résolution de la cour interaméricaine des droits de l`homme du 20
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résolution de la cour interaméricaine des droits de l`homme du 20
RÉSOLUTION DE LA COUR INTERAMÉRICAINE DES DROITS DE L’HOMME DU 20 NOVEMBRE 2015 AFFAIRE FLEURY ET AUTRES C. HAÏTI SUPERVISION D’EXÉCUTION D’ARRÊT VU: 1. L’Arrêt portant sur le fond et les réparations (ci-après “l’Arrêt”) rendu par la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme (ci-après, “la Cour”, “la Cour Interaméricaine” ou “le Tribunal”) le 23 novembre 2011 concernant l’affaire Fleury et autres 1. Dans cette affaire, la Cour a déclaré la responsabilité internationale de la République d’Haïti (ci-après, “l’État” ou “Haïti”), inter alia, pour les violations perpétrées en 2002 contre les droits à la liberté personnelle, à l’intégrité personnelle, aux garanties judiciaires et à la protection judiciaire, à la liberté d’association et à la liberté de déplacement et de résidence de Monsieur Lysias Fleury, défenseur des droits de l’Homme et conseiller juridique de l’organisation non gouvernementale Commission Épiscopale Nationale Justice et Paix, et contre les droits à l’intégrité personnelle et à la liberté de déplacement et résidence, au préjudice de sa famille. Le 24 juin 2002, deux policiers en uniformes et trois autres hommes se sont présentés à son domicile, lui ont déclaré qu’ils avaient reçu une plainte selon laquelle il aurait acquis un objet volé et l’ont ensuite placé en détention sans mandat judiciaire. Lors de sa détention, les policiers l’ont menacé, maltraité et intimidé en raison de son activité de militant dans le domaine des droits de l’Homme, situation qui s’est poursuivie jusqu’à son arrivée dans le lieu où il est demeuré détenu pendant 17 heures. Monsieur Fleury n’a pas été informé des motifs de sa détention et a été enfermé dans une cellule surpeuplée et dans des conditions inappropriées. Dans cette affaire, la Cour a déterminé que l’Arrêt précité constituait per se une forme de réparation, et a ordonné à l’Etat de prendre des mesures de réparations déterminées (infra Considérant 1). 2. Les trois notes du Secrétariat de la Cour 2, par lesquelles, suivant les instructions du Président du Tribunal, il a été rappelé à l’État que le délai prévu pour présenter le rapport portant sur l’exécution des réparations requis dans l’Arrêt avait expiré le 21 décembre 2012, et par lesquelles la présentation de ce rapport a été sollicitée. 1 Cfr. Affaire Fleury et autres c. Haïti. Fond et Réparations. Arrêt du 23 novembre 2011. Série C No. 236. Le texte complet de l’Arrêt est disponible sur http://corteidh.or.cr/docs/casos/articulos/seriec_236_esp.pdf. L’Arrêt fut notifié à l’État le 21 décembre 2011. 2 Les dites notes furent transmises le 11 mars et les 1er et 30 juillet 2015. 2 CONSIDÉRANT QUE: 1. Dans l’exercice de sa fonction juridictionnelle de supervision de l’exécution de ses décisions 3, la Cour a supervisé l’exécution de l’Arrêt depuis quatre ans (supra Vu 1). À cet égard, la Cour a ordonné comme mesures de réparation: le paiement d’indemnisations au titre des dommages matériels et immatériels et le remboursement d’une certaine somme au titre des frais et dépenses 4; la publication de l’Arrêt et de son résumé officiel 5, et “dans un délai raisonnable, instruire, diriger et conclure les enquêtes et les procès nécessaires, afin d’établir la vérité concernant les faits de l’affaire, et aussi afin de déterminer et, le cas échéant, de sanctionner tous les responsables des faits dont Monsieur Lysias Fleury fut la victime” 6. En outre, il a été ordonné, comme garantie de non-répétition la mise en œuvre d’un programme ou cours obligatoire et permanent sur les droits de l’homme destiné aux fonctionnaires de la Police Nationale et aux acteurs judiciaires d’Haïti 7. A cet égard, le délai imposé à l’État pour présenter le rapport, requis dans l’Arrêt, portant sur l’exécution a expiré le 21 décembre 2012. Malgré le long délai qui s’est écoulé, Haïti n’a fourni aucune information sur l’exécution de l’Arrêt jusqu’à la présente date. 2. Conformément aux dispositions de l’article 68.1 de la Convention Américaine, “[l]es États parties à la présente convention s’engagent à se conformer aux décisions rendues par la Cour dans tout litige où elles sont en cause”. Cette obligation inclut pour l’État le devoir d’informer la Cour concernant les mesures adoptées en vue de se conformer à chacun des points ordonnés, ce qui est fondamental pour évaluer l’état d’avancement de l’exécution de l’Arrêt dans son