Madame la Préfète du Cher, Messieurs les Députés

Transcription

Madame la Préfète du Cher, Messieurs les Députés
Audience de rentrée CA de Bourges
12 janvier 2017
Discours de Dominique Decomble, premier président
Madame la Préfète du Cher,
Messieurs les Députés,
M. le représentant du Conseil Régional,
M. le représentant du Président du Conseil Départemental,
Monsieur représentant du Maire de Bourges,
Monsieur le Président de la Section d'entraide des membres de
la Légion d' Honneur du Cher,
Monsieur le Président du Tribunal administratif d' Orléans,
Messieurs les Directeurs intergégionaux de la Police judiciaire
de Dijon et d' Orléans,
Messieurs les représentants des Commandants des Régions de
Gendarmerie du Centre et de Bourgogne,
Monsieur le représentant du Délégué militaire départemental et
Monsieur le Colonel commandant de la Base de défense d'Avord,
Madame et Messieurs les responsables de la Police et de
Gendarmerie du Cher, de l' Indre et de la Nièvre,
Mesdames et Messieurs les représentants du Défenseur des
droits, des Finances publiques, de l'Université et de la Faculté
de droit de Bourges, de la Santé, de l'Administration
pénitentiaire et des autres services de l'Etat,
Mesdames et Messieurs les Chefs des juridictions, Magistrats
et fonctionnaires de la Cour et des juridictions du ressort,
Mesdames les Bâtonniers, Mesdames et Messieurs les Avocats,
Messieurs les Présidents de la Chambre interdépartementale
des Huissiers, et de la Compagnie régionale des commissaires
aux comptes, de la Compagnie régionale des Experts judiciaires,
de l' Association des Conciliateurs
Monseigneur l'Archevêque de Bourges,
Mesdames, Messieurs les représentants des chambres
consulaires, du monde économique, associatif et de la presse,
Mesdames et Messieurs,
Au nom de la cour je vous remercie d'avoir répondu très
nombreux à notre invitation et vous adresse pour la nouvelle
année qui commence, nos vœux les plus chaleureux pour vous
mêmes et tous ceux qui vous sont chers, ainsi que pour les
services que vous représentez.
Notre pays est placé, maintenant depuis plus d'un an, sous le
régime juridique de l'« état d'urgence » pour faire face à des
attaques visant notre mode de vie en société.
Les menaces restent bien réelles comme l'actualité de 2016 l'a
démontré notamment à Nice et à Berlin.
C'est pour nous un devoir de nous d'avoir une pensée pour les
victimes de la barbarie qui nous atteint, leurs familles mais
aussi, pour tous les responsables et acteurs de la sécurité
publique de nos concitoyens qui risquent parfois leur vie pour
nous prémunir contre d'éventuelles attaques.
C'est donc dans ce contexte nouveau et particulièrement
exigeant que nous tous, au sein de cette cour d'appel, nous
assumons la mission qui nous est confié de rendre la justice au
nom du peuple français et dont, conformément aux prescriptions
du code de l'organisation judiciaire, nous vous rendrons compte
dans quelques instants.
Auparavant, nous commençons cette audience par l'installation
dans ses nouvelles fonctions d'un nouveau membre de cette
cour en la personne de Madame Marie-Pierre VIRET nommée
substitut général chargé du secrétariat général du parquet
général.
Je désigne Madame JACQUEMET, pour aller chercher notre
nouvelle collègue.
Madame Le Procureur général, voulez-vous
magistrat de votre parquet général.
désigner
un
Madame le Procureur général, vous avez la parole.
Madame la Directrice de greffe, voulez-vous donner lecture des
décret de nomination de Madame VIRET.
************
Madame VIRET, nous connaissons le dynamisme et la conscience
professionnelle qui vous caractérisent et nous vous félicitons
pour votre promotion amplement méritée. Nous apprécions
d'autant plus votre arrivée de ce côté-ci de nos bâtiments où
vos compétences seront particulièrement
précieuses pour
l'accomplissement de votre missions de « secrétaire général »
qui sont symétriques à celles de Madame JACQUEMET qui
assume les siennes depuis une année.
Ces missions sont en effet parfois transversales et communes
entre le siège et le parquet, puisque la direction de nos
juridictions est « dyarchique ». Ce mode de fonctionnement
particulièrement atypique requiert en effet de ceux qui en ont
la charge, une ouverture d'esprit et des dispositions
personnelles certaines au dialogue franc et loyal.
Avec tous les magistrats du siège, je me réjouis de notre
collaboration et vous souhaite pleine réussite dans vos nouvelles
fonctions.
– Je vous invite à rejoindre votre place au siège du parquet
général.
*********
Activité et avenir de la cour d'appel
Montesquieu nous avait prévenu en indiquant que lorsque « La
justice élève sa voix, elle a peine à se faire entendre dans le
tumulte des passions » !
Force est de constater que cette année 2016 a été marquée, audelà des réformes législatives sur lesquelles je reviendrai plus
tard, par plusieurs événements intéressant directement la
conception que notre pays se fait de l'institution judiciaire.
A l'occasion du Colloque sur la place de l'autorité judiciaire
dans nos institutions, l'on s'est interrogé notamment sur le
point de savoir si la justice judiciaire française devait disposer
des mêmes garanties statutaires que celles dont disposent ses
homologues européennes. Cette réflexion est d'autant plus
importante voire essentielle, car chaque jour ou presque, des
événements judiciaires illustrent les difficultés de notre
positionnement dans l'architecture constitutionnelle.
Il suffit de se souvenir des questionnements suscités
dernièrement par la décision de la juridiction qu'est la Cour de
Justice de la République et, quelques jours plus tard, par
l'exercice du droit de grâce, prérogative du président de la
République, effaçant une condamnation judiciaire...
Ces deux décisions renvoient aux responsables politiques,
l'obligation d'expliquer sinon de clarifier les modes d'exercice
de la justice dans ce pays. En effet, les « passions » que
Montesquieu avait déjà décelées, sont toujours à l'œuvre ! Et il
n'est pas supportable au XXI ° siècle, d'entendre dire que
notre justice « serait héritée de la monarchie » ou pire, que
La Fontaine aurait toujours raison puisque « Selon que vous
serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous seront
blanc ou noir »...
