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Contribution de Robin Poulton
Nous saluons la mémoire de Muhammed Ali – sportif incomparable, héros de la jeunesse
mondiale, grand agitateur pour la paix et pour la justice aux USA .
La mort de Muhammed Ali dépasse très largement la disparition d’un ancien champion
mondial de la boxe – sans doute le plus grand des champions. Muhammed Ali avait des
dimensions politique et morale, qui dépassaient en importance ses remarquables réussites
sportives. Il n’y a pas beaucoup d’athlètes qui peuvent revenir pour conquérir un titre
mondial, après trois années en prison … une prison qu’il avait choisie comme objecteur de
conscience.
Ali avait choisi la prison, par refus de participer à la guerre au Vietnam. “Les Vietnamiens ne
m’ont rien fait,” dit-il. “Aucun Viet ne m’a jamais traité de ‘nègre’; aucun Viet ne m’a lynché,
ni envoyé des chiens pour me traquer. Aucun Vietnamien n’a violé ma souer ou ma maman.
Alors pour quelle raison j’irais les tuer?”
Devant une meute de jeunes Blancs aggressifs sur un riche campus américain, le jeune boxeur
les avait accusé d’hypocrisie. “Vous les Blancs, vous partez en Suisse pour éviter de partir au
Vietnam. Moi, je n’ai pas besoin d’aller au Vietnam pour mourir: j’aime autant mourir ici, en
train de vous combattre, VOUS!”
L’adoption par Cassius Clay – champion mondial de la boxe – de la religion musulmane était
un geste politique autant que religieux. Il abandonna d’un coup le nom de Blanc qui avait été
imposé à ses pères esclaves, et la religion de la traite négrière: ce Catholicisme qui acceptait
que les Noirs soient réduits à l’état de sous-hommes, à condition qu’ils soient baptisés pour
devenir esclaves chrétiens.
Ce baptême signifiait pour le captif non seulement une nouvelle affiliation religieuse (le
moindre des problèmes) mais surtout la perte de son nom africain, de son identité africaine,
ainsi que l’eloignement de sa famille et de ses terres, de sa langue maternelle …. de la dignité
de ce qui nous rend HOMME ou FEMME.
Muhammed Ali avait donc rejeté son état de descendant d’esclaves. Il avait rejeté aussi toute
participation dans une guerre impéraliste immorale et immonde, menée par des Blancs
américains dominateurs d’un système politique répressif. Le défi lancé par Ali, un défi jeté
aux visages des Blancs, l’a rendu dangereux aux élites blanches aux USA. Ils ont riposté par
la prison. Ali est ressorti grandi pour devenir héro international.
On trouve à Hollywood un couloir des stars. Au mur vous verrez une seule étoile, les autres
étant par terre. Muhammed Ali avait refusé que les gens marchent sur son nom: si Hollywood
voulait son étoile, il insistait qu’elle soit placée au mur.
La BBC britannique avait demandé à ses auditeurs de choisir le plus grand sportif du 20e
Siècle. Dans la liste finale figuraient : Muhammed Ali (boxeur); Pele (Brésil) et George Best
(Irelande) du foot; l’Australien Sir Donald Bradman, meilleur au cricket (ce jeu intellectuel
des ‘gentlemen’ que les Français ont du mal à comprendre); le champion américain du golf
Jack Nicklaus; et l’athlète noir américain d’exception Jesse Owens, qui avait gagné quatre
médailles d’or aux “Jeux Olympiques des Nazis” à Berlin en 1936.
Muhammed Ali avait récolté plus de 50% des suffrages. A lui seul, Ali avait totalisé plus que
les votes accordés à tous les autres athlètes sur la liste. Controversé aux Etats-Unis, le
champion mondial de la boxe était adulé en Europe, en Afrique et ailleurs. Ses positions
morales ne froissaient pas les susceptibilités des autres pays – on admirait la force de ses
convictions.
Malgré nos récents problèmes avec l’immigration, on peut conclure que l’Europe souffre
moins de racisme que les Etats-Unis.
Quand on regarde le 20e siècle, je ne vois que Nelson Mandela pour rivaliser avec
Mohammed Ali comme Homme de Paix du Siècle – du moins sur le plan de la popularité et
de l’admiration mondiales.
Nous saluons la vie extraordaire de feu Muhammed Ali, d’un homme exceptionnel.
REP

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