12.VACCINATION DES PROFESS
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12.VACCINATION DES PROFESS
PRÉVENTION Vaccination des professionnels de santé contre l’hépatite B PARTIE 3 LES ACCIDENTS D’EXPOSITION AU SANG J.-F. Gehanno Médecin des hôpitaux - Service de médecine du travail et des pathologies professionnelles - CHU Rouen Résumé. En France, dès 1982, une circulaire a recom- The hepatitis B vaccination for healthcare workers mandé la vaccination contre l’hépatite B chez le personnel de santé. Cette recommandation a été transformée en obligation pour les professionnels de santé des établissements ou organismes publics ou privés de prévention ou de soins « exerçant une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination » par la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991. Ainsi, le chef d'établissement est tenu de mettre à disposition les moyens nécessaires à leur immunisation et de s'assurer du respect de cette obligation vaccinale. Si le vaccin contre le VHB a prouvé son efficacité, il existe néanmoins, au plan individuel, des sujets faiblement voire non répondeurs. Les sujets habituellement considérés « bons répondeurs » sont ceux qui développent un taux d’anticorps supérieur à 10 UI/l. Les sujets faiblement répondeurs (entre 1 et 9 UI/l) semblent protégés vis-àvis de l’hépatite B, au moins de formes symptomatiques et un rappel peut être proposé avec un contrôle sérologique 1 mois après. Les sujets « non répondeurs », ne développant pas d’anticorps après la troisième injection, semblent avoir le même risque de contracter une hépatite B, aiguë ou chronique, que les sujets non vaccinés. Bien que l'incidence de l’hépatite B semble diminuer dans la population générale, l'attention vis-à-vis de ce risque ne doit pas faiblir et la vaccination doit être largement promue chez les professionnels de santé et une conduite à tenir pour les non-répondeurs étudiée en fonction des risques encourus. Abstract. In 1982, in France, a circular recommended that healthcare workers should be vaccinated against hepatitis B. The law n°91-73 of 18th January 1991 made this recommendation compulsory for the staff of public or private healthcare and prevention facilities who “carry out an occupational activity with an exposure to contamination risks”. This means that the manager of the facility has to make sure that the staff have the means to be vaccinated and make sure that the vaccination is carried out. The hepatitis B vaccination has been proved to be efficient, only some persons respond poorly or not at all. The persons that respond well are those who develop an antibody rate over 10 UI/1. The persons that respond poorly (between 1 and 9 UI/1) seem to be protected against hepatitis B, at least against the symptomatic forms, and a booster and a screening can be proposed a month later. The persons that do not respond do not produce antibodies after the third injection and they seem to have the same risk of contracting acute or chronic hepatitis B as those who have not been vaccinated. Even if hepatitis B incidence seems to be going down globally, the attention must not be slackened, the vaccination must be encouraged for all healthcare workers and the way to deal with persons who do not respond must be studied according to the risks undertaken. Mots-clés: Hépatite B – Vaccination – Personnel de santé – Key-Words: Hepatitis B – Vaccination – Healthcare Wor- Législation – Calendrier Vaccination – Ligne Directrice. kers – Legislation – Immunization Schedule - Guidelines. 'HÉPATITE B EST, SELON L'OMS, une des plus importantes pathologies de l'espèce humaine et représente un sérieux problème de santé publique dans le monde. Sur les deux milliards d'individus qui ont été infectés par le virus de l'hépatite B (VHB), près de 400 millions sont atteints d'une infection chronique. Ce nombre serait de l’ordre de 100 000 en France et l'Ins- L HYGIENES - 2003 - VOLUME XI - N°2 Dr Jean-François Gehanno CHU Charles Nicole 1 rue Germont F- 76031 Rouen cedex titut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), évalue à près de 1 000 le nombre des personnes qui meurent chaque année en France des complications d'une hépatite chronique à virus B. En effet, dans les pays développés, on estime qu’environ 10 % des porteurs chroniques du VHB évoluent vers la cirrhose et il a été