Ces discours participent en effet du travail de sape des
fondements de l'autorité judiciaire dont nous sommes les
dépositaires.
Sans ouvrir plus largement ici le débat de la place de notre
justice au sein des institutions républicaines, l'on ne peut
cependant laisser se développer sans réagir des attaques ou des
interprétations qui, à la longue, favoriseraient la mise en cause
directe de l'indépendance de l'institution judiciaire.
Aussi, est-il nécessaire de rappeler les fondements de cette
indépendance et des règles qui la garantissent en toutes
circonstances.
Comment en effet ne pas s'inquiéter, en tournant notre regard
vers la Turquie, aux limites de l'Europe, de voir un pouvoir par
ailleurs démocratiquement élu et qui plus est, représenté par un
juge à la Cour de Strasbourg, anéantir les fonctions de très
nombreux magistrats, procureurs et juges, et procéder à leur
encontre par des « purges » qui renvoient aux heures sombres
de notre propre histoire judiciaire...
La société actuelle est en outre soumise aux coups de boutoir
amplifiés par les « réseaux sociaux », moyens de communication
manipulables à merci... quand ce n'est pas délibérément par la
« cyberguerre »....
En cette année d'élections politiques cruciales pour notre pays,
souhaitons que l'esprit public conserve de la hauteur et mette
au cœur du débat national le respect loyal et authentique de
l'équilibre de tous les pouvoirs sans lequel il n'existe pas de
démocratie.
Précisément, la prise de position publique, à deux reprises ces
derniers mois et « en urgence absolue », des plus hauts
responsables de notre institution, le premier président de la
cour de cassation et le procureur près cette juridiction, révèle
l'impérieuse obligation de s'assurer en toutes circonstances, de
la réalité des garanties institutionnelles de l'indépendance de la
justice dans notre pays.
**********
L'avenir de la cour d'appel de Bourges
Dans notre ressort, il est une autre préoccupation qui resurgit...
C'est la lancinante question de la vie, sinon de la « survie », de
notre cour ! Beaucoup d'eau est passée sous les ponts depuis les
premières menaces que contenait la réforme de 2008. Le
mauvais présage paraissait s'être éloigné jusqu'à la réforme des
régions administratives qui a confirmé la volonté politique de
« rationaliser » les services publics dans les territoires.
Je ne pensais pas rouvrir ce dossier, mais à lire certains
rapports officiels, après la réalisation de la réforme de la carte
des
cours d'appel des juridictions financières et
administratives, le dernier bastion qui résisterait encore est
celui des cours d'appel judiciaires !
Il nous est ainsi expliqué
que le découpage territorial judiciaire n'est aujourd'hui plus
« soutenable » et qu'est venu le temps de le redéfinir...
Or, l'on peut s'interroger sur les prémisses d'une telle refonte
en regardant de plus près une réforme qui vient d'être décidée
et dessinée avec la loi dite « J21 » du 18 novembre 2016 : celle
de la réorganisation de la gestion du contentieux « social ».
En effet, cette loi prévoit « le transfert définitif, au 1° janvier
2019, du contentieux des tribunaux des affaires de sécurité
sociale (TASS), des tribunaux du contentieux de l’incapacité
(TCI), et d’une partie des commissions départementales d’aide
sociale (CDAS) vers les futurs « pôles sociaux » des tribunaux
de grande instance spécialement désignés ».
L'objectif recherché est double :
- il s'agit de mettre fin à la particularité de ces juridictions,
présidées par des magistrats judiciaires relevant du ministère
de la justice, mais dont le secrétariat est assuré par des agents
issus des organismes de sécurité sociale et du ministère des
affaires sociales et de la santé.
-et d'autre part, l'intégration de la juridiction sociale au sein de
la juridiction de droit commun et le regroupement du
contentieux social doivent constituer un levier d’amélioration du
service public avec notamment la réduction des délais de
jugement, l’uniformisation des procédures et l’amélioration du
pilotage de ces contentieux.
Ainsi, la Circulaire du 2 janvier dernier décrit en détail le
phasage sur 2 ans de la préparation de cette réforme .
Des moyens financiers exceptionnels sont d'ailleurs dégagés
pour atteindre l'objectif impératif d'un an d'ancienneté des
affaires en instance, quand il est parfois dans certaines
juridictions sinistrées de deux, voire trois ans...ce qui n'est pas
le cas dans ce ressort rassurez-vous !
Mais d'autre part, le Législateur a décidé de restructurer le
traitement en appel de ces contentieux qui sera confié à
quelques cours déterminées suivant un distribution territoriale
originale qui n'est pas calquée sur les 12 nouvelles régions
administratives, mais s'en rapproche puisqu'en définitive, sur
les 36 cours d'appel, seulement 18 cours sont désignées pour
traiter les recours.
Nous concernant, le contentieux en appel des « pôles sociaux »
des tribunaux de grande instance du ressort ne sera donc plus
assuré par la cour de Bourges mais sera divisé entre d'un côté
celui des départements de l'Indre et du Cher, qui rejoindra la
cour d'appel d' Orléans, et d'autre part, les affaires jugées à
Nevers seront rejugées par la cour d'appel de Dijon.
Cette circulaire ouvre une période de préparation avec la
création dès à présent, de « comités locaux » au sein de
chaque Tribunal de grande instance, réunissant les
représentants des services judiciaires et des administrations
des affaires sociales. Ils ont pour mission de mesurer sur
chaque site les moyens humains comme matériels, voire
immobiliers, nécessaires pour assurer l'effectivité de la
réforme dans le délai fixé.
Auprès de chacune des 18 nouvelles juridictions d'appel qui
viennent d'être désignées, un « comité de synthèse » des
comités locaux est aussi constitué. Celui d'Orléans se réunira le
2 février...et celui de Dijon le 1° mars...
Comment une réorganisation si lourde et déployée à marche
forcée sur l'ensemble du territoire, serait-elle remise en cause
ou abandonnée dans quelques mois ? Il semble difficile de ne pas
se demander si ce scénario, en forme de préfiguration d'une
décision politique à venir, n'annoncerait pas, à mots couverts,
le prochain « redécoupage » territorial des cours d'appel...
