quel avenir pour la ria d`etel

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quel avenir pour la ria d`etel
N° 23-24-25-26 - 4e trimestre 2004 - 10 € - ISSN 1286-370 X
Petites Nouvelles
DU PATRIMOINE ET DES
Directeur de la publication : Marie-Claire BORDE
PAYSAGES
en Morbihan
Coordination : Isabelle FALHUN
Union pour la Mise en Valeur Esthétique du Morbihan - « Patrimoine et Paysage »
Téléphone : 02 97 76 16 22 - Télécopie 02 97 76 10 29 - Courriel : [email protected]
Bordlann - Le Mané - 56600 LANESTER
Site internet : www.umivem.fr.tc
QUEL AVENIR POUR LA RIA D’ETEL ?
Paysage, Urbanisme et Architecture
Extraits
des actes
du colloque
des 29 et 30 mars 2004
Qu’est-ce que l’Umivem ?
L
’Union pour la mise en valeur esthétique du
Morbihan — « Patrimoine et Paysage » a pour
but la défense et la mise en valeur du patrimoine
morbihannais, notamment le patrimoine artistique,
architectural, culturel et naturel.
L’UMIVEM a été créée en 1969 à la demande d’Henry
de Segogne, conseiller d’Etat, qui venait lui-même de lancer la FNASSEM (Fédération Nationale des Associations
de Sauvegarde des Sites et Ensembles Monumentaux) et
désirait que sa fédération soit représentée dans chaque
département.
Ses animateurs ne défendent pas le passé pour le passé
mais souhaitent prouver que sens du présent et respect du
passé ne sont pas incompatibles. D’accord avec les
autorités ministérielles préoccupées particulièrement
par l’environnement, ils estiment que les hommes
d’aujourd’hui ont besoin de beauté et ils désirent à la fois
préserver et mettre en valeur ce qui répond à ce besoin.
Au départ l’UMIVEM regroupait 10 associations
s’intéressant aussi bien au patrimoine bâti qu’au
patrimoine naturel. Elle en compte maintenant 47 qui
sont une émanation soit d’une association nationale
comme les Vieilles Maisons Françaises, soit d’une
association régionale comme Breiz Santel ou Eau et
Rivières, soit des associations locales comme La Vigie de
La Trinité-sur-Mer, les Amis de Carnac, etc..
Parutions de l'UMIVEM
BROCHURES "ÉGLISES ET CHAPELLES" par le Chanoine Joseph DANIGO.
Pays de Baud, 1974, 82 p, épuisé
Canton de Cléguérec, 1980, l20 p, épuisé.
Pays de Lanvaux, 1983,184 p, épuisé..
DOYENNÉ de PORT-LOUIS ET de GROIX (Port-Louis, Gâvres, Kervignac, Nostang, Groix,
Locmiquélic, Merlevenez, Plouhinec, Riantec, Ste-Hélène), 1984,168 p, 12 €.
DOYENNÉ de BELZ (Belz, Erdeven, Etel, Locoal, Mendon, Ploemel), 1986, 138 p, 12 €.
Vannes ouest, 1988, 142 p, épuisé.
VANNES EST (St-Avé, Séné, Surzur, Noyalo, Le Hézo, La Trinité-Surzur, Theix, St-Patern de Vannes),
1989, 192 p, 12 €.
Canton de Locminé 1991, 232 p, épuisé.
ROYAUME DE BIGNAN (Bignan, Billio Buléon, Guéhenno, Plumelec, Saint-Aubin, Callac, SaintAllouestre, Saint-Jean-Brévelay), 1993, 256 p, 13 €.
Pays de Guémené, 1ère partie, 1994, 188 p, épuisé.
Pays de Guémené, 2ème partie, 1996, l96 p, épuisé.
Muzillac, 1ère partie, 1997, 160 p, épuisé.
Muzillac, 2ème partie (Lauzach, Ambon, Damgan, Pénerf, Péaule, Marzan, Arzal), 1998, 208 p, 15 €.
Paroisse de Guern, de Marie-France Bonniec, 2003, 106 p, 12 €.
"Restaurer en Bretagne - Le Morbihan", d’Albert DEGEZ, éd. Serg, 1981, épuisé.
"DUNE SAUVAGE" écrit et illustré par Albertine Deletaille, album relié (Format 22,5 x 24,5 cm) de 64 p,
13 €.
"LE JEU DE L’HERMINE ou 1000 pas pour la sauvegarde patrimoine" (Label de l’Année Européenne de
l’Environnement), 22 €.
Un coffret de puzzles sur le thème de la dune, épuisé.
Cotisations
SIMPLE :
20 €
AVEC ABONNEMENT :
30 €
BIENFAITEUR :
40 €
à adresser à
l’UMIVEM
Bordlann - Le Mané
56600 LANESTER
Crédit photos : Serge ESVAN, Jean-Yves COLLIN (Le Télégramme), Jean-Pierre FERRAND, Mariette HUIDO (Ouest-France), Jo LE GUILLOU,
Alain LANOË, Cohoner-Fischof, Philippe RIO, Lise CORDONNIER, Cartopole de Baud, Conseil Général du Morbihan, Jean LE CORGUILLÉ.
Ont contribué à ce numéro : Agnès BOLZINGER, François EECKMAN, Marie-Thérèse KLOTZ, Martine GERDIL, Yves GUILLAUMOT,
Marie-Madeleine MARTINIE, Christine MONTFORT, Collectif du Golfe du Morbihan.
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Lundi 29 mars
Discours d’ouverture
du Maire d’Etel
B
ienvenue à vous Madame Borde et à vous tous qui
avez choisi de passer deux journées dans notre
commune d’Etel à réfléchir sur l’avenir de la Ria à
l’occasion de ce colloque organisé par l’UMIVEM.
Je vous souhaite des échanges fructueux, et pour que
vous puissiez mieux découvrir et apprécier notre
Commune, j’aimerais vous la présenter, en soulignant les
faits marquants de son histoire.
ETEL (aujourd’hui 2 500 habitants - 175 hectares) doit
peut-être son nom à l’époque de l’occupation romaine (de
58 avant Jésus-Christ à 409 après Jésus-Christ), du latin :
In Tellus, sur la terre ferme (par opposition à la lagune
d’alors) ou Iter, passage (qui évoquerait le passage de la
"barre"), comme on le trouve écrit sur de vieilles cartes
bretonnes, ou encore du vieux celtique (détroit, chenal,
bras de mer, lagune…).
De ce passé, on trouve encore quelques traces, les
Romains ayant construit, entre Etel et Nostang (véritable
cité romaine, à l’époque, au fond de la rivière), un certain
nombre d’ouvrages militaires, les "oppidums".
Plus près de nous, au début du XIXème siècle, Etel est
encore partie intégrante d’Erdeven, la Commune voisine.
Sa population, essentiellement maritime, est alors de
700 habitants et la pêche à la sardine représente son
activité principale.
S’estimant lésés, pour des raisons diverses, alors qu’ils
contribuaient fortement à l’économie du pays, les habitants d’Etel demandent et obtiennent leur séparation
d’Erdeven. Etel devient Commune à part entière en 1850.
La pêche au thon complète peu à peu la pêche à la
sardine et devient prépondérante vers 1920. Etel connaît
alors un grand essor qui se poursuivra jusqu’à la dernière
guerre mondiale.
Dans les années 1930, deux cent cinquante thoniers
formaient à Etel l’une des plus belles flottilles de la
côte atlantique. Dans la région immédiate, douze conserveries y employaient une main d’œuvre considérable,
essentiellement féminine.
Mais la crise de la pêche au thon en 1950, la
destruction de certains fonds, l’attrait du port de Lorient
reconstruit, l’inconvénient d’un accès au port tributaire de
la marée amorcent le déclin de l’activité maritime d’Etel.
Mme Marie-Claire BORDE et Rémy GUILLEVIC, maire d’Etel
La dernière conserverie a résisté au temps jusqu’en
1996. Elle employait alors cent cinquante personnes.
Aujourd’hui, le port n’est plus animé que par 260 bateaux
de plaisance.
Il eut été utopique d’imaginer que du fait de la
concurrence du port de Lorient et de sa propre situation
géographique, le port d’Etel puisse retrouver un jour
l’activité maritime du passé.
Nous nous sommes donc progressivement tournés vers
le tourisme, avec une prudence écologique réaliste. Je ne
crains pas en effet de l’affirmer, les élus les premiers ont
conscience de la valeur de leur environnement et de
l’obligation de le protéger mais ils ont aussi le souci de la
vitalité de leur commune.
Les deux objectifs ne sont certes pas contradictoires
mais, s’agissant de l’ensemble de la Ria, n’est-ce pas
plutôt à la base, aux acteurs locaux, à ceux qui la connaissent le mieux, aux ostréiculteurs, aux cultivateurs, aux
pêcheurs à pied, c’est-à-dire à ceux qui y travaillent, à
ceux qui en vivent, de définir les modalités d’une protection efficace et de la mettre en œuvre plutôt que de se voir
imposer des directives venant d’instances du sommet et
d’ajouter encore des contraintes à celles exigées par la loi
"Littoral", le zonage NDS et Natura 2000 ?
C’est dans cet esprit d’ailleurs que l’opération "Bassin
versant" a vu le jour ; mon collègue, le maire de Locoal et
d’autres intervenants vous en parleront plus longuement
demain.
-3-
Pour terminer ma présentation, j’ajouterai :
- qu’Etel fait partie de la Communauté de Communes
de la Ria avec Belz, Erdeven et Locoal.
- que la pépinière humaine ételloise est très importante
puisque, outre les écoles maternelles et primaires,
nous sommes dotés d’un collège, d’un lycée
professionnel et d’un lycée maritime et aquacole.
- que 25 associations participent aux activités sportives
et culturelles…
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Discours d’ouverture
de Marie-Claire BORDE
J
e voudrais tout d’abord vous remercier, Monsieur le
Maire, de nous accueillir chez vous. C’est qu’il faut
être courageux pour prendre le risque de transformer
votre cinéma en "repaire d’écologistes intégristes", comme
le dit votre député, et je vous suis très reconnaissante de
prendre ce risque. A dire vrai, je crois que vous n’avez pas
grand-chose à craindre car, même s’il peut nous arriver
d’être excessifs, je suis convaincue que la qualité de nos
orateurs et que la qualité des débats ne vous fera pas
regretter de nous avoir accueillis, surtout quand vous saurez que ce colloque est une parfaite illustration de la
convention européenne sur le paysage, convention que la
France devrait signer prochainement.
Pourquoi ce colloque ? Je dois bien vous l’avouer, c’est
une vieille histoire d’amour entre ces lieux magiques et
moi. Depuis 35 ans aujourd’hui que l’UMIVEM existe, j’ai
une obsession : "garder à la Ria d’Etel sa beauté". Nous
avons fait ce que nous pouvions pour cela avec les moyens
que nous avions :
Dès 1969, nous avons essayé de faire inclure la Ria
d’Etel dans le Parc régional d’Armorique.
En 1970, non sans peine, nous avons sauvé "in extremis" le chemin de Cadoudal en Locoal de la destruction si
bien programmée par le remembrement que les bulldozers
étaient déjà là.
En 1975, grâce à une étude approfondie faite à notre
demande par François Roche, nous avons sauvé de la
destruction quelques trop rares beaux chemins lors du
remembrement de Nostang.
En 1972, nous avons aidé Monsieur le Maire de
Plouhinec à protéger ses dunes des extractions de sable
abusives.
En 1984, nous avons édité une plaquette sur les églises
et chapelles du canton de Port-Louis.
En 1986, nous avons édité une autre plaquette sur les
églises et chapelles du canton de Belz.
Dans les années 95, nous avons contribué à garder le
bâtiment de l’école Ste Anne à Etel, alors menacée de
destruction, dont la belle façade, heureusement conservée,
fait l’admiration de tous.
En 1999, nous avons consacré un numéro des Petites
Nouvelles du patrimoine et des paysages à la "Ria d’Etel".
En 1999 encore, nous avons organisé un rallye autour
de la Ria, avec une découverte en bateau.
Enfin, en 2000, avec la municipalité de Plouhinec, nous
avons contribué à maintenir l’unité architecturale du Vieux
passage.
Mais il y a tout ce que nous n’avons pas pu ou pas su
faire :
Nous n’avons pas su empêcher la destruction de
rangées entières de menhirs à Plouhinec lors du
remembrement.
Nous n’avons pas su empêcher la démolition du très
beau prieuré de Locoal, ni celle de la superbe petite
maison de Mendon dont les pierres ornent la boîte de nuit
d’Alain Barrière à Carnac.
Nous n’avons pas su empêcher non plus dans les
années 90, la construction d’une énorme aire de stationnement -un parking- sur le Domaine public maritime,
parking utile certes, mais qu’il aurait fallu mettre suffisamment en retrait pour qu’il n’écrase pas le site, si fragile, du
Vieux passage.
Nous n’avons pas su empêcher non plus des restaurations insuffisamment respectueuses de maisons traditionnelles, pas plus que les destructions de nombreux murets
de pierre et la banalisation du paysage.
Nous n’avons pas su inciter suffisamment les constructeurs d’aujourd’hui à respecter ce qui fait l’originalité des
villages bretons dans leur disposition comme dans leur
construction.
Alors quand on me dit "votre colloque arrive trop tôt",
j’ai plutôt envie de penser "notre colloque arrive tard, bien
tard". Mais peut-être aura-t-il plus de chance de donner
des fruits maintenant que si nous l’avions fait il y a 30 ans,
car il est porté par beaucoup d’amoureux de la Ria qui,
depuis quelques années, font un très important travail en
profondeur.
Je pense ici au Contrat Territorial d’Exploitation lancé
en 1996 par Jean-Noël Yvon et Louis Hervé, devenu
aujourd’hui "démarche de Bassin Versant de la ria d’Etel"
qui fait réfléchir ensemble ostréiculteurs et agriculteurs.
Je pense à la sauvegarde et à la mise en valeur remarquable du hameau de Rémoulin en Nostang, lancée dans
les années 1993, par le SIVOM du canton de Port-Louis
dont l’ancien maire de Locmiquélic, Francis Pahun, était
président.
…/…
-4-
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Je pense aussi au travail fait par la section Eau et
Rivières de la Ria, par la section Bretagne Vivante-SEPNB
de la Ria, aux expositions organisées par Christine
Monfort, Anne-Louise Le Gall et leurs amis qui ont eu pour
thème "la Ria s’expose", et auxquelles ont participé de
nombreux peintres et photographes dont M. Guillas qui a
bien voulu exposer quelques-unes de ses photos pour décorer le hall d’entrée du cinéma…
quelle beauté parlons-nous ? Du diamant qu’est la rivière,
mais aussi de son sertissage qui est non seulement la
bordure, le paysage rapproché, mais beaucoup plus en
profondeur ce qui nous y amène : les beaux chemins
bordés de murets de pierre sèche, les fermes aux proportions parfaites, tout ce petit patrimoine fait de puits, de
fontaines, de lavoirs, de calvaires, la lande, les bois, les
champs, des milieux naturels si variés et si fragiles.
