Histoire des Noirs aux Etats-Unis : les faits essentiels

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Histoire des Noirs aux Etats-Unis : les faits essentiels
Le rôle des noirs avant, pendant et après la guerre de Sécession
Page élaborée à partir du travail de Inès Halleux (avec quelques modifications de Y. Vienne)
1) Avant la guerre de Sécession (en anglais "Civil War")
12 à 15 millions de Noirs ont été arrachés à l’Afrique à partir de la fin du 17è siècle. Ils étaient réputés pour
supporter mieux le travail forcé dans le climat éprouvant des Caraïbes et de l’Amérique latine que les Indiens
autochtones, qui avaient été très rapidement décimés par les premiers colonisateurs.
Durant le voyage qui les menaient de l’Afrique en Amérique, dans les cales des « négriers », de nombreux
esclaves mouraient à cause des maladies.
Après 1807, les négriers ont été attaqués par la marine de guerre anglaise (c'est l'époque et une partie du
thème d'Amistad, de Spielberg) car le commerce des esclaves était devenu illégal. Pour ne pas être pris, les
négriers jetaient parfois les esclaves à la mer.
Une fois arrivés sur les côtes américaines, les esclaves survivants étaient vendus.
Dans les colonies du Nord, les esclaves étaient utilisés à des tâches domestiques et dans le commerce. Dans les
colonies du Centre, ils étaient davantage utilisés dans l’agriculture et dans les colonies du Sud, ils travaillaient
dans les grandes plantations de coton et de tabac.
Les esclaves noirs d’Amérique ne sont pas restés sans réaction et, à plusieurs reprises, ont essayé de se rebeller
contre leurs oppresseurs : ils utilisaient pour cela divers moyens :
- ils feignaient la maladie ou pratiquaient l’automutilation.
- ils sabotaient les outils et brutalisaient le bétail.
- ils prenaient la fuite, d’autres esclaves parvenaient à fabriquer de faux laissez-passer ou de faux papiers
d’affranchis.
- ils organisaient des mutineries à bord des négriers.
- ils complotaient des incendies criminels ou des sabotages.
Mais les « maîtres » des esclaves mirent rapidement en place des réponses pour réprimer ces révoltes :
- organisations de système de gardes, rondes et couvre-feu propre à chaque plantation.
- régisseur pour surveiller les travaux des champs et fouiller les cabanes des Noirs.
- des châtiments corporels, privations de sorties ou de laissez-passer, travail supplémentaire.
- diminution des rations, emprisonnement, mise aux fers, marquage au fer rouge, fouet.
- codes noirs qui visent à empêcher: le rassemblement des Noirs, l’éveil d’une conscience collective, les relations
entre affranchis et esclaves.
2) Pendant la Guerre de Sécession (1861-1865, sous la présidence d'Abraham Lincoln, assassiné en 1865)
Dans le Nord où ils furent d'abord libérés, les noirs organisèrent des sociétés de secours pour venir en aide à
leurs frères esclaves ou nouveaux affranchis et s ’efforcèrent de les instruire.
Les femmes s’engagèrent comme aides hospitalières ou infirmières.
Les hommes servirent l’Union comme matelots, ordonnances, cuisiniers et ouvriers dans l’armée.
A l'été 1862, les Noirs furent officiellement autorisés à s’engager dans l’armée mais l’accès aux grades
d’officiers leur était interdit et c’est seulement en juin 1864 que leur solde devint égale à celle de leurs
camarades blancs (voir le film "Glory" de Edward Zwick, (1989) avec Matthew Broderick et Denzel Washington,
qui conte l'histoire d'un bataillon noir engagé dans la guerre civile).
Dans le Sud, les révoltes des Noirs se firent plus régulières: ils brûlèrent les champs et tentèrent de prendre
les armes contre leurs « maîtres ».
Par contre, d’autres restèrent aux côtés de leurs maîtres, par attachement, par menace ou par incapacité à
gérer cette liberté : ils n’avaient connus qu’eux et ne savaient quoi faire seuls, une fois la guerre terminée.
3) Après la guerre de Sécession
Les Noirs avaient gagné leur liberté mais beaucoup de Blancs, surtout dans les états vaincus du Sud,
n’acceptaient pas l’égalité entre la race noire et la race blanche (considérant comme une évidence, leur
supériorité).