Depuis longtemps, des prémisses de cette réforme ont été
repérés, mais aujourd'hui, les facteurs juridiques et politiques
nécessaires semblent pouvoir être réunis, s'il existe une volonté
politique forte, pour accélérer le processus ....
L'enjeu est donc de taille pour les citoyens des ressorts
concernés, et en premier lieu pour les professionnels du droit
qu'ils soient fonctionnaires comme les magistrats et greffiers,
mais aussi bien évidemment pour les auxiliaires de justice, au
premier rang desquels les avocats.
La réflexion sur les implications d'une telle réforme devra donc
être entreprise sans pour autant ralentir les efforts de
rapprochement de nos services du justiciable comme au moyen
des CDAD, et l'amélioration de l'accueil dans les juridictions,
avec le déploiement des « SAUJ ». Efforts qui sont chaque jour
plus évidents pour répondre à la demande d'une « justice de
proximité » adaptée aux particularités de notre région.
Les nouvelles réformes …
Cette année 2016 a vu fleurir de nombreuses réformes
législatives et notamment celles qui sont issues du colloque de
janvier 2014 sur la « Justice du XXI° siècle », avec en
particulier la « loi J21 » que je viens d' évoquer.
Madame le Procureur général a parlé des aspects pénaux de la
réforme, aussi, je ne reviendrai en cette matière que sur la
réforme du « JLD », pour évoquer ensuite deux autres
domaines : l'indépendance et l'impartialité des juges, qu'il
soient magistrats professionnels ou non professionnels et « le
divorce sans juge ».
a) La réforme des fonctions de « JLD » ( juge des
libertés et de la détention)
Après l'affaire dite d' Outreau, la réforme attendue, était
celle de la juridiction en charge du placement en détention
provisoire.
Votée en 2007, une loi qui apportait une réponse à cette
demande, n'a jamais pu être mise en application et le Parlement
vient de l'abandonner définitivement .
C'est donc la loi du 8 août 2016 qui entrera en application le 1°
septembre prochain, qui a retenu la formation d'un juge unique,
le « JLD », qui a des pouvoirs très importants.
Ce magistrat a en effet, une mission double puisqu'il est le juge
des atteintes à la liberté d'aller et de venir, qu'elles soient
d'origine civile, comme en matière de soins sans consentement
ou de rétention administrative des étrangers en situation
irrégulière, ou qu'elles aient un aspect pénal, avec la détention
provisoire.
Pour garantir de façon exceptionnelle l'indépendance de ce
magistrat du siège, non seulement à l'égard des parties, et du
parquet, mais aussi, de sa hiérarchie directe représentée par le
président de la juridiction, le statut prévoit que le magistrat
« JLD » est un vice-président spécialement nommé à cette
fonction par décret pour une durée de 10 ans, comme c'est le
cas pour les autres fonctions spécialisées comme les juges des
enfants ou les juges de l'application des peines.
La lourdeur de la charge du « JLD » et notamment la
potentielle sollicitation jusqu'à 7 jours sur 7 et 24h/24 dans
des circonstances exceptionnelles, a été évaluée dans les
juridictions. Elle nécessite au minimum deux magistrats pour
assurer un relais.
Or, la définition de ces nouvelles fonctions ne se traduira pas
chez nous, par la création mais par la transformation de postes
déjà existants, ce qui équivaut en pratique à une réduction des
moyens humains des Tribunaux de grande instance.
Il faut en effet prévoir que le titulaire de la charge de JLD
devra assurer d'autres services ou du moins qu'il devra être
secondé dans certaines situations. C'est donc une dérogation au
statut qu'il faudra mettre en œuvre, et vraisemblablement
recourir à la participation à tour de rôle, d' autres collègues,
comme c'est déjà le cas actuellement,ces participations étant
incontournables dans les faits.
Les réflexions dont nous feront part au cours de leurs audiences
de rentrée les présidents des Tribunaux de grande instance du
ressort seront intéressantes sur leur vision de cette réforme
structurelle qui paraît très compliquée à mettre en oeuvre.
b) les garanties d'indépendance et d'impartialité des
juges, qu'il soient magistrats professionnels,
juges
consulaires ou conseillers prud'homaux
La question de l'indépendance et de l'impartialité de la justice a
constitué un fil conducteur des débats sur la Justice du XXI°
siècle. Comme toute autre activité publique, elle est soumise à
l'exigence toujours plus vive de la « transparence de la vie
publique ».
Une notion centrale de la problématique est notamment celle du
« conflit d'intérêts » dont les illustrations défraient
régulièrement la chronique médiatique et judiciaire des
personnes chargées d'un mandat politique. C'est aujourd'hui
dans le souci de « responsabiliser les juges » que la même
exigence a donc été logiquement étendue aux juges de l'ordre
judiciaire.
Ainsi, s'agissant des magistrats professionnels, la loi affirme
que « Les magistrats veillent à prévenir ou à faire cesser
immédiatement les
situations de
conflit
d'intérêts.
« Constitue un conflit d'intérêts toute situation d'interférence
entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés, qui est
de nature à influencer ou à paraître influencer l'exercice
indépendant, impartial et objectif d'une fonction ». Aussi, elle
prévoit que « Dans les deux mois qui suivent l'installation dans
leurs fonctions, les magistrats remettent une déclaration
exhaustive, exacte et sincère de leurs intérêts ».
En outre, certains magistrats et notamment les chefs de
juridictions devront faire une « déclaration de patrimoine » au
début de leurs fonctions.
Par ailleurs, les personnes participant occasionnellement au
service de la justice doivent dorénavant se soumettre à diverses
contraintes inspirées par le même souci de « transparence ».
Ainsi, pour les juges des tribunaux de commerce, qui sont par
nature immergés dans monde des affaires, la confrontation de
ces magistrats occasionnels aux risques de conflits d'intérêts
est fréquente. Elle constituait d'ailleurs, l'une des raisons de la
mise en cause de cette juridiction d'exception, jusqu'à la
décision du Conseil constitutionnel du 4 mai 2012 qui a confirmé
le statut de cette juridiction dans sa forme actuelle, excluant
toute modification comme par exemple celle de l'échevinage qui
avait été envisagé.