Je pense enfin aux nombreuses autres associations et à
la sensibilisation faite à travers le chant par Fabienne
Marsaudon auprès des enfants des écoles. Et j’en oublie
sûrement.
Si tous ensemble, nous réfléchissons aux meilleurs
moyens à mettre en œuvre pour que jeunes et vieux, ostréiculteurs, agriculteurs, autochtones, vacanciers, puissent
vivre, travailler, se reposer dans un pays qui aura gardé
son âme, alors nous n’aurons pas perdu notre temps et
nous mériterons que nos adresses portent "Morbihan" car
la Petite Mer, chez nous, ce n’est pas seulement le Golfe,
c’est aussi la Ria d’Etel.
Aussi suis-je confiante car nous sommes nombreux,
élus, associations, administrations, simples citoyens, à
vouloir vraiment sauvegarder ce capital de beauté. De
Survol de la rivière d’Etel
Jean-Pierre FERRAND,
Conseil en Environnement
La rivière d’Étel est extrêmement ramifiée : pénétrant à
13 km dans l’intérieur des terres, elle compte environ
120 km de littoral. Cet univers de bras de mer sinueux et
de presqu’îles compte deux grandes îles reliées au continent, le Plec et Locoal, ainsi que plusieurs petites îles
(Saint-Cado, Riec’h, Niheu, l’île des Moines, Fandouillec…). Si les "rivières" étroites et sinueuses prédominent
au nord, la partie centrale présente un aspect plus ouvert et
parsemé d’îles qui peut faire penser au golfe du Morbihan.
La longueur de façade littorale des dix communes riveraines est extrêmement variable, allant de 1 km pour Erdeven
à 32 km pour Locoal-Mendon.
Le cadre géographique et naturel
La rivière d’Étel est une "rivière marine", un bras de
mer, comme les rivières de Pénerf, d’Auray, de Pont
l’Abbé, de Morlaix, etc. Géographiquement, c’est une ria,
c’est-à-dire un ancien système de vallées ennoyé par
la transgression marine. Celle d’Étel n’a pas de
caractère estuarien du fait de la faiblesse des apports d’eau
douce.
Cartopole de Baud
Le relief de la Rivière et de ses abords est peu marqué,
avec des altitudes le plus souvent inférieures à 10 m au
voisinage de la ligne de rivage.
Une des caractéristiques paysagères les plus fortes de la
rivière d’Étel est un balancement omniprésent entre
espaces ruraux et espaces maritimes.
Ces contrastes se lisent notamment dans l’écosystème
(avec par exemple une distribution des peuplements végétaux influencée par la salinité, le substrat, les courants…),
Procession des 7 Saints à Erdeven dans la lande du Sac’h vers 1920
-5-
dans les activités humaines
(prédominance
d’activités
agricoles ou maritimes, organisation de l’habitat, structure
parcellaire…), et dans les paysages d’une manière générale.
On peut identifier trois grands
secteurs bien différenciés:
- Le secteur nord, caractérisé par des bras de mer
étroits et ramifiés dans une
ambiance rurale bien affirmée, avec en outre des boisements de pins maritimes
surtout. La ligne de rivage
n’est pas toujours marquée
et la marée se répand souvent au milieu des landes
et des pinèdes.
- Le secteur médian, domaine de la conchyliculture, présentant un aspect plus ouvert et plus maritime, qui n’exclut pas la présente d’espaces ruraux et de boisements
(pointe de la Forest par exemple). Il accueille l’essentiel des quelque 80 chantiers conchylicoles de la
Rivière, les principales communes conchylicoles étant
Locoal-Mendon, Sainte-Hélène, Belz et Plouhinec.
- Le secteur sud, long bras de mer très resserré qui
serait le "tronc" de " l’arbre " formé par la rivière
d’Étel et ses diverticules. Balayé par de forts courants,
il débouche dans l’océan en passant au travers du
massif dunaire de Gâvres à Quiberon.
La rivière d’Étel présente un très grand intérêt écologique, de niveau national, voire européen si l’on prend en
compte la très riche végétation des schorres (1) d'étendue
considérable ainsi que des transitions uniques en France
avec des végétations de landes.
Les îles et îlots hébergent de belles colonies de sternes,
de hérons et d’aigrettes, les vasières ainsi que l’étang de
Saint-Jean accueillent en hiver de fortes populations d’oiseaux aquatiques. La présence d’une population de loutres,
sur la Rivière et les ruisseaux affluents, témoigne aussi de
la qualité du milieu naturel. Il faut signaler l’exceptionnelle richesse faunistique des tombants rocheux
sous-marins à l’aval de Pont-Lorois, qui possède peu
d’équivalents sur les côtes françaises.
Un retour sur le passé
La rivière d’Étel a connu ses plus spectaculaires
mutations dans les années 1970 / 80 :
(1) Schorre : mot néerlandais signifiant « pré-salé »
-6-
Les formes de l’urbanisation
- Le remembrement de la plupart des communes riveraines, a éliminé la plupart des talus et la quasi-totalité des anciens chemins, mais a ouvert çà et là des
panoramas étendus et intéressants.
- Le bord de mer s’est urbanisé rapidement en constructions isolées et en lotissements, surtout à Plouhinec et
Belz, à un moindre degré Sainte-Hélène et LocoalMendon. Ce phénomène a pris des formes diverses :
lotissements créés de toutes pièces en bord de mer
(Mané-Vechen, Nestadio, Ninezveur…) ; habitat dispersé, souvent à partir de secteurs conchylicoles ; ou
encore mélange de lotissements, d’habitat dispersé et
de noyaux anciens formant une "nébuleuse" de plus en
plus dense sur Belz et Plouhinec, de part et d’autre de
Pont-Lorois. Ce processus s’est ralenti dans les communes du nord, après l’entrée en vigueur de la loi
Littoral, mais il se poursuit au sud, par remplissage des
"dents creuses" dans le tissu urbain. Il faut enfin rappeler que, riche en lieux à la fois discrets et attractifs,
la rivière d’Étel a vu s’implanter diverses constructions
dans des conditions d’une légalité douteuse.
- La pêche professionnelle a presque disparu et le
nautisme s’est développé,
- ainsi que les activités de loisirs et les hébergements
touristiques (résidences secondaires, campings,
habitat léger de loisirs…)
- L’activité agricole décline et de ce fait certains
espaces (prairies naturelles, landes, pinèdes…) sont à
l’abandon.
Photo : Jean-Pierre Ferrand
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
La rivière d’Etel,
état des lieux environnemental
Les outils de protection et de gestion
Quelques questions actuelles…
Les outils législatifs et réglementaires sont trop rares :
on recense un arrêté de protection de biotope pour deux
îlots à sternes, un site classé (dunes de Plouhinec), un site
inscrit (Saint-Cado), et une douzaine de monuments
historiques protégés.
Le bilan des politiques foncières publiques est bien
modeste. L’action du Conservatoire du littoral en rivière
d’Étel est gênée par le manque de zones de préemption : il
n’en existe qu’à Plouhinec et Ste-Hélène. Le Conservatoire
n’a acheté de terrains que dans les dunes du Magouër, sauvegardant ainsi 1 km, soit 0,8 % du littoral de la Rivière.
A Landévant et Nostang, le Département a acquis trois
domaines totalisant 90 hectares aménagés pour l’accueil du
public. Sur Plouhinec, de très nombreux terrains ont été
acquis depuis 26 ans. Ils couvrent près de 50 ha, mais aucun
n’est géré pour le moment. D’autres terrains non gérés
depuis des années existent également à Sainte-Hélène.
Cette anomalie a été signalée par la Chambre régionale des
comptes. Le linéaire côtier protégé se monte à 4,2 km, soit
3,5 %. Au total, le bilan des protections foncières en rivière
d’Étel reste anormalement faible (4,3 % de littoral
protégé) ; il est même nul sur toute la rive orientale.
En ce qui concerne le programme Natura 2000, le site
"rivière d’Étel" n’existe que sous la forme d’un périmètre.
Il n’y a toujours, à la date du colloque, ni comité de pilotage, ni opérateur local, ni carte des habitats, ni document
d’objectifs.
- Il apparaît donc que contrairement à un point de vue
largement diffusé, la rivière d’Étel est bien loin d’être
"sur-protégée" par un carcan de règlements. Natura
2000 étant toujours "en panne" et le projet de classement étant apparemment abandonné pour des motifs
qui n’ont jamais été explicités, la protection des sites
les plus beaux et les plus fragiles repose pour l’essentiel sur la loi Littoral, dont l’application est défendue
chaque jour avec courage par des fonctionnaires de
l’État mais dont la pérennité n’est nullement assurée.
- Enfin, le sentier littoral est un équipement très apprécié du public. Pourtant, sa mise en place est tardive,
lente et difficile. 28 ans après le vote de la loi qui l’institue, il ne concerne encore qu’une faible proportion du
littoral de la rivière d’Étel (environ 14 km, soit 12 %).
(Cette liste n’étant pas limitative)
La qualité de l’eau : Des efforts importants ont été
consentis par les collectivités comme par les agriculteurs
du bassin versant. Ils portent aujourd’hui leurs fruits,
comme le montre l’amélioration de la qualité bactériologique des eaux de la rivière d’Étel. Toutefois, il reste encore
à faire pour réduire les apports de fertilisants.
Les remblais : Des dizaines d’hectares de schorres,
sur lesquels pèse pourtant une présomption de domanialité
publique, sont cadastrées comme terrains privés. Cette
situation favorise des aménagements illicites et ne permet
pas de gérer correctement le littoral.
Les formes de l’urbanisation : En rivière d’Étel
comme ailleurs, les formes d’habitat actuelles consomment
énormément d’espace et coûtent cher. Il devient urgent, par
le biais des PLU (1), de créer des formes plus compactes au
voisinage des bourgs, tout en donnant à ces nouveaux quartiers une qualité de traitement architectural et paysager
trop souvent absente des lotissements.
L’avenir des bois de pins : Les pinèdes couvrent
d’importantes surfaces autour de la rivière d’Étel depuis le
XIXe siècle. Leur rôle économique décline, elles sont mal
entretenues et trop souvent mal exploitées : il peut exister
des solutions pour aider leurs propriétaires à mieux les
gérer.
L’organisation et la culture politique du territoire :
Le territoire de la rivière d’Étel est morcelé, écartelé entre
deux "pays", deux schémas de cohérence territoriale et
trois communautés de communes. Il manque en outre
d’une "culture de projet" : les communes ont encore peu
l’habitude de travailler ensemble, et certaines expériences
ont été des échecs (contrat de pays côtier par exemple). Les
projets de protection et de mise en valeur de l’environnement sont souvent ressentis au mieux comme des fatalités,
au pire comme des menaces qu’il faut essayer d’éviter ou
de retarder. Cela entraîne une mentalité de rejet des projets
"venus d’en haut" et de résistance au changement.
Dans le même temps, le territoire a du mal à élaborer par
lui-même des projets de développement local et à avoir une
attitude claire par rapport au tourisme, présenté tantôt
comme une gêne, tantôt comme une richesse.
(1) PLU : Plan Local d’Urbanisme (remplace le POS, Plan d’Occupation des Sols)
-7-
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Mais il y a aussi des réussites, comme le village de gîtes
du Remoulin, une belle réalisation intercommunale menée
dans le cadre du canton de Port-Louis. Par ailleurs,
conchyliculteurs et agriculteurs ont engagé des actions
communes de reconquête de la qualité de l’eau
(CTE/CAD (1), projet de bassin versant…) en dépassant les
limites administratives.
Les règles préservant l’intégrité du domaine public
maritime
Le droit de l’urbanisme : les PLU instituent en effet
de plus en plus de règles en faveur de la nature, du
patrimoine et des paysages. Leurs dispositions ne
peuvent souffrir aucun passe-droit ni aucune complaisance, notamment en faveur de constructions
légères de loisirs ou d’activités économiques.
Quelques propositions pour l’avenir
La servitude de passage des piétons sur le littoral.
En premier lieu, il faut appliquer et faire respecter les
règles existantes en faveur de l’environnement. Cela
concerne notamment :
On peut en outre proposer une mesure plus étendue :
Faire connaître et aimer la rivière d’Étel : beaucoup
reste à faire dans ce domaine. Le travail réalisé par
Mme Marsaudon dans le domaine musical, auprès
d’écoliers, à l’occasion du colloque, montre qu’il
existe bien des pistes à explorer. Les espaces
naturels départementaux auraient vocation à devenir
des outils privilégiés d’initiation du public à la
La loi Littoral, qui doit elle-même être défendue
contre d’éventuelles tentatives de démantèlement
d’origine parlementaire.
La loi sur l’Eau, qui protège les cours d’eau et les
zones humides.
Les enjeux de la gestion intégrée
et durable de la Ria d’Etel
Yves LEBAHY,
Professeur agrégé de géographie - Université de Bretagne Sud (Lorient)
Le professeur Lebahy considère la Ria comme un territoire menacé comme l’est tout le littoral breton actuellement, mais ce d’autant plus que les évolutions "économistes" de notre société ne l’ont pas encore totalement atteint.
Il est encore relativement à l’abri de certaines mutations
qui tendent à détruire l’équilibre entre l’homme et l’espace
bordant la mer, d’où l’importance qu’il y a aujourd’hui à le
préserver.
Le géographe qu’il est, souligne tous les aspects de ces
déséquilibres qui s’installent : désorganisation des activités
traditionnelles ; pression "anthropique" par multiplication
des activités et usages du milieu, pression foncière
qui incite à vendre maisons et terrains, constructions
anarchiques, fragilisation des écosystèmes (équilibres
naturels entre terre et mer, faune et flore) et géosystèmes
(perte d’un patrimoine et d’une spécificité culturelle,
diminution des liens de solidarités entre générations et
groupes humains, disparitions d’activités régulatrices du
milieu) non seulement en bordure littorale, mais aussi dans
la zone rétro-littorale, en arrière de la côte.
Face à ces mutations souvent perturbatrices des
équilibres, Yves Lebahy propose de mettre en œuvre une
politique de Gestion Intégrée de la Zone Côtière (GIZC),
politique prônée en 2002 par la Commission européenne.
Cette idée ne renie en rien les efforts de protection menés
depuis 1959 pour protéger les littoraux, avec les "périmètres sensibles", les SAUM (2), les SMVM (3), le
Conservatoire du littoral, la loi littoral, la loi sur l’eau etc.