démontré que ces por1 VACCINATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ CONTRE L’HÉPATITE B teurs chroniques avaient un risque accru de développer un carcinome hépato-cellulaire, de l’ordre de 40 à 100 fois plus important que celui d'individus non infectés. Nécessité de vacciner les soignants Historiquement, l’infection par le virus de l’hépatite a été reconnue dès les années 50 comme un risque professionnel pour les personnels de soins, à la suite de la survenue de cas groupés d’hépatites après accident exposant au sang (AES) à partir d’un patient source porteur du virus (24). Il fallut néanmoins attendre les travaux de BARUCH BLUMBERG et l’identification en 1966 de l’antigène HBs, pour voir se développer des études séro-épidémiologiques. Elles confirmèrent le risque élevé d’infection des professionnels de santé (médecins et dentistes) par le VHB, évalué entre trois et cinq fois supérieur à celui de la population générale. Dans les années 70, près d’un soignant sur cinq apparaissait porteur d’anticorps anti-HBs (5). Le CDC (Centers for Disease Control) estimait alors que 100 à 200 soignants américains mourraient chaque année des conséquences d’une infection chronique par le VHB. Dans le même temps, des cas d’infection soignant-soigné par le VHB étaient rapportés (11) et des mesures pour limiter le risque de contamination des soignants apparaissaient alors indispensables. Parmi les mesures de prévention, celles concernant le risque d’exposition au sang des patients porteurs chroniques du VHB furent les premières envisagées avec la publication par le CDC dès 1970 du manuel Isolation Techniques for Use in Hospitals, contenant un chapitre « Blood precautions ». Dans le même temps, les premiers essais chez l’homme d’un vaccin d’origine plasmatique, en particulier en France (16), aboutirent à la mise sur le marché de ce vaccin dès 1981, en France comme aux États- Unis. La recherche d’une alternative à l’origine plasmatique, initiée dans le milieu des années 70, aboutit à la mise sur le marché de vaccins recombinants en 1988 en France. Les vaccins actuels, produits par génie génétique, sont constitués d'antigènes de surface du VHB (protéine S +/- protéines pré-S2). Dès 1982, une circulaire de la Direction Générale de la Santé recommande la vaccination chez le personnel de santé. Cette recommandation est transformée en obligation vaccinale pour les professionnels de santé des établissements ou organismes publics ou privés de prévention ou de soins « exerçant une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination » par la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991. Le schéma vaccinal en quatre injections (trois injections à un mois d'intervalle, la quatrième un an après la première) est resté préconisé en milieu professionnel jusqu'en 1999 (Avis du Conseil Supérieur d'Hygiène Publique de France (CSHPF) du 16 avril 1999), où un schéma vaccinal unique en trois injections, du type 01-6 a été adopté, sauf en cas de besoin d'une immunisation rapide. En France, le chef d'établissement est tenu de mettre à la disposition des personnels exposés professionnellement les moyens nécessaires à leur immunisation. Il a la responsabilité de s'assurer du respect de cette obligation vaccinale, y compris pour les médecins (chirurgiens) et personnels médicaux temporaires. L'article R. 242-16 du code du travail stipule que le médecin du travail veille, sous la responsabilité du chef d'établissement, à l'application des dispositions du code de la santé publique sur les vaccinations obligatoires et qu'il procède lui-même ou fait procéder à ces vaccinations, le salarié restant maître du choix du médecin vaccinateur. Efficacité de la vaccination Réponse anticorps Tableau I - Nombre de cas d'hépatites professionnelles reconnues par la CNAM. (Source : DR ANNE DELÉPINE INRS). Année 2 Nombre de cas Année Nombre de cas 1973 533 1987 135 1974 653 1988 83 1975 740 1989 77 1976 746 1990 63 1977 581 1991 91 1978 483 1992 98 1979 597 1993 93 1980 497 1994 75 1981 438 1995 62 1982 381 1996 53 1983 295 1997 42 1984 285 1998 42 1985 242 1999 53 1986 223 2000 51 L'efficacité du vaccin plasmatique a fait l'objet de nombreuses publications au début des années 80, tant dans la population générale que dans des sous groupes à risques tels que les homosexuels ou les personnels soignants (6). Après