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Sur la route d’Italie. Peindre la nature d’Hubert Robert à Corot
Évreux, Musée, du 26 avril au 21 septembre 2014.
Amiens, Musée de Picardie, du 13 février au 31 mai 2014.
« Des peintures françaises du XIXe siècle de paysages italiens ».
Résumer comme cela l’exposition du musée d’Évreux ne serait
pas tout à fait exact. On y trouve en effet un peintre suisse
(Alexandre Calame) et un autre flamand (Simon Denis) ; quelques
tableaux et dessins représentant des scènes de genre et un
portrait, par Granet ; deux toiles du XVIIIe siècle par Hubert
Robert et Lacroix de Marseille et des paysages représentant la
campagne française… Mais cette légère différence entre le titre
et la réalité des œuvres accrochées s’explique aisément puisqu’il
s’agit d’une collection particulière montrée dans son intégralité
et qu’un amateur n’est soumis à aucune loi sinon celles de son
goût et de ses moyens.
Beaucoup de collectionneurs ont réuni, ces dernières décennies,
des ensembles de peintures de paysages français antérieures à
Barbizon et à l’Impressionnisme. On se rappelle notamment de
celui exposé au Musée des Beaux-Arts de Lyon en 2010 (voir
1. Hubert Robert (1733-1808)
l’article ; depuis, quelques œuvres ont été offertes à ce musée Un dessinateur devant les cascatelles de Tivoli
voir la brève du 1/7/14 - tandis que d’autres revenaient sur le
Huile sur toile - 36 x 28,5 cm
marché de l’art).
Collection Michael Pächt
La collection que présente aujourd’hui le Musée d’Évreux n’a pas
Photo : Didier Rykner
été réunie par un Français, mais par un Autrichien, Michael Pächt,
fils du célèbre historien de l’art Otto Pächt. Son portrait et l’origine de son intérêt pour ce type de
peintures sont décrits dans un essai de Florence Calame-Levert, directrice du musée, et de Gennaro
Toscano, directeur des études du département des conservateurs à l’Institut National du Patrimoine.
Ce dernier est en effet à l’origine de l’idée de ce projet qui permet à de jeunes conservateurs en cours
d’études à l’INP de préparer une exposition et de rédiger son catalogue. Le Musée de Picardie à Amiens
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accueillera cette collection l’année prochaine .
Celle-ci compte (au moment de l’élaboration de
l’exposition, car Michaël Pächt continue d’acheter)
soixante-neuf œuvres, de qualité inégale, parfois
splendides, d’autres plus modestes, toujours
attachantes jusqu’aux (rares) erreurs d’acquisition qui
ne sont pas cachées. L’étude des œuvres a en effet
occasionné le déclassement de quelques-unes, dont un
Paysage avec moines d’après Constantin d’Aix ou
François-Marius Granet dont il porte une fausse
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signature ou quelques huiles et aquarelles
(repoussées en fin de catalogue dans un appendice,
mais exposées) acquises sous un nom mais
désattribuées, ce qui ne veut d’ailleurs pas dire qu’elles
sont médiocres.
Beaucoup de noms importants de l’histoire du paysage
français sont représentés, du néoclassicisme au
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2. Simon Denis (1755-1813)
Vue de Tivoli
Huile sur papier marouflé sur toile - 38 x 59,5 cm
Collection Michael Pächt
Photo : Didier Rykner
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romantisme, en allant jusqu’à l’école de Barbizon. Le parcours commence avec une jolie petite toile
d’Hubert Robert figurant Un dessinateur devant les cascatelles de Tivoli (ill. 1), un site particulièrement
apprécié par les peintres et dont de nombreuses vues sont accrochées ici. Une jolie petite peinture de
l’élève de Joseph Vernet, Lacroix de Marseille, montre Fontaine de Vaucluse.
Une autre vue de Tivoli (ill. 2), peinte par Simon Denis, est très remarquable dans sa représentation de
la brume causée par les gouttes disséminées dans l’atmosphère par la chute de l’eau. L’auteur de la
notice la situe au début de son séjour romain en raison de son aspect encore très XVIIIe siècle (Simon
Denis arriva en Italie en 1785 et y mourut en 1813).
4. Jean-Joseph-Xavier Bidauld (1758-1846)
Paysage de rivière aux baigneuses surprises par un lion
Huile sur toile - 25 x 32 cm
3. Jean-Antoine Constantin, dit
Constantin d’Aix (1756-1844)
Collection Michael Pächt
Photo : Tajan
Pêcheurs aux abords d’une grotte à
a Fontaine du Vaucluse}, vers 1810-1830
Huile sur papier marouflé sur panneau - 49 x 40 cm
Collection Michael Pächt
Photo : INP/G. Vanneste
L’exposition, qui montre plusieurs œuvres de
Constantin d’Aix, manifestement très apprécié par le
collectionneur, nous réconcilie avec cet artiste que le
Musée Granet avait utilisé sans vergogne pour faire
bouche-trou entre deux expositions dans ses salles
permanentes. Si ses dessins sont parfois un peu
ennuyeux, ses huiles sur papier peuvent être très
spectaculaires (ill. 3).
