TATARAK (SWEET RUSH) Andrzej Wajda, Pologne, Suisse (2009
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TATARAK (SWEET RUSH) Andrzej Wajda, Pologne, Suisse (2009
TATARAK (SWEET RUSH) Andrzej Wajda, Pologne, Suisse (2009) À partir de 10 ans Conseillé pour les 13 ans et plus Andrzej Wajda est l’un des réalisateurs polonais les plus marquants de l’après-guerre et de l’École Polonaise de Cinéma. Son père est tué pendant la deuxième guerre mondiale lors du massacre de Katyn et Andrzej s’engage dans l’armée polonaise pour lutter contre les nazis dans son adolescence. A l’issue de la guerre, il étudie la peinture avant d’intégrer l’École nationale de cinéma de Lodz. Il est proche du mouvement Solidarnosc et de son leader Lech Walesa, à qui il consacre un film et un documentaire. PRIX : Prix Alfred Bauer au Festival international du film de Berlin en 2009 Prix FIPRESCI aux European Film Awards en 2009 FILMOGRAPHIE (sélection) : 1950 : Le Mauvais Garçon (CM) 1952 : Quand tu dors (CM) 1955 : Une fille a parlé (ou Génération) 1957 : Ils aimaient la vie 1958 : Cendres et Diamant 1959 : Lotna 1960 : Les Innocents charmeurs Copyright © Festival de Cinéma Européen des Arcs – Révélations Culturelles. Toute reproduction interdite sans l’autorisation de l’auteur. 1961 : Lady Macbeth sibérienne 1961 : Samson 1962 : L'Amour à 20 ans (segment Varsovie) 1965 : Cendres 1968 : La Croisade maudite 1969 : Tout est à vendre 1969 : Polowanie na muchy 1970 : Paysage après la bataille 1970 : Le Bois de bouleaux 1973 : Les Noces 1974 : La Terre de la grande promesse 1976 : Smuga cienia 1977 : L'Homme de marbre 1978 : Sans anesthésie 1979 : Les Demoiselles de Wilko 1980 : Le Chef d'orchestre 1981 : L'Homme de fer 1983 : Danton 1983 : Un Amour en Allemagne 1986 : Chronique des événements amoureux 1988 : Les Possédés 1990 : Korczak 1993 : L'Anneau de crin 1994 : Nastasja 1995 : La Semaine sainte 1996 : Panna Nikt 1999 : Pan Tadeusz - Quand Napoléon traversait le Niémen 2002 : Zemsta 2007 : Katyń 2009 : Tatarak (Sweet Rush) 2013 : L'Homme du peuple TAGS : vieillesse, mort, maladie, amour, perte, nature, relation, hommage BANDE ANNONCE: https://www.youtube.com/watch?v=3fo6qABwakw SYNOPSIS : Dans une chambre d'hôtel, Krysyna Janda, actrice, parle des derniers moments de la vie de son mari, le chef-opérateur Edward Klosinski. Elle s'apprête à tourner le nouveau film d'Andrzej Wajda : Tatarak. Elle y joue le rôle de Marta, une femme d'âge mûr qui reprend goût à la vie aux côtés de Bogus, un jeune homme qui lui rappelle ses fils disparus. Ces deux histoires, celle de Krystyna et celle de Marta, se fondent autour d'une même douleur : la perte de l'être aimé. EXTRAIT INTERVIEW AVEC LE RÉALISATEUR : Copyright © Festival de Cinéma Européen des Arcs – Révélations Culturelles. Toute reproduction interdite sans l’autorisation de l’auteur. Le film tout entier est marqué par la mort : celle de la protagoniste mais aussi celle de son mari, celle de ses deux fils dans l’insurrection de Varsovie et celle du jeune homme et pourtant le film est lumineux. Peut-être parce que je n’arrive pas à être d’accord profondément avec cette idée que je suis sur le départ ! Je pense toujours que je vais faire un bon film. Qu’est-ce qui vous a conduit à choisir le format du cinémascope ? C’est Pawel Edelman qui me l’a conseillé. J’ai vu ce film pour la première fois au Festival de Berlin et sur cet écran immense avec le scope cela me fit une forte impression. J’avais choisi de mettre Tatarak (2009) en compétition au Festival de Berlin pour attirer l’attention et lui donner une chance d’obtenir un prix, ce qui arriva. Vous savez, il est facile de faire un film mais c’est ensuite un effort désespéré pour qu’il passe dans les salles avec l’invasion des films américains. Nous avions autrefois en Pologne, trois mille cinémas et nous n’en avons plus que quelques centaines. Il y a très peu de distributeurs et je savais qu’ils commenceraient à me dire au printemps qu’ils sortiraient peutêtre le film en automne. Je savais que