1 International Digital Publishing Forum (IDPF) 28 et 29 mai 2014

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1 International Digital Publishing Forum (IDPF) 28 et 29 mai 2014
International Digital Publishing Forum (IDPF)
28 et 29 mai 2014
Javits Center, New York
Compte rendu rédigé par Ginette Péloquin
Chaque année, l’International Digital Publishing Forum (IDPF) propose diverses
conférences sur les plus récents développements technologiques en édition numérique,
notamment à ce qui a trait à la production de formats provenant de logiciels libres (Open
Source), dont est issu notamment le format ePub. Cependant, comme le domaine de
l’édition n’évolue pas en vase clos, la chaîne du livre, de l’auteur aux revendeurs, était bien
représentée. Pour ce qui est des formats de production, la principale nouveauté à surveiller
cet automne sera l’arrivée du format ePub d’Adobe. Outre cette annonce, les organisateurs
ont cédé la parole à de nombreux éditeurs et plusieurs auteurs qui en ont profité pour faire
des bilans, réviser les objectifs et analyser le chemin parcouru.
Ce compte rendu n’a pas la prétention d’être exhaustif, ce n’est qu’un aperçu de faits
marquants ou encore troublants comme les propos rapportés lors d’une table ronde
composée d’auteurs qui se demandaient si la prochaine révolution dans le livre ne sera pas
réalisée par des auteurs indépendants. La matière était riche, parfois excellente, parfois
moins, parfois aussi ce ne sont que des retours sur des notions élémentaires ou de bases,
mais qu’il est toujours bon de se rappeler. Il demeure qu’il s’agit d’une activité de partage de
connaissances qui, à mon sens, est très productive.
Adobe lancera son ePub 3 à l’automne 2014
Parmi les principales nouveautés, mentionnons le lancement du ePub 3/HTML5 par Adobe
prévu à l’automne 2014. La session a été présentée par Michael Kay qui agissait à titre de
représentant pour Adobe et remplaçait Chris Kitchener. Après avoir fait un retour sur les
générations passées du inDesign depuis 1999 au inDesign CC utilisé aujourd’hui,
l’exportation au format HTML simplifié, qui constitue maintenant un moyen simple pour
mettre en forme des contenus pour le Web, nous avons eu un aperçu de la production d’un
format ePub avec Adobe.
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Les 3 principes qui ont guidé l’équipe de concepteurs :
• La capacité de créer le « plus beau » ePub possible ;
• Faciliter la création du ePub à partir du InDesign ;
• Réduire au maximum, à défaut d’éliminer, les raisons pour lesquelles quelqu’un pourrait
avoir à « casser » (to crack) le ePub après l'exportation.
Les possibilités devraient ressembler à ceci :
- Exportation à partir du InDesign vers le ePub2 ou ePub 3 standard ;
- Utilisation de ses propres CSS (Cascading Styles Sheets) qui définissent la cartographie
définie ou retenue ;
- Imbrication des styles définis en HTML ;
- Des puces et des numéros en format InDesign permettront de détecter les balises
appropriées et d’apporter des corrections.
Adobe souhaite en arriver à ce que ce soit aussi facile d’exporter du InDesign vers le ePub 2
ou ePub3 qu’il est facile de faire un PDF. C’est ce qu’on pourra vérifier prochainement.
La communication et l’équipe de production
Sanj Kharbanda (Houghton Mifflin Harcourt), John Prabhu (SPi Global), Ken Brooks
(McGraw-Hill Education), Samantha Cohen (Simon & Schuster)
Avec la transformation de l'industrie et de l'explosion des nouvelles plateformes, des
technologies et des normes (HTML5/ePUB), les éditeurs ont besoin de planifier et de
structurer leurs processus de production en différents formats. La stratégie de contenu
mobile est également un élément clé à prendre en considération dans le cadre de la
planification du contenu.
