportement est celui du prophète de la miséricorde (PbAsl).
La meilleure chose que les fidèles attendent de leur imam en Occident,
c’est un sourire plein d’enseignements, un geste affectueux et une
question sur leur santé ; cela est facile mais encore faut-il qu’Allah vous
l'inspire. C’est ce que nous avons perçu depuis de nombreuses années, c’est
la clé des cœurs et le secret pour se faire adopter. C’est pour ce genre de
détails que l’imam est soit évacué soit nommé et maintenu avec sollicitude
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dans les mosquées en Europe, le pays du fromage du lait et du dépaysement.
N’est-ce pas qu’ici les demeures d’Allah sont à la fois : la clinique
psychologique, l’institution familiale et le paradis terrestre ? Vers qui d’autre
pourrait se diriger celui dont le cœur est blessé ou l’ouvrier soucieux, si ce
n’est vers toi ô imam ? Qui d’autre que toi, imam, panserait les blessures,
conforterait les âmes, apporterait de la joie ? C’est toi le père, le pieux, celui
qui porte les paroles d’Allah qui guérissent ... « N’est ce point par
l’évocation d’Allah que les cœurs se tranquillisent ? » (Sourate le Tonnerre /
verset 28).
Quand tu es invité à la maison chez quelqu'un ou quelque part à l’occasion
d’un évènement, ne prive pas les gens présents de la lecture du Coran, de ses
bénédictions de ses lumières ; c’est l’hymne de la foi. Dans le petit mot
d’usage pour les exhortations que tu seras amené à prononcer, tu veilleras
qu’il soit léger, doux, spontané. S’il se trouve parmi les gens un enfant, un
homme âgé, un handicapé ou une personne anxieuse, il faut lui prêter
attention, lui réserver une caresse affectueuse, un regard compatissant, une
invocation sincère. Ne sois pas bourru, dur de cœur, le front plissé, sensible,
ne pensant qu’à manger, à boire et à partir ? C’est incroyable mes frères que
des gens aient le cœur si dur ! On dirait que leur cœur est taillé dans du roc!
Rappelle-toi que chaque thème requiert ses spécialistes et que le thème doit
être en harmonie avec la circonstance et l’évènement : C’est ainsi que les
versets du Coran, les hadiths, les poèmes et l’expression du visage doivent
aller de pair avec la joie ou le deuil selon le cas. C’est cela la sagesse. Fasse
Allah que nous en soyons tous dotés ! Comment te permettrais- tu ô imam
de baigner dans l’humour et les anecdotes, alors que l’événement est un
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deuil, que la famille est attristée, que le défunt est dans son cercueil. C’est
tout simplement répugnant et inhumain.
C’est malheureusement un fait que j’ai constaté en Europe et dont j’ai
énormément souffert, et j'espère n’avoir plus à le revivre. J’ai écouté un
imam, qui m’était aussi cher que toi, à l’occasion d’un mariage : Il débitait
hadith après hadith dans son allocution, sur les affres de l’enfer et la colère
du Tout-Puissant ! Je ne tenais plus en place, comme lardé de dards ; les
gens étaient consternés et l’offensive ne prit fin que lorsque la table fut
dressée ! J’ai aussi, hélas, écouté un autre imam parler niaisement de la
foudre du divorce et ce en pleine cérémonie d’un mariage : la mariée était
prête, les bouquets de fleurs trônaient partout et les youyous des femmes
remplissaient les oreilles. Je me suis alors dit : Quel est ce fléau qui nous
frappe ? Comment est-ce possible ? Qui sommes-nous ? Ce ne sont pas les
connaissances qui nous manquent et notre look est au top ! Mais où est donc
la sagesse, le goût l’intelligence et le discernement ? Nous sommes
messieurs, véritablement, aux antipodes de la sagesse ?
C’est aussi faire preuve de sagesse et de maturité que l’imam n’affiche pas
une trop grande ouverture ni de donner libre cours à ses blagues. Cela lui
fera perdre son charisme, amoindrira son attractivité et pourrait même lui
entraîner les conséquences les plus imprévisibles ! N’accorde aucun crédit à
leur dicton qui dit : Jouer avec les jeunes c’est leur enseigner le Livre. –
Nous ne sommes pas contre les jeux tant qu’ils sont licites –, car le jeu a
exténué des nations et allumé des guerres ! Et surtout quand il s’agit d’un
imam enturbanné et d’un savant respecté qui concurrence pour la coupe du
village ou de la ville, ceux dont il préside les prières. Il les tacle sous les
applaudissements du publique, les cris des enfants et les coups de sifflet de
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l’arbitre ... et la suite est évidente ! Je me rappelle avec tristesse ces
souvenirs dont j’ai vécu les péripéties et vu les conséquences. J’aurais voulu
n’y avoir jamais assisté !