Mais elle va beaucoup plus loin en suggérant une concertation approfondie entre populations, associations, élus et
responsables de l’aménagement, d’une part, et une gestion
globale des problèmes d’autre part. Celle-ci est à concevoir
tant spatialement - en liant les différents milieux que sont
la mer, l’estran (c’est-à-dire la portion de la côte découverte à marée basse), la côte proprement dite, le littoral, la
zone "rétro-littorale" et même la zone rurale à l’arrière du
littoral - que socialement et économiquement, en confrontant les acteurs et les intérêts.
Cette vision globale des problèmes permet de ne pas
travailler au coup par coup, en ordre dispersé, mais à l’in-
(1) CAD : Contrat d’Agriculture Durable (remplace le CTE, Contrat Territorial d’Exploitation).
(2) SAUM : Schéma d’Aménagement et d’Urbanisme de la Mer.
(3) SMVM : Schéma de Mise en Valeur de la Mer.
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Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
verse de tenir compte de l’intérêt de tous, de définir un projet commun de vie et de développement. A cette vision globale des problèmes sociaux, écologiques et économiques,
il faut apporter ici une réelle concertation politique.
L’enjeu est de taille et suppose responsabilité et citoyenneté ; qui plus est, elle suppose la concertation. Or la Ria
d’Etel, en tant que portion du territoire appartient à
plusieurs communes et à deux "pays" différents, ce qui ici
complique la tâche.
Unir les populations et les élus dans une recherche
commune de solutions, serait créer la "démocratie participative", laquelle suppose lucidité, courage, et oubli des
divisions politiciennes chez les élus comme dans les
populations. Définir ensemble une stratégie commune,
fonctionner en réseau pour réaliser des projets complémentaires, ce serait cela la "Gestion Intégrée de la Zone
Côtière". Ils ont agi dans cet esprit, les ostréiculteurs et
agriculteurs qui ont créé un CTE (1) pour s’engager ensemble pour une meilleure qualité de l’eau de la Ria.
En effet, dit Yves Lebahy, l’élu ne peut être toujours
seul à l’initiative des projets : "son rôle peut également
consister à créer les conditions qui font émerger le projet".
Quant au citoyen, il a lui "le devoir de participer à la décision". Un exemple nous est donné par ce qui a été fait pour
le SMVM du Golfe du Morbihan, où "des acteurs que tout
séparait, ont accepté de se rencontrer, de s’écouter, de définir des problèmes communs". C’est un exemple du nouveau contrat social qu’il nous faut essayer de généraliser (2).
Dans cet esprit, la "commission littoral" du CNADT (3)qui travaille à l’aménagement du territoire sur le plan
national- propose dix mesures (4), destinées à faire vivre le
patrimoine littoral pour les générations futures, tout en
développant les économies maritimes et littorales (dont
l’agriculture et l’aquaculture).
Dans l’avant-dernière partie de sa conférence, Yves
Lebahy insistait sur le fait que l’instauration d’un GIZC
suppose que l’opinion prenne "conscience des désordres
en cours et qu’apparaissent les limites des moyens
jusqu’alors mis en œuvre pour protéger les équilibres hérités". Il souligne également les risques auxquels une telle
responsabilisation (ou non) des acteurs locaux peut
conduire et présente des options fondamentales sur
lesquelles elle doit s’appuyer.
Il semble que le colloque d’Etel ait été, dans cette prise
de conscience, une étape nécessaire… A nous tous, maintenant, de continuer à réfléchir, non sur des notions abstraites, mais sur la réalité telle que nous l’ont montrée les
divers intervenants.
Le développement durable en architecture :
la HQE et l’insertion dans le paysage
Philippe MADEC,
architecte et urbaniste, directeur de recherche
M. Philippe Madec a particulièrement intéressé les
auditeurs soucieux du patrimoine bâti. Il a évoqué l’histoire de l’idée d’insertion en architecture et l’apport du
développement durable. Voici l’idée principale que nous
avons retenue de sa conférence : lorsque nous participons à
une construction- que nous soyons pétitionnaire (5), élu
chargé de la décision ou architecte-, nous ne devons jamais
le faire sans nous soucier de l’environnement. "Comment
ce projet va-t-il occuper ma parcelle ?" est une question
insuffisante. Il faut y joindre celle-ci : "Comment le bâti-
ment projeté va-t-il s’insérer dans le paysage, naturel et
construit ?" La loi (6) désormais oblige à se poser cette question certes, mais encore faudrait-il que ceux qui vont aider
le pétitionnaire-et peut-être le contraindre- aient reçu une
formation à l’insertion architecturale qui leur permette de
répondre aux questions autrement qu’avec des extraits du
règlement. Il leur est facile de dire s’il y a par exemple le
nombre de pièces voulues… mais beaucoup plus difficile
d’apprécier ce que représentera dans le paysage (la nature
et le déjà construit), le bâtiment projeté.
(1) CTE : Contrat Territorial d’Exploitation (signé entre agriculteurs et ostréiculteurs de la Ria d’Etel en 2001).
(2) Pour le cas où il apparaîtrait impossible, sur la Ria d’Etel, de faire coopérer les deux " pays "riverains, Yves Lebahy suggère de mettre en œuvre un PASED,
un Projet d’Action Stratégique de l’Etat au Département, qui passerait outre les clivages.
(3) CNADT : Conseil National pour l’Aménagement Durable du Territoire.
(4) cf. synthèse du colloque faite par Mme Bersani.
(5) Pétitionnaire : candidat à la construction pour lui-même, demandant un permis de construire ici.
(6) Le code de l’urbanisme précise que le dossier de permis de construire doit décrire le paysage et l’environnement existants, exposer et justifier les dispositions
prévues pour assurer l’insertion dans ce paysage dès la construction de ses accès et de ses abords.
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Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Cette question est particulièrement préoccupante lorsque le pétitionnaire veut construire au milieu d’un
"contexte"(c’est-à-dire au milieu de bâtiments déjà là) et
que ce contexte est beau… comme c’est souvent le cas en
Bretagne, dans les zones peu urbanisées en particulier, où
ce contexte a une forte identité (un style traditionnel).
Philippe Madec fait remarquer à ce sujet qu’il ne faut
pas confondre "existant" avec "beau". L’ancien n’est pas
beau parce qu’il est ancien. Il est beau parce que l’on a respecté une harmonie dont les lois ne sont pas évidentes pour
tous les yeux. Une éducation du regard peut apprendre à
reconnaître le beau traditionnel bien inséré dans le paysage. "Les anciennes architectures domestiques propres à
un pays" dit-il "naissent de leurs lieux… il suffit de rassembler le savoir-faire des compagnons, les matériaux existant
sur place et les réponses techniques aux conditions du
climat pour que les différences se créent et que l’identité
perdure". Reconnaître que l’on est d’un lieu permet d’éviter des erreurs, mais beaucoup de constructions "anciennes » datant souvent de la fin du XIXème siècle ou du début
du XXme siècle ne respectent nullement cette identité régionale et ne méritent pas d’être prises en modèles. D’autre
part, si l’on s’inspire de l’identité régionale, il faut aussi
penser à "l’échelle". Nous sommes de plus en plus
consommateurs d’espace. Alors, notre "grande maison
régionale", comment va-t-elle s’insérer dans un contexte
de "petites" maisons régionales ? Cette question a aussi son
importance.
Philippe Madec connaît toutes les difficultés que l’on
rencontre pour faire exister le présent à côté du passé. Nous
sommes d’un lieu, mais nous sommes aussi d’un temps. Et
dans ce temps de crise écologique, le rapport Brundtland
de 1987 nous rappelle la nécessité de prendre en compte
l’éthique, en architecture comme ailleurs. En effet "le
développement durable est appuyé sur trois piliers : le
pilier social, le pilier économique et le pilier environnement. "Et il ne suffit pas d’"insérer une architecture compatible avec le contexte", il s’agit "d’insérer une architecture compatible avec les enjeux de l’environnement." Il
précise que "la conception environnementale s’appuie sur
un arsenal de dispositifs performants de brise-soleil, double-peau, sur-toiture…, cheminées solaires… et sur l’emploi de matériaux écologiques : bois, briques épaisses et
des techniques énergétiques : capteurs solaires, panneaux
photovoltaïques, éoliennes…" Cependant si la technique
prime dans la résolution de la crise actuelle, la compréhension sociale et culturelle des politiques énergétiques est la
condition indispensable aux actions concrètes dans les
divers pays, rappelle-t-il en citant le président du Groupe
Intergouvernemental d’Etudes du Climat (GIEC), l’Indien
Rajendra Pachauri.
Enfin pour terminer, il rappelle que le sujet du colloque
- la sauvegarde écologique et esthétique de la Ria d’Etels’inscrit dans un large horizon éthique. En effet nous ne
sommes plus aujourd’hui en "expansion" mais en "insertion", "nous n’habitons plus uniquement les lieux, nous
partageons la Terre". Aujourd’hui, en tant que citoyen de
la planète, il nous est impératif désormais d’agir pour "sauvegarder la possibilité même d’un établissement humain
sur la terre tout en gardant un devoir de mémoire."
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Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
« L’évolution de l’architecture
en Bretagne »
L’intervention de Jean-Michel Hervieux,
architecte dplg et directeur du CAUE du
Morbihan, ne nous est hélas pas parvenue à
l’heure où nous imprimons ces actes. Nous
espérons que son intéressante intervention sur
"l’évolution de l’architecture en Bretagne" nous
parviendra pour notre futur numéro des Petites
Nouvelles du Patrimoine et des Paysages du
Morbihan.
Théâtre « Les oiseaux de la Ria d’Etel »
avec Fabienne MARSAUDON
et des enfants de Nostang
Dix enfants de Nostang, particulièrement bien initiés
par Fabienne Marsaudon, ont interprété une petite pièce de
théâtre ponctuée de chants sur la Ria. L’artiste a accompagné les enfants de sa voix et de sa guitare pour quelques
extraits de ses "chansons autour de la Ria » composées lors
d’ateliers d’écriture de chants avec des enfants des écoles
de la Ria (disponibles en CD au 11 cité Ker Hent Coz,
56690 Nostang). Pierre-Yves Martinie, l’auteur de cette
pièce intitulée « les oiseaux de la Ria d’Etel » a su révéler
avec humour et talent les enjeux de la Ria. Le décor et les
très jolis costumes ont été confectionnés avec brio par
Véronique de la Monneraye et Mathilda Borde. Leur succès a été complet pour la joie de tous. L’UMIVEM a
récompensé les talents de ces jeunes comédiens en leur
offrant l’album « Dune sauvage », occasion de continuer à
découvrir la beauté et la fragilité de la Ria d’Etel.
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Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Concours photos
« Beautés et blessures de la Ria d’Etel »
Trente personnes ont
participé au concoursphotos sur les "Beautés
et blessures de la Ria
d’Etel". Parmi plus de 80
photographies, accompagnées d’un commentaire
réfléchi, le jury a attribué :
Le 1er prix (un dîner
pour deux au château de
Kerambarh en Landaul)
à Joël Le Guillon
Le 2ème prix (un weekend au gîte de Rémoulin
en Nostang) à Jean-Yves
Le Garrec
Lauréats du concours photos
Le 3ème prix (une nuit au château de Loguénolé en Kervignac) à Catherine Légeron
Dîner au restaurant du château de Kerambarh en Landaul
Puis une soixantaine de convives ont continué à débattre pendant le dîner servi dans le très beau cadre du château de
Kerambarh en Landaul. Le jardin médiéval et la table valent le détour…
Hébergement au village
des gîtes de Rémoulin
en Nostang
Emerveillement
grâce aux films témoignages
Enfin plusieurs participants ont regagné le village de
gîtes du Rémoulin pour y être accueillis le temps d’une
nuit à Nostang. Remarquablement restauré dans les
années 1990 par la communauté de communes de
Blavet-Bellevue-Océan (Plouhinec, Ste Hélène,
Merlevenez, Kervignac, Nostang), alors qu’il était en
ruines, il est aujourd’hui ouvert toute l’année. A en lire
son livre d’or, il laisse un souvenir inoubliable à ceux
qui y ont passé le temps d’un mariage, anniversaire ou
séminaire… Situé en bord de rivage, il a permis à nos
hôtes de goûter pleinement le calme et la beauté du
paysage encore sauvage du fond de la Ria d’Etel.
Quatre très beaux films-témoignages réalisés par
Yvan Dubuc, ont donné de belles respirations à ces
deux journées de réflexion sur l’avenir du paysage de
la Ria d’Etel. Traitant du paysage de la Ria, de son
histoire, de ses agriculteurs biologiques et du village
restauré de Rémoulin, le réalisateur québecois a
travaillé en collaboration étroite avec la maison de
production Néfertiti-Ouest, le musée d’Etel et JeanBenoît Gauchet pour le montage. Ils ont suscité chez
tous l’émerveillement devant la beauté fragile de la
Ria. Ils ont permis de prendre conscience que celle-ci
dépend entièrement de notre attitude et de notre
responsabilité, que nous soyons élus ou citoyens.
réalisés par Yvan DUBUC
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Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Mardi 30 mars
Le développement durable : lever les ambiguïtés
Jean-Claude PIERRE,
Membre du Conseil Economique et Social de Bretagne,
Porte-parole du réseau Cohérence
pour un développement durable,
Fondateur de l’association Nature et Culture.
Il a fallu à peu près un siècle pour que le terme "écologie" entre en politique, c’est-à-dire, entre dans la vie de la
cité. C’est en 1866 que le mot écologie (1) a été créé par le
biologiste allemand Haeckel et ce n’est qu’en 1967 en
France, qu’une chaire d’écologie a été créée à Lyon. Un
siècle pour que ce concept scientifique s’impose en France.
Et c’est en 1971, qu’un ministère de l’écologie, un "ministère de l’environnement" est créé dans notre pays. Un an
auparavant, un ministère identique avait été créé en
Grande-Bretagne. Enfin, c’est en 1974 que l’agronome
René Dumont, candidat à la Présidence de la République,
fait connaître l’écologisme. Le grand public en France va
donc découvrir l’écologisme et l’écologie en même temps,
ce qui va être sujet de confusion.
Quant au mot "développement durable", il a fait une
entrée fulgurante dans notre environnement, notre paysage
audiovisuel et linguistique. En 1983, il apparaît 10 fois
dans le journal Le Monde, puis 30 fois l’année suivante,
puis 80 fois. Ce n’est qu’en 1987 qu’il apparaît dans un
document officiel : quand Madame Brundtland (2), alors
Premier Ministre de Norvège, engage, sur la demande de
Javier Pérez de Cuéllar (3), un travail en vue de préparer le
Sommet de la Terre de Rio. En 1992, le terme de "développement durable" qui structure le rapport de Mme
Brundtland "Our common future" (Notre avenir à tous)
apparaît comme la clé de voûte de ce sommet de la Terre.