Quelques observations depuis le passage de l’édition en format imprimé au numérique :
• Dorénavant, il faut compter sur l’équipe spécialisée dans le numérique qui s’implique dès
le début du travail de production, car dans le flux du travail s’ajoute maintenant des
logiciels et des applications, surtout en ce qui concerne le livre jeunesse ou les jeux
interactifs. En ce sens, le Learning management system (LMS) et le Assessment Engines
semblent offrir des avenues intéressantes.
• Les besoins sont dans une architecture de contenu plus standard et le ePub et le HTML5
s’y prêtent bien puisqu’ils offrent des possibilités de narration, de vidéo, de MP4 ou encore
de WebM, d’audio MP3, etc.
• Et finalement, nous sommes dans un monde de recherche en continu, elle n’est jamais
terminée, elle évolue constamment et nous devons y participer systématiquement.
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La gestion des métadonnées
La question des métadonnées est revenue constamment lors des différentes conférences,
notamment dans un contexte de « Business and Marketing track ». Rebecca Albani
(Bowker), qui agissait à titre de modératrice lors de la conférence « In the Metadata
track : Creating metadata that makes your titles discoverable » a rappelé que si les
métadonnées étaient très utiles pour les lecteurs elles l’étaient encore davantage pour les
éditeurs qui veulent vendre.
On a insisté sur l’importance de vérifier l’exactitude des métadonnées générées par Onix
avant d’être lancées sur le marché. Petit fait cocasse et intéressant, on a mentionné qu’il y
aurait au Royaume-Uni une équipe de surveillance (une initiative citoyenne) qui publie à
l’occasion les noms des maisons d’édition délinquantes, soit celles qui omettent d’inscrire
des métadonnées ou encore les publient de façon erronée. Cette équipe irait même jusqu’à
apporter des correctifs aux métadonnées, comme dans les titres ou les noms d’auteurs, les
prix, les ISBN, des ajouts de pages couverture, etc.
Les participants ont rappelé les impacts que peuvent avoir des métadonnées erronées sur
la chaîne du livre, que ce soit pour les distributeurs, les vendeurs, un éditeur étranger qui
achète des droits, des acheteurs institutionnels et autres. Les problèmes les plus fréquents
sont en effet ceux mentionnés précédemment. Un rappel bien élémentaire, mais encore de
mise, l’importance de concevoir les couvertures très tôt dans le processus de production,
notamment dans un contexte de prévente qu’offrent dorénavant de plus en plus de
revendeurs.
Tous les départements d’une maison d’édition doivent se sentir concernés par les
métadonnées, notamment celui de la production, des finances (les prix) et du marketing et
doivent aussi apprendre à bien communiquer entre eux. Ross Weisstuch (HarperCollins)
disait tenir une réunion au moins une fois par mois avec son équipe pour s’assurer que tout
est conforme. Quant à Matt West (B+H Publishing), il travaille plutôt à construire un
système global qui facilitera de travail de communication à l’interne. Ces éditeurs, comme
Marti Heyman (Cengage Learning), disent mettre beaucoup d’efforts, mais encore des
erreurs se glissent et c’est malheureusement souvent les auteurs qui les trouvent...
Pirates hier, partenaires aujourd’hui ?
Avec Peter Balis (John Wiley & Sons), Leslie Hulse (HarperCollins), Andrew Weinstein
(Scribd), Matt MacInnis (Inkling).
Une multitude de plateformes, des ventes qui plafonnent, les mêmes titres qui reviennent
constamment (best-sellers) nous obligent à penser à de nouvelles façons de faire.
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Parmi les panellistes, Andrew Weinstein (Scribd) et Matt Macinnis (Inkling) deux
représentants de plateformes virtuelles qui appliquent des principes d’abonnement payant
et se présentent comme des gestionnaires de bibliothèques virtuelles. Un principe qui
semble vouloir devenir de plus en plus populaire, même et peut-être surtout chez des
éditeurs de grandes tailles qui semblent y adhérer en grand nombre depuis peu. Les
éditeurs participant à cette table ronde affirment être très satisfaits des résultats financiers
obtenus.