Après une telle ouverture notre imam pourra- t-il conserver sa
considération et compter sur ses supporters ou sera-t-il piétiné et tiré dehors
comme un ballon?
Certes l’ouverture est louable ; elle est préconisée par l’enseignement du
prophète (PbAsl) et ce bien avant les théories pédagogiques. Toutefois si elle
devient démesurée, le résultat sera contraire à celui escompté ainsi que
prouvé chaque fois par l’expérience et c’est la pratique sur le terrain qui
nous a enseigné qu’il est indispensable qu’il y ait de la retenue et du respect
entre l’enseignant et le disciple, entre l’imam et les fidèles, entre
gouvernants et gouvernés sinon il n’y a plus ni crainte révérencielle ni
décence : Les hommes se corrompront et les générations se dissoudront. Il y
a déjà longtemps que Al imam Al Awzàri a dit : « Auparavant nous riions à
gorge déployée et quand nous sommes devenus l’exemple que suivent les
gens, nous craignions même de pouvoir sourire ». Quand le grand imam de
son époque, Allaïth Bnou Massaoud – Qu’Allah l’ait dans sa miséricorde –
voulut mettre une tenue inhabituelle, l’imam de Médine Yahya Bnou Saeed
lui dit : « N’en fais rien car tu es un imam vers qui convergent les regards ».
Oui, cher imam, tu es effectivement regardé par tous et tu représentes le
modèle à suivre, c’est pourquoi tu dois être irréprochable dans ton maintien
quand tu es en société mais libre à toi de prendre tes aises quand tu es seul
ou en compagnie de tes égaux. Le champ est libre et le Seigneur est clément
! Oui, là tu peux t’allonger sur le dos, galoper, te défouler, dire des poèmes,
parler des informations, t’habiller à ton goût tout en restant décent et
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raisonnable. Mais sois sérieux et digne quand tu es au milieu des gens de ta
mosquée si tu tiens à rester sain et sauf ! Ceci car l’homme du commun est
habituellement idéaliste : Il est offusqué par le moindre écart et se trouble en
cas d’équivoque. Pour lui la religion c’est l’imam et si l’imam tombe c’est
toute la religion qui s’effondre !
Ne vois-tu pas que la communauté musulmane en général, vit encore au
stade des personnes et qu’elle n’est pas encore passée au stade des idées ?
Ainsi que formulé par le grand penseur Malik Bnou Naby – Qu’Allah l’ait
dans sa miséricorde –.
La sagesse et le tact de l'imam se reflètent aussi dans son habileté à créer
le climat qui instaure la concorde entre les gens dans la mosquée, dans le
quartier, dans la ville. Telle a été la stratégie du sage imam Soufiane
Atthawri – Qu’Allah l’ait dans sa miséricorde – C’est ainsi que quand il
rentrait dans la ville de Bassorah il axait ses discours sur les vertus et les
exploits de Ali et quand il rentrait dans la ville de Koufah, il les axait sur les
vertus et les exploits de Othmann. Il était pieux, modéré, perspicace et
s’ingéniait à trouver la voie de faire régner la concordance entre les gens. Il
n’avait de cesse d’aplanir l’esprit de clan et de discorde qui pouvait surgir
dans les rangs des fidèles et sa seule motivation était de se rapprocher
d’Allah : « Quand on est vertueux on l’est là où l’on se trouve tout comme le
soleil qui reste le soleil qu’il se lève ou qu’il se couche » selon l’expression
du imam Ibnou Badiss – Qu’Allah l’ait dans sa miséricorde –.
Sois donc, cher monsieur, ce grand vertueux qui défriche les chardons et
dépollue l’environnement quel que soit ton état d’âme, convaincu que tu
œuvres par respect de la volonté d’Allah, non de ton seul gré. C’est à Allah
que nous devons le succès quand nous réussissons. Sois cher monsieur à
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l’image de la pluie qui, là où elle tombe apporte les bienfaits. Apporte la
bénédiction là où tu te trouves à l’image du prophète et verbe d’Allah Jésus
(Paix sur Lui) dont la bénédiction rayonnait partout ... Sois à l’image de
l’abeille qui ne mange que du bon, ne produit que du bon et qui ne casse
point la branche sèche sur laquelle elle se pose (Hadith).