Rappelons qu’on a dit à cette occasion : "175 chefs d’Etat
et de gouvernement au chevet de la Planète". Le mot entre
vraiment en politique à partir du moment où ces 175 chefs
d’Etat et de gouvernement (4) s’emparent de cette expression"développement durable" et aussi de l’expression
"Agenda 21" (5). Elle s’insert même en France, quoique plus
timidement que chez nos voisins anglo-saxons. En 1999
cependant, la loi LOADDT (6), la Loi d’Orientation pour
l’Aménagement et le Développement Durable du Territoire
fait apparaître le mot dans la terminologie administrative et
politique.
En 2002, en France, sont créés un Secrétariat d’Etat au
Développement Durable, un Conseil National du
Développement Durable et un Comité Interministériel du
Développement Durable. Il n’est donc plus possible ni
pour les élus, ni pour les responsables d’association, ni
pour les citoyens d’ignorer ce terme. Mais que se cachet-il derrière cette expression "développement durable" ? De
(1) L’écologie est une science, vous le savez, si j’avais à parler d’écologie politique, je dirais écologisme, parce que les mots nous piègent tellement.
(2) Dr Brundtland Gro Harlem : ancien Premier Ministre de Norvège (1981-1996), médecin, elle est actuellement Directrice Générale de l’Organisation
Mondiale de la Santé (OMS-WHO) depuis 1998.
(3) Javier Pérez de Cuéllar : cinquième Secrétaire Général des Nations Unies (1982-1991), il a été successivement avocat, diplomate puis Ministre des Affaires
Etrangères du Pérou.
(4) Précisément ce sont 175 Etats qui ont été représentés au plus haut niveau notamment par 119 chefs d’Etat et de gouvernement pendant 12 jours à Rio de
Janeiro (Brésil) pour le Sommet de la Terre du 3 au 14 juin 1992.
(5) Agenda 21 : document préparatoire à l’action 21 pour le XXIème siècle, adopté par la conférence de Rio le 14 juin 1992. Programme étendu d’actions à mettre en œuvre dès maintenant et au cours du XXIème siècle par les gouvernements, agences de développement, organisations des Nations Unies et groupes
indépendants dans tous les pays où l’activité économique affecte l’environnement.
(6) LOADDT : loi n°99-533 du 25 juin 1999, dite "loi Voynet", elle fait des pays des "territoires de projet" et crée les conseils de développement… (complétant
la LOADT de 1995 ou "loi Pasqua" qui avait institué les "pays").
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Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
toute évidence, pour beaucoup, il s’agit de "faire durer le
modèle actuel de développement" ! Nous sommes là aux
antipodes du concept initial. Il y a là, pour le monde associatif, un immense chantier d’éducation populaire. Quand
un terme fait si rapidement son entrée sur la scène politique, il est souvent utilisé à tort et à travers ; chacun y met
le sens qui l’arrange. Aujourd’hui, on peut dire que l’interprétation de cette expression va d’un extrême à l’autre.
Pour certains, il s’agit simplement de faire "durer" le
modèle actuel de développement, au besoin, en le verdissant quelque peu ; et pour d’autres, il s’agit de rompre
totalement puisque d’aucuns considèrent même que la
croissance n’est pas la solution mais le problème. A l’expression "développement durable", certains chercheurs,
penseurs, associations préfèrent l’expression "décroissance
soutenable".
Essayons de clarifier :
- Je crois que le gouvernement, en plaçant le Secrétariat
d’Etat au Développement Durable sous l’autorité du
Ministère de l’Environnement, aujourd’hui du Ministère
de l’Ecologie, a accrédité l’idée que le Développement
Durable était une composante de l’écologie.
C’est l’inverse qui est vrai. Si un Ministère du
Développement Durable ne peut pas exclure une
réflexion sur l’écologie, on peut très bien imaginer un
Ministère de l’Ecologie qui ne se soucie guère de
Développement Durable au sens que ses concepteurs lui
ont donné. Donc, premier facteur de confusion : le fait
d’avoir placé le Secrétariat d’Etat au Développement
Durable sous l’autorité du Ministère de l’Ecologie.
- Le second facteur de confusion vient de ce que l’expression "Développement Durable" est une très mauvaise traduction de l’expression anglo-saxonne "Sustainable
development". Dans le rapport Brundtland, "Notre avenir
à tous", on parle en effet de "Sustainable development".
Or les mots soutenable et durable n’ont pas du tout les
mêmes connotations. Une chose peut être durable sans
pour autant être saine, bonne, sur le plan éthique, sur le
plan moral ou même sur le plan environnemental. Les
blockhaus qui continuent de consteller notre littoral sont
éminemment "durables".
- Troisième facteur qui complique les débats : trois ou quatre des termes sont devenus dans notre société quasiment
synonymes : "croissance", "développement" et "progrès".
On nous dit tous les jours : "Relancez la croissance !",
"Relancez la consommation, source de progrès !" etc. Or
continuer d’augmenter, de croître, au sens de cette société
de consommation dont nous sommes encore les héritiers,
c’est complètement antinomique de la réflexion à
l’origine du développement durable. En effet celui-ci
doit beaucoup à « l’écodéveloppement", une économie
anthropologique inventée par Ignacy Sachs dès 1972.
Trois périodes ont marqué l’apparition
de ce mot développement durable
- Dans la décennie 1960-1970, on est dans les "Trente glorieuses", la société de consommation court sur son erre,
tout le monde est heureux… Déjà, malgré tout, dès cette
époque, un certain nombre de personnes commencent à
se poser des questions. Il y eut d’abord les "Futuribles" (1)
de Jouvenel. Puis fut créé le Club de Rome au sein duquel
des penseurs, des philosophes mais aussi des hommes
d’affaires, des industriels se posaient des questions… Et
rappelez-vous tous de la sortie de ce fameux rapport du
Club de Rome : "Halte à la croissance !". En 1970-1971
a lieu la publication de ce document, traduit en 13 langues et diffusé à plusieurs millions d’exemplaires. Pour la
première fois, un document de très grande diffusion
posait de manière très claire la problématique : dans un
monde fini, la sphère, il est impossible de penser que l’on
pourra continuer à consommer toujours plus. Il venait
confirmer la célèbre formule de Paul Valéry : "Le temps
du monde fini commence". Dans un univers limité, la
sphère, notre petite planète bleue, il est impensable de
continuer à exploiter comme nous le faisons. Le Club de
Romme alerte sur le fait que le fer, le pétrole, l’uranium,
le charbon ne sont pas inépuisables, mais limités. Le premier facteur limitant ainsi mis en évidence, c’est la finitude des ressources. Or en 1970-1971, quand le rapport
du Club de Rome a été publié, il a été combattu par toute
la classe politique et le CNPF (2) de François Sérac,
comme par Georges Séguy de la CGT.
- Pourtant dans la décennie 1970-1980, on prend
conscience du fait que, même si nos ressources étaient
illimitées, notre système n’est pas durable parce que nos
pollutions sont telles qu’elles mettent à mal les processus
sur lesquels repose la vie de la planète. On découvre
l’effet de serre (en réalité, il a été découvert bien avant, en
1897). Mais là, on commence à le ressentir. Nos pollutions, les marées noires, la mort des forêts, l’épuisement
ou le saccage de la nature sont le deuxième facteur limitant : notre planète est fragile et ne peut recycler tous nos
(1) Futuribles : revue mensuelle de prospective du centre indépendant d’étude et de réflexion sur le monde contemporain, dirigée par Hugues de Jouvenel
(cf. www.futuribles.com).
(2) CNPF : Conseil National du Patronat Français (1946-1998), devenu MEDEF (Mouvement des Entreprises en France en 1998.
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Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
déchets. Nous bouleversons les équilibres sur lesquels
repose la vie. Après la maladie de "la vache folle", les
hécatombes d’abeilles et d’autres insectes pollinisateurs
illustrent les aberrations dans lesquelles nous nous installons et auxquelles participe l’émergence de nombreuses
pathologies liées à la dégradation de la nature.
- Mais en 1987, le rapport de Madame Brundtland met
en évidence un troisième facteur limitant. Même si les
ressources étaient illimitées, même si on était capable
d’épurer tous nos processus de production et de
consommation, même si on était capable de réconcilier
écologie et économie, notre modèle n’est pas soutenable moralement, compte tenu du fait que l’accroissement des richesses va à une minorité de la population
du monde. L’aggravation des inégalités constitue un
facteur de destruction de nos sociétés. Dans un monde
où tout se sait et tout se voit : plus personne n’ignore
que 20 % de la population consomme 80 % des richesses et provoque 80 % de la pollution. Ces inégalités ne
font que croître tant dans nos pays qu’entre nos pays et
les pays dits "en voie de développement". Que vous
preniez les chiffres du FMI (Fond Monétaire
International) ou ceux de la Banque Mondiale, vous
trouverez qu’entre le revenu par habitant des dix pays
les plus riches et des dix pays les plus pauvres, l’écart
qui était de 1 à 3 dans les années 1850, de 1 à 17 au
début du XXème siècle, de 1 à 30 en 1950 est
aujourd’hui de 1 à 97 ! Et quand on traduit sur une
courbe ces inégalités, on a une exponentielle. Et il est
évident, surtout dans un monde où tout se voit et où
tout se sait, que les inégalités créent des frustrations
qui sont des facteurs de violence. Avec la miniaturisation de tous les procédés de destruction massive que
l’on connaît, l’humanité aujourd’hui installe une épée
de Damoclès au-dessus de sa tête. Et c’est en ce sens
que le type de développement actuel n’est pas soutenable moralement.
A l’aide de graphiques, je vais essayer de vous montrer
que, contrairement à ce qui nous est dit en permanence,
nous ne sommes pas condamnés à consommer toujours
plus pour vivre mieux (cf. version intégrale des actes du
colloque disponible sur commande à l’UMIVEM).
En 1976, c’est la grande sécheresse : il n’y avait plus
assez d’eau dans le Scorff, la "fontaine des Lorientais".
Chacun considérait qu’il avait des droits : pomper pour
ceci, pomper pour cela. "Et chacun pour soi… et plus
d’eau pour tout le monde…". Une réunion est organisée à
la sous-préfecture de Lorient (les élus étaient là, la
Direction Départementale de l’Agriculture aussi, qui
menait le débat). J’entends encore le directeur dire : la
consommation d’eau augmente de 7 à 8 % par an : c’est
inéluctable. Il faut irriguer le maïs, les légumes, il faut
arroser les golfs. Et il faut prévoir les piscines. Donc la
consommation d’eau va augmenter de 7 à 8 % par an :
c’est-à-dire qu’on est dans la loi du doublement décennal".
C’est aussi avec ce raisonnement qu’on justifiait la centrale
nucléaire d’Erdeven ou celle de Plogoff. Et j’entends
encore le directeur de l’Agriculture dire aux élus :
"Gouverner, c’est prévoir : il faut un barrage sur le Scorff."
Le maire-adjoint de Lorient, Maurice Menesguen, me
demande : "Jean-Claude Pierre, qu’est-ce que vous en pensez ?". Je réponds rapidement parce qu’on arrivait dans la
fin de la réunion : "Ecoutez, Monsieur le Directeur de
Voilà donc les trois facteurs limitants de notre modèle.
Il nous faut impérativement en inventer un autre, qui respecte les capacités de recyclage, d’équilibre de la planète
qui tienne compte des ressources, mais qui tienne compte
aussi de la nécessité d’un partage équitable du travail, des
ressources et des richesses et tant des richesses matérielles
que des richesses culturelles…. Si ces trois conditions ne
sont pas réunies, notre société risque de connaître le chaos.
*
**
- 15 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
l’Agriculture vient de nous dire que cette sécheresse est
une sécheresse centenale : je propose donc qu’avant d’envisager un barrage dont les conséquences écologiques
seront lourdes, nous engagions un programme d’économies d’eau." J’ai fait rire tout le monde… ou presque.
Quelques jours plus tard, Maurice Menesguen m’a rappelé : "Qu’est-ce que tu voulais dire exactement avec les
économies d’eau ?" Nous avons engagé une réflexion, puis
un travail. Et en 1978, la ville de Lorient a commencé dans
les écoles- parce que tout passe par l’éducation- à réfléchir
à un programme d’économies d’eau. Au terme de 25
années d’efforts, les résultats sont là, dans les bâtiments
publics : la consommation d’eau a été divisée par trois !
pour récupérer le bois que pour le conditionner en petites
particules afin de pouvoir approvisionner ces chaudières
extrêmement mécanisées dans leur fonctionnement.
On a donc là les trois cercles sur lesquels devrait reposer la société. On est au cœur du développement durable.
Car on fait de l’économie (taux de retour sur investissement : un an avec les aides de l’ADEME (1), espérons qu’elles seront à nouveau rétablies à un niveau souhaitable). Et
même sans les aides de l’ADEME, retour sur investissement en 5 ans. Il vaut mieux investir ici qu’à la bourse et si
demain le cours du baril de pétrole augmente encore, les
économies seront encore plus significatives.
- Economie de fonctionnement de l’ordre de
90 000 euros par an.
Y-a-t-il moins d’hygiène et de confort ? Non. Mais on a
compris que les processus intellectuels - car tout est
d’abord culturel - qui avaient conduit aux économies
d’eau, pouvaient aussi conduire à des économies d’énergie… A Lorient, ces économies ont été faites grâce à l’utilisation de chaudières à bois (cf. graphiques des économies
d’énergie en Euros et Francs dans la version intégrale des
actes du colloque)
Les techniciens de la cellule "eau-énergie" de Lorient
disent : "C’est 50 % d’investissement et 50 % de matière
grise"… Les résultats sont là : 10 millions de Francs d’économies chaque année. C’est considérable et ces économies
peuvent encore s’accroître : le "gisement" est considérable.
La preuve est faite que le confort, le développement économique n’impliquent pas nécessairement l’augmentation
des consommations d’eau, d’énergie…
De telles réalisations montrent que nous ne sommes pas
condamnés à consommer toujours plus pour polluer toujours plus. Les dernières chaudières à bois qui viennent
d’être installées pour le grand théâtre de Lorient (mais la
population ne le sait pas) représentent une puissance installée de 1,5 Mégawatt. Avec la même somme que celle qui
était nécessaire pour chauffer l’hôtel de ville au fioul, on
chauffe aujourd’hui, l’hôtel de ville, le grand théâtre, les
installations sportives du stade et bientôt la piscine, et cela,
au bois ! Il est évident que l’augmentation du prix du baril
de pétrole, inéluctable, renforce encore l’intérêt financier
de ce système.
