Johannesburgempoisonnéepardeseauxtoxiques

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Johannesburgempoisonnéepardeseauxtoxiques
4 Planète
0123
Jeudi 24 février 2011
Des prêts pour le climat
Bébés dauphins échoués
La Banque européenne d’investissement
a accordé 19 milliards d’euros de prêts en 2010,
soit 3 milliards de plus qu’en 2009, à des projets
contribuant à la lutte contre le réchauffement.
Bénéficiaires: les énergies renouvelables,
l’efficacité énergétique et les transports durables.
En deux semaines, dix-sept bébés dauphins ont été
retrouvés morts sur les côtes de l’Alabama et du
Mississippi, aux Etats-Unis. Des nécropsies doivent
déterminer si ces échouages sont dûs à la marée
noire provoquée en avril 2010, dans le golfe du
Mexique, par l’explosion de Deepwater Horizon.
«Atlas mondial du nucléaire»
Didactique et exhaustif, cet ouvrage, enrichi
d’infographies,propose un panorama planétaire
dunucléaire civil et militaire,traitant des différentes filières
del’atome, de leurs usages et de leurs risques.
Ed.Autrement, Bruno Tertrais, 80p., 17 ¤ (en vente le 2mars).
Johannesburg empoisonnée par des eaux toxiques
Le sous-sol de la région, transformé en gruyère, a été exploité pendant plus d’un siècle pour en extraire de l’or
Krugersdorp (Afrique du Sud)
Envoyé spécial
L
esracinesdes roseauxquibordent le lac sont orange, de la
couleurduferquis’yest déposé. L’eau est trouble. Cela fait des
années que les animaux du parc
protégé de Krugersdorp, à l’ouest
de Johannesburg, ne viennent plus
boire ici. Le cocktail est toxique,
composé d’acide sulfurique, de
métaux lourds et d’éléments
radioactifs. Deux hippopotames
sont en train de devenir aveugles,
selon des spécialistes.
« A chaque fois que je viens, je
suis écœurée, je n’arrive pas à croire
que rien n’est fait », confie Mariette
Liefferink,responsabledelaFédération de l’environnement durable
(FSE). A quelques kilomètres de là,
l’eau polluée a commencé à s’infiltrerdans lesgrottes du « Berceaude
l’humanité», où ont été découverts
de nombreux fossiles d’hominidés. Le site est inscrit depuis 2000
sur la liste du Patrimoine mondial
de l’Unesco.
D’ici un an, si rien n’était fait, les
quatre millions d’habitants de
Johannesburg,la capitale économique de l’Afrique du Sud, pourraient
constater de leurs propres yeux
l’écoulement dans leur ville de cette eau toxique, le drainage minier
acide, et ainsi payer le prix de ce qui
a fait la richesse d’« Egoli », « la cité
de l’or ». Pendant près de 120 ans,
les compagnies minières ont
exploité le sous-sol de la région
pour en extraire le métal précieux.
Mais à la fin des années 1990, les
dernières mines ont fermé, et les
pompes servant à maintenir au sec
les galeries creusées ont petit à
petit cessé de fonctionner. Dans un
sous-soltransforméenvastegruyère, l’eau des pluies a réapparu, puis
s’est retrouvée au contact de l’acide
sulfurique présent le long des
parois, résultant de l’oxydation de
la pyrite (un sulfure de fer).
Dès 1996, les autorités sud-africaines avaient été alertées qu’à
l’ouest de Johannesburg, là où se
situe le parc de Krugersdorp, la
décantationallait débuter audébut
des années 2000. Mais aucune
mesure n’avait été prise jusqu’à
maintenant. Absence de prise de
A Randfontein, à 45 km à l’ouest de Johannesburg. C’est dans cette région que l’acide de drainage minier a commencé à s’écouler dès 2002. DENIS FARELL/AP
conscience de la gravité du problème ? Carences techniques ? Manque de moyens financiers ? Plusieurs raisons sont avancées pour
expliquer cette longue incurie.
« Il ne faut pas paniquer »
Va-t-elle prendre fin ? Le mardi
22 février, le gouvernement a en
effet annoncé qu’il allait prendre
des mesures pour diminuer le
niveau de décantation et purifier
l’eau toxique. « Il ne faut pas paniquer », a répété Trevor Manuel, le
président de la Commission nationale du plan, qui s’est engagé à ce
qu’une pompe soit installée en
mars 2012 pour maintenir le
niveau de l’eau polluée à plus de
200 mètres de la surface.
