Peter Greenaway se veut plus peintre que

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Peter Greenaway se veut plus peintre que
Date: 20.04.2016
Tribune de Genève
1211 Genève 11
022/ 322 40 00
www.tdg.ch
Genre de média: Médias imprimés
Type de média: Presse journ./hebd.
Tirage: 41'213
Parution: 6x/semaine
N° de thème: 832.044
N° d'abonnement: 1092279
Page: 24
Surface: 74'551 mm²
Peter Greenaway a reçu le Prix du «Maître du Réel» du festival Visions du Réel à Nyon, ce lundi. LAURENT GUIRAUD
Peter Greenaway
se veut plus peintre
que réalisateur
Visions du Réel remet son prix au cinéaste anglais. Rencontre
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Réf. Argus: 61317748
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trouve souvent que de l'illustraDans son dernier film, Que viva tion de texte et encore, basée sur
celles des princesses, mais plutôt
Eisenstein!, Peter Greenaway ima- de la littérature du XIXe et même
gine le fameux cinéaste russe dé- pas du XXe. Où sont les Perec, les
clinant l'offre de ses collègues d'al- Borges? Où sont les auteurs
ler filmer les inondations qui font contemporains? Je ne vois que du
le cinéaste se méfie comme de la
Boris Senff
rage au Mexique, pays où il s'est
temporairement installé. «Le réel
ne m'intéresse pas», rétorque-t-il.
Et l'Anglais abonde, depuis son
hôtel nyonnais, au moment de re-
celles des taximen new-yorkais» -,
peste de la narration quand elle
prétend régir un film. «J'aime la
littérature, mais, en matière de
Jane Austen, du Zola et du Dic-
films, je suis antinarratif. C'est une
kens...»
perte de temps et ce n'est pas l'afLe grand modèle esthétique de faire du cinéma qui se préoccupe
l'auteur de Meurtre dans un jardin d'images. Vous voulez être romananglais demeure celui de la pein- cier? OK, mais restez loin du cicevoir le prix «Maître du Réel» du ture, discipline qu'il avait d'abord néma, où tous les scénaristes defestival Visions du Réel. «Non. élue avant de bifurquer vers le ci- vraient être flingués.» Ne lui parlez
Dieu s'est déjà occupé de la chose, néma. «Personne n'est plus impor- pas non plus des philosophes, ils
pourquoi devrais-je essayer de le tant que les peintres, c'est pour- ne rivalisent pas avec ses chers
copier?» poursuit le Britannique, quoi je voulais en être un. Ils dessi- peintres. «Michel Foucault a écrit
en maître, surtout, de la repartie nent le monde humain. Comme le Les mots et les choses, mais il emironique.
disait Giacometti: il y a peu de prunte toutes ses notions à Picasso
chance que votre grand-mère con- et aux postimpressionnistes. Il a
«Le cinéma se meurt»
naisse Picasso mais Picasso sait juste mis en mots ce qu'ils avaient
Le Festival se serait-il trompé de tout de votre grand-mère! Mais la peint bien avant lui.» Les sculprécipiendaire? Certainement pas, plupart des réalisateurs ne savent teurs peuvent parfois trouver
puisque le cinéma de Peter Gree- rien de la peinture. Ils sont illettrés grâce à ses yeux, lui qui prépare
naway, 74 ans, a développé en en la matière, inconscients de un film sur Brancusi.
quarante ans un vocabulaire 8000 ans de production visuelle.
parmi les plus originaux du sep- C'est une tragédie. De mon côté, je Rencontre avec Kasander
tième art, un lexique et une gram- réalise peut-être des peintures Cet intransigeant a eu beaucoup
maire propres à servir tous les réa- avec bande-son.»
de chance dans le monde impilisateurs, fussent-ils les plus docuCar le son, principalement la toyable des producteurs. «Jeune,
mentaires. «Le cinéma est un lan- musique, a toujours été une di- j'ai présenté mes courts-métrages
gage!, martèle -t -il. Les Français mension importante de ses créa- au Festival de Rotterdam, où j'ai
l'ont dit depuis longtemps: il n'y a tions, marquées par «trois généra- rencontré Kees Kasander, enthouplus de contenu ou alors c'est le tions de compositeurs minimalis- siasmé par mes films, et qui m'a
langage lui-même. J'aime cette tes», que ce soit Michael Nyman, dit: tant que tu ne me demandes
idée et mon cinéma en est très John Cage ou Philip Glass. «Vous pas de filmer Elizabeth Taylor en
conscient: quand vous regardez pouvez en faire sans musique et train de se faire baiser par vingt
un de mes films, vous regardez un certains l'ont fait. Mais c'est tou- cochons sur un porte-avion améri-
film et vous ne faites rien d'autre.» jours une sorte d'appauvrisse- cain, je m'occuperai de ta carrière.
Cet acharnement à défendre le ment car l'excitation de son al- Et il s'en occupe toujours!» Encore
langage cinématographique sur- liance avec les images est toujours motivé par son obsession de pein-
prend pourtant de la part de celui très profonde. Et tout le monde
qui en prophétise volontiers la fin. semble d'accord, à voir la florai«Le cinéma se meurt, et vite. Ou son des vidéos pop!»
alors il n'est qu'à l'état embryonnaire, 120 ans après ses débuts «Tous les scénaristes
tre sonore, ce grand baroque ne
rend pas les armes et poursuit son
oeuvre. «Même si les gens ne savent plus ce qu'est le cinéma muet
et que 95% d'entre eux ne voient
plus les films dans les salles... à
puisque les gens en sont toujours à devraient être flingués»
se demander ce qu'il est... Même s'il va sortir, en livre, sa pro- part en festival!»
D'ailleurs, sous ce terme, on ne pre version des 1001 Nuits - «pas
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