Le bois vient de la région, c’est du bois récupéré, qui,
jusque-là était perdu : palettes, cageots, déchets issus de
l’exploitation des billes de bois importées à Lorient (on
n’utilise que 70 à 80 % de la bille, le reste, c’est du
déchet !) Le travail de récupération est effectué par la
Communauté d’Emmaüs. Elle s’est en effet équipée tant
- Répercussions sur l’environnement : 800 tonnes de
CO2 en moins dans l’atmosphère (2).
- Evidemment le social ne vous échappe pas : permettre
aux personnes qui travaillent chez Emmaüs de retrouver la dignité par le travail… et par un travail, ô combien valable pour la société, c’est tout autre chose que
de redistribuer des revenus sous forme de charité.
Comprenez-moi bien : je n’ai rien contre les démarches de charité : il en faut. Mais l’équité, elle est là. Et
le mot équité est aussi au cœur du développement
durable.
Et nous qui sommes tout à la fois sensibilisés aux problèmes sociaux et aux problèmes écologiques, on voit que
sur une ville comme Lorient, sont atteints déjà les objectifs
que la France a contresignés dans les accords de Kyoto.
Nos présidents de la République, quels qu’ils soient, pourront toujours aller signer les accords de ce type, si localement à l’échelle de nos collectivités, de nos entreprises, de
nos propres immeubles, nous n’engageons pas les efforts
nécessaires pour réduire les gaz à effet de serre, la température du globe continuera de monter. Et les canicules
comme celle de 2003 reviendront. Tout se tient. C’est en ce
sens que le développement soutenable nous place face à
des problématiques complexes que sont celles de l’homme
du XXIème siècle.
Et rappelons que l’expression "agenda 21" (pour XXIème
siècle), devrait être les programmes d’actions engageant
nos collectivités pour répondre simultanément à ces trois
problématiques économique, environnementale et sociale.
En matière d’agendas 21, la France connaît un retard certain par rapport à ses voisins anglo-saxons et un effort
considérable va devoir être engagé.
(1) ADEME : Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie qui fournit des aides financières pour s’équiper en énergies renouvelables (solaire,
bois…) ; cf. Point info énergie et économies d’eau de la ville de Lorient : 02 97 83 74 61 ou www.ademe.fr.
(2) CO2 : Gaz carbonique, dit aussi dioxyde de carbone qui fait partie des Gaz à Effet de Serre (GES) aggravant l’effet de serre.
- 16 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Une application du développement durable :
l’agriculture biologique
Michel HELFTER,
directeur de l’agence BIO,
(Agence Française pour le Développement
et la Promotion de l’Agriculture Biologique).
stricte. Les transformateurs sont également soumis à
des contraintes importantes au niveau des intrants
qu’ils peuvent utiliser : un industriel biologique ne
pourra pas disposer, pour nettoyer ses installations,
des mêmes produits qu’un industriel classique.
L’Agence BIO est un groupement d’intérêt public qui
associe le Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation, de
la Pêche et des Affaires Rurales, le Ministère de l’Ecologie
et du Développement Durable, l’Assemblée Permanente de
Chambres d’Agriculture (APCA), la Fédération Nationale
d’Agriculture Biologique des régions de France (FNAB),
le syndicat des transformateurs et distributeurs de produits
biologiques (SYNABIO) et l’association des coopératives
agricoles françaises (Coop de France).
L’agriculture biologique est née en France dans les
années 50 grâce aux efforts de pionniers producteurs et
consommateurs. Les consommateurs étaient intéressés par
des produits plus simples, qui respectaient l’environnement, le bien-être animal, les équilibres naturels. Les agriculteurs n’étaient pas prêts à aller vers une agriculture productiviste qui privilégiait l’utilisation massive des produits
chimiques de synthèse, engrais ou pesticides.
C’est en juillet 1980 au sein de la loi d’orientation agricole qu’on on parlé pour la première fois d’ "agriculture
sans produits chimiques de synthèse".
Le grand départ réglementaire et administratif en
Europe, c’est en 1991 où les trois termes "organique, écologique et biologique" sont introduits officiellement dans
le langage et la réglementation communautaires. Les trois
mots "organique, écologique et biologique" sont réservés à
l’agriculture biologique. Ceux qui emploient ces mots abusivement peuvent être épinglés par la DGCCRF (Direction
Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la
Répression des Fraudes).
- le règlement européen 2092/91 est le plus important
en matière d’agriculture biologique. Il mentionne les
règles de ce mode de production mais aussi de la
transformation, de l’étiquetage, de la commercialisation et du contrôle des produits issus de l’agriculture
biologique. Toute la chaîne de production et de transformation est concernée par une réglementation très
- Le règlement européen 2078/92 sur l’aide à la conversion à l’agriculture biologique a été fondamental pour
en favoriser le développement. Pendant les premières
années de conversion, soit 2 ou 3 ans suivant les secteurs, il faut supporter contraintes et surcoûts sans
pouvoir encore valoriser les produits. L’aide à la
conversion vise à compenser cette perte importante de
revenus des débuts.
En France, la marque "AB", propriété du Ministère de
l’Agriculture garantit la nature biologique d’un produit.
Fin 2003, l’agriculture bio couvrait 550 000 hectares, soit
1,85 % de la surface agricole, 11 400 exploitations, soit
1,8 % du total des exploitations. La taille d’une exploitation en bio est plus importante que celle d’une exploitation
conventionnelle. Les chiffres d’affaires commencent à être
importants : le marché bio est à 2 à 3 milliards d’Euros
(plus que le secteur de la pêche et des cultures marines).
Mais si on regarde nos voisins européens, la France n’est
pas très en avance puisqu’elle occupe la 13ème place au sein
de l’Union Européenne. L’Italie, l’Autriche, le Danemark,
la Suède frôlent les 10 % de surface agricole en agriculture
biologique. L’Italie occupe la première place en Europe,
avec 1/3 des surfaces européennes en agriculture bio.
Cela tient avant tout aux systèmes d’accompagnement.
Dans la presque totalité des pays européens, des aides permanentes sont attribuées aux agriculteurs bio. Cela permet
avant tout d’avoir des produits un peu plus compétitifs
pour le consommateur. Comme les frontières ne sont pas
imperméables, cette situation induit des problèmes de
distorsion de concurrence parce que les produits bio aussi
circulent librement et largement en Europe. Et si les
agriculteurs bio français continuent à être les seuls à ne pas
- 17 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
être aidés pour maintenir leur production, ces problèmes ne
pourront qu’empirer.
Développer la consommation
de produits bio
Selon un sondage de 2003, 83 % des Français ont une
image positive des produits bio " parce qu’ils sont naturels
et sains, parce qu’ils contribuent à préserver l’environnement et parce qu’ils respectent le bien-être des animaux ".
Or seulement 37 % des Français consomment régulièrement des produits bio.
Que faire pour favoriser le développement de la
consommation de produits bio ?
- Les consommateurs réguliers de produits bio disent
qu’ils en consommeraient davantage s’ils les trouvaient plus facilement dans leur lieu de vente habituel.
Il y a donc des gens qui sont prêts à augmenter leur
consommation mais n’ont pas l’intention de faire
vingt kilomètres en voiture, quitte à polluer, pour aller
acheter des produits biologiques. Il est clair qu’il y a
encore beaucoup à faire auprès des grandes surfaces
(60 % du marché) et des municipalités (marchés,
réseaux plus spécialisés, vente directe).
- Les Français qui n’achètent pas de produits bio, sont
arrêtés par le prix proposé pour ces produits. Ils
iraient bien vers des produits bio, mais ils ne sont pas
prêts à dépenser 20, 30, 40 voire 50 % de plus en
faveur de ce mode de production.
Il reste beaucoup d’information et d’éducation à faire
en direction des consommateurs. Les initiatives sont nombreuses mais insuffisantes pour toucher la grande masse de
nos concitoyens. S’il est vrai qu’en moyenne, les produits
bio sont plus chers pour le consommateur, il reste possible
de consommer bio sans exploser son budget : en respectant
le rythme des saisons, un bon équilibre alimentaire dans
nos achats et en choisissant bien ses lieux d’achats. Les
produits bio sont en moyenne plus nutritifs et ont un
impact positif sur notre environnement (eau, sol, air). Ainsi
l’agriculture biologique est par conséquent aussi économiquement très intéressante pour la société.
Inondations
et effet de serre
L’exemple des inondations a révélé le rôle anti-érosion
de l’agriculture biologique. Les sols travaillés selon ce
mode de production entretiennent la vie organique,
l’humus. Il permet une meilleure infiltration de l’eau de
pluie, ce qui limite très fortement inondations et ravinement risquant d’embourber la Ria d’Etel par exemple… La
matière organique en quantité importante a un rôle fondamental pour piéger le carbone. Or en matière d’agriculture
biologique, l’objectif des agriculteurs est d’avoir un sol
vivant avec une vie organique importante, ce qui contribue
à lutter contre l’effet de serre, en piégeant le carbone.
La recherche d’un équilibre
L’agriculture biologique recherche l’équilibre en favorisant la rotation des cultures, le recyclage de la matière
organique et la biodiversité. Elle proscrit la culture et l’élevage hors sol. Le bien-être animal est au centre de l’agriculture biologique : les animaux y ont des obligations de
parcours et y ont plus d’espace. L’équilibre humain dans la
vie rurale est aussi favorisé par ce mode de travail. Après
les années de conversion, l’agriculteur biologique gagne,
dans les conditions actuelles, autant que son homologue
conventionnel. Un éleveur laitier bio rencontré en région
Rhône-Alpes m’affirmait que son élevage très extensif lui
assurait une meilleure rémunération en bio que précédemment en conventionnel et que cela serait toujours le cas
même si le lait bio était valorisé au même prix que le
conventionnel. Cela, il le devait en particulier aux économies réalisées en matière de frais vétérinaires (4 à
5 000 euros par an) et d’alimentation de son troupeau (la
totalité des aliments est produite sur l’exploitation) et ce
malgré une baisse des volumes de lait produits. Par ailleurs, en privilégiant le travail des sols, l’agriculture biologique favorise l’utilisation d’une main d’œuvre abondante
et contribue à maintenir une vie rurale.
L’agriculture biologique n’est pas un retour vers le
passé : les agriculteurs biologiques sont en moyenne mieux
formés que les producteurs conventionnels (soit 2 années
de formation en plus). Nombreux sont les ingénieurs agronomes qui se sont mis à l’agriculture biologique.
L’agriculture biologique, c’est utiliser toutes les connaissances accumulées aujourd’hui pour être davantage à
l’écoute de la nature, pour aller davantage vers une meilleure maîtrise des processus naturels, des équilibres naturels. L’agriculture biologique constitue aujourd’hui un
modèle de développement durable. Mais ce modèle peut et
doit toujours faire des progrès. Il peut encore être plus
performant au regard de ses objectifs environnementaux,
économiques et sociaux. L’agriculture biologique se situe
réellement dans une dynamique de progrès dont les objectifs en matière de durabilité me paraissent particulièrement
ambitieux et pertinents.
- 18 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Table Ronde du matin
Débat :
« Développement durable,
eau et paysage »
Une attitude et des méthodes
pour aujourd’hui et demain ?
Animateur :
Yann LUKAS, journaliste à Ouest-France
Participants :
Jean-Paul CELET, directeur régional
de l’environnement de Bretagne (DIREN-Bretagne),
Michel HELFTER, directeur de l’Agence BIO,
Agence française pour le développement et la promotion
de l’agriculture biologique,
Louis HERVE
agriculteur et maire de Locoal-Mendon,
Marcel LE ROUZIC, agriculteur
Jérôme LOIRE et
Jean-Noël YVON ostréiculteurs
Jean-Claude PIERRE, membre du Conseil Economique
et Social de Bretagne (CESR-Bretagne),
Bertrand SOULARD, représentant du directeur
départemental de l’agriculture et de la Forêt du Morbihan
(DDAF56),
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Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Au cours de la présentation des participants,
M. HERVE rappelle qu’il a été de ceux qui ont été à
l’origine de la démarche Bassin versant en créant le syndicat du Bassin versant de la Ria. M. CELET indique que si
le développement durable a été confié au Ministère de
l’Ecologie, c’est dans le but de concilier les enjeux économiques et environnementaux et qu’en dehors des aspects
protection, le développement durable constitue un
véritable enjeu en ce qui concerne la Ria d’Etel.
lopper et protéger concomitamment les 3 activités qui font
sa richesse : la pêche, l’agriculture et le tourisme.
Pour lancer le débat, M. LUKAS rappelle que la Ria est
un milieu exceptionnel et qu’elle constitue la seule ria
encore en bon état en Bretagne : cela mériterait peut-être
d’en faire une "vitrine" et d’y développer des structures
souples de dialogue.
Alain Lanoë
Jo Le Guillou
M. YVON souligne que, si la Ria lui permet de vivre,
elle lui donne aussi l’envie d’y rester et de la transmettre
aux générations futures. Il marque l’importance des démarches participatives issues du projet bassin versant et l’importance des comportements individuels dans les dérives
constatées. M. LE ROUZIC renchérit et déclare que la production bactérienne et les problèmes phytosanitaires ne
viennent pas du seul fait des agriculteurs mais sont aussi
dus au comportement des collectivités territoriales, des
entreprises et des citoyens utilisateurs de pesticides. M.
SOULARD rappelle la courte existence du C.T.E de la Ria
d’Etel et annonce son remplacement par un C.A.D conchylicole et un C.A.D agriculture du littoral actuellement en
préparation. Ils doivent concerner les problèmes de
production bactérienne et phytosanitaire mais aussi le
développement des deux activités concernées. Jean-Claude
PIERRE expose la vocation de Nature et Culture, association qui, depuis 1991 est un outil au service du développement durable. Au lieu de se contenter de critiquer,
l’association a choisi de faire des propositions alternatives.
Celles-ci figurent dans son ouvrage "Terre d’avenir"
qui fait état de solutions d’agricultures biologiques et durables pour toutes les filières. Dans les Côtes d’Armor, cette
association a mené une démarche de développement
durable avec une communauté de communes qui a permis
l’obtention du label "agenda 21" du Ministère de
l’Environnement, ce qui est une première en Bretagne.
Etant emblématique de la Bretagne, la Ria se doit de déve-
M. HERVE relève que c’était précisément les objectifs
de la démarche bassin versant qui a été initiée par les organisations professionnelles de l’agriculture et de l’ostréiculture avec pour buts :
- maintenir la qualité de l’eau
- maintenir l’activité économique de ces deux
professions
- Favoriser et le maintenir le dialogue
Initiée entre professionnels, cette démarche doit s’étendre aux élus et à l’ensemble de la population, la Ria comprenant 36 000 hectares, 3 600 habitants et 18 communes.