trois injections, 97 % des sujets vaccinés développaient un taux d'anticorps protecteur (10 UI/l). Ce pourcentage a été retrouvé également par la suite dans des études menées avec les vaccins recombinants (26). Le pourcentage de sujets répondant au vaccin varie toutefois en fonction de certains paramètres. Ainsi, une étude rétrospective réalisée dans le Minnesota auprès de 10 hôpitaux de court séjour (595 soignants) avait montré que le tabagisme actif, le sexe masculin, l’âge supérieur à 40 ans, l’obésité constituaient des facteurs indépendants de mauvaise réponse au vaccin (27). L’effet de la voie d’injection sur l’efficacité de la vaccination a fait l’objet d’un certain nombre d’investigations. La meilleure réponse anticorps est obtenue par la voie intramusculaire dans le deltoïde (19). Néanmoins, deux études turques portant sur 200 et 400 enfants de 2 mois à 6 ans ont étudié l’effet de la vaccination intradermique d’Ag HBs. L’administration de dose de 2 µg par voie intradermique ou 10 µg en intra-musculaire à ces HYGIENES - 2003 - VOLUME XI - N°2 VACCINATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ CONTRE L’HÉPATITE B enfants montrait une efficacité satisfaisante à 5 ans, sans différence significative entre les deux vaccins (7,14). Efficacité clinique et épidémiologique du vaccin contre le VHB Elle peut être estimée collectivement à partir des données d'incidence de l'hépatite B chez les personnels de santé. En effet, on observe dans les pays développés ayant préconisé ou imposé ce vaccin chez ces personnels une diminution du nombre de nouveaux cas. Ainsi, les professionnels de la santé représentaient aux Etats Unis 9 % des nouveaux cas d'hépatite B aiguë en 1985 contre 0,9 % en 1994-1995 (4). Peu de données de cette nature sont disponibles en France. La première source de données est constituée par les hépatites déclarées en maladie professionnelle au titre du tableau 45 du régime général, créé en 1967. Les principaux écueils de cette source sont de ne pas tenir compte de la fonction publique hospitalière, de ne recenser que les hépatites déclarées et reconnues en maladie professionnelle et de ne faire la distinction entre les différentes hépatites virales que depuis 1998. En dépit de ces réserves, on peut constater dans le tableau I une très nette diminution des cas. Les données de la fonction publique hospitalière ne sont pas connues, mais le suivi des cas d'hépatite B reconnues en maladie professionnelle au sein de l’Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, qui emploie environ 55 000 personnels paramédicaux fait apparaître une nette diminution des cas reconnus : près de 100 cas en 1984 contre quatre cas en 2001 (Source : Dr BENKÉTIRA, Service Central de Médecine Administrative et de Contrôle). Ces diminutions sont probablement en grande partie dues à l’amélioration de la couverture vaccinale des soignants, patente sur la dernière décennie, mais la diminution de l’incidence et de la gravité des accidents exposant au sang sur cette période a probablement également exercé une influence. Différentes réponses à la vaccination ? Ainsi, le vaccin contre le VHB a prouvé son efficacité dans la prévention des hépatites B des personnels soignants. Néanmoins, au plan individuel, il existe des sujets faiblement, voire non répondeurs. LES BONS RÉPONDEURS Un taux seuil protecteur de 10 UI/l d'Ac anti-HBs a été proposé par de nombreuses études au début des années 80 (voir la revue publiée par WEST et CALENDRA en 1996) (25). Les sujets bon répondeurs sont donc ceux qui développent un taux d’anticorps supérieur à 10 UI/l. Néanmoins, des hépatites B cliniquement symptomatiques, avec présence dans le sang de l’Ag HBs, ont été décrites dans les années 80 chez certains sujets vaccinés par le vaccin plasmatique, en dépit d’une réponse sérologique attestée. Ainsi, l'équipe de MAUPAS (16) a rapporté le cas d’un interne, faiblement répondeur à la vaccination (2,1 UI/l) qui a développé une hépatite B cytolytique anictérique mais asthéniante. Dans cette étude, sur 97 soignants vaccinés avec un taux d’AC anti HBs supérieur à 2,1 UI/l dans les dix mois suivant la vaccination, cinq avaient eu une antigénémie HYGIENES - 2003 - VOLUME XI - N°2 HBs transitoirement positive, sans élévation des transaminases. Par ailleurs, dans la cohorte d’homosexuels masculins étudiés par