Le gouvernement sud-africain a
assuré qu’il discutait avec les compagniesminièresàproposdufinancement de ces mesures. Tous les
coûts liés à l’exploitation de mines
ouvertes depuis 1956 sont censés
être à la charge des entreprises
extractrices. Mais la plupart d’entreellesontdepuislongtempsquitté l’Afrique du Sud. « Ces multinationales ont gagné beaucoup d’argent en exploitant les richesses du
pays, constate amèrement Mariette Liefferink, et, aujourd’hui, ils
nousontlaissélafactureetcettepollution qui va encore faire des victimes pendant des décennies. »
SousJohannesburg,l’eau,actuellement à 500 mètres de profondeur, monterait chaque jour, selon
les experts, de 50 centimètres à
1mètre. Ilsestimentque,à partir du
premier semestre 2012, 60 millions de litres d’eau toxique, l’équivalent d’une trentaine de piscines
olympiques, pourraient sortir de
terre chaque jour si le plan du gouvernement n’était pas réellement
misenaction.L’eau feraitson apparition en banlieue, dans la ville de
Boksburg. A proximité du musée
de l’Apartheid, le parc d’attractions
de Gold Reef City de Johannesburg,
dans lequel les touristes peuvent
s’enfoncer à 200 mètres sous terre
pour visiter une mine d’or, serait
alors le premier touché.
Le mélange acide pourrait rongerlesfondationsdeplusieursbâtiments situés dans le centre-ville de
Johannesburg. « C’est possible,
mais le risque est faible, nuance
Anthony Turton, un spécialiste de
la gestion de l’eau. Le principal problème est une contamination des
rivières environnantes. » Les habitants de Johannesburg consomment de l’eau provenant essentiellement du Lesotho, petit pays voisin,mais lapréservation delaqualité de l’eau risque d’augmenter la
facture des ménages.
Lespersonnesmenacéesen priorité sont les plus pauvres, celles qui
vivent dans les townships en péri-
phérie de la ville. L’eau courante
n’est pas un service accessible à
tous, et certains doivent se résigner
à laver leurs légumes, voire parfois
à boire de l’eau des ruisseaux coulant à proximité.
«L’arsenic endommage le système nerveux, le mercure nuit au
développement du fœtus, etc. ; imaginez l’effet du cocktail du drainage
acide minier sur l’organisme d’une
personne qui y sera exposée de
manière chronique! », alerte le docteur Jo Barnes, épidémiologiste à
l’université de Stellenbosch. Les
experts évoquent aussi des risques
de cancers, de problèmes rénaux,
pour des sujets aux maigres ressources, souvent déjà vulnérables à
des maladies comme le sida ou la
tuberculose.Les dégâtssurl’écosystème ne devraient également pas
être connus avant plusieurs
années. p
Sébastien Hervieu
L’agriculture
sud-africaine menacée
Les agriculteurs sud-africains
sont à bout de nerfs. Le drainage
acide minier et le mauvais état
des stations d’épuration ont mis
à mal la qualité de l’eau d’irrigation. L’Union européenne a déjà
mis en garde les producteurs :
« Elle réclame des standards de
qualité, c’est normal, on ne va
quand même pas exporter des
fruits radioactifs ! », s’emporte
Louis Meintjes, vice-président du
syndicat agricole du Transvaal, la
région de Johannesburg.
En 2008, l’Afrique du Sud a exporté vers l’UE, 2,8 milliards d’euros
de fruits et légumes. « Si le gouvernement continue comme cela,
le pays risque de passer d’exportateur à importateur de nourriture », estime le syndicaliste.
Le séisme en Nouvelle-Zélande a fait des centaines
de disparus et va lourdement pénaliser l’activité du pays
Biotechnologies
La région touchée représente 15% du PIB. La catastrophe pourrait coûter plus de 6milliards d’euros
Les surfaces plantées de cultures génétiquement modifiées ont atteint
148 millions d’hectares en 2010, une augmentation de 10 % par rapport
à 2009, selon les chiffres publiés, mardi 22 février, par l’lnternational
Service for the Acquisition of Agri-biotech Applications (ISAAA), un institut privé favorable aux OGM, seule source reflétant l’adoption de cette technologie dans le monde.
Les Etats-Unis restent premiers, avec plus de 66 millions d’hectares,
mais sur les 29 pays cultivateurs, 19 sont des pays en développement.
« 48 % des semences OGM ont été plantées en 2010 dans ces pays, et ils
dépasseront les pays industrialisés d’ici à 2015, affirme Clive James, directeur de l’étude. Clairement, la plus forte croissance dans les années à
venir aura lieu en Amérique latine et en Asie. » Le maïs, le soja, le coton et
le colza résistants aux herbicides et aux insectes continuent à dominer
largement le marché. Les plantes cumulant plusieurs modifications
génétiques, leur conférant de multiples résistances, progressent.
