Résumé manuscrit thèse A. Perrotton. - UR Agirs

Transcription

Résumé manuscrit thèse A. Perrotton. - UR Agirs
SOUTENANCE DE THESE ARTHUR PERROTTON
Jeudi 17 Décembre 2015, Amphithéâtre Agropolis International, Montpellier
Titre de la thèse : « Conduite du Bétail et coexistence entre les aires
protégées et leurs périphéries: Une approche participative »
Le fait qu’Homme et environnement sont les éléments de systèmes complexes et
dynamiques est aujourd’hui largement accepté. Des cadres théoriques ont été développés
pour étudier ces systèmes, et au cours de notre travail nous avons adopté celui des
Systèmes Socio-Ecologiques (SSE). La pluralité des acteurs vivant au sein d’un SSE amène
logiquement à la question de la coexistence entre ceux-ci. En effet, différents acteurs ont
souvent des objectifs différents reposant sur des représentations de l’environnement, des
pratiques et des systèmes de valeur différents. S’ils collaborent et obtiennent des bénéfices
de la coexistence, force est de constater que les situations de conflit sont nombreuses de
par le monde.
Aujourd’hui, 15 % des terres émergées mondiales sont ‘protégées’ d’une manière ou d’une
autre. Conflits homme/faune, prédation du bétail, pertes agricoles, braconnages divers, la
liste des tensions entre aires protégées africaines et leurs périphéries est longue. Ces
conflits peuvent être vus comme des « problèmes pernicieux », caractérisés par la présence
simultanée de valeurs culturelles divergentes et de nombreuses incertitudes sociales ou
scientifiques. Là où le paradigme classique, positiviste, invite les chercheurs à chercher une
vérité objective et absolue, les sciences « post-normales » (SPN) abordent la réalité comme
le résultat d’une construction sociale, et reconnaissent donc l’existence d’une pluralité de
réalités. La participation d’acteurs locaux dans nos démarches scientifiques permet de
prendre en compte ces réalités.
Cette thèse est focalisée sur les interactions entre la Forêt de Sikumi (FS), une aire protégée
zimbabwéenne, et les communautés rurales vivant à sa périphérie. Nous nous sommes
intéressés aux tensions liées aux pratiques de conduite du bétail. Les communautés rurales
vivant dans notre zone d’étude disposent d’un droit d’accès légal pour emmener leurs
animaux paitre dans la forêt, et bien que villageois et gestionnaires de l’aire protégée
trouvent des bénéfices dans cet accord, aucun n’est réellement satisfait et des inquiétudes et
désaccords sont exprimés de part et d’autre. Nous retrouvons là les caractéristiques des
problèmes « pernicieux » : difficulté à identifier le problème de manière définitive ;
incertitudes scientifiques et sociales ; valeurs culturelles conflictuelles et liens avec d’autres
problèmes. Pour comprendre et modéliser les interactions entre acteurs à travers la conduite
du bétail, nous avons mis en place un processus de modélisation d’accompagnement
(ComMod). Nous avons co-construit un outil de recherche participatif sous la forme d’un Jeu
de Rôle (JdR) nous permettant d’étudier les stratégies locales de conduite du bétail.
Plusieurs étapes ont été nécessaires : observation directe de ces pratiques ; création d’une
équipe de co-constructeurs mêlant chercheurs et membres des communautés rurales ; coconstruction en tant que telle au travers d’ateliers interactifs.
Trois ans après le commencement de cette thèse, nous disposons d’un JdR opérationnel.
Nos travaux montrent comment l’utilisation d’environnements virtuels permet aux chercheurs
de s’extraire du paradoxe majeur des problèmes pernicieux : toute action modifie le système
et donc le problème, sans jamais le régler. La participation d’acteurs locaux nous a permis
de redessiner une vision commune des incertitudes sociales et scientifiques au travers de
processus de négociation. Nous montrons comment le résultat de notre effort collectif
dépasse les ambitions premières et la manière dont le chercheur doit nécessairement perdre
en partie le contrôle de l’objet construit au profit des partenaires locaux. Nos travaux
fournissent des éléments pour la formalisation d’approches visant à construire des modèles
empiriques. Finalement, nous exprimons notre conviction que des approches comme la
nôtre sont pertinentes dans le cadre de la gestion des aires protégées, particulièrement avec
l’émergence des parcs transfrontaliers en Afrique australe.
Mots clé: système socio-écologique, problèmes pernicieux, perception, modélisation,
Conduite de troupeau.
Jury :