SZMUNESS (21), un individu parmi les 549 vaccinés avait développé une hépatite B chronique. L’intensité de la réponse immunitaire ainsi que la date de l’épisode par rapport à la vaccination n’étaient toutefois pas précisées. Des épisodes de séroconversion vis-à-vis de l’anticorps anti HBc, témoignant d’un contact avec le virus puis d’une réplication virale, ont également été signalés dans le passé. Dans une étude d’efficacité de la vaccination portant sur 666 soignants, un tel épisode avait été rapporté chez un anesthésiste, qui avait pourtant développé un taux d’anticorps post vaccination de 16 UI/l (6). Dans l’étude de SZMUNESS (21), ce type d’événement concernait 2,7 % des vaccinés et 3,7 % des non vaccinés sur la période d’étude. Il convient toutefois de signaler que de tels événements (hépatite B symptomatique ou cytolytiques, présence de l’antigène HBs dans le sang) n’ont pas été rapportés dans la littérature récente, ce qui peut possiblement s’expliquer par une efficacité meilleure, ou plus constante, des vaccins recombinants. LES FAIBLES RÉPONDEURS Le risque réel des sujets faiblement répondeurs (entre 1 et 9 UI/l) reste mal étudié. Bien qu’ils semblent protégés vis-à-vis de l’hépatite B, au moins de formes symptomatiques, il est raisonnable de proposer un rappel avec un contrôle sérologique 1 mois après l’injection pour tenter d’atteindre un taux considéré comme protecteur, tant dans les études publiées (25) que dans la réglementation actuelle (Calendrier vaccinal). Par ailleurs, les cas d’hépatites documentés chez ces sujets dans les années 80, détaillés plus haut, doivent inciter à la prudence et à une surveillance plus attentive des marqueurs sérologiques, et en particulier des anticorps anti HBc. LES NON- RÉPONDEURS Les sujets non répondeurs à la vaccination, c’est-àdire ne développant pas d’anticorps après la troisième injection, semblent avoir le même risque de contracter une hépatite B, aiguë ou chronique, que les sujets non vaccinés, ainsi que cela a été mis en évidence dans plusieurs des études portant sur l’efficacité vaccinale réalisées à la fin des années 70 et au début des années 80 avec les vaccins plasmatiques (16,20). Conduite à tenir face à un sujet non répondeur Affirmer la réalité de la non réponse En effet, il existe des disparités entre les différents tests utilisés pour la détection des Ac anti HBs, et HEIJTINK, et al (12) ont observé des différences parfois sensibles entre 4 tests commercialisés. La différence de préparation des antigènes entre les différents tests peut probablement être incriminée et il peut être opportun de reprendre les sujets considérés comme non répondeurs avec d’autres tests (Test VIdas par exemple). Les différences observées apparaissent toutefois faibles. Il faut également vérifier que la recherche d’anticorps n’a pas été faite trop à distance de l’injection (1 3 VACCINATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ CONTRE L’HÉPATITE B mois d’un rappel). Enfin, il convient de réaliser une sérologie complète pour éliminer un portage chronique du virus de l’hépatite B. Si l’absence de réponse est confirmée, un ou plusieurs rappels peuvent être indiqués, éventuellement en utilisant un vaccin contenant des protéines S et pré S. Le nombre optimal d’injections n’a pas fait l’objet de publications définitives mais le calendrier vaccinal 2000 précise que « le médecin du travail procédera à l'évaluation de l'opportunité de doses additionnelles, sans excéder un nombre de six injections au total (y compris les trois injections de la première série vaccinale) ». La voie d’administration du vaccin peut représenter une piste de recherche intéressante. Plusieurs publications récentes ont ainsi mis l’accent sur la tolérance et l’efficacité, y compris chez des non répondeurs, de l’injection intra dermique de doses réduites (1/10e de la dose habituelle soit 2 µg d’Ag HBs). Ainsi, EGEMEN (7) observait une réponse similaire à 2 mois chez 400 nourrissons et enfants d’âge préscolaire, entre l’injection intramusculaire et intradermique de 10 et 2 µg d’Ag HBs. Une équipe australienne a étudié l’effet d’injections intradermiques (entre 1 et 4) de 5 µg d’Ag HBs sur 18 sujets non répondeurs à la vaccination, c’est-à-dire ayant reçu entre cinq et dix injections du vaccin en IM dans le deltoïde sans réponse anticorps détectable. À l’issue