La première motivation de cette initiative, fait savoir
M. YVON, a été le résultat d’analyses IFREMER qui laissaient craindre un risque de passage en "zone qualité B"
pour les coquillages. La démarche avait donc pour objectif
de garantir une qualité A, ce qui a été réalisé en 2001 et ce,
sans mesures structurelles particulières, car il n’y avait pas
assez de pollution pour justifier un processus de reconquête de la qualité de l’eau. Tout s’est fait par le dialogue,
la persuasion et l’imagination des parties prenantes pour
limiter les pratiques néfastes comme le vidage des fosses
septiques individuelles dans la Ria.
M. LOIRE met également en relief la difficulté de mise
en place d’une structure porteuse avec 2 pays, 4 communautés de communes et d’agglomérations et des municipalités aux tendances politiques différentes. L’absence de
captage d’eau empêche également d’entrer dans des problématiques telles que "Bretagne eau pure" et d’obtenir
ainsi les financements qui seraient nécessaires pour une
action de plus grande envergure.
- 20 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Jean-Claude PIERRE souligne le paradoxe qu’il y a à
ne pas pouvoir obtenir d’aide "parce qu’on n’est pas assez
pollué" et fait référence à un rapport de l’O.C.D.E qui
révélait que cela coûte 4 fois plus cher de dépolluer que
d’éviter de polluer et qu’il faudrait mettre un euro pour des
mesures de prévention à chaque fois qu’on met un euro
dans la dépollution et que chacun doit peser en tant que
citoyen pour que les choses changent.
M. CELET souligne l’intérêt de la démarche bassin
versant qui donne la capacité de réunir tous ceux qui
agissent et pèsent sur la qualité de l’eau : agriculteurs
bien sûr mais aussi collectivités locales (captages, unités
de distribution, désherbage) et particuliers (pratiques de
jardinage, assainissement). Il insiste également sur celui
des S.A.G.E (1) et des S.D.A.G.E (2) qui permettent de
développer la concertation entre tous les habitants et de
traiter l’ensemble des questions relatives à la gestion de
l’eau.
M. HELFTER donne l’exemple de Munich qui, au lieu
de créer une usine pour débarrasser l’eau des pesticides a
fait le choix de favoriser l’agriculture bio sur le bassin
versant : les financements spécifiques en faveur des
agriculteurs pour faciliter ce changement ont coûté 5 fois
moins cher. Tout le bénéfice a été pour le citoyen. Est-on
prêts à faire de même ? Cela nécessite une réflexion
globale au niveau des collectivités.
M. PIERRE renchérit sur ce point et fait référence à
des voyages d’études qu’il a organisés en Allemagne pour
les collectivités locales. Il complète l’exemple donné par
celui de la ville d’Augsburg : en une génération de 25-30
ans, elle est passée de 48 mg/l de nitrates dans l’eau (le
seuil de tolérance est de 50 mg) dans les années 1980 à 3/4
mg/l, grâce à un engagement financier très fort sur la
modification en profondeur des pratiques agricoles (formation, incitations financières : 4 000 F/ha) : le coût a été
de 3 cts d’euros contre 18 cts pour la dénitratation. La
Philippe Rio
ville s’est aussi engagée à faciliter l’approvisionnement
des collectivités par les produits issus de cette agriculture
bio (crèches, cantines, foyers de personnes âgées). Il faut
en effet établir une cohérence entre les pratiques, les agriculteurs ne devant pas être les seuls à modifier les leurs. Et
aujourd’hui, il n’y a pas un agriculteur en moins dans la
région d’Augsburg.
M. LOIRE revient au bassin versant et indique qu’après
diagnostic des pratiques à risque, il est désormais établi un
programme d’actions en 3 volets sur les 18 communes
concernées :
- qualité de l’eau (observatoire de la qualité de l’eau,
réseau de surveillance des algues vertes, lutte contre
les pollutions bactériologiques et les pesticides),
- maintien des activités économiques primaires (agriculture, ostréiculture) : démarche de certification environnementale "qualité" et valorisation du territoire par
la communication sur la qualité environnementale.
- dialogue : information et communication par une
lettre – journal du bassin versant)
Il indique également la nécessité de trouver des outils
de préservation pour lutter contre la pression foncière et
l’urbanisation.
Une personne de l’auditoire souligne l’importance des
comportements individuels en donnant quelques exemples
de pratiques "à risque" observées en bordure de Ria d’Etel
où elle demeure (épandages de fosses, constructions illicites, enfouissements de déchets) et les dangers de "l’effet
boule de neige" créé par leur tolérance, chacun pouvant se
croire autorisé à faire de même.
M. SOULARD fait état d’un essai de mise au point de
C.A.D adaptés au Morbihan et des difficultés qu’il y a, à
maintenir une activité agricole viable économiquement
avec les exigences de l’élevage de coquillages. D’où
l’importance de l’enjeu de la biodiversité et du paysage et
des zones Natura 2000. Les accords entre agriculteurs et
ostréiculteurs devraient donc s’étendre vers une protection
plus large de l’environnement.
M. HELFTER rappelle qu’il existe des mesures nationales d’aide à la conversion à l’agriculture biologique proposées dans tous les départements et qu’il faut mener une
réflexion à ce sujet en passant par-dessus les préjugés ce
mode de culture permettant une diminution notable de
l’utilisation des pesticides, des pollutions bactériologiques
grâce au compostage et proposant des systèmes extensifs
de diminution des nitrates. Cela mène à une agriculture
plus autonome et plus économe.
(1) SAGE : Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux.
(2) SDAGE : Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux.
- 21 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
comporte des engagements sur 30 ans et suppose, bien sûr,
un travail sur les P.L.U. Ces démarches ont été initiées sur
le golfe du Morbihan mais pas sur la Ria d’Etel.
Pour un C.A.D. commun à l’Agriculture et à
l’Ostréiculture
M. LOIRE rapporte que le diagnostic établi par la
Commission Environnement initié sur l’ensemble des
communes de la Ria à l’occasion de la démarche bassin
versant a permis d’avoir le témoignage des associations,
donc un contact avec les citoyens, mais a révélé une
méconnaissance de leur territoire par les habitants. Il y a
donc là un important travail d’information à faire, comme
en matière de sensibilisation car c’est grâce à la pression
sociale qui peut en découler que peuvent être évitées les
exactions individuelles évoquées.
Il suggère la création d’un C.A.D "Ria d’Etel" commun
aux deux professions : agriculteurs et ostréiculteurs.
La salle s’interroge sur les zones humides et
l’épandage
Cohoner-Fischof
– La préservation des zones humides, souvent comblées
pour satisfaire à la pression foncière alors qu’elles ont
une réelle importance dans la qualité de l’eau. Il est
confirmé qu’elles sont effectivement un tampon d’épuration et qu’elles doivent être prises en compte dans le
cadre des P.L.U. M. CELET souligne que les S.A.G.E
comportent un inventaire des zones humides et qu’ils
présentent l’avantage d’avoir une valeur réglementaire
qui permet de les faire respecter.
– Les épandages : une personne de l’assistance fait état, sur
son secteur situé à 200 m de la Ria, d’une enquête publique relative à une demande d’épandage par un éleveur de
Pontivy. Il est indiqué qu’il y a interdiction totale d’épandage dans la bande de 500 m avec une tolérance entre
200 m et 500 m après compostage.
Un débat s’engage ensuite au sujet
de la pression foncière
M. LOIRE confirme qu’il y a un net surenchérissement
du prix des terrains qui entraîne une difficulté de préservation des biens familiaux et d’installation pour les jeunes.
Cela amène également une nouvelle population qui perçoit
souvent l’existence des activités traditionnelles comme une
gêne, d’où, une nouvelle fois, la nécessité de dialogue et
d’explications en évitant les querelles et les dénonciations.
M. LEBAHY, dans l’assistance, fait remarquer que,
dans ce domaine du foncier, mieux vaut prévenir que guérir. Par exemple, définir des orientations dans les P.L.U, ce
que permettent les S.M.V.M, mais ils ne concernent que les
zones côtières contrairement aux Parcs Naturels Régionaux
qui prennent, eux, en compte, l’ensemble du bassin versant,
avec une réflexion sur la consommation de l’espace qui
M. HERVE considère que l’observation de la loi littoral
et l’élaboration des P.L.U permet de maîtriser les zones
constructibles. Dans l’assistance, M.LOUARN fait observer que ce phénomène de pression foncière n’est pas propre
à la Ria d’Etel et aux zones côtières. Il s’agit d’un phénomène général dû à l’accroissement de la demande, à la saturation des zones urbaines et au refus de densification des
zones périphériques (1ère et 2ème couronne) créées dans les
années 70. Cela génère un report de la demande vers les
zones plus éloignées (3ème couronne et au delà) même si
l’environnement est peu attractif. Il considère donc que,
compte tenu de l’attractivité particulière de la Ria d’Etel et
de l’existence d’une "couronne extrême" sur laquelle la
construction est susceptible de se concentrer hors zone
côtière, il serait nécessaire d’avoir une réflexion, non pas au
niveau du P.L.U de chacun, mais sur le territoire global, via
les S.C.O.T (1), par l’ensemble des communes, pour avoir
une répartition équilibrée des constructions. Il n'y aura pas,
selon lui, de blocage du phénomène en cours s’il n’y a pas
de régulation de la pression foncière sur l’ensemble du territoire concerné. Dans l’assistance, Mme BERSANI souligne l’intérêt du programme européen de "Gestion intégrée
des zones côtières" qui offre l’avantage de ne pas prendre
en compte uniquement le littoral et l’aspect "balnéaire" des
côtes mais l’ensemble du territoire et des aspects concernés : qualité de l’eau, activités primaires, foncier.
Revenant à l’agriculture, M. HELFTER indique que les
avantages de l’agriculture bio ne sont pas assez valorisés,
tant en matière sanitaire qu’en matière de respect de l’environnement et de biodiversité. Elle devrait être considérée
comme une véritable alternative en accord avec le concept
de développement durable, l’agriculture dite "raisonnée"
n’étant qu’un "relookage" du système dominant. Il faut
donc des moyens pour informer et sensibiliser.
(1) SCOT : Schéma de Cohérence Territoriale
- 22 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Il est par ailleurs souligné qu’il faut des moyens et du
temps pour passer d’un mode de production à un autre et
que les discussions menées dans le cadre de la démarche
bassin versant ont révélé les difficultés ressenties par les
anciens à être considérés comme des pollueurs et à être
dans l’impossibilité de sortir d’un modèle économique
dans lequel ils se sont trouvés piégés.
La solution ne peut venir que d’une volonté collective,
y compris au niveau des consommateurs. Seul le maintien
de l’activité agricole pouvant éviter le passage de certaines
terres en zone constructible. M. LE ROUZIC insiste sur le
fait que le modèle actuel entretient une surproduction pour
maintenir des prix bas et que c’est de là que viennent les
excès tels que l’utilisation des farines animales, des antibiotiques etc... Il considère qu’il faut une évolution progressive vers l’agriculture durable (cela étant a priori plus
facile pour la filière bovine) et confirme que "l’agriculture
raisonnée" maintient les schémas en place.
M. PERRON, maire d’Hennebont et présent dans l’assistance, demande quelles sont, selon les agriculteurs, les
conséquences des nouvelles mesures de la P.A.C (1) et pourquoi la démarche bassin versant a été privilégiée par rapport à un S.A.G.E qui, selon l’expérience qu’il en a faite en
tant que Président du S.A.G.E Blavet, présente l’avantage
de traiter les conflits d’usage en faisant se rencontrer tous
les partenaires concernés et permet d’établir une réglementation qui s’impose aux communes au niveau des P.L.U.
M. HERVE indique que la démarche bassin versant
s’est faite à partir des discussions menées à LocoalMendon entre agriculteurs et ostréiculteurs et qu’ils se sont
dirigés vers ce processus, faute d’en connaître d’autre. Il
marque son ouverture à passer au S.A.G.E et M. CELET
lui donne l’assurance de son aide si cette initiative est
prise. Ce dernier rappelle que les S.A.G.E permettent la
création d’une Commission Locale de l’Eau, que le programme Natura 2000 sur le secteur est relancé ainsi que les
possibilités offertes par les S.C.O.T, même si l’existence
de 2 périmètres en Ria d’Etel rend ce processus plus difficile. Le programme de Gestion Intégrée des zones Côtières
évoqué par Mme BERSANI lui paraît être de nature à assurer la cohérence de l’ensemble.
En conclusion, M. PIERRE fait remarquer que 80 % des
aides vont à 20 % des agriculteurs et que le modèle économique en place (et non les écologistes) a fait disparaître
70 % des agriculteurs en une génération et rend quasi impossible la reprise des exploitations par des jeunes. Seulement
deux A.O.C existent à ce jour en Bretagne: il considère
comme nécessaire de valoriser une plus grande part de la
production par le lien au sol et de reconquérir le marché intérieur. Il cite l’exemple de la Sardaigne qui vient de décider
de passer 100 % de son agriculture en bio, ce qui va aussi
valoriser le tourisme dans cette région et celui de la Toscane
qui vient, dans le même sens, de solliciter une labellisation
de son paysage auprès de la Commission Européenne.
Une intervention
remarquée
sur les cimetières
de bateaux
Lise Cordonnier
Lors du déjeuner du mardi, Alain Decaux, du service du
patrimoine maritime de la DRAC-Bretagne, ne pouvant
rester aux débats, a fait une intervention fort intéressante
sur le rôle de lieux de mémoire joué par les cimetières de
bateaux dans le patrimoine maritime et les moyens de les
gérer.
Exceptée la délicieuse "barre d’Etel", spécialité d’un
pâtissier d’Etel, les deux délicieux déjeuners biologiques
servis pendant le colloque ont été préparés par la jeune
créatrice du restaurant "La Pause Bio", 4, rue Clairambault
à Lorient.
(1) PAC : Politique Agricole Commune.
- 23 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Mise en valeur du paysage et de l’architecture :
introduction au débat
Yves DUBOST,
Architecte dplg,
Vice-Président de l’UMIVEM et Administrateur du CAUE 56
Mise en valeur du paysage ?
Lors de notre croisière sur les sites magnifiques de la
rivière, on pouvait dire que la nature elle-même s’était
merveilleusement acquittée de sa mise en valeur.
Cependant, quel milieu à la fois fort et fragile, où la main
de l’homme peut façonner ou détruire, exploiter avec
sagesse ou consommer sans retour. Lorsque de notre
bateau nos regards interloqués s’arrêtaient sur quelques
constructions, on était tenté de paraphraser La Bruyère :
"C’est une grande misère que de n’avoir pas assez d’esprit
pour bien construire, ni assez de jugement pour ne pas
construire (en certains lieux), pas assez d’esprit pour
façonner un paysage ni assez de jugement pour n’y point
toucher."