si le film était remarqué à l’étranger – ce qui fut le cas à Berlin – cela l’aiderait à vivre en Pologne et effectivement la première a eu lieu le 22 Avril 2009 soit deux mois après le Festival. Mais nous sommes loin de votre question sur le scope ! Comme je vous l’ai dit, j’ai fais confiance à mon chef-opérateur. Jusque là, je croyais qu’un film intimiste devait avoir un format petit. Eh bien, non, c’est comme s’il devenait plus grand. Ce fut pour moi, une expérience nouvelle : là, tout d’un coup, se créait une nouvelle relation au film qui n’existait pas avant sur un monitor ou un petit écran. Dans la structure du film on ne trouve pas seulement les quatre monologues de Krystyna Janda, le récit d’Iwaszkiewicz, accompagné de certains éléments empruntés à Màrai, mais aussi le film à l’intérieur du film, son tournage comme dans Tout est à vendre. Dès le départ, je savais que j’avais fait un film en deux parties, que l’on verrait Krystyna dans sa chambre d’hôtel, je ne pouvais pas cacher qu’un film était en train d’être tourné. Tous ces gens qui m’entouraient, je les connaissais très bien, on travaille ensemble au théâtre et ce ne fut pas un problème de filmer les coulisses du tournage. J’ai pourtant inventé une scène où l’actrice profondément en désaccord avec le film, quitte le plateau. Je me suis demandé pourtant si c’était vraisemblable. Krystyna m’a fait remarquer que c’était arrivé à trois reprises ! Un jour, alors que l’on pensait changer la fin, elle, qui avait interprété son rôle en fonction de cette fin, m’a dit « Pieds nus, je pars comme je t’aime et je rentre à l’hôtel ». Cela m’a fait réfléchir. Je trouve cela superbe quand le comédien a sa propre vision et se sent responsable du film. (Source – Cinemotions : http://www.cinemotions.com/interview/94141#cwooCxLApTCmTdQH.99) Copyright © Festival de Cinéma Européen des Arcs – Révélations Culturelles. Toute reproduction interdite sans l’autorisation de l’auteur. THÉMATIQUES ET INTERPRÉTATIONS: La structure binaire du film La structure binaire du film se perçoit dans l’alternance entre un récit fictif et un monologue relativement théâtral. Les parties introspectives sont volontairement maintenues hors du récit. Elles se distinguent par une mise en scène qui oppose les deux univers présentés. Le monde de Krystyna est intérieur, sombre et minimaliste. Celui de Marta est extérieur, lumineux, et ouvert. Paradoxalement, les faits relatés par Krystyna convergent vers un certain réalisme alors que le décor où elle se situe s’en éloigne. Il s’apparente à une scène artificielle où l’actrice s’adresse aux fenêtres de la chambre comme s’il s’agissait d’un public latent. Les scènes sont longues, sans montage, comme des plans séquences. L’absence de coupure de la scène témoigne de la qualité de jeu de l’actrice. L’utilisation de plans larges, donc l’absence de gros plans, ainsi qu’une exploitation très réduite d’accessoires et d’espace ne laisse à l’actrice que son corps et sa voix pour s’exprimer. Le vide de la chambre reflète son état intérieur. Le film laisse entrevoir deux réalités parallèles en utilisant la même actrice sous un différent rôle. Ce choix permet de souligner le parallélisme thématique. Les personnages féminins traversent des expériences douloureuses : une incapacité de se remettre de la mort de l’être aimé. À travers la reconstruction des derniers mois de la vie de son mari, Krystyna présage celle de Marta. Elle reconstruit avec la parole quelque chose qui n’est plus là, alors que Marta vit une relation qui va partir. Krystyna et Marta ne font plus qu’une et cette construction binaire, ou encore construction sur la base de miroir, est imagée par les reflets de la rivière lors du prologue du film. Copyright © Festival de Cinéma Européen des Arcs – Révélations Culturelles. Toute reproduction interdite sans l’autorisation de l’auteur. Le traitement du passage du temps et de la mort Le thème de la mort et de son approche est prédominant dans le film. Marta, le personnage principal, ignore qu’elle