des injections intradermiques, 17 (94 %) sujets avaient développé un taux d’anticorps variant de 25 à plus de 1 000 UI/ml (17). L’existence d’une réponse importante (plus de 1 000 UI/l) chez 6 individus dans les deux semaines suivant la première injection intra dermique laisse toutefois planer un doute sur la réalité de leur non réponse antérieure. Aptitude du soignant non-répondeur En cas de non réponse vraie, il faut estimer que le sujet n’est donc pas protégé, au même titre que celui qui présente une contre-indication et qui n’a jamais été vacciné. Dès lors, la question de l’aptitude du soignant se pose. En effet, bien que la vaccination, et l’immunisation, soit obligatoire pour les soignants, l’arrêté du 26 avril 1999 (fixant les conditions d'immunisation des personnes visées à l'article L. 10 du code de la santé publique) stipule que « sont exemptées de l'obligation de vaccination les personnes qui justifient, par la présentation d'un certificat médical, d'une contre-indication à une ou plusieurs vaccinations. Le médecin du travail apprécie le caractère temporaire ou non de la contre-indication et détermine s'il y a lieu de proposer un changement d'affectation pour les personnes concernées. » Le point fondamental réside alors dans l’évaluation du risque encouru par le soignant. Ce risque dépend principalement du type de population prise en charge par le soignant (prévalence du portage d’antigène HBs) et du type et de la fréquence des accidents exposants au sang. Il est difficile d’agir sur le premier paramètre, d’autant qu’un certain nombre de sujets sont porteurs asymptomatiques. Les efforts doivent donc porter sur la réduction du risque d’AES, via le respect des mesures de précautions standard, et en particulier le port de gants, et l’utilisation de matériels protégés. Une affectation à un poste moins exposant au 4 risque peut être également envisagée. Enfin, il ne faut pas méconnaître la possibilité d’une immunisation passive par immunoglobulines après un AES potentiellement contaminant. L’information du soignant sur les risques qu’il encoure, et sur la conduite à tenir immédiate en cas d’accident s’avère ainsi primordiale. Lorsqu’un sujet répond correctement à la vaccination, peut-on considérer qu’il est durablement protégé ? Quelle est la nécessité de rappels ultérieurs ? Les connaissances sur la durée de la protection induite par le vaccin contre le VHB, et ses déterminants, ont notablement évolué depuis sa mise sur le marché. Dans les premières années d'utilisation du vaccin, des études séro-épidémiologiques ont mis en évidence une relation entre le taux d'anticorps anti-HBs et la protection vis-à-vis de l'infection par le VHB. La force de la réponse immune a été historiquement évaluée par l’intensité de la réponse anticorps, dont semblait également directement dépendre la durée de la protection. En effet, il apparaît que les anticorps anti HBs diminuent avec le temps, avec une vitesse variable selon les individus et plus rapidement les premières années que les années suivantes (13). En 1995, une revue des nombreuses études menées à la fin des années 80 et au début des années 90, montrait déjà qu’un certain nombre de sujets anciennement vaccinés restaient immunisés après la disparition des anticorps (25). Ceci a été depuis confirmé in vitro (15), et le recul actuel semble indiquer que cette immunité persiste au moins quinze ans. Cette évolution des connaissances avait fait l’objet d’une synthèse en 1998 par un groupe de travail européen. Il avait proposé que les sujets immunocompétents ayant répondu à une première série vaccinale ne soient pas revaccinés (8) Cette démarche a été appliquée en France avec la recommandation du CSHPF d’avril 1999. La nécessité de contrôle de l’efficacité de la vaccination, pour les personnes qui sont susceptibles d'être exposées au sang et autres produits biologiques dans le cadre d'activités professionnelles ou bénévoles peut être discutée. Pour certains, une vaccination avant l’âge de 25 ans ne nécessite pas d’investigations complémentaires. Néanmoins, la possibilité, même faible, d’une mauvaise réponse chez ces sujets particulièrement exposés, d’une part, et le risque d’être confronté chez ces individus à un AES quelques années plus tard, avec un taux d’anticorps anti-HBs négatifs, sans que l’on puisse alors savoir si le sujet a