Mettre en valeur le paysage ? ou plutôt ne pas le démettre, et surtout ne pas se démettre d’un objectif premier :
préserver l’admirable équilibre de sa réalité, car cette
nature, est la vie même d’un éco-système, véritable
richesse d’aujourd’hui et de demain. Mise en valeur du
paysage ?… Ou plutôt remise en valeur, lorsque la main de
l’homme en a fait un peu trop, par des abattages, terrassements, ou remblais excessifs. Il s’agit alors de restituer, il
s’agit aussi de s’adapter aux nécessaires évolutions humaines ou naturelles.
Mettre en valeur l’architecture ?
Mais quelle architecture ? On conçoit aisément la mise
en valeur d’un patrimoine ancien, laissé à l’abandon, par
une restauration soucieuse de son caractère. On conçoit
aisément, pour une maison ancienne, transformée un temps
par des ouvertures ou des ajouts sans proportion, la recherche d’une (re) mise en valeur de sa qualité originelle. La
valorisation d’un pays passe par le respect et la mise en
valeur de son patrimoine. On conçoit beaucoup moins aisément, dans l’écrin de la Ria d’Etel, l’extension désordonnée de l’habitat, le développement des constructions bana-
lisées de type "pavillon". D’une part, ce développement
des maisons individuelles est terriblement consommatrice
d’espaces et d’autre part, il n’y plus d’osmose entre
paysage et habitat, environnement naturel et construit.
Et notre architecture d’aujourd’hui, quelle est-elle ?
Pourquoi un tel cadre de vie harmonieux et fort ne secrèteil pas une architecture de qualité ? Comment renouveler la
richesse du vocabulaire architectural et des formes dans la
continuité évolutive d’une identité locale ?
Garder aux paysages de la Ria toute leur harmonie, restaurer le patrimoine dans toute sa qualité et sa simplicité,
générer une architecture d’aujourd’hui soucieuse à la fois
des normes qui y demeurent, et de son environnement,
garder le juste équilibre des lieux construits et pérenniser
la qualité des espaces devant rester naturels : Quel
fabuleux programme ! quelle ambition !
Mais comment
et par quels moyens ?
En matière d’urbanisme, il existe une panoplie d’outils
à caractère réglementaire, analytique et d’orientation,
touchant tant au droit des sols, qu’à l’architecture et au
paysage… citons en quelques uns :
- les incontournables PLU ont pris le relais des POS, ils
peuvent permettre une maîtrise fine de l’usage des
sols, si on le veut. Mais, pourquoi au sein d’un
territoire marqué, le PLU est-il abordé isolément par
chaque commune. Un rapprochement des méthodes
de travail, des problèmes rencontrés, des orientations
durables à prendre entre les communes concernées
par une même entité géographique créeraient une
synergie d’idée et de cohérence
- 24 -
- nous avons aussi les ZPPAUP "zone de protection du
patrimoine architectural urbain et paysager ».
Excellent outil alliant étroitement architecture et
paysage elle pourrait trouver ici une application
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
particulière. La ZPPAUP est certainement à redécouvrir. Sans doute faut-il redessiner la manière de l’appliquer dans une vue beaucoup plus large, et donner
une cohérence aux orientations à la fois de protection
et d’évolution maîtrisées, sur un territoire d’une telle
qualité.
- et bien sûr la loi littoral qui s’applique sur toute la
rivière, les SCOT (mais dans quel découpage ?).
Sera évoqué le classement au titre des sites NATURA
2000 dont le périmètre est assez limité et la démarche en
panne.
Ces documents sont-ils adaptés à la Rivière d’Etel ? Par
ailleurs, comment à travers ces outils doser habilement
pédagogie/orientation/règlements. Les outils doivent-ils
imposer ou suggérer ? contraindre ou orienter ? Nous allons
en parler dans notre débat mais et il y a certainement plusieurs manières de les appréhender, d’utiliser leurs atouts.
En matière d’architecture, sans doute faut-il s’affranchir de nos terribles habitudes, de nos besoins -quelquefois
inutiles- et nous recentrer sur l’essentiel : le sol et les
matériaux.
Le sol
Toute réalisation doit y adhérer. Plus on y adhère physiquement mieux on s’y insère. Une plus grande vigilance,
une plus grande connaissance de la trame cadastrale, de la
géométrie foncière qui s’est toujours calée jusqu’à un
temps récent, sur la topographie d’un lieu permet de bien
assimiler les lignes fortes d’un site ainsi que les influences
climatiques.
Les matériaux
Depuis quelques décennies, quelle explosion de
matériaux rarement sains et presque toujours polluants :
PVC/polyester/silicone/multicomposants/alliage !
La réflexion sur le développement durable est une réelle
ouverture pour travailler sur d’autres matériaux simples
tels que la terre, la chaux, les mortiers de chanvre, les isolants de chanvre et de lin, matériaux de qualité, (également
utilisés en restauration de patrimoine), juste réponse au
traitement du bâti ancien. N’est – ce pas ici une source de
réflexion pour l’architecture d’aujourd’hui et de demain ?
Dans une intégration au site pour une architecture intégrée
et aussi - (on pourrait dire surtout)- pour une intégration de
l’homme à son habitat, le matériau est un facteur
déterminant : (il apporte une respiration, une matière, une
coloration.)
Par ailleurs, ne pas oublier les lignes simples, hors du
temps, celles qui sont à l’échelle de l’homme, où les choses trouvent leur juste proportion, leur juste équilibre, sans
trop en faire. Agir avec modestie, c’est aussi s’investir en
profondeur. La simplicité n’est pas toujours simple à pratiquer. Une maison où il fait bon vivre n’est-elle par une
maison en harmonie avec elle-même, avec son environnement, avec l’homme qui y demeure ?
Contribution d’Alain Marinos,
la ZPPAUP
Retenu au dernier moment, le chef de la Direction de
l’Architecture et du Patrimoine (DAPA) a tenu à nous
adresser par télécopie sa réflexion sur l’intérêt pour les
communes à établir une Zone de Protection du Patrimoine
Architectural, Urbain et Paysager.
En voici un extrait :
"La ZPPAUP qui n’est pas, à proprement parler, un
document d’urbanisme, gagne à être conduite préalablement à l’élaboration ou la révision du plan local d’urbanisme ou de la carte communale. Elle permet d’approfondir la connaissance des valeurs patrimoniales des lieux
considérés. Elle révèle les bases sur lesquelles le Maire
peut fonder ses décisions, en accord avec le service départemental de l’architecture et du patrimoine (SDAP), dans
le respect des qualités architecturales, urbaines et paysagères du territoire. Elle ouvre sur la dimension culturelle
et permet ainsi de compléter et d’enrichir, en bord de mer,
les orientations données par la Loi littoral.
Les expériences déjà conduites dans d’autres lieux
montrent que l’étude préalable permet non seulement de
concevoir un document facilitant la gestion des lieux du
Patrimoine, mais elle propose une méthode pouvant
conduire à un projet d’urbanisme et de paysage fondé sur
la connaissance du territoire. On ne protège bien que ce
que l’on connaît bien. Les préoccupations d’aménagement
et celles de protection se rejoignent ainsi dans un souci
commun de qualité du cadre bâti et paysager."
- 25 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Table Ronde de l’après-midi
Débat :
« Mise en valeur paysage et architecture »
Quels moyens choisir pour le Ria d’Etel ?
Animateur :
Ouest-France
Marcel FREYDEFONT, professeur en
scénographie à l’Ecole d’architecture de Nantes
Participants :
Joëlle BEAUCHET, adjointe au maire de Plouhinec, chargée de l’urbanisme, de l’environnement et du tourisme,
Catherine BERSANI, Inspecteur général au Ministère de
l’Equipement, Présidente du collège des espaces protégés,
du paysage et de l’architecture au Conseil Général des Ponts,
membre de la Commission Nationale Supérieure des Sites
(loi 1930), membre du Conseil National de l’Aménagement et
du Développement du Territoire,
Marcel FREYDEFONT, animant le débat
sur le paysage et l’architecture
Yves DUBOST, architecte dplg, en milieu rural,
Christophe GARRETA, architecte des bâtiments de
France, chef du Service Départemental du Morbihan
(SDAP56),
Denis-Marie LAHELLEC, conseiller pour
l’architecture à la Direction Régionale des Affaires Culturelles
de Bretagne (DRAC),
Patrick LE LOUARN, directeur du laboratoire de recherche sur l’urbanisme, le territoire et l’environnement
Jacques LESCOAT, géographe,
responsable de la Conférence des Villes de Bretagne
(réseau des 30 plus grandes villes de Bretagne),
et fondateur de l’association des géographes de Bretagne,
Bertrand LOOSES, Directeur départemental de
Photo : Jean-Pierre Ferrand
l’Equipement du Morbihan (DDE56),
Jean-Bernard VIGHETTI, maire de Peillac (56),
Président du Grand Site Naturel de la Basse Vallée de l’Oust
du réseau des villes d’art et d’histoire de Bretagne,
des Petites Cités de caractère
et directeur de l’Office du tourisme de Rennes-métropole,
Lande de la Ria aujourd’hui
- 26 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Pour lancer le débat, M. FREYDEFONT souligne que
les atteintes au site, au paysage, et au bâti (quelquefois par
le bâti lui-même) sont liées aux activités économiques,
mais en même temps, on réclame qualité de l’eau, de l’air,
de la terre, du cadre de vie et du paysage dans l’aménagement urbain etc.). Ainsi naissent des conflits : entre Nature
et Culture, équipement et culture, création et protection doit-on arrêter le temps ?- aménagement et développement.
On est face à un système d’acteurs, comme au théâtre. Et
le théâtre, c’est le conflit.
Il paraît donc indispensable d’établir un dialogue entre
les différents acteurs (techniciens et élus de différents
niveaux) et de s’appuyer sur les nouveaux outils tels que
les P.L.U, les S.C.O.T etc. et les nouvelles approches telles
que le développement durable ou le lien récemment établi
entre patrimoine et architecture.
Quel sens, quelle valeur souhaitons-nous donner au
"décor" dans lequel nous vivons ? Quel paysage, quelle
architecture, pourquoi, pour qui ? La question centrale se
situe du point de vue de la valeur esthétique, de la beauté,
de la sensibilité. C’est bien du sens esthétique des milieux
de vie qu’il est ici question. Qu’en est-il du paysage ?
Zola déclarait à propos du théâtre : "Le décor n’est que
le milieu dans lequel naissent, vivent et meurent les
personnages".
Ne peut-on pas établir un parallèle avec notre "décor de
vie" et considérer que la mise en valeur du paysage et de
l’architecture est un enjeu de vie ?
Mme BERSANI déclare que le premier conflit à dépasser est celui entre nature et culture. Le Val de Loire a su
concilier nature et culture. Lorsque l’UNESCO l’a reconnu
comme Patrimoine mondial, c’est un paysage profondément humain avec ses villages et ses châteaux, qui a été
considéré là. Elle pense que l’avenir de la Ria est dans ce
type de démarches : dialogue, écoute, participation, projet.
Selon elle, il convient avant tout de définir quelle identité
on lui reconnaît et que cela soit fait par les habitants euxmêmes : la Ria sera ce que seront capables d’en faire ceux
qui y vivent.
Mme BEAUCHET fait état des difficultés et de la solitude des élus face aux problèmes de mixité sociale et d’urbanisation. Ainsi, à Plouhinec, toutes les zones Na (terrains
à bâtir) seront construites d’ici début 2005. Les communes
n’arrivent pas à faire jouer leur droit de préemption, devant
les promoteurs qui négocient avec les propriétaires des
compromis de vente signés avec le notaire, sous réserve du
droit de lotir. Elle dit sa crainte de voir arriver les outils de
protection trop tard.
M. FREYDEFONT relève la complexité du statut d’élu
face à ses électeurs et du système des acteurs en matière
d’urbanisme. Il confirme qu’il y a actuellement une forte
demande d’espace individuel, chacun voulant avoir un jardin et souligne qu’il y a là un problème de responsabilité
collective : comment peut-on dépasser son pré carré et
avoir une image plus globale ?
M. LAHELLEC rappelle que c’est bien entre les mains
des élus que se trouvent les solutions par des projets
d’aménagement et de protection qui peuvent être élaborés
en liaison avec les services de l’Etat. Ainsi, l’initiative de
création d’une Z.P.P.A.U.P ne dépend que d’une décision
du Conseil Municipal.
M. LESCOAT insiste sur l’importance du volet paysager et déplore les dégâts enregistrés depuis nombre d’années par l’urbanisation débridée du littoral, les mitages, le
développement des zones d’activité. Les maires, très proches de leurs concitoyens, manquent de recul pour décider
l’autorisation ou non des permis de construire : c’est un
problème administratif grave à régler. Cela explique bien
des erreurs en matière d’environnement. Nous n’avons pas
encore la culture de la qualité et la maturité en matière
d’aménagement. Pourtant les citoyens sont sensibles à la
qualité et à la beauté. Compte tenu du potentiel géographique de la région, une reconquête paraît cependant possible.
Pour cela il faut agir surtout au niveau de la culture.
M. LOOSES insiste sur la nécessité de commencer par
appréhender la réalité des acteurs : mode de vie, attentes,
activités avant de faire appel à la "boîte à outils" que
constituent les règlements et les solutions administratives :
une vision esthétique se construit et doit se partager : il faut
prendre le temps nécessaire à cette construction et tenir
compte de la diversité des agglomérations qui bordent la
ria.
Une conviction partagée autour d’enjeux reconnus sera
une protection plus efficace que la création de règles
spécifiques.
M. VIGHETTI expose l’expérience de Z.P.P.A.U.P réalisée dans sa commune de Peillac qui est partie d’une
volonté de créer une commune résidentielle en liaison avec
les nouveaux habitants et d’une prise de conscience de l’intérêt du patrimoine local. Cela a permis à la commune de
bénéficier d’un architecte conseil. S’y est adjoint la création d’un grand site naturel concernant 9 communes de la
Basse Vallée de l’Oust qui est un site totalement humanisé.
Les jeunes ont été associés à ces projets via les associations
locales (mini-golf d’interprétation, circuit des châtaigniers,
circuit de la Bande dessinée). Mais le manque de moyens
humains et financiers des petites communes rurales ne
permet pas de réaliser tout ce qui est souhaité.
- 27 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
M. LE LOUARN rebondit sur les attentes contradictoires relevées par M. FREYDEFONT. Il fait remarquer que
le paysage comme l’architecture sont des "objets juridiques" : depuis longtemps, pour l’architecture (à la fin du
XIXème s.), et plus récemment, pour le paysage (en 1983).