ensemble 8. A cet effet, il faut en outre tenir compte que, selon l’article 67 de la Convention Interaméricaine, “[l]'arrêt de la Cour est définitif et sans appel”, de sorte que, une fois que ce Tribunal rend un arrêt, celui-ci produit les effets de la chose jugée et doit être promptement et intégralement exécuté par l’État. 3. Ainsi, les États Parties à la Convention Interaméricaine ont l’obligation conventionnelle de mettre en œuvre aussi bien au niveau international qu’au niveau interne et de manière prompte et intégrale, ce qui a été fixé par le Tribunal dans les Arrêts qui les concernent, obligation qui, comme le souligne le droit international coutumier et comme l’a rappelé la Cour, lie tous les pouvoirs et organes de l’État 9 et qui, à défaut d’exécution, constitue un fait illicite international. A cet égard, il convient d’ajouter que, selon le droit international coutumier et la jurisprudence de la Cour, chaque fois que se produit un fait illicite atribuable à un État, la responsabilité internationale de celui-ci est engagée pour violation d’une norme internationale, donnant ainsi jour à une nouvelle relation juridique qui consiste en l’obligation de réparer 10. Ainsi que l’a indiqué la Cour 11, l’article 63.1 de la Convention 3 Faculté qui en outre résulte des dispositions des articles 33, 62.1, 62.3 et 65 de la Convention Américaine, l’article 30 de son Statut ainsi que de l’article 69 de son Règlement. 4 Quatrième point résolutif de l’Arrêt. 5 Paragraphe 125 et cinquième point résolutif de l’Arrêt. 6 Second point résolutif de l’Arrêt. 7 Premier point résolutif de l’Arrêt. 8 Cfr. Affaire Familia Barrios c. Venezuela. Supervision d’Exécution d’Arrêt. Résolution de la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme du 2 septembre 2015, Considérant 2. 9 Cfr. Affaire Castillo Petruzzi et autres c. Pérou. Supervision d’Exécution d’Arrêt. Résolution de la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme du 17 novembre 1999, Considérant trois, et Affaire Defensor de Derechos Humanos et autres c. Guatemala. Supervision d’Exécution d’Arrêt. Résolution de la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme du 2 septembre 2015, Considérant 5. 10 Cfr. Affaire Garrido et Baigorria. Réparations (art. 63.1 Convention Americaine relative aux droits de l’homme). Décision du 27 août 1998. Série C No. 39, par. 40, et Affaire Fontevecchia y D’amico c. Argentine. Supervision d’Exécution de Décision. Résolution de la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme du 1er septembre 2015, Considérant 5. 3 reproduit le contenu d’une norme coutumière qui constitue un des principes fondamentaux du droit de la responsabilité internationale des États 12. 4. Dans ce sens, bien que près de trois ans se soient écoulés depuis l’expiration du délai prévu dans l’Arrêt, et malgré les trois injonctions émises par le Président du Tribunal (supra Visa 2), l’État n’a présenté aucun rapport sur la mise en œuvre de l’Arrêt ni n’a remis aucun mémoire au Tribunal. Cela constitue un manquement de la part de la République d’Haïti à son obligation d’informer le Tribunal. L’inertie d’un État face à une juridiction internationale de droits de l’homme est contraire à l’objectif, à la fin et à l’esprit de la Convention Interaméricaine 13. A cet égard, à l’étape de supervision d’exécution d’Arrêt dans d’autres affaires 14, la Cour a établi que le manquement d’un État à son devoir d’informer la Cour constitue une inexécution des obligations conventionnelles prévues par les articles 67 et 68.1. Le défaut d’exécution des réparations au niveau interne implique le déni du droit à l’accès à la justice internationale 15. 5. Etant donné ce manquement de l’État, la Cour ne possède pas les éléments lui permettant de déterminer si Haïti a pris les mesures visant à donner effet aux réparations ordonnées dans l’Arrêt, bien que ce soient écoulés quatre ans depuis l’émission de ce dernier. A cet égard, le Tribunal considère que ce manquement fait obstacle à la réparation des violations des droits de l’homme reconnues dans le jugement. PAR CONSÉQUENT LA COUR INTERAMÉRICAINE DES DROITS DE L’HOMME, Dans l’exercice de ses attributions de supervision de l’exécution de ses décisions, conformément aux dispositions des articles 33, 62.1, 62.3, 65, 67 et 68.1 de la Convention Américaine relative aux droits de l’homme, 25.1 et 30 du Statut et 31 et 69 de son Règlement, DÉCLARE QUE: 1. L'État a manqué pendant près de trois ans à son devoir d’informer cette Cour concernant les mesures adoptées en vue de donner effet aux réparations ordonnées dans l’Arrêt rendu le 23 novembre 2011 dans la présente affaire, conformément à ce qui est indiqué dans les Considérants de la présente Résolution. 