C'est dans ce contexte que la loi « J21 » vient de poser des
conditions nouvelles permettant de garantir l'indépendance des
juges consulaires. Ainsi, à côté de l'obligation de formation
continue, la loi fixe certaines règles comme la limite d'âge à 75
ans pour l'exercice d'un mandat et à 4 le maximum de mandats
consécutifs dans le même tribunal.
Mais surtout, la loi affirme que « Les juges des tribunaux de
commerce exercent leurs fonctions en toute indépendance,
dignité, impartialité, intégrité et probité et se comportent de
façon à prévenir tout doute légitime à cet égard » . Elle
détermine enfin dans les mêmes termes que pour les magistrats
professionnels, l'obligation de la déclaration d'intérêts dans
les deux mois qui suivent l'élection du juge consulaire.
Par ailleurs, la procédure
et le régime disciplinaire sont
modifiés par l'introduction de la possibilité de la saisine directe
par un justiciable de la Commission nationale de discipline, sous
réserve de dispositif de filtrage pour éviter les tentatives
d'intimidation. Il est également prévu que le Garde des sceaux
ou le premier président d'une cour d'appel, peut délivrer un
avertissement en dehors de toute procédure disciplinaire ou
saisir la Commission nationale de discipline.
Enfin la mise en place d'un recueil de déontologie est prévue.
Ces mesures prises concernant les juges des tribunaux de
commerce sont similaires à celles que la loi du 6 août 2015, dite
« Loi Macron » a instauré pour les juges prud'homaux et dont
le décret d'application vient d'être publié le 28 décembre
dernier. Ainsi, dès le 1° février prochain, le nouveau dispositif
disciplinaire sera opérationnel et une Commission nationale de
discipline sera mise en place.
Il n'est pas inutile de souligner que le premier président de la
cour d'appel dans le ressort de laquelle le conseiller
prud'homme mis en cause siège, peut proposer au président de
la Commission nationale de discipline de suspendre un conseiller
prud'homme, pour une durée qui ne peut excéder six mois,
lorsqu'il existe contre l'intéressé des faits de nature à
entraîner une sanction disciplinaire.
Tous ces dispositifs nouveaux ont en définitive pour vocation de
renforcer les mesures de contrôle des conditions d'exercice de
l'activité judiciaire et au-delà, de doter les juridictions des
moyens institutionnels leur permettant de relever le défi qui
consiste à restaurer la confiance des français dans leur
système judiciaire.
– « le nouveau divorce sans juge »
Une autre réforme mérite d'être rappelée, celle qui aboutit au
« divorce sans juge »
Faut-il le rappeler, elle était initialement présentée comme un
moyen de « recentrer le juge sur ses missions essentielles »...
En réalité, cette réforme instaurée par la loi « J21 » va
surtout dans le sens de l'évolution de notre société et d'ailleurs,
l'argument selon lequel elle aurait « porté atteinte à l'ordre
public du droit de la famille » a été rejeté par le Conseil
constitutionnel dans sa décision du 17 novembre 2016.
Si elle épouse donc les mœurs du temps présent, la loi nouvelle
n'en est pas moins « révolutionnaire » a-t-on pu écrire, puisqu'en
somme, c'est ici la volonté des époux qui « fait le divorce » sans
intervention du juge, ni d'une quelconque autorité publique. Ce
mode de divorce se rapproche donc de « la rupture par
déclaration conjointe » qui est prévue en matière de PACS.
Ainsi la « déjudiciarisation » du droit de la dissolution du
mariage est inscrite dans notre droit. Et ce n'est pas, en
qualité de gestionnaire des faibles moyens humains et financiers
de nos juridictions, que je vais le regretter...
Par contre, il me semble important de souligner les incidences
plus discrètes mais non moins réelles qui en découlent et que les
praticiens ont immédiatement mis en évidence.
Il s'agit du nouveau rôle dévolu à l'avocat d'une part, mais aussi
du « retour du juge » dans certaines circonstances.
Je n'évoquerai pas le rôle du notaire qui n'a qu'à enregistrer
l'acte, sans disposer, ni revendiquer d'ailleurs, aucun contrôle
sur son contenu...
Ce que l'on a décrit comme l'« éviction du juge » suppose que la
volonté des époux sur le principe du divorce et surtout sur ses
conséquences, est certain, le double accord n'étant plus soumis
à aucun contrôle d'un tiers, comme le faisait le «jugegendarme ». Aussi, pour éviter des dérives, la loi a exclu la
pratique de l'avocat commun et exige désormais que chacun des
époux soit assisté de son propre avocat pour l'établissement de
la convention de divorce.
Cette convention est un « acte d'avocat » contresigné par
chacun des avocats. Il s'agit de la manifestation la plus
symbolique de cette nouvelle catégorie d'acte juridique
introduite récemment dans notre droit qui officialise très
fortement la responsabilité de l'avocat à l'égard de son client.
Il lui revient en effet non seulement de vérifier la réalité du
consentement du client, mais surtout de le conseiller dans
l'élaboration de la convention, accord qui pourrait s'avérer
fragile ou inadapté, ou au pire préjudiciable à l'un ou l'autre,
voire aux deux époux...
N'étant plus garantie par l'« homologation judiciaire » cette
convention pourra donc être contestée par les époux en cas
d'absence ou de vice du consentement, mais aussi par des tiers
des créanciers qui s'estimeraient lésés...... Aussi certains
redoutent déjà la survenance d'un nouveau contentieux ou bien
le recours à d'autres modes de divorce qui sont nécessairement
« judiciaires »...ce qui reviendrait à nier l'objectif recherché !
En l'état, une seule hypothèse de contrôle par le juge de
l'accord des époux a été prévue par le Législateur. C'est
l'hypothèse où un enfant mineur demanderait à être entendu.
Le « retour du juge » est en effet considéré comme une
garantie exigée par la Convention internationale des droits de
l'enfant (CIDE). Il est ainsi expressément exigé des époux
qu'ils attestent, dans la convention contresignée par leurs
avocats, qu'ils ont bien informé leur enfant mineur de son droit
à être entendu par le juge. Cette mention doit être portée à
peine de nullité de la convention, ce que le notaire devra sans
doute vérifier …Mais reste posée la question de la vérification
de ce que les enfants ont été bien et loyalement informés, en
dehors de toute manipulation...??