est en train de mourir d’un cancer du poumon. Parallèlement, elle est en deuil suite à la mort de ses fils lors de l’insurrection à Varsovie. Les portraits encadrés couleur sépia auxquels la mère prête hommage rappellent le passé douloureux. Elle a même honte d’être en vie face aux fins tragiques de ses enfants. Vite, elle s’éprend d’un jeune garçon, Bogus, qui va lui-même mourir. Les acores joncs (« Tatarak ») symbolisent la jeunesse, la fraîcheur et le naturel que lui apporte cette relation et contrastent avec le deuil qui pèse sur les autres personnages. Bogus est caractérisé par sa force physique et sa naïveté de jeunesse. À travers les quatre scènes de la chambre d’hôtel, la lumière s’atténue progressivement. On peut imaginer la maladie qui s’installe et ronge les personnages, comme une métaphore visuelle de l’approche de la mort. Cette luminosité accompagne le récit de Krystyna Janda qui relate les derniers jours de la mort de son mari. Elle découvre et essaye d’accepter le mal qui la ronge. Ses paroles ne sont jamais mises en image, comme s’il s’agissait d’une mort visuelle. L’autoréflexivité sur la mort de son mari est aussi une manière de révéler la nature artificielle de la représentation cinématographique. Chaque personnage gère et digère la mort de manière personnelle. Par exemple, lorsque le mari de Maria apprend que sa femme est en phase terminale, il décide de ne pas le partager. Refouler et taire le diagnostic est un processus qui s’oppose aux monologues thérapeutiques de Krystyna. Copyright © Festival de Cinéma Européen des Arcs – Révélations Culturelles. Toute reproduction interdite sans l’autorisation de l’auteur. Un film de fiction ancré dans des faits réels La structure binaire insiste sur la confusion entre le monde diégétique et non-diégétique du film. Bien que fictif, les faits qu’il représente se confondent avec une actualité tangible. En effet, le mari de l’actrice, Edward Klosinki (un cinéaste qui avait souvent collaboré avec Wajda), atteint d’un cancer du poumon, était en pleine chimiothérapie lors de la conception du film. Wajda inclut dans son film l’histoire de l’actrice autour de la maladie et de la mort de son mari. C’est pour cela qu’il donne à son personnage le prénom de l’actrice. Le monologue de Krystyna Janda peut être reçu comme un accès à son histoire personnelle. Son rôle d’actrice se mélange avec sa réalité. D’ailleurs, le monologue a été écrit par l’actrice. Elle parle des éléments du film au seinmême de l’histoire. « Il ne voulait pas de ce film, il voulait tout le temps que je reste avec lui», « Je me souviens encore d’avoir dit à Andrzej que je ne pouvais pas » ou encore « Un spasme a traversé le visage d’Andrzej quand je lui ai dit que Edward suivait une chimio ». Le réalisateur est nommé dans les répliques. Le film fonctionne comme une autoréflexion sur lui-même et sur le contexte qui entourait sa réalisation. Cette ambiguïté prend forme dans la scène de la noyade. L’équipe de tournage est présente lors des faits tragiques qui construisent la trame de la fiction. PISTES DE RÉFLEXION POUR LES ÉLÈVES: -‐ -‐ -‐ -‐ -‐ Cherchez la traduction du mot « Tatarak ». Comment comprenez-vous le choix de ce titre pour le film ? Comment le film est-il structuré ? En quoi la scène du prologue du film est à l’image de cette structure ? Quelle est la particularité des scènes dans la chambre d’hôtel ? Vous prêterez particulièrement attention à la durée et au montage. Pourquoi le réalisateur donne-t-il le nom de l’actrice à son personnage ? Faites des recherches sur le contexte autour de la réalisation du film. Comment le film mêle-t-il fiction et réalité ? POUR ALLER PLUS LOIN: Remise d’Oscar à Andrej Wajda: https://www.youtube.com/watch?v=rImCpUzwGx0 LEXIQUE: Diégétique : qui relève de la diégèse, c’est-à-dire qui fait partie de l’action ou qui est lié aux événements dans une œuvre de fiction. Copyright © Festival de Cinéma Européen des Arcs – Révélations Culturelles. Toute reproduction interdite sans l’autorisation de l’auteur.