11 Cfr. Affaire Castillo Páez c. Pérou. Réparations et Frais et Dépens. Arrêt du 27 novembre 1998. Série C No. 43, par. 50, et Affaire Fontevecchia y D’amico c. Argentine. Supervision d’Exécution d’Arrêt. Résolution de la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme du 1 septembre 2015, Considérant 5. 12 Cfr. Reparation for Injuries Suffered in the Service of the United Nations, Advisory Opinion: I.C.J. Reports 1949, p. 184; Affaire relative à l’Usine de Chorzów (Demande en Indemnité) (Fond), Arrêt Nº 13, 13 septembre 1928, C.P.J.I. Série A-Nº 17, p. 29; et Affaire relative à l’Usine de Chorzów (Demande en Indemnité) (Compétence), Arrêt Nº 8, 26 juillet 1927, C.P.J.I. Série A-Nº 9, p. 21. 13 Cfr. Affaire Caesar c. Trinité-et-Tobago. Fond, Réparations et Frais et Dépens. Arrêt du 11 mars 2005. Série C No. 123, par. 38, et Affaire Fontevecchia y D’amico c. Argentine. Supervision d’Exécution d’Arrêt. Résolution de la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme du 1er septembre 2015, Considérant 8. 14 Cfr. Affaire Caesar c. Trinité-et-Tobago. Supervision d’Exécution d’Arrêt. Résolution de la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme du 21 novembre 2007, Considérant onze; et Affaire Fontevecchia y D’amico c. Argentine. Supervision d’Exécution d’Arrêt. Résolution de la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme du 1er septembre 2015, Considérant 9. 15 Cfr. Affaire Baena Ricardo et autres c. Panama. Compétence. Arrêt du 28 novembre 2003. Série C No. 104, par. 83 et Affaire Fontevecchia y D´Amico c. Argentine. Résolution de la Cour Interaméricaine de Droits de l’Homme du 1er de septembre de 2015. Considérant 7. 4 2. La Cour ne dispose pas des informations nécessaires pour déterminer si l'État a mis en œuvre les réparations ordonnées dans l’Arrêt: a) instruire, diriger et conclure les enquêtes et les procédures nécessaires, dans un délai raisonnable, afin d’établir la vérité concernant les faits de l’affaire, et aussi afin de déterminer et, le cas échéant, de sanctionner tous les responsables des faits dont Lysia Fleury a été victime (Point résolutif deux); b) mettre en œuvre, dans un délai raisonnable, un programme ou cours obligatoire et permanent sur les droits de l’homme destiné aux fonctionnaires de la Police nationale d’Haïti, tous niveaux hiérarchiques confondus, et à tous les acteurs judiciaires d’Haïti (Point résolutif trois); c) effectuer les paiements des sommes indiquées dans l’Arrêt au titre de dommages matériel, immatériel et de remboursement des frais et dépens (Point résolutif quatre), et d) effectuer les publications de l’Arrêt tel qu’il est disposé dans de dernier (Point résolutif cinq). ET DÉCIDE: 3. De maintenir ouverte la procédure de supervision d’exécution d’arrêt concernant toutes les mesures de réparations ordonnées dans l’Arrêt. 4. D’ordonner qu’Haïti adopte, définitivement et dans les meilleurs délais, les mesures nécessaires pour assurer une exécution prompte et effective des réparations ordonnées dans l’Arrêt, conformément à ce qui a été envisagé dans la présente Résolution et aux dispositions de l’article 68.1 de la Convention Américaine relative aux droits de l’homme. 5. D’ordonner que l’État présente à la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme, au plus tard le 30 avril 2016, un rapport dans lequel il indique les mesures prises en vue de s’acquitter des réparations ordonnées par cette Cour, conformément aux considérants de cette Résolution. 6. D’ordonner que les représentants des victimes et de la Commission Interaméricaine des droits de l’homme présentent des observations sur le rapport de l’État mentionné dans les Considérants précédents, dans les délais de quatre et six semaines, respectivement, à partir de la réception du rapport. 7. D’ordonner que le Secrétariat de la Cour notifie la présente Résolution à l’État, aux représentants des victimes et à la Commission Interaméricaine des droits de l’homme. 5 Ordonnance de la Cour interaméricaine des Droits de l’Homme. Affaire Fleury et autres Vs. Haití. Surveillance de l’exécution de l’arrêt. . Humberto Antonio Sierra Porto Président Roberto F. Caldas Manuel E. Ventura Robles Diego García-Sayán Alberto Pérez Pérez Eduardo Vio Grossi Eduardo Ferrer Mac-Gregor Poisot Pablo Saavedra Alessandri Greffier Ainsi ordonnée, Humberto Antonio Sierra Porto Président Pablo Saavedra Alessandri Greffier