En somme, si la loi ouvre désormais un nouveau mode de «
divorce sans juge », la pratique dira si, à l'exemple des
dissolutions des PACS, de nouveaux contentieux judiciaires ne
seront pas générés... qui seraient alors vraisemblablement
beaucoup plus conflictuels ...
La réforme de la cour de cassation....
Il y a un an, j'évoquais les réflexions internes à notre institution
sur une réforme des voies de recours de l'appel et du pourvoi en
cassation.
Les procédures de « filtrage » des pourvois en cassation mises
en place restant insatisfaisantes, la réflexion avançait
notamment sur une proposition inspirée du système allemand qui
confie aux cours d'appel elles-même l’examen de la recevabilité
du recours, décision elle même soumise à recours.... Mais, outre
sa complexité et son éloignement de la tradition française,
cette procédure serait en pratique ingérable au sein de
juridictions de la taille de notre cour d'appel ….
Mais, en attendant de réformer les procédures de « filtrages » ,
la loi « J21 » du 18 novembre 2016 vient, alors même que le
projet de loi initial ne l'abordait pas,
au moyen d'un
amendement « subreptice », de modifier la cour de cassation
elle même !
Le but recherché est de donner à la juridiction suprême « la
liberté de choisir les pourvois dignes d'intérêt et de refuser
d'examiner les autres », lui permettant ainsi de mieux assurer
son rôle de cour régulatrice de la jurisprudence.
Ainsi, a été introduit la possibilité pour la cour de solliciter «
l'amicus curiae », c'est à dire « toute personne dont la
compétence ou les connaissances sont de nature à l'éclairer
utilement sur la solution à donner à un litige, à produire des
observations d'ordre général sur les points qu'elle détermine ».
Cette procédure est le symétrique de celle qui existe déjà
devant le Conseil d' Etat.
Elle est en outre complétée par une nouvelle définition de la
mission du parquet général près la cour de cassation. En effet,
le Procureur général se voit confier la mission de « rendre des
avis dans l'intérêt de la loi et du bien commun. Il éclaire la cour
sur la portée de la décision à intervenir ».
L'intervention du parquet général n'est donc plus limitée à la
vision légaliste du problème posé mais elle peut désormais
porter sur l'évolution sociétale. L'ancien Procureur général
NADAL avait parlé de «fenêtre sur l'extérieur »...
Avec l' « amicus curiae », la cour de cassation dispose donc
désormais d'outils au service de son ambition de devenir une
véritable « cour suprême » en mesure de rendre des décisions
de portée très générale.
Par ailleurs, la cour de cassation peut désormais trancher les
litiges au fond sans se référer aux conditions strictes qui
étaient exigées jusque là. Elle peut en effet casser la décision
des juges du fond et elle-même « en matière civile comme en
matière pénale, statuer au fond lorsque l'intérêt d'une bonne
administration de la justice le justifie » ( art L 411-3 al 2 du
COJ) ou « lorsque les faits tels qu'ils ont été souverainement
constatés et appréciés par les juges du fond, lui permettent
d'appliquer la règle de droit appropriée » ( art L 411-3 al 3 su
COJ).
L'alignement sur la procédure devant le Conseil d'Etat est très
clair. Mais, à la différence de la cour de cassation, le « juge
suprême » de l'ordre administratif a toujours été « juge du
fait » et le dossier de procédure qui lui est transmis est entier
à la différence de la procédure de cassation.
Désormais, les deux juridictions sont dotées des mêmes
pouvoirs afin « de ne pas prolonger inutilement le litige et d'y
mettre fin dans les cas où le renvoi à la juridiction dont la
décision est cassée ne se justifie pas ».
Cette réforme répond par ailleurs aux critiques venant de la
Cour de Strasbourg qui reprochait à la cour de cassation de ne
pas juger les affaires elle-même...
L'activité de cette cour en 2016...
S'agissant des chiffres d'activité figurant sur la plaquette qui
vous est remise, je me limiterai à quelques commentaires pour
constater que nous conservons des délais de traitement des
affaires qui sont très corrects par comparaison avec les cours
d'appel de taille comparable.
S'agissant des stocks d' affaires en attente de décision, celui
de la chambre sociale qui augmentait depuis deux ans,
enregistre cette année une diminution de 18 % ( de 626 fin 2015
à 509 fin 2016).
Ce résultat provient notamment d'une diminution significative
de 15% des affaires nouvelles (595 en 2015 à 500 en 2016).
Certes, cette diminution peut n'être que conjoncturelle et
pourrait s'expliquer en partie par l'entrée en vigueur de la
nouvelle procédure d'appel par voie numérisée le 1° août
dernier... Mais ce résultat provient surtout de l'augmentation
des affaires terminées cette année : 621 affaires pour
seulement 529 en 2015, soit une augmentation de 14% qui
nécessite quelques précisions.
Depuis plusieurs années, nous avons mis en place des dispositifs
reposant sur la bonne intelligence entre les avocats du ressort
et nos services, pour garantir à la fois le respect du
contradictoire et une meilleure fluidité des affaires en
proscrivant les trop nombreux renvois souvent dilatoires. Force
est de constater que la « convention de procédure » est restée
souvent ignorée ou du moins sans les effets recherchés....
Face à la dérive de l'augmentation des demandes de renvois, la
chambre a du revenir à la pratique que l'on voulait éviter qui est
celle de la radiation des affaires du rôle qui sont le plus
souvent réinscrites pour être jugées. Le taux de ces radiations
qui atteint plus de 21% des affaires fixées, constitue donc un
allègement des stocks qui n'est qu'un trompe-l'œil !.
Mais depuis le 1° août dernier, la donne a changé puisque la loi a
étendu à la procédure devant la chambre sociale la procédure
avec représentation obligatoire, et introduit la mise en état
par voie dématérialisée.
Cette innovation constitue un changement important dans la
pratique de avocats et du Greffe par l'instauration de délais
contraints pour l'échange des conclusions entre les parties et
l'application de la sanction couperet qu'est la caducité en cas de
non respect des délais.
Cependant, un frein important à l'efficacité optimale attendue
de la nouvelle mise en état des affaires tient à ce qu'elle ne
s'impose qu'entre avocats du ressort de la cour mais ne peut pas
être étendue aux avocats de l'extérieur de la cour... qui sont
pourtant nombreux à venir plaider à Bourges.