Sois le trait d’union non de désunion et sois l'apôtre de la clémence non
celui de la vindicte, car les différends dans les mosquées de l’Occident
prolifèrent de façon prodigieuse et l’heureux parmi nous est celui qui fait
dévier la zizanie Hadith). Garde toi bien de ne jamais jeter de l’huile sur le
feu, car un mot de toi compte pour mille et une graine prend la proportion
d’un dôme ! Et tu sais que le commun des gens n’a pas cette aptitude
d’analyse pour faire la part des choses. « ... cependant Allah enregistre ce
qu’ils fomentent la nuit » (Sourate Annissaa / verset 81). Si le mal t’envahit
et que tu n’en peux plus, réfugie-toi en toi-même, eclipse-toi des lieux du
désordre, qu’il soit déclaré ou latent en toute habileté et douceur et ne me
choque pas encore une fois en me disant : Divise pour régner. Cette devise
appartient aux machiavélistes, aux arrivistes et aux profiteurs, non aux gens
pieux et aux imams dignes de ce nom.
La sagesse et le succès de l’imam s’expriment aussi dans son aptitude à
tisser les liens et à établir la communication entre les mosquées et la société
occidentale dans toutes ses composantes. Il faut aussi étayer ses liens par des
arguments et des fatwas bien fondés issus du droit islamique afin d’en faire
une source de référence en cas de besoin. Le défaut de tels liens et le
manque de dialogue nuiront tôt ou tard à l’Islam et aux musulmans en
Occident et les médias ne seraient point blâmables s’ils taxaient l’Islam et
ses adeptes de chauvinisme, de renfermement et de tous les attributs et
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quolibets qui les satisfont. Nous serions fautifs pour n’avoir rien entrepris
pour mettre la lumière sur nous-mêmes, notre identité, la voie que nous
suivons, nos moyens et nos objectifs. Il est vrai aussi que nous ne tendons
pas la main aux autres : « Personne ne regarde avec compassion du côté de
celui qui se résigne dans le préjudice », règle bien connue dans le droit
jurisprudentiel.
La sagesse et le tact de l’imam interviennent aussi dans l'aptitude à trouver
cet équilibre entre la solitude et la fréquentation. La solitude permet au mal
de se répandre n’étant pas visible pour être combattu. De même, la
fréquentation excessive des gens aboutit à banaliser la relation entre l’imam
et les fidèles, épuise ses forces spirituelles et ses ressources en connaissances
théologiques. Il y a aussi le risque que la tendance s’inverse entre l’imam et
les fidèles qui, d’influencés et d’admirateurs deviennent des critiques
virulents et la source de la plupart de ses ennuis. C’est la réalité de la
majorité des imams qui vont trop loin dans ce genre de mixité avec des
proches, des mourides et des immodérés dans l’amour et dans la rancœur.
Un joli dicton sur la sagesse dit : « Les personnes qui jouissent de la plus
haute considération des gens sont celles dont on cite le nom mais que l’on ne
voit pas ». De son côté le docteur Abdelkrim Bakkar a dit dans l’un de ses
articles : Il est certain que s’isoler des gens de temps à autre permet à l’âme
de se fourbir et l’on est probablement plus efficace à leur service que
lorsqu’on est parmi eux ; il est à remarquer que les gens, en cas d’anxiété ou
de crise, se tournent vers ces personnes réservées pour solliciter avis,
affection et soutien.
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RECOMMANDATION
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:
L’ APPARENCE
ET
LA
FORC E
DE
CARACTERE
Par apparence nous visons la meilleure, celle qui englobe la bonté et la
beauté soit les côtés invisibles et visibles. L’imam, parce qu’il incarne le
modèle à suivre, ne doit pas être frivole, dissipé ou manquant de dignité. Il
ne doit pas être excessif dans ses mouvements et ses gestes ni rire aux éclats
et chahuter. Il ne doit pas couper la parole aux gens dans les réunions ni
vouloir rivaliser avec les adolescents et les enfants dans des futilités. Il doit
éviter de s’immiscer dans des sujets qui ne le regardent pas, ou se mêler dans
certains détails administratifs qu’ils ne maîtrisent pas que d’autres sont
chargés d’assurer. Toute indiscrétion de sa part lui fera perdre son respect et
l'exposera aux critiques.