été auparavant bon répondeur, et reste donc protégé, d’autre part, rend nécessaire le dosage des Ac anti-HBs dès que possible (en laissant néanmoins s’écouler un délai d’un mois après vaccination). Une copie du résultat du dosage des anticorps doit être donnée au soignant, afin de faciliter la gestion d’un éventuel accident exposant au sang ultérieur Cette démarche peut par ailleurs permettre de prescrire un rappel, sans excéder toutefois un nombre de 6 injections au total (y compris les 3 injections de la première série vaccinale). Enfin, ce contrôle systématique de l’immunité est celui adopté par le Canada ou les États-Unis. HYGIENES - 2003 - VOLUME XI - N°2 VACCINATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ CONTRE L’HÉPATITE B En l’état actuel des connaissances, il apparaît qu’il peut être utile de suivre à long terme certains marqueurs d’infection transitoire, et en particulier les anticorps anti HBc, dans la population des soignants. Effets secondaires Les effets secondaires de la vaccination contre l’hépatite B ont fait l’objet de débats passionnés et de multiples publications. Les vaccins actuellement sur le marché en France sont constitués d'antigène de surface du VHB, adsorbés sur de l'hydroxyde d'aluminium. Il faut noter qu'un composé mercuriel, le mercurothiolate sodique (thiomersal), était retrouvé à l'état de trace dans les vaccins recombinants de la génération précédente. Sclérose en plaques et affections auto-immunes Selon le rapport de la Mission d’expertise sur la politique de vaccination contre l’hépatite B en France (Rapport DARTIGUES, 15 février 2002), le suivi des cas notifiés d’effets indésirables attribués au vaccin avait permis de dénombrer, au 31 mars 2001, 862 atteintes neurologiques dont 771 atteintes démyélinisantes aiguës centrales. Quarante-six pour cent des cas notifiés étaient survenus dans les deux mois après la vaccination. Ces chiffres doivent toutefois être relativisés considérant que 22 à 29 millions de personnes avaient été vaccinés en France durant cette période, avec 86,5 millions de doses de vaccin vendues, et que l’incidence de la sclérose en plaque (SEP) est estimée en France, à partir d’une étude Dijonnaise, à 4,3/100 000 habitants. Par ailleurs, à la date de mars 2001, aucun cas d’affection démyélinisante aiguë n’avait été observé en France chez un enfant de moins de deux ans. Plusieurs études cas-témoins, françaises ou étrangères, ont été consacrées au risque de survenue d'affections démyélinisantes du système nerveux central après vaccination par le vaccin VHB. Les études s’intéressaient aux antécédents de vaccination dans les 2 mois (22), 6 mois (23,28) 12 mois (étude anglaise citée dans le rapport DARTIGUES, mais non encore publiée) ou 24 mois (1) précédant la découverte de l'affection démyélinisante. Les risques relatifs étaient respectivement de 1,8 (IC95 % (0,7-4,6)), 1,3 (IC95 % (0,4-4,8)), 1,7 (IC95 % (0,5-6,3)), 1,2 (IC95 % (0,7-2,3)) et 0,7 (IC95 % (0,31,7)). On peut noter dans la plupart de ces études un excès de risque modéré, mais non significatif. L’étude d’ASCHERIO, seule à montrer une diminution du risque, a été critiquée en raison de la durée de la période de latence et de l’exclusion de nombreux sujets pour lesquels une preuve de la vaccination ne pouvait être apportée. En effet, l’analyse des données incluant ces patients aboutissait à un risque relatif de 1. L’analyse de ces études est compliquée par le fait qu’elles reposent sur l’identification clinique des cas, alors que la démyélinisation précède souvent l’apparition des signes cliniques de plusieurs mois (3). L’étude de SADOVNICK et SCHEIFELE (18) portait sur l’incidence de la SEP chez près de 300 000 enfants canadiens de 11-12 ans vivant en Colombie Britannique, avant et après le lancement en 1992 d’une campagne HYGIENES - 2003 - VOLUME XI - N°2 de vaccination dans cette tranche d’âge. Dans ces groupes d’enfants, l’incidence de la SEP n’était pas significativement différente avant et après la mise en place de la vaccination. En dépit, des incertitudes portant sur l’exhaustivité du recueil des cas, les résultats de cette étude sont concordants avec ceux des études mentionnées auparavant. L’analyse des résultats publiés n’est pas en faveur d’une relation causale entre la vaccination contre le VHB et l’apparition d’une SEP. Il apparaît néanmoins