Aussi,
l'enregistrement de tous les avocats de France sur nos réseaux
numérisés est très attendue. Les choses avancent certes, mais
encore bien trop lentement alors que le «tout numérique » est
déjà largement répandu dans quasiment tous les secteurs de la
société...
En matière pénale, comme Madame le Procureur général vient
de le démontrer, la charge des cours d'Assises reste lourde. Il
convient de souligner que comme les années passées,
l'engagement professionnel des conseillers Jean-Michel Pignoux
et Patrice Bresciani auxquels s'est joint Olivier Guiraud pour
assurer la présidence de toutes les affaires, ce qui a permis
d'éviter des renvois et l'allongement des délais d'audiencement
des affaires.
Pour rester sur ce chapitre de l'activité pénale, je rejoins les
observations de Madame le Procureur général sur les
dysfonctionnements de ce qu'un « grand quotidien du soir » a
décrit sous le titre « transfert des détenus : autopsie d'une
réforme mal menée ». Le constat est catastrophique au plan
national et le président du Tribunal de grande instance de
Châteauroux avait dès octobre dernier, alerté publiquement les
autorités. Son message est d'ailleurs repris l'article.
Cette situation est un élément extérieur à nos services qui, audelà des pertes de temps innombrables pour « organiser
dans certaines
l'inorganisable », risque d'être la cause
situations de remises en liberté de personnes avant leur
jugement.
Aussi, les mesures préconisées par l'inspection
interministérielle ( Justice et Intérieur) sont d'autant plus
urgentes à mettre en œuvre car il est évident que nous ne
pouvons assumer la responsabilité des conséquences fâcheuses
de ce qui est parfaitement décrit comme la chronique d'une
catastrophe sinon annoncée du moins prévisible... !
***************
D'une manière générale, pour assumer nos missions, l' effectif
des magistrats du siège de la cour est resté complet pendant
toute cette année 2016 et le restera en 2017, sauf quelques
semaines entre mon prochain départ à la fin de ce mois, et
l'installation de mon successeur... !
Mais la cour dispose depuis cette fin d'année 2016 de nouveaux
moyens humains. En effet, contre toute attente, le Ministre de
la Justice a doté l'ensemble des cours d'appel de crédits nous
permettant de recruter de nouveaux agents qui sont les juristes
assistants et les chefs de cabinet.
Ainsi, trois « juristes assistantes » viennent d'être recrutées
par notre cour et deux d'entre elles sont déjà à l'œuvre auprès
des magistrats de la chambre civile et de la chambre sociale en
particulier, ce qui constitue un renfort très appréciable.
De son côté, la « cheffe de cabinet » dont les missions sont
communes entre la première présidence et le parquet général,
prendra ses fonctions dans quelques jours.
Je saisis l'occasion pour renouveler mes souhaits de bienvenue
et de pleine réussite dans leurs nouvelles fonctions à nos quatre
nouvelles collaboratrices.
Les fonctionnaires du Greffe de la cour ont assuré leurs
missions avec un déficit d'effectif de près de 10% et je tiens à
saluer leur dévouement au travail quotidien dans la discrétion
mais marqué par une efficacité sans faille alors qu'ils doivent
en outre s'adapter aux modifications dans l'organisation des
services ou les modes de travail apportées par l'évolution des
procédures, des techniques ou des façons de travailler des
magistrats !
De son côté, fidèle à sa réputation d'excellence qui s'est
maintenue alors que les titulaires ont été pratiquement tous
renouvelés
cette
année,
la
qualité
du
travail
du
« SAR »(Service d'administration régionale) nous a permis de
faire face aux difficultés de gestion des déficits en ressources
humaines avec les greffiers placés qui sont envoyés en mission
dans les services ou en déployant des moyens financiers qui
permettent de recruter le personnel temporaire contractuel
sans lequel nos services seraient sinistrés.
Ainsi, la cour a pu disposer cette année 2016 de 5 ETP
( équivalent temps plein), ce qui a permis de déployer 61 mois de
renforts contractuels qui ont été répartis principalement au
Tribunal de grande instance de Bourges pour 15 mois et au
Tribunal de grande instance de Nevers pour 23 mois.
Cette gestion sûre et fiable du budget qui nous est alloué est la
marque de notre service. Elle nous a permis d'engager la
réorganisation des services d'accueil des justiciables dans les
juridiction avec le déploiement du « SAUJ » ( « Service
d'Accueil Unique du Justiciable ») qui commence par celui du
Tribunal de grande instance de Bourges qui sera inauguré dans
quelques jours.
Un autre domaine a pris cette année une nouvelle envergure avec
le recrutement d'un « technicien immobilier » en la personne de
Madame Drodde dont le temps de travail est partagé avec la
cour d'appel d'Orléans.
Sa formation d'architecte est très largement sollicitée l'étude
préalable de projets immobiliers comme notamment celui du
palais de Châteauroux ou les aménagements nécessaires pour
rendre accessibles aux « PMR » les locaux de ce site, ou
aménager le futur local d'accueil du Tribunal de grande instance
de Nevers....
C'est donc avec plaisir que je tiens une nouvelle fois à féliciter
tout le personnel du service dirigé par notre DDARJ !
Vie des juridictions en 2016...
Parmi les magistrats du siège du ressort l'on compte à ce jour
cinq postes vacants dans le ressort:
- trois postes au Tribunal de grande instance de Bourges : un
juge des enfants, le juge l'application des peines et le 3° juge
d'instruction.
– un poste de juge au Tribunal d'instance de Châteauroux,
– un poste de vice président au Tribunal d' instance de
Nevers.
La cour qui dispose de trois juges placés les délégue en renfort
dans les juridictions : deux sont affectés au Tribunal de grande
instance de Bourges pour assurer les fonctions de juge de
l'application des peines et de juge des enfants. Le troisième, a
pour mission d'aider le Tribunal de grande instance de Nevers
en particulier pour remettre le service du TASS de la Nièvre en
état pour respecter les objectifs de la réforme que je viens d'
évoquer.