Commis par des personnes ordinaires, ces gestes et ces comportement ne
choqueraient pas n’étant ni illicites ni répréhensibles, mais venant d’un
imam qui est censé être l’exemple à suivre, ils seront préjudiciables à sa
mission et les gens renonceraient à ses cours ne le voyant pas à la hauteur de
ses responsabilités. C’est probablement à cela que fait allusion celui qui a dit
: Les bonnes œuvres des bonnes personnes suscitent l’animosité de celles qui
leur sont le plus proches. C’est ainsi que les gens n’acceptent pas, par
exemple, d’être dirigés dans leurs prières ou exhortés par un imam qui ne
fait pas preuve de réserve dans son langage et à table et qui n’a pas la force
de caractère pour se départir des mauvaises habitudes profondément ancrées
telles :
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- les longues heures passées dans les cafés et les jardins publics
- manger dans la rue (hors voyage ni nécessité)
- la passion démesurée vouée au football et aux footballeurs
- les rires aux éclats
- la mastication du schwin gomme en public
- manger avec avidité et roter de façon répugnante
- bâiller fréquemment
- expectorer en présence des gens et cracher par terre
- conduire la voiture n’importe comment
- enfourcher des vélos ou s’embarquer sur des engins trop voyants
- le port de lunettes, de casquettes ou de portables réservés aux adolescents
- présider la prière sans la tenue de rigueur
- se laisser trop pousser les cheveux, se les maintenir lâchés ou se faire
coiffer bizarrement
- porter des vêtements étroits ou transparents ou portant des décorations ou
dont la forme ne cadre pas avec les us et coutumes du milieu, sachant que
ceux-ci varient selon l’époque et le lieu.
Tous ces comportements et ceux qui leur sont similaires, même si au fond
ils sont admis, peuvent ne pas être souhaitables de la part d’un imam et être
préjudiciables à sa mission. Il peut même être opportun de s’écarter de
certaines pratiques pourtant licites et ce en fonction des circonstances et des
conséquences prévisibles et ce conformément à l’avis des jurisconsultes.
Mais ne perçoit l’utilité de cette option et n’en comprend l’opportunité que
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le savant qui connaît Allah, croit sans le moindre doute à l’invisible, qui a
rompu définitivement avec ses caprices et voué sa vie à la science et à
l’enseignement. Combien compte-t-on en Occident de telles personnes, voire
même dans toute la Umma ? Allah l’a bien souligné en disant : « Mais ce
privilège n’est donné qu’à ceux qui endurent et il n’est donné qu’au
possesseur d’une grâce infinie » (Sourate Foussèlate – les versets détaillés –
/ verset 35). Et qu’Allah ait dans sa miséricorde Ibnou Al Arabi Al Maliki,
imam et cadi, dont la tombe se trouve à Fès et qui a dit déjà à son époque :
« S’il postule aujourd’hui pour les fonctions d’imam, autre que quelqu’un de
de juste, il y a lieu de s’attendre à ce que soient détruits des couvents, des
synagogues, des églises et des mosquées, lieux de cultes où l’on invoque le
nom d’Allah ».
ESPOIR ET APPEL :
Combien il aurait été souhaitable que les établissements de formation des
imams (en Occident) quoique très rares, adoptent un programme alliant
l’étude et la pratique au lieu d’être axé sur la théorie et les connaissances
livresques qui s’avèrent insuffisantes sur le terrain ainsi que nous l’avons
constaté. Ci-après quelques propositions :
- Que l’étudiant, au cours de sa dernière année, effectue un stage sur le
terrain de trois mois minimum, au cours duquel il sera confié à un imam
qualifié et consciencieux afin d’acquérir par l’exercice l’art de la fonction,
la manière de prononcer le sermon du vendredi les qualités du savant pieux
qui éduque ... Stage indispensable, à l’instar de ce qui se fait pour accéder
aux fonctions et aux métiers et dont l’importance est indiscutable. A l’issue
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de cette période, une évaluation objective déterminera si le stagiaire est
valable pour les fonctions d’imam ou s’il sera meilleur ailleurs.
- Par surcroît de précaution un imam ne devra être affecté dans une mosquée
ou un institut qu’après une enquête approfondie et circonstanciée auprès
des gens avec lesquels il entretient des relations d’affaires et après avoir
recueilli le maximum de témoignage surtout ceux de ses parents, de ses
maîtres, des proches et des voisins. Il est hors de question de se fier à son
auto caution morale ; celle qu’il donne en se déplaçant de mosquée en
mosquée répétant qu’il est imam en quête d’emploi, qu’il mémorise tout le
Coran, que les gens peuvent lui confier les enfants pour l’apprentissage du
Coran et de l’arabe. Ce serait une espèce d’aventure dont l'échec serait le
plus probable. Invoquons Allah afin qu’Il nous réserve tous une fin
heureuse, qu’Il nous préserve de contracter des dettes, de causer du tort aux
autres ou de le subir.