Rappelons qu’au Québec, il n’y a pas si longtemps, certains de nos éditeurs ont fait affaire
avec Scribd, mais sans le vouloir réellement. Ils ont trouvé certains de leurs titres sur le site
de Scribd sans qu’on leur ait demandé la permission au préalable. Cependant, après avoir
adressé une lettre à Scribd le sommant de retirer les titres, celui-ci obtempérait assez
rapidement à la demande des éditeurs, semble-t-il. Mais, pour certains, la confiance était
rompue.
Depuis, de l’eau semble avoir coulé sous les ponts. Scribd s’est rapproché de maisons
d’édition influentes, a consulté le milieu, discuté et signé des ententes, ceci est le cas
notamment pour Peter Balis (John Wiley & Sons) et Leslie Hulse (HarperCollins) et Simon &
Shuster qui recommandent fortement l’adhésion des éditeurs aux services offerts par les
deux plateformes de vente par abonnement. Pour la plupart des éditeurs, les avantages
concerneraient surtout des livres de fonds, notamment les titres épuisés ou en voie de
l’être.
Selon Leslie Hulse, les éditeurs surveillent ce que veulent les auteurs « Nous devons être
flexibles et efficaces, nous avons donc opté pour ce type de vente par abonnement ».
HarperCollins cherche des formats standards pouvant s’adapter à différents canaux de
diffusion. Pour Peter Balis (John Wiley & Sons), « Au-delà du format, il y a les auteurs, leurs
recherches, leurs médias sociaux, on doit toujours faire plus, on se questionne aussi sur nos
relations avec les distributeurs ».
Les services offerts :
Scribd offre plus de 400 000 livres de 900 maisons d’édition. La plateforme est compatible
avec Androïd, iPad, iPhone, Kindle Fire et avec tous les navigateurs internet. Quelques
clients : Simon & Shuster, HarperCollins et autres. Un aperçu des coûts d’abonnement : Read
unlimited books for $8,99/ month.
Inkling applique un principe semblable à Scribd, mais sa plateforme est collaborative et a la
capacité d’accueillir des livres interactifs, des livres audio et des jeux. Quelques clients :
Wolters Kluwer, Pearson, Kaplan, Mc Graw Hill, Elevier, Lonely Planet. Un aperçu des coûts
d’abonnement : 12,99 $/an (10 livres).
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Le livrel aurait-il atteint son seuil de maturité en terme de vente ?
Comme le mentionnait Nicholas Carr, auteur de plusieurs livres sur la technologie, les
affaires et la culture, dont The Shallows : What the Internet is Doing to Our Brains, en
nomination pour le Prix Pulitzer 2011, le marché du livre numérique semble avoir atteint
un certain seuil de maturité en 2014. Cette hypothèse a souvent été confirmée par plusieurs
maisons d’édition, dont plusieurs appartenant à de grands groupes, lors de ces deux
journées.
Toujours selon N. Carr, après avoir connu des ventes fulgurantes de 2009 à 2013, il semble
normal, en 2014, d’observer une certaine stagnation dans les ventes du livre numérique.
Prenant en exemple les ventes de son livre qui a connu semble-t-il un immense succès, il
affirme que pour un livrel de vendu, huit livres en formats papiers trouvaient des
acquéreurs. De façon générale, si les ventes de livres en format imprimé ont semblé
diminuer ces dernières années, cela serait de façon plutôt modérée.
Ventes et métadonnées
Sur la même lancée que précédemment, Josh Marwell (HarperCollins) confirmait aussi que
les ventes en numérique se sont stabilisées, mais il affirme aussi qu’elles demeurent
toutefois très importantes. Les lecteurs continuent en effet d’apprécier les livres en format
imprimé et il faut leur en offrir.
Pour lui, les stratégies de vente tant pour les livrels que pour les formats imprimés passent
par :
• La langue anglaise, dont le marché est immense ;
• L’importance d’avoir les bonnes métadonnées et surtout de savoir bien les utiliser ;
• Comprendre les marchés, les ventes, les consommateurs ;
• Et surtout, bien se préparer pour le futur.