Cependant, les OGM régressent en Europe. Ce point, ignoré dans le rapport de l’ISAAA, est souligné par l’association Les Amis de la Terre, qui
estime la baisse des surfaces de 23 % par rapport à 2008, sur la base des
chiffres gouvernementaux. En Espagne, principal pays producteur, les
surfaces ont chuté de 15 %, à 67 000 hectares. Seules deux variétés OGM
sont autorisées en Europe, dont l’une est ancienne (le maïs MON 810), et
plusieurs pays ont mis en place un moratoire. p Gaëlle Dupont
Sydney
Correspondance
L
es secours continuaient de
rechercher des survivants
dans les décombres, mercredi 23 février, au lendemain du séisme meurtrier qui a frappé Christchurch, deuxième ville la plus peuplée (348 000 habitants) de Nouvelle-Zélande. Alors que des renforts arrivent du monde entier, la
région de Canterbury commence à
évaluer l’ampleur des dégâts. Les
autorités font désormais état de 75
morts et de centaines de disparus.
Les nombreuses répliques du
séisme compliquent les opérations de sauvetage. Des bâtiments
restent difficiles d’accès, comme la
cathédrale, un des principaux
sites touristiques de Christchurch,
où une vingtaine de personnes
seraient ensevelies. Des familles et
des proches attendaient vainement un miracle autour de l’immeuble de la télévision régionale,
transformé en un amas de débris,
où des dizaines de personnes pourraient être piégées sous les ruines.
« Notre pays vous soutient de
toutes ses forces (…) Cela sera un
chemin difficile, mais les choses
s’amélioreront. Christchurch va se
relever », a déclaré John Key, le premier ministre néo-zélandais.
L’état d’urgence a été décrété
dans le pays, ce qui permet de diriger tous les services d’urgence vers
la région dévastée. Après la rupture de nombreuses canalisations,
80 % des habitants de Christchurch se retrouvent sans eau
potable. Beaucoup ont rejoint des
refuges temporaires.
« Codes de construction »
En plus du coût humain, le séisme aura des conséquences économiques importantes. La région de
Canterbury, qui tire ses principaux revenus de l’agriculture et
du secteur manufacturier, contribue à 15 % de la richesse du pays.
Le premier séisme qui avait
frappé Christchurch, le 4 septem-
bre 2010, n’avait fait aucune victime. Néanmoins les dégâts matériels avaient été évalués entre 6 et
8 milliards de dollars néozélandais (3,3 à 4,4 milliards d’euros). Le prix de la reconstruction
devrait, cette fois, être supérieur,
car les immeubles de la ville ont
été durement touchés. Selon Air
Worlwide, une société qui évalue
les dommages financiers pour les
assureurs après une catastrophe,
le coût du séisme du 23 février
pourrait atteindre près de 12 milliards de dollars NZD.
« C’est différent du premier séisme. Un nombre de bâtiments dans
le centre vont devoir être détruits et
reconstruits », a reconnu le premier ministre. « La reconstruction
après le premier séisme venait de
débuter. Il faut du temps pour évaluer les dégâts, il faut aussi attendre qu’il n’y ait plus de répliques. En
outre, cela signifie une interruption d’activité pour de nombreuses
compagnies », analyse Shamubeel
Eaqub, de l’Institut de recherche
économique de Nouvelle-Zélande.
« Il faudra avoir une discussion sur
les codes de construction actuels. Il
est étonnant de voir que des
immeubles relativement neufs se
sont écroulés. Psychologiquement,
il sera nécessaire que les habitants
sachent que leurs bureaux peuvent
résister aux séismes », affirme
David Kaunitz, en charge de la
branche australienne de la Fondation Architectes de l’urgence.
Des questions se posent désormais sur la tenue de la 7e Coupe du
monde de rugby, qui doit débuter
en septembre en Nouvelle-Zélande. Des matches sont prévus à
Christchurch. « Il est trop tôt pour
savoir si la région sera en état pour
la Coupe », estime M. Eaqub. Même
sile stade n’est pasdétruit, d’autres
problèmesrisquent de surgir, comme lemanqued’hébergements disponibles après la destruction de
plusieurs hôtels. L’International
Rugby Board a annoncé la mise en
place d’une cellule de crise. p
Marie-Morgane Le Moël
Les cultures OGM progressent
dans le monde, mais pas en Europe
Effet de serre Trois nouveaux pays européens
vont rouvrir leur marché du carbone
Après la France, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Slovaquie, le RoyaumeUni, le Portugal et l’Espagne, trois nouveaux pays, la Belgique, le Luxembourg et l’Estonie, vont pouvoir reprendre leurs opérations sur le marché européen du carbone, a annoncé, mardi 22 février, la Commission
européenne. Les transactions avaient été suspendues le 19 janvier,
après la découverte d’une vaste escroquerie. La Commission a demandé
à chaque Etat des mesures renforçant la sécurité des échanges. – (AFP.)