qu'il ne peut être exclu qu'une injection vaccinale quelle qu’elle soit, y compris avec le vaccin contre le VHB, soit responsable d'une poussée d'affection démyélinisante chez un sujet déjà atteint par cette affection, y compris à un niveau infra-clinique. La prudence doit probablement s'appliquer dans le cas d'autres affections auto-immunes. Effets du thiomersal Les effets de l'injection d'un dérivé organique du mercure ont provoqué des interrogations aux ÉtatsUnis, et un rapport de l'Académie Américaine de Pédiatrie proposait en 1999 de ne plus utiliser de vaccins contenant du thiomersal dans le calendrier vaccinal des enfants (2). L'évaluation des risques se basait sur l'hypothèse que la toxicité de l'éthylmercure (composé du thiomersal) était identique à celle du méthylmercure (très étudié depuis la pollution de la baie de Minamata au Japon). Les principaux effets retrouvés étaient des réactions locales, mais avec possibilité d'une injection de dose cumulée excédant chez l'enfant la limite proposée par l'Environmental Protection Agency américaine. Cette dose n'apparaissait toutefois pas dépassée chez l'adulte. Le thiomersal a été supprimé des vaccins utilisés en France. Effets de l’hydroxyde d’alumine Les relations entre l'injection intramusculaire d'hydroxyde d'aluminium, adjuvant de nombreux vaccins (dont le vaccin contre le VHB) et la survenue de myofaciite à macrophage a fait l'objet de préoccupations récentes, qui ne sont pas encore tranchées. Cette pathologie, qui s'observe principalement chez l'adulte de plus de 45 ans, a été identifiée en 1997 (9) et se caractérise par des symptômes non spécifiques, associant myalgie et fatigue, parfois accompagnées d’arthralgies, de céphalées, de douleurs abdominales ou de dyspnée. Des inclusions intra-cytoplasmiques contenant de l'hydroxyde d'aluminium semblent être retrouvées dans les macrophages de la plupart des patients (10). Une étude récente portant sur 50 patients retrouvait pour tous un antécédent de vaccination contenant de l'hydroxyde d'aluminium (hépatite B, hépatite A, tétanos) entre 3 et 96 mois précédent le diagnostic histologique (10). Les relations entre cette nouvelle entité nosologique et l’injection d'hydroxyde d'aluminium font actuellement l'objet d'études et aucune décision d'interdiction de vaccins ou de modification de la voie d'injection n'a été proposée. Conclusion Les soignants font donc partie d'un groupe professionnel qui a payé dans le passé un lourd tribut à l'hé5 VACCINATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ CONTRE L’HÉPATITE B patite B. Bien que l'incidence de cette pathologie dans la population générale semble diminuer, en grande partie en raison des programmes élargis de vaccination, l'attention vis-à-vis de ce risque ne doit pas faiblir et la vaccination doit être largement promue chez ces professionnels. Cette démarche doit néanmoins s'appuyer sur une évaluation approfondie du rapport bénéficerisque, en particulier chez les individus présentant une contre-indication à la vaccination, et d’une information compréhensible sur les risques et les bénéfices des vaccinations. Enfin, considérant les différents germes susceptibles d’être transmis en cas d’accident exposant au sang, l'ensemble des moyens visant à prévenir une contamination accidentelle doit être mis en œuvre. Dans l'avenir, l'influence de la vaccination des nourrissons, dont certains deviendront des soignants, et l'apport des nouveaux vaccins feront probablement évoluer les recommandations actuelles. ■ Bibliographie 1- ASCHERIO A, ZHANG S, HERNAN M, OLEK M, COPLAN P, BRODOVICZ K, WALKER A. Hepatitis B vaccination and the risk of multiple sclerosis. N Engl J Med 2001; 344: 327-332. 2- BALL LK, BALL R, PRATT RD. An assessment of thimerosal use in childhood vaccines. Pediatrics 2001; 107(5): 1147-1154. 3- BREX PA, O’RIORDAN JI, MISZKIEL KA, et al. Multisequence MRI in clinically isolated syndromes and the early development of MS. Neurology 1999; 53: 1184-1190. 4- CENTERS FOR DISEASE CONTROL AND PREVENTION (CDC). Hepatitis Surveillance Report No. 57. Centers for Disease Control and Prevention, Atlanta, 2000, 38 pages. 5- DENES AE, SMITH JL, MAYNARD JE, DOTO IL, BERQUIST KR, FINKEL AJ. Hepatitis B infection in physicians. Results of a nationwide seroepidemiologic survey. 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