M. Doyle McKey, PR, Université Montpellier, Cefe
Directeur de thèse
M. Michel de Garine-Wichatitsky, DR, Cirad
Co-directeur de thèse
M. Serge Bahuchet, PR, Muséum National d’Histoires Naturelles
Rapporteur
Mme Juliette Rouchier, CR, CNRS-GREQAM
Rapporteur
M. William McConnell, Michigan State University
Examinateur
M. Raphaël Mathevet, DR, CNRS
Examinateur
Title of the PhD: “Cattle herding and coexistence between protected
areas and their peripheries: a participatory approach”
It is now widely accepted that human beings and their environment are intertwined parts of a
complex and dynamic system. Several analytical frameworks have been developed to study these
systems, and in this work we adopted the Social-ecological System (SES) framework. The plurality of
actors within a SES brings with it the question of coexistence. Indeed, the different actors sharing
common resources do not always have the same objectives, practices and cultural values. While the
different actors can collaborate and produce positive outcomes, there are many examples of land
use conflicts around protected areas throughout the world.
About 15 percent of the world’s terrestrial area has some kind of protected status. Human-wildlife
conflicts, crop raiding, livestock predation, poaching, illegal harvesting of natural resources, the list of
conflictual issues taking place at the edges of African protected areas is long. These issues are
“wicked” problems, characterized by scientific uncertainties, by conflicting cultural values and by
interconnections with other problems. While the positivist paradigm charges researchers to discover
an objective truth (even though they realize that single truths and single solutions do not exist), the
constructivist approach of post-normal science (PNS) assumes that reality is socially constructed, and
studying and addressing wicked problems therefore requires insights on local stakeholders’
perspectives.
In this PhD study we focused on interactions between the Sikumi Forest (SF), a Zimbabwean
protected area, and the rural communities living at its periphery. More particularly, we focused on
the tensions related to cattle-herding practices. Rural communities have legal access to the forest,
but although communities and Sikumi Forest managers both get benefits from the agreement, none
is fully satisfied and concerns are expressed on both sides. The situation shows characteristic of
wicked problems: the difficulty to frame a precise problem; great uncertainties about the studied
SES; incomplete scientific knowledge; competing cultural values and objectives; and interconnection
of the issue of coexistence with other problems. In order to understand and ultimately simulate
cattle-related interactions between rural communities and the protected area, we implemented a
companion modeling (ComMod) approach. We co-designed a participatory research tool taking the
form of a role-playing game (RPG) enabling us to elicit cattle-herding strategies. Several steps were
necessary, including intensive ethnographic fieldwork, the creation of a co-design team involving
researchers and members of the local communities, and the conducting of several iterative
workshops.
Three years after the beginning of this PhD study, we succeeded in producing an operational RPG
that was used with naïve villagers (i.e., villagers who were not involved in the co-design). This PhD
thesis shows how the use of virtual worlds (RPG) allows researchers to cope with the catch-22 of
wicked problems, i.e., that any action transforms the context and potentially brings more problems.
The co-design of the research tool allows us to deal with one of the major characteristics of wicked
problems: uncertainties. In the participatory design of the RGP, uncertainties were collectively
reduced and negotiated. Participation led to the appropriation of the co-designed object by local
actors. As a result, our project went beyond the initial ambitions to produce a multi-dimensional tool,
of which we necessarily lose control. Finally, our work allows us to propose elements for the
formalisation of empirically-based modelling. In a wider perspective, we believe that with the
emergence of Transfrontier conservation in Africa, participatory approaches like ours can provide
alternative ways to study and manage coexistence between protected areas and their peripheries.
Key words: Socio-ecological systems, wicked problems, perception, modelling, cattle
herding.

Documents pareils