Pour Pierre Danet (Hachette Livre) la phablette (appareil intermédiaire entre le
smartphone et la tablette, doté d'un écran tactile d'environ 5 po. à 6,9 po.1), serait en train
de tuer la tablette.
Tous les présentateurs ont insisté sur l’importance des métadonnées, celles que l’on insère
dans les livres « tag », mais aussi celles que l’on récolte… Comme le disait Lori Benton
(Scholastic Trade) « Si vous ne prenez pas soin des métadonnées, les métadonnées
prendront soin de vous… »
Si HarperCollins déplore le manque de données concernant spécifiquement les lecteurs, il
compense en étant actif dans la cueillette d’autres données dans d’autres champs de
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En 2013, il existe plusieurs modèles de phablettes sur le marché, dont le Samsung Galaxy Note III, le Sony Xperia Z Ultra,
le Wiko Darkside, le Nokia Lumia 1520 et Alcatel One Touch Hero.
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consommation, comme les études sur les consommateurs, les cotes d’écoute d’émission ;
qui écoute, quel groupe d’âge, etc. ?
La révolution des auteurs indépendants s’en vient-elle ?
ou
Quand les auteurs deviennent de remarquables entrepreneurs ?
Trois auteurs de grande renommée ayant connu des succès de ventes à coup de millions
d’exemplaires, sélectionnés à plusieurs reprises dans les listes de best-sellers dans le New York
Times et le USA Today, vendu des droits à travers le monde et remporté plusieurs prix littéraires
prestigieux s’interrogent sur la place de l’éditeur à l’heure actuelle. Leurs propos font partie des
faits troublants observés lors des conférences.
Pour Hugh Howey rien n’est plus facile maintenant que de s’autopublier, car c’est ainsi qu’il
a commencé en 2011 lorsque Laine est devenu rapidement un best-seller. Pour lui rien n’est
plus simple avec l’impression à demande, les différentes plateformes de ventes comme
Amazone, Apple, Kobo et d’autres, les opportunités maintenant sont très grandes et sans
limites. Il dit avoir fait une recherche sur les 85 derniers best-sellers, il a étudié les prix, les
lieux de ventes et il affirme qu’en effet, la prochaine révolution sera faite par les auteurs
indépendants.
Selon Bella Andre, écrire n’est qu’une partie du travail de l’auteure, l’autre partie du travail est le
marketing. Elle considère que la compétition nous a amenés à développer de bien meilleures
pratiques en marketing. Elle se demande d’ailleurs, en tant qu’auteure, s’il ne serait pas
préférable de faire affaire avec deux éditeurs plutôt qu’un. L’un s’occupe de la version imprimée
et l’autre de la version numérique, car elle trouve que performer sur ces deux marchés semblent
difficile pour certains éditeurs. En tant qu’auteur, elle dit qu’il faut aussi savoir lire entre les
lignes : où sont placés nos livres, sur quelles tablettes, quels sont les formats les plus performants,
les types de licence, la taille des marchés, la taille de l’éditeur, les prix de vente, etc. Elle suit tout
ce qui apparaît comme résultats de sondage, elle déplore seulement que les sondeurs ne
l’appellent jamais...
Quant à Barbara Freethy, elle considère aussi qu’il très important d’être impliquée dans
tous ces changements. Elle rappelle que lorsqu’elle a publié sa première œuvre à compte
d’auteur en 2011, elle a étudié le marché global et depuis, elle continue à tout suivre de très
près. Une des grandes difficultés qu’elle dit avoir rencontrée était celle de la traduction de
son ouvrage ; comment savoir qu’elle sera impeccable ? Kobo l’a approchée et lui a offert de
faire la traduction de son livre en français, elle dit être enchantée des résultats, de plus le
travail a été rapide, il a été réalisé en 90 jours seulement.
En guise ce conclusion, je dirais tout simplement qu’il y beaucoup de travail sur la planche
et que le partage des connaissances est essentiel dans notre milieu.
Et comme le disait si bien Peter Brentley (Hypothes.is), il est bien de se rappeler que :
La valeur d’un livre n’est pas dans son format, mais dans son contenu…
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