L’architecture est plus facilement reconnue comme objet
esthétique et patrimonial que le paysage qui est plutôt ressenti comme une identité que comme un patrimoine. Mais
c’est aussi un objet économique. Et sa mise en valeur passe
par une modification de la spéculation foncière et de la
"consommation de paysage". La loi peut garantir l’aménagement et la protection du paysage, celui-ci est la résultante d’un modèle de développement du territoire. Il
convient donc de définir le modèle que l’on veut voir appliquer à la Ria d’Etel. Sa singularité et son espace très limité
interdisent un développement non durable du "toujours
plus". Parviendra-t-on à garder l’attractivité sur chacune
des rives et à créer une unité géographique et paysagère ?
A son sens, il n’est pas nécessaire de rajouter du droit (il
existe sur la ria 2 SCOT mais ni SAGE ni ZPPAUP) mais
plutôt de créer un espace politique global via une unité de
débat et de participation du citoyen sous une forme à
inventer.
Mme BERSANI cite le cas de HONFLEUR et de la
région des lacs de Haute Savoie où se sont créés des P.O.S
intercommunaux qui permettent d’avoir un projet de territoire, une répartition différente de l’espace et la définition
des règles par un collège, son application relevant d’un
seul homme. C’est important parce que ça limite la solitude des élus et fait partager les difficultés et la fiscalité.
Elle suggère que s’élabore pour la Ria d’Etel un projet de
même nature que celui du grand site dunaire qui s’appuie
sur la création d’un Syndicat Intercommunal.
Sans écarter totalement cette idée, Mme BEAUCHET
souligne la lourdeur et les problèmes financiers liés à un tel
projet ainsi que la question de la répartition des retombées
pour chacune des communes concernées.
Les questions posées par l’assistance concernent
essentiellement l’urbanisation et le non-respect des règles d’urbanisme
Mme BERSANI informe des possibilités ouvertes par
les Etablissements Publics Fonciers qui facilitent l’achat
d’immeubles par les communes, en vue, par exemple, de
réaliser des projets sociaux en accordant des financements
à taux Zéro. C’est aussi un moyen de préserver le patrimoine et d’éviter qu’il tombe entre les mains des spéculateurs. Elle cite l’exemple, en Normandie, de
l’Etablissement Public Foncier de la Basse-Seine : il réunit
tous les maires des départements des deux régions de
Haute et Basse Normandie. Cela permet ainsi à chaque
commune de bénéficier d’une banque à taux zéro, grâce à
une minuscule taxe additionnelle appelée "Taxe Spéciale
d’Equipement". Les communes peuvent alors faire face
immédiatement aux besoins qui peuvent se manifester et
qui peuvent être d’ordres très divers. Mme BERSANI
s’étonne que la Bretagne n’ait encore aucun Etablissement
Public Foncier pour le littoral qui en a pourtant un besoin
évident.
M. LESCOAT déclare que tout le monde ne peut pas
vivre sur le littoral. Pour faire face à la très forte pression
foncière sur le littoral et les îles, il invite à n’autoriser à
construire que sur des parcelles limitées à 400 m2, là où il
y a déjà une urbanisation, pour recomposer un noyau
urbain qui soit beau. Selon lui, aujourd’hui, les architectes
qui gagnent sont ceux qui travaillent dans la simplicité et le
respect de l’existant. Il faut maintenir un équilibre. Nous
devons promouvoir une autre forme d’urbanisme liée à la
culture.
M. LE LOUARN confirme son propos et constate qu’il
y a une différence importante entre le ressenti et la réalité
dans la mesure où il y a pléthore de règlements et de procédures : le véritable problème est un manque d’échanges
sur les choix.
M. LAHELLEC indique, qu’à ce titre, les Z.P.P.A.U.P
ne sont qu’un outil répondant à un projet et qu’il faut donc
définir d’abord le projet. Un travail commun préalable est
donc indispensable et il devrait être fait au niveau intercommunal en ce qui concerne la ria d’Etel. Il cite l’exemple de la Z.P.P.A.U.P intercommunale de la rivière du
Loiret initié en 1991 en réponse à une demande des collectivités locales. Elle a porté sur 10 km de rivière et 6 communes, demandé 3 ans d’étude et 2 ans de procédures
administratives pour aboutir en 1995. Les décisions restant
toujours communales, un Syndicat intercommunal a pris
en charge cette étude et l’a menée à terme. Car ce projet
était intercommunal dès le départ. Un autre projet similaire
sur l’Aber du Trieux n’a pu aboutir : notons qu’au départ,
il n’était pas centré sur l’ensemble du paysage mais sur un
seul monument historique, le château de La Roche-Jaigu et
que l’initiative venait du Conseil Général et non pas
des communes. Cela s’est terminé par le désaccord de
2 communes qui a empêché l’aboutissement du projet.
- 28 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Le sénateur-maire de Landévant Joseph-François Kerguéris, (élu depuis
Président du Conseil général) nous a fait l’amitié de venir clore le colloque,
malgré la période électorale et un décès survenu dans sa famille. Il nous a dit
son attachement au patrimoine naturel et culturel de la Ria d’Etel et les efforts
des élus pour préserver la qualité de son eau. Il a souligné notamment les
importants investissements réalisés pour assurer un meilleur assainissement
dès l’amont, en fond de Ria, grâce à la construction d’une station d’épuration
traitant les pollutions bactériologiques par ultra-violets. Enfin il a encouragé le
travail de réflexion entrepris pour l’avenir de la Ria à travers ce colloque.
Joseph-François Kerguéris,
Président du Conseil général
Synthèse
des deux journées
de colloque
4 Affirmer le patrimoine littoral comme support
majeur d’une identité vivante, à portée économique
(savoir-faire locaux).
5 Valoriser l’économie maritime et littorale
6 Reconnaître à l’agriculture et à la conchyliculture
littorales un privilège foncier contre une obligation
d’excellence partagée
7 Arrimer résolument les politiques portuaires aux
atouts du littoral (cabotage…)
8 Faire le choix :
a) d’une politique de valeur ajoutée pour la filière nautique
b) de coordonner les politiques de loisirs et de tourisme
(par exemple équipements sportifs servant à la fois
aux habitants et aux touristes)
En conclusion, Mme BERSANI fait état du message
d’alerte adressé au gouvernement par le Conseil National
d’Aménagement du Territoire concernant la disparition
silencieuse de l’identité sociale, culturelle et économique
du littoral, due au grignotage. Ce Conseil fait référence au
projet de Gestion Intégrée de la Zone Côtière (GIZC), programme européen en cours de développement. Il propose
10 mesures classées par ordre d’importance :
1 Se donner et donner aux collectivités territoriales
les moyens d’une maîtrise foncière globale : avec la création d’Etablissements Publics Fonciers au niveau des
Régions, notamment pour le financement de programmes
sociaux locatifs (à privilégier à l’accession à la propriété si
on veut préserver le patrimoine foncier communal).
2 Sauvegarder le tiers sauvage via les aides
apportées au Conservatoire du Littoral
3 Mettre au service de l’économie du littoral des
grandes filières de formation et de recherche maritimes
9 Renouveler le cadre de la gouvernance, c’est à dire
établir un dialogue entre élus, acteurs économiques,
associations, habitants pour définir une vision d’avenir
commune.
Cette vision commune permettra de produire une image
commune de la Ria d’Etel à montrer.
Que les communes fassent leur PLU à partir de cette
vision commune à travers une charte, un colloque ou d’autres formes encore, pour montrer que des gens sont d’accord pour une même vision en matière de mixité sociale
entre jeunes, anciens, modestes, riches, extérieurs et natifs
pour l’avenir de la Ria.
10 Créer un Conseil National du Littoral (point omis
pendant le colloque)
C’est cette capacité de dialogue, cette volonté de porter,
d’expliciter, de faire partager cette image de la Ria qui peut
assurer la préservation de ce patrimoine exceptionnel. Car
alors tout le monde saura que cette image a de l’importance
pour vous. Et elle sera portée par les élus qui vous représentent, les services de l’Etat et la société civile (architectes..) qui sont prêts à aider les citoyens. "L’avenir de la ria
d’Etel est dans vos cœurs, dans vos yeux, dans vos mains.
A patrimoine exceptionnel, mesures exceptionnelles".
- 29 -
Quel avenir pour la Ria d’Etel ?
Mot de clôture
Marie-Claire BORDE :
Je remercie tous les intervenants qui ont été passionnants.
J’espère que vous allez repartir "regonflés", parce qu’ on a besoin
de vous tous pour travailler ensemble à garder la beauté de ce pays
magique.
Et maintenant quelles suites ?
Village “Les Gîtes de Remoulin” en Nostang
Pour répondre au désir exprimé par plusieurs des participants à ces deux journées de colloque, plusieurs visites
ont été proposées.
Deux d’entre elles ont déjà eu lieu : la première le
19 juin 2004, à Plourin-lès-Morlaix (29), dont le maire,
Jacques Le Brigand, a retracé l’aménagement concerté
avec les habitants et la mise en place de la Zone de
Protection du Patrimoine Architectural Urbain (ZPPAU) ;
la seconde, le 19 juillet 2004, a permis de visiter la Zone
de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et
Paysager (ZPPAUP) de Peillac (56), sous la conduite de
son maire Jean-Bernard Vighetti.
Une autre visite aura lieu en février 2005, dans le Pays
du Goëlo (22) pour découvrir la mise en place de l’agenda
21 de la communauté de communes de Lanvollon-Plouha,
sous la conduite de Jean-Claude PIERRE de l’association
Nature et Culture.
Enfin plusieurs bonnes nouvelles ont suivi la tenue du
colloque dont voici les principales : la sélection définitive
du fond de la Ria comme zone Natura 2000, le projet d’une
étude paysagère de la Ria d’Etel, l’étude de la commune de
Locoal-Mendon par des élèves de l’Ecole d’Architecture
de Nantes…
Nos lecteurs qui regretteraient de n’avoir qu’une version “allégée” des actes du colloque peuvent nous
demander les actes complets pour le prix de 15 € ou les consulter sur le site Internet de l’UMIVEM.
- 30 -
Mauvaises nouvelles
Les projets de remaniement de la loi littoral ont suscité une vive inquiétude chez toutes les associations qui, sur
toutes les côtes de France, s’efforcent bénévolement, au prix de grandes difficultés, de conserver pour le bien de tous,
des portions du littoral vierges de toute urbanisation. Voici la lettre en date du 15 octobre que l’UMIVEM, forte de
47 associations, a adressé à Monsieur Goulard, secrétaire d’Etat aux transports et à la mer :
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- 31 -
Une réponse de Monsieur Goulard
apaiserait-elle nos craintes ?
Mauvaises nouvelles
Le SMVM du Golfe du Morbihan suit-il son cours ?
L’UMIVEM s’inquiète des décisions du dernier
CIADT (Conseil Interministériel pour l’Aménagement et
le Développement du Territoire) qui a prévu le passage du
SMVM (Schéma de Mise en Valeur de la Mer) des mains
de l’Etat à celles des élus au sein du SCOT (Schéma de
Cohérence Territoriale).
Il apparaît indispensable que l’intégrité du texte actuel
du SMVM soit sauvegardée sans remise en question. Ceux
qui ont longuement participé à sa réflexion ne comprendraient pas qu’il en soit autrement.
Rien en effet ne justifie le blocage d’une procédure
aussi avancée sous prétexte qu’une nouvelle législation est
envisagée. La législation actuelle reste valide. Les ministères concernés peuvent, s’ils le veulent, faire aboutir rapidement le document. La fragilité du Golfe côté terre et
côté mer n’attend pas. Que deviendra le Golfe du
Morbihan, s’il est livré à tous les appétits du bétonnage
dans les 20 communes de l’une des plus belles baies du
monde ?
Bonnes Nouvelles
Natura 2000 avance dans le Morbihan
Le réseau européen Natura 2000 se tisse peu à peu dans
le Morbihan : plusieurs sites sont déjà entrés en phase
opérationnelle (contrats Natura 2000…) pour la mise en
œuvre des actions prévues dans leur document d’objectifs
(DOCOB) déjà validés.
Décembre 2003 : validation du DOCOB du Scorff
(opérateur local, le Syndicat du Bassin versant du Scorff.)
Juillet 2004 : validation du DOCOB de l’île de Groix
(op. loc. : mairie de Groix)
Novembre 2004 : validation partielle du DOCOBdu
"Grand Site Dunaire" (op.loc. : SIVU Grand Site Dunaire
Gâvres-Quiberon)
Courant 2005: validation probable du DOCOB
"Pointe du talus, étang du Loc’h et Lann Ménec" des
communes de Guidel et Ploemeur (op.loc. : CAP Lorient)
La carte des sites Natura 2000 du Morbihan est
consultable sur le site :
www.natura2000.environnement.gouv.fr
Deux nouvelles ZPPAUP dans le Morbihan
Deux ZPPAUP ont été approuvées le 23 juin 2004 par
le Collège Régional du Patrimoine et des Sites (CRPS) :
- Celle de Guémené-sur-Scorff, réalisée à la demande
des élus dans un temps record par M. Fetter et
Mme Claudine Herbaut, historienne, sous la houlette de
M. Garreta, architecte des bâtiments de France.
- Celle de Port-Louis qui, à la demande de
Mme VERGNAUD, Maire, réalisé par M. PROST,
Architecte sous la houlette de M. GARRETA, Architecte
des Bâtiments de France, a enfin vu le jour.
Souhaitons que ces ZPPAUP facilitent le travail des élus
et permettent aux habitants une meilleure connaissance
et une meilleure protection de leur patrimoine bâti.
Fondation du Patrimoine
L’équipe régionale de la Fondation a changé. Elle est
dirigée par Jean-François Le Besque, secondé par François
Rollot, chargé de mission. Le siège est à Caudan, à la
Fédération du Bâtiment, 507, rue Jacques Ange Gabriel,
tél : 02. 97. 89. 02. 20. Les dossiers sont maintenant traités
avec rigueur.
Pour le Morbihan, la déléguée départementale est
Marie-Claire Borde, Bordlann, 56600 Lanester, secondée
par des délégués de pays : Marie-France Bonniec (Guern),
Yves Dubost, architecte (St Jacut-les-pins), François
Eeckmann (Pluvigner), Marie-Hélène Van den Broek
(Muzillac).
Ont été nos partenaires financiers pour ce colloque :
IOV COMMUNICATION - Tél. 02 97 40 87 87 - 06/2005 - R.C. 875 780 207 B
Le beau relais de chasse de Bieuzy-les-eaux qui avait
obtenu le 2ème prix du concours "Sauvez un trésor près de
chez vous" organisé par la Fondation du Patrimoine en
2001 est en cours de restauration.

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