Si Valenciennes manque à l’appel, la plupart des
paysagistes néoclassiques français actifs à Rome dans
la première moitié du XIXe siècle sont présents :
Dunouy, Bidauld, Jean-Victor Bertin, Rémond,
Michallon, Caruelle d’Aligny… Parmi toutes leurs
5. Achille-Etna Michallon (1796-1822)
œuvres, nous reproduirons ici le Paysage de rivière aux
Vue des ruines du théâtre de Taormine, 1821
baigneuses surprises par un lion de Bidauld (ill. 4), où
Huile sur toile - 20,5 x 27,2 cm
l’on voit comment l’artiste aime représenter de manière
Collection Michael Pächt
minutieuse la moindre feuille, au contraire par exemple
Photo : Sotheby’s
de Michallon dans sa Vue des ruines du théâtre de
Taormine (ill. 5) ou celle du lac de Nemi, par un temps orageux, plus esquissées.
On voit également de nombreux Corot dans cette collection, à la fois de petites huiles, des dessins
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(Saint Sébastien secouru par les saintes femmes
préparatoire à un tableau du Walters Art Museum de
Baltimore) et plusieurs clichés-verre, technique utilisée
sur une courte période au XIXe siècle mais reprise au
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XXe notamment par Man Ray .
Quelques paysages romantiques par Paul Huet (dont
une très belle aquarelle : Litière de forêt à l’automne –
et Decamps, et de l’école de Barbizon (Diaz de la Peña
et Théodore Rousseau, Henri Harpignies - ill. 6)
complètent un ensemble finalement assez homogène,
dominé par les huiles de petit format, ce qui permet un
accrochage serré, un peu dans l’esprit de la collection
privée que l’on voit sur une photo du catalogue.
6. Henri Harpignies (1819-1916)
Promenade en lisière de forêt
Aquarelle - 11,5 x 18,7 cm
Collection Michael Pächt
Servant un propos pédagogique, le catalogue se devait
Photo : INP/G. Vanneste
d’être exemplaire. Il l’est, en grande partie, combinant
plusieurs essais à des notices assez fournies (mais qui auraient gagné à une relecture plus
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approfondie, non pour corriger des coquilles mais un certain nombre de répétitions ). Il bénéficie d’un
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index, d’une bibliographie détaillée et de notices biographiques des peintres exposés .
Pour que cette entreprise puisse être citée en modèle, il serait cependant souhaitable que le prêteur,
bénéficiant ainsi du travail de conservateurs payés par l’État qui, indiscutablement, valorisent sa
collection, fasse comme ses prédécesseurs (Prat et Motais de Narbonne au Louvre, Gayrard à Lyon…)
quelques dons à Évreux et à Amiens !
Commissaire scientifique : Gennaro Toscano.
Commissaires : Florence Calame-Levert, François Bridey et Olivia Voisin.
Sous la direction de Gennaro Toscano, Sur la route d’Italie. Peindre la nature
d’Hubert Robert à Corot. Le goût d’un collectionneur, Gourcuff Gradenigo,
2014, 238 p., 29 €. ISBN : 9782353401789.
Informations pratiques :Musée d’Évreux, 6, rue Charles Corbeau, 27000 Évreux. Tél : 00 33 (0)2 32 31
81 90. Ouvert du mardi au dimanche, de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h. Entrée libre.
Site du musée.
Signalons aussi, à cette occasion, par Gennaro Toscano, chez le même éditeur Gourcuff-Gradenigo
avec l’INP, et en compagnie de deux co-auteurs, Anna Maria d’Achille et Antonio Iacobini, la parution
du journal de voyage en Italie d’Aubin-Louis Millin. Cet archéologue et historien de l’art français
parcourut la péninsule, à partir de 1811 et pendant trois ans, se rendant notamment dans le sud
jusque là peu exploré, avec pour objectif de faire dessiner par des artistes locaux, mais aussi
étrangers, des relevés de monuments et les paysages. Cette entreprise, véritable voyage pittoresque,
n’aboutit finalement pas, mais il rédigea un compte rendu de ce voyage adressé aux membres de
l’Institut de France, publié en 1814 et republié ici. L’ouvrage est illustré de nombreux dessins tirés du
fonds très important de la Bibliothèque nationale (1040 feuilles). Des essais sur Millin, sur Catel, un
des artistes qu’il employa, et sur la thématique plus générale du voyage en Italie complètent
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l’ouvrage .
Anna Martia d’Achille, Antonio Iacobini, Gennaro Toscano, Le voyage en Italie d’Aubin-Louis Millin
1811-1813, un archéologue dans l’Italie napoléonienne, Gourcuff-Gradenigo, 2014, 204 p., 32 €.
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Sur la route d'Italie. Peindre la nature d'Hubert Robert à Corot - La Tri...
http://www.latribunedelart.com/sur-la-route-d-italie-peindre-la-nature-...
ISBN : 9782353401857.
Didier Rykner, mercredi 23 juillet 2014
Notes
1. Olivia Voisin qui depuis a été nommée conservateur de ce musée (les lecteurs de La Tribune de l’Art connaissent son travail
important pour la remise à l’honneur des œuvres du XIXe siècle), participe à cette exposition.
2. Signalons d’ailleurs pour être précis que lorsqu’une signature n’est pas considérée comme authentique, il est préférable
d’écrire dans la notice technique « porte une signature » plutôt que « signé ».
3. Contrairement à l’affirmation du catalogue qui dit que cette technique « ne connut pas de prolongement après la mort de
ses inventeurs ».
4. En écrivant cela, nous avons bien conscience de ne pas nous mêmes être parfaits sur ce point, l’Internet nous permettant
fort heureusement de corriger nos erreurs de style après publication…
5. Il aurait été souhaitable que les dates de naissance et de mort des peintres soient précisées aussi dans les notices.
6. Roch Payet, directeur des études du département des restaurateurs à l’INP, nous précise que ce département et celui des
conservateurs ont collaboré pour cette exposition pour sa conception, son montage et son accrochage.
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