Je ne m'appesantirai pas sur l'activité de chacune des
juridictions qui sera déclinée à l'occasion de leurs audiences de
rentrée dans les prochains jours, mais je retiendrai quelques
faits significatifs :
- Au Tribunal de grande instance de Bourges, c'est le départ
du président Ollivier Joulin promu dès la fin mars pour présider
le Tribunal de grande instance de Rennes. Il n'a été remplacé
qu'en septembre par le président Yannick Gressot.
Pendant l'intérim, la charge de travail du président a du être
répartie entre les magistrats et je tiens à souligner qu'un
renfort a même été donné à cette juridiction par deux
conseillers de la cour, Madame Jacquemet et Monsieur Perinetti.
A Châteauroux, l'activité s'est maintenue à un très bon niveau
et les réorganisations se sont poursuivies pour une meilleure
efficacité du service. Le déficit d'affaires nécessitant la
réunion de la cour d'assises dans l'Indre permet d'ailleurs aux
magistrats d'assurer leurs fonctions principales dans les
meilleures conditions possibles.
Par contre, la préoccupation des occupants du Palais a été toute
cette année de préparer l'arrivée dans les locaux désormais
partagés, du service du Conseil des prud'hommes. La réflexion a
été longue et laborieuse, voire par moments tendue avec
certains membre de la juridiction ainsi déplacée. Aujourd'hui,
grâce à la bonne volonté et à l'effort de chacun mais aussi
grâce à l'apport important de notre nouvelle technicienne de
l'immobilier, Madame Drodde, les opérations matérielles du
déménagement ont pu être menées à bien dans les délais fixés.
Certes des aménagements ont été nécessaires et restent à
réaliser pour améliorer les conditions de l'accueil des
justiciables, et c'est le chantier déjà engagé qui s'ouvre
aujourd'hui et occupera les mois qui viennent afin de mettre en
place le « SAUJ » dans les conditions optimales avant la fin de
cette année.
A Nevers, le début de l'année a été très impacté par
l'organisation du procès de M Van Nierop qui a été qualifié de «
procès sensible » et qui a permis de réaliser des aménagements
mobiliers très significatifs. Ce procès très bien anticipé de
longue date avec méthode et sérieux, a été très bien conduit et
c'est à l'honneur de la juridiction dans son ensemble !
D'ailleurs, le succès remarquable de l'opération « Portes
ouvertes » du CDAD de la Nièvre qui a eu lieu en automne dans
le palais de justice peut être considéré comme un écho très
favorable de l'image de la justice qui a été donnée par toute la
juridiction au cours de cette année.
L'année 2017 s'ouvre avec l'anticipation de la mise en place du
« SAUJ » qui nécessite au-delà du choix des personnels
compétents et efficaces pour cette mission délicate, la
réalisation de certains aménagements immobiliers. Forte de la
réussite des opérations du procès qui a marqué l'année 2016, je
ne doute pas que le Tribunal de grande instance de Nevers
relèvera ce nouveau défi avec la même compétence et le même
désir de bien faire.
Puisque j'évoque les aménagements des sites judiciaires, il n'est
pas inutile de souligner la difficulté que nous rencontrons pour
mettre en œuvre dans chacun des lieux accueillant du public, les
préconisations pourtant impératives du plan « Vigipirate
renforcé ». Il faut bien admettre que les moyens financiers
dont nous disposons, bien qu'ils soient abondés dans le cadre des
« crédits PLAT » ( Plan de Lutte Anti-Terrosisme) ne
permettent pas de garantir la parfaite sécurisation de certains
sites qui ne sont pas gardés. Néanmoins, des dispositifs sont mis
en place pour pallier au maximum ces carences et devraient
garantir une sécurisation minimale pour permettre le
fonctionnement le plus serein possible des services.
La suppression de la juridiction de proximité...
Le fonctionnement des juridictions de première instance va être
très sérieusement affecté par la suppression de la juridiction
de proximité dont l'entrée en vigueur initialement prévue pour
le 1° janvier dernier, a été reportée au 1° juillet prochain.
En effet, les juges de proximité dont la dénomination est
remplacée par celle « Magistrat à titre temporaire » auront
des fonctions d'assesseur au Tribunal de grande instance et
participeront à la marge aux services du Tribunal d'instance
puisque celui des affaires civiles qu'il traitaient exclusivement,
sera transféré aux juges d'instance dont les effectifs restent
inchangés.
Certes, les nouveaux « MTT » siègeront dans les formations
collégiales du Tribunal de grande instance et devraient ainsi
dispenser les juges d'instance de venir participer aux services
du Tribunal de grande instance. Cependant, à ce jour, nous
enregistrons une désaffection manifeste des anciens juges de
proximité pour les nouvelles fonctions qui leur sont proposées.
Si l'objectif de la réforme est également d'intégrer les
magistrats professionnels à la retraite dans ces services actifs,
il nous appartient de les convaincre à poursuivre leurs activités
dans ce nouveau cadre statutaire...
Nos relations avec les Barreaux,les Experts et les étudiants.
Cette année 2016 nous a permis d'établir des relations
fructueuses avec les nouvelles Bâtonnières qui atteignent la
moitié de leur mandat....
Les échanges entre les barreaux et les juridictions de première
instance ont été marqués en particulier par la réforme de la
postulation qui l'étend désormais à l'ensemble du ressort de la
cour. J'espère que les travaux en cours de finalisation
permettront très prochainement la signature de la Convention
qui règle les modalités de cette nouvelle façon de procéder de
façon plus harmonieuse devant les trois tribunaux de grande
instance.
De son côté, la Compagnie des Experts judiciaires, sous
l'impulsion de son président M. Yves Chausset, a renoué en juin
dernier avec la tradition, interrompue quelques années, dela
rencontre enrichissante pour la connaissance mutuelle et
l'échange direct des experts avec les magistrats du Tribunal
de grande instance de Bourges et de la cour. Cette pratique est
à poursuivre.
Par ailleurs, avec le concours de l'expert en informatique
Monsieur Gaultier, la Compagnie a organisé plusieurs sessions de
formation destinées à la fois aux experts mais aussi aux
avocats, magistrats et greffiers du ressort pour se familiariser
avec la dématérialisation des expertises judiciaires. La cour se
félicite d'avoir contribué en mettant nos installations
informatiques à la disposition de cette action. Grâce à cet
investissement, elle se trouve dans le peloton de tête des cours
d'appel engagées dans l'expérimentation de cette pratique
innovante qui doit être généralisée dans les prochaines années.