En résumé, la fonction de l’imam est une mission d’importance
considérable pour laquelle Allah choisit les meilleurs de ses serviteurs. Le
seul moyen pour quiconque aspire à devenir le guide des gens qui craignent
Allah et d’être le plus clément pour tous, est d’invoquer Allah, le cœur plein
d’espoir, de concrétiser son vœu : Et fais que nous soyons imams des gens
qui Te craignent (Coran).
Nous sommes sincèrement persuadés que l’imam de l'avenir sera un
homme pieux, porteur d’un message, modéré, sérieux, assidu. C’est sur lui
que reposera l’espoir de l’éducation des générations pour une pratique saine
de la religion : Sans laxisme ni abus ; sans extrémisme ni anarchisme. C’est
cela brièvement l’imamat que nous recherchons à travers ces lignes et c’est
cet imam là que nous appelons de nos vœux pour les pays de l’Occident.
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C’est la denrée rare et qui fait malheureusement défaut aujourd’hui dans la
plupart des mosquées et des instituts en Occident.
Voilà l’imam idéal : Il prêche la sécurité dans sa société et n’attire pas le
déshonneur sur l’Oumma, sur son pays, son histoire et sa civilisation. Voilà
ce que doit être l’imam, de l’avis d’un imam expérimenté qui a la véritable
crédibilité pour représenter l’Islam dans les pays occidentaux et les sociétés
laïques et la crédibilité est tout pour un imam, comme chacun sait. Elle est à
la fois son capital, son harnais, ses vivres, son arme, la condition de sa survie
et le secret de sa réussite ... Il n’est pas de l’intérêt de l’Orient et de
l’Occident ni du gouverneur et du gouverné que l’imam perde cette
crédibilité sous quelque prétexte ou paravent que ce soit et ce de l’avis
de nombreux européens qui étudient la question : Les conséquences et
les effets désastreux finiront par se répercuter préjudicieusement sur
l’humanité entière – et non sur les seuls musulmans – et ce serait alors
la porte grande ouverte au désordre, à l’anarchie, au pullulement de
groupes égarés et de fatwas aberrantes. Le docteur marocain Mostapha
Ben Hamza a dit avec raison : « Le désœuvrement amène toutes les
surprises ». La fatwa est soit l’œuvre bien fondée d’un imam versé dans le
les sciences religieuses soit improvisée par un ignorant rancunier. Le savant
imam est soit au poste de commande soit il est commandé ; s’il n’a pas les
rênes en mains pour guider la masse c’est elle qui le mènera, il n’y a pas
d’autre alternative.
Joignez-vous à nous, messieurs pour pleurer ensemble la réalité de
l’imamat en Occident ! Des milliers de lieux de prière et de mosquées
souffrent du manque d’imam digne de sa mission, pieux et modéré.
Adressons nous tous à Allah avec recueillement et les larmes aux yeux, dans
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ces termes : Ö Allah compense nous de cette adversité et remplace la pour
nous par une meilleure.
CONCLUSION (Q U ’A LLAH
CONCLUE NOTRE V IE A TOUS PAR TOUT
CE QU ’ IL Y A DE MIEUX ).
Notre but derrière ces mots n’était nullement de cerner complètement ce
sujet, car est une entreprise des plus épineuses qui nécessite aptitudes et
moyens. L’objectif était de donner simplement un aperçu sur la situation et
coopérer de cette manière à l’améliorer dans le sens de : Il faut arracher le
maximum de ce que l’on ne peut obtenir entièrement. Nous avons tâté le
sujet pour répondre au vœu des amis ; si nous avons réussi c’est grâce à
Allah et si nous avons failli ou trop abusé nous en demandons pardon à
Allah notre Seigneur et nous nous en excusons auprès de nos frères et nos
maîtres.
Allah sait que si ce n’était la demande des amis et des proches et aussi la
pitié qu’inspirent les jeunes imams, je n’aurais jamais abordé ce sujet et n’y
aurais écrit la moindre ligne car votre ami détient en défauts et en péchés le
lot qui lui suffit. Le croyant recherche les moindres excuses pour pardonner
pendant que l'hypocrite scrute et poursuit les défauts selon les termes des
éminents alèms AL Barnoussi et sheikh Zarrouq Al Fassi (Qu’Allah l’ait
dans sa miséricorde) dans l’ouvrage intitulé : L’équipement du Mouride
J’attends de votre part messieurs, avec une sincère impatience, vos
remarques et vos rectificatifs pour un débat enrichissant qui libérera la
conscience et apportera le soulagement. C’est grâce à vous que nous
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évoluons. Allez donc messieurs, à vos crayons et au nom de votre Maître Le
Plus Noble et paix sur les justes après les Messagers et louanges à Allah Le
Maître de l’Univers.