Master and commander

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Master and commander
"Master and commander" : une leçon de Leadership.
Avez-vous vu "Master and Commander : de l’autre côté du Monde" ?
Splendide film de Peter Weir sorti en 2003, dans lequel Jack Aubrey, charismatique
commandant du vaisseau royal Surprise, se lance à la poursuite du vaisseau français
l’Acheron. Le film nous emmène dans une aventure plus humaine que maritime. La
poursuite navale est un prétexte à l’étude de la vie d’une communauté de marins du XIXème
siècle sous la direction complexe et nuancée de leur commandant.
Toute à la contemplation d’un Russel Crowe au sommet de son art, j’ai été néanmoins
interpellée par la fresque détaillée peinte par le réalisateur sur le sujet du commandement
et du leadership.
Au cours de mes recherches incesssantes ces dernières années sur le leadership, j’ai identifié
7 compétences majeures nécessaires au leader idéal, et je me suis amusée à observer
comment Jack Aubrey, le Master and Commander, les déploie sur son vaisseau.
Le développement des collaborateurs :
Jack délègue. Preuve qu’on peut être officier de la marine anglaise et déléguer pour aider
l’autre à se développer et à dépasser ses propres limites. Lors de l’abordage de l’Acheron, il
passe en première ligne et demande à son tout jeune Lieutenant Blackney, petite tête
blonde, de prendre le commandement du navire. Les yeux tout pétillants de fierté, le jeune
Blackney prend la barre avec volonté et responsabilité.
Plus tard, lorsque l’Acheron s’est rendu, il confie son commandement à son second,
Bowlings, en lui remettant très solennellement sa lettre de mission pour conduire le navire
jusqu’à Valparaiso.
Dans les deux cas, les lieutenants ont une opportunité de se développer et de mettre à
l’épreuve leurs propres compétences. Jack n’a pas peur de leur faire confiance.
Le coaching, le feedback et l’écoute :
Installé dans sa cabine luxueuse du pont arrière, Jack doute. Il s’interroge souvent sur ses
propres décisions prises ou à prendre. A la lueur d’une bougie et entre deux accords de
violon, il demande du feedback à son ami le médecin du bord. Celui-ci lui renvoie en miroir
les conséquences bonnes ou mauvaises de ses actions du jour. Parfois, le commandant
change d’avis, parfois il persiste. Il reste le seul maitre. Mais il pratique l’écoute de son ami,
mais aussi de ses lieutenants, avec une grande attention et en conservant la distance
nécessaire à sa réflexion.
Un jour, son lieutenant Holom, peu apte à se faire respecter, se fait bousculer par un marin
sur le pont. Jack réagit immédiatement. Il fait fouetter ce marin qu’il estime pourtant
tellement par ailleurs. Et il convoque son lieutenant pour évoquer avec lui l’incident.
Jack ne laisse rien passer, il a l’œil sur tout. Il écoute, observe, et agit immédiatement en
conséquence. Il sait qu’un seul écart de sa part peut mettre la vie de tous en jeu.
La communication :
Aubrey pratique la communication positive et sûre en toute circonstance. Pas question que
ses hommes voient l’inquiétude sur son visage. Il doute seul dans sa cabine, se montre
vulnérable son violon à la main, en colère l’œil rivé sur l’horizon. Mais une fois son bicorne
sur le front et sa jaquette enfilée, il a l’allure fière et inébranlable. Les ordres sûrs. La parole
implacable. La posture droite et battante.
Ces hommes ont une confiance absolue en leur maitre. Ils croient aux compétences
infaillibles de leur commandant. D’ailleurs ils l’appellent "Jack la chance", persuadés que rien
de dramatique n’arrive jamais à cet homme là.
La motivation et l’engagement :
La ration de Tafia est un outil de récompense ou de punition utile et facile à bord du
Surprise. Mais Jack sait aussi toucher la fierté et l’égo de ses hommes pour les motiver et les
engager. Lors de la préparation à l’abordage de l’Acheron, le feu fait rage entre les deux
navires. Les hommes sont au comble du stress et de la peur. Jack descend dans la cale aux
canons et motive ses troupes : "Vous voulez que Bonaparte figure sur vos shillings?" "Non"
crient les marins. "Vous voulez que vos enfants chantent la Marseillaise?" "Non" répondentils encore. Appel patriotique qui fouette le sang des hommes et les motive à se jeter dans la
bataille au côté de leur commandant, sans l’ombre d’un doute.
La notion de focus, le suivi et le contrôle :
Le plus important pour le commandant Aubrey reste sa mission. La lettre de mission de son
roi, il n’a que ça en tête. Il lui arrive parfois de se laisser aller aux projets utopiques de son
ami médecin et scientifique, mais seulement si cela ne contrarie pas sa mission première. Et
s’il doit se fâcher avec son ami pour faire passer son ordre de mission en premier, il n’hésite
pas à le faire.
Focus, vous avez dit focus ? Tellement focus, qu’il sent la présence de l’Acheron avant de le
voir. On pourrait appeler ça de l’intuition de l’objectif.
Le courage managérial :
Sur ce thème, la leçon donnée par Jack la chance n’est pas en demi-teinte. Tandis que la
tempête malmène le Surprise au large du Cap Horn, un des mâts se brise et tombe à la mer
avec son homme de vigie. Le mât rompu entraine le navire vers le fond et le commandant
doit prendre une terrible décision : couper les liens qui retiennent le mât au navire et
condamner son marin de vigie à une mort effroyable et certaine. L’espace d’un instant, l’œil
de Jack se trouble. Il hésite, se retourne et voit ses hommes suspendus à sa décision, il sent
qu’ils s’en remettent à lui. Alors il rompt les cordes lui-même, assumant pleinement son
courage.
Caricatural, me direz-vous ? Je dirais plutôt symbolique. Il faut parfois faire passer l’intérêt
collectif devant la nécessité individuelle.
Les hautes valeurs :
Le personnage de Nelson, légendaire officier de la marine anglaise, n’est pas physiquement
présent dans le film, mais il est évoqué à plusieurs reprises comme un marin exemplaire,
courageux dans les tempêtes, d’une loyauté sans faille à son roi, et stratège hors pair dans la
bataille. Son image de mentor semble planer sur les esprits et chacun rêve de pouvoir un
jour lui ressembler. Le commandant Aubrey, lui-même, reconnait également les valeurs
portées par ce personnage qu’il a côtoyé tandis qu’il était jeune marin. Il a fait de Nelson son
modèle, il s’applique à se conduire à la hauteur de cet homme exemplaire. Les hommes en
font une légende, et choisissent ses valeurs comme références.
Jack Aubrey, à mon sens, maitrise les 7 compétences du leader idéal. Il les pratique au
quotidien et les croise avec agilité. Je crois qu’il ajoute à cela 3 qualités personnelles
essentielles à un grand meneur d’hommes : le charisme, l’humanité, et la discipline. Un
cocktail performant grâce auquel ses hommes le suivraient au bout du monde.
Avez-vous choisi votre mentor en termes de leadership ?
Moi j’ai trouvé le mien : Jack la Chance.

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