D'ailleurs, les services du Ministère doivent nous proposer de
nouveaux développements que nous sommes prêts à mettre en
œuvre dans cet esprit très constructif qui nous caractérise.
Les relations de la cour avec la Faculté de Droit de Bourges,
antenne de l' Université d' Orléans, se sont enracinées avec le
deuxième événement-phare qu'est le Concours d'éloquence qui
permet aux étudiants de découvrir l'exercice des métiers
judiciaires en s'y plongeant avec le concours de plaidoiries mais
aussi avec des stages chez des avocats ou dans nos services.
Nous remercions aussi tout spécialement la Direction de la
Faculté de droit pour l'accueil de réunions de travail dans ses
locaux comme lundi dernier pour un colloque sur les tutelles qui a
rassemblé un public très nombreux dans de bien meilleures
conditions que dans nos salles d'audience....
**************
Avant de conclure..., et puisque c'est la dernière fois que je
m'exprime publiquement devant vous, permettez-moi de vous
livrer quelques réflexions personnelles sur l'exercice de mes
fonctions que je quitte.
D'une façon générale, comme je l'évoquais au début de mon
propos, je tiens à souligner que le contexte dans lequel
magistrats et fonctionnaires de justice, nous devons remplir nos
missions, s'est compliqué par un environnement marqué par le
développement de l'individualisme et par la violence des
réactions, tant en paroles qu'en actes, des personnes qui
comparaissent devant les juridictions.
Le respect de l'autorité n'est plus évident dans l'esprit de
nombre de nos concitoyens ! Aussi, comment rechercher la
vérité, une vérité socialement acceptable, certes pas divine,
d'une affaire à l'ère de la prolifération du « post-factuel » et
de la « post-vérité »...
Les remparts de la République que constituaient la déférence à
l'égard de l'enseignant, puis du policier ou gendarme, et enfin du
juge, sont bien rabaissés. La question de l'adaptation de nos
modes de fonctionnements judiciaires aux évolutions sociales
est cependant permanente et au cœur de nos préoccupations.
Elle nous incite à développer toujours plus les meilleures
conditions d'accueil du justiciable et à favoriser la
compréhension de nos procédures comme de nos décisions qui
doivent être rédigées dans un style simple et accessible.
Mais pour atteindre ces objectifs ambitieux, alors que nos
charges qui restent lourdes, nos moyens sont très limités.
Monsieur Urvoas a lui-même déclaré en juin dernier que la
justice était « en voie de clochardisation » ! Cette expression
provocatrice par certains égards, correspond cependant
exactement au vécu dans nos services
confrontés aux
difficultés récurrentes pour se doter des fournitures de base...
De même, ce n'est plus un secret, nous ne payons plus en temps
normal nos fournisseurs ou les auxiliaires de justice comme les
experts par exemple …
La situation nous dit-on s'améliore car le Gouvernement a pris
en considération la situation dramatique de notre Ministère... et
force la main de « Berçy » pour débloquer des fonds... mais en
contrepartie, nous devons montrer nos capacités à dépenser
utilement et à poursuivre nos efforts de rationalisation et
d'économies... car la gestion de notre ministère est dans le
viseur de Berçy et dans celui de la Cour des Comptes qui
souhaitent confier cette gestion à des administrateurs civils...
au risque de dénaturer à titre symbolique l'indépendance de la
justice qui repose notamment sur l'autonomie de sa gestion
confiée jusqu'à présent aux magistrats eux-mêmes. C'est là un
défi majeur lancé à notre institution !
Ma deuxième réflexion a trait plus particulièrement
aux
ressources humaines. En l'état, nos missions se sont
considérablement alourdies depuis ces dernières années et les
juridictions ont du les assumer avec moins de personnel, les
départs à la retraite n'étant pas toujours compensés et certains
personnels ne disposant plus des compétences nécessaires pour
assurer avec la qualité et l'efficacité attendues des services en
perpétuelle rénovation.
La « GRH » tant celle des magistrats que celle des
fonctionnaires, est donc devenu une préoccupation permanente
des responsables des services, et il nous est demandé
d'apporter une attention toute particulière aux situations de
« RPS » ( risques psycho-sociaux) qui n'étaient pas imaginables il
y a quelques années à peine, dans notre administration.
Ne voyez pas là un message de Cassandre ou de présages de
mauvaise augure, mais seulement des raisons d'alerte et de
vigilance pour assurer et garantir l'avenir de la belle et solide
institution que j'ai eu l'honneur de servir sur le terrain, et que
je continuerai encore de servir ... dans des sphères plus
parisiennes...
La Cour :
– Déclare Madame Marie-Pierre VIRET installée dans ses
fonctions de Substitut chargé du Secrétariat général du
parquet général de cette cour ,
– Déclare close l'année judiciaire 2016 et ouverte l'année
judiciaire de 2017,
Donne acte à Madame le Procureur général de ses
réquisitions,
– Dit que du tout il sera dressé procès-verbal pour être
joint aux actes importants de cette juridiction.
Avant de lever l'audience, je tiens à remercier publiquement
toutes celles et ceux qui, pendant ces 7 années, m'ont accueilli
et accompagné dans l'exercice passionnant de mes
responsabilités de chef de cour et bien sûr en premier lieu les
Procureurs généraux successifs et plus particulièrement
Madame le Procureur général, chère Jeanne-Marie, avec qui j'ai
partagé avec bonheur la co-direction de cette cour pendant 4
ans.
Je vous souhaite enfin à chacun des magistrats comme les
fonctionnaires de la cour, des Tribunaux de grande instance,
d'instance, des Tribunaux de Commerce et des Conseil des
prud'hommes de poursuivre dans la sérénité l'accomplissement
de nos éminentes fonctions, au service de la paix et de la
modération des relations sociales dans cette belle cour d'appel
qui a démontré l'utilité de son implantation locale et dont nous
pouvons être particulièrement fiers !
Il est temps de nous retrouver dans le Salon d'honneur pour
poursuivre nos échanges dans un moment de convivialité.
–L'audience solennelle est levée.
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