Le droit de vote fut donné aux Noirs. Mais les anciens esclaves étaient mal armés pour assumer des
responsabilités politiques. Ils aspiraient à l’instruction et à la jouissance d’un lopin de terre plutôt qu'à l’exercice
de droits politiques.
En 1867, une société secrète, ayant pour but premier d'empêcher les Noirs de voter, fut créée dans le
Tennessee : le Ku Klux Klan. Cette société usait de la menace, de la cravache, voire de la corde et du fusil. Ils
répandaient la terreur parmi les Noirs mais aussi, et peut-être davantage, parmi les dirigeants républicains.
Cette société refit surface dans les années 1920 et 1960 et est toujours présente aujourd'hui.
Dans un premier temps, on voulut aider les Noirs en leur distribuant des terres: 40 acres et une mule, mais ce
fut un échec car on ne voulait pas vraiment chercher des lopins de terre pour eux.
Le premier constat était donc négatif, l'échec apparaissant tant dans le domaine de l'exercice des droits
politiques - où le droit de vote était purement formel - que dans le domaine de l'indépendance économique.
Dans un second temps, diverses institutions furent mises en place pour maintenir les Noirs en état de
subordination :
- au niveau économique se développa le métayage (ou "sharecropping") dans lequel le Noir, pour travailler, devait
se mettre au service du Blanc, propriétaire de terre. Chacun recevait une partie des récoltes mais le métayer
était criblé de dettes car il devait rembourser l’équipement qu’il avait emprunté au propriétaire des terres.
- au niveau social, une ségrégation de plus en plus rigide s'installa au fil du temps. Dans les années qui suivirent la
guerre de Sécession, Noirs et Blancs se mêlaient jusqu’à un certain point dans les lieux publics et les transports.
Mais les unions mixtes étaient proscrites et les écoles séparées et cela jusqu’en 1954.
- au niveau politique: le vote des Noirs fut effectif jusqu’en 1890 puis les Blancs trouvèrent des moyens
détournés pour les empêcher de voter:
* taxes à payer pour voter
* loi du grand- père: les Noirs devaient avoir un grand-père ayant voté avant 1867.
Le combat pour les droits civiques fut long et difficile; on se souvient de Malcolm X, assassiné en 1965, de la
marche du pasteur Martin Luther King, prix Nobel de la Paix et de son assassinat en 1968 mais aussi de la
disparition violente d'autres leaders, pacifiques ou activistes, de la constitution du Black Power et de son égérie,
Angela Davis. Emprisonnée 16 mois, elle est aujourd'hui toujours active comme universitaire et comme militante
des droits des noirs.
Les résistances rencontrées, les injustices si nombreuses qu'ils ont dû subir expliquent d'ailleurs la difficulté
des Noirs à se cantonner dans une stratégie toujours strictement pacifiste.
En place depuis 1965 une politique appelée "affirmative action" (ou "discrimination positive" en français) fixe des
quotas pour les minorités dans les entreprises, les universités et même dans les films hollywoodiens. Cette
politique reste très controversée car dénoncée par beaucoup comme une "discrimination à l'envers".
Même si aujourd’hui l’esclavage est aboli, les droits civiques respectés et la discrimination moins marquée dans le
monde du travail, l’égalité des chances entre minorités et blancs n’est pas encore atteinte.
Des hommes, des femmes et des enfants souffrent encore de cette inégalité de « couleur » et les mouvements
racistes existent bien comme on le voit dans "American History X.".
On peut terminer ce tour d'horizon sommaire par un exemple illustrant bien les contradictions de la société
américaine : depuis bien plus longtemps que chez nous la majeure partie des télévisions américaines ont des
journalistes et des présentateurs noirs pour leurs informations, et ce même aux heures de grande écoute.
Néanmoins cela n'empêche pas nombre de chaînes d'entretenir, alors même que la criminalité est globalement en
baisse, une concentration de l'information sur les faits-divers violents dont les auteurs (présumés ou non) sont le
plus souvent (comme par hasard) ...des Noirs (voir à ce sujet le film de Michael Moore "Bowling for Columbine").