Dossier pédagogique complémentaire Collège au cinéma .53

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Dossier pédagogique complémentaire Collège au cinéma .53
Dossier pédagogique
complémentaire
Collège au cinéma .53
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SOMMAIRE
25................................................................................................................................................................ 1
1. ENTRETIEN AVEC LE RÉALISATEUR............................................................................................3
2. CRITIQUES............................................................................................................................................. 5
3. LES LIEUX ET TEMPS DU FILM .................................................................................................... 12
1.LES DIFFÉRENTS LIEUX ............................................................................................................................... 12
2.LE THÉÂTRE DANS LE FILM: ........................................................................................................................ 12
3.LES FENÊTRES VUES DE LA RUE.................................................................................................................... 14
4. LES PERSONNAGES DU FILM........................................................................................................15
1.LES ADULTES.............................................................................................................................................15
2.LES JEUNES............................................................................................................................................... 16
1.La prééminence du groupe................................................................................................................ 16
2.Le langage:........................................................................................................................................17
3.Le statut de l'individu........................................................................................................................ 17
5. LE POINT DE VUE ET LA MISE EN SCÈNE..................................................................................18
1.LE COSTUME, LE PERSONNAGE......................................................................................................................18
2.ETUDE DE LA PREMIÈRE SÉQUENCE: MISE EN CADRE ET MISE EN SCÈNE.............................................................. 19
6. COMPLÉMENTS: « LE JEU DE L'AMOUR ET DU HASARD » . ..............................................20
1.RÉSUMÉ DE LA PIÈCE ................................................................................................................................. 20
2.TEXTE DE LA SCÈNE JOUÉE PAR LYDIA – FRIDA- RACHID (KRIMO)...................................................................20
7. PISTES PÉDAGOGIQUES COMPLÉMENTAIRES....................................................................... 23
1.IMAGES DE LA CITÉ:................................................................................................................................... 23
2.THÉÂTRE ET THÉÂTRALITÉ. ......................................................................................................................... 23
3.LE CHOIX DU TITRE, LE CHOIX DE LA PIÈCE ................................................................................................... 23
4.ETUDE DE L'AFFICHE...................................................................................................................................24
8. SITES À CONSULTER.........................................................................................................................25
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1. ENTRETIEN AVEC LE RÉALISATEUR
Comment avez-vous choisi la cité qui constitue le décor unique du film ?
Abdellatif Kechiche : Je voulais que le film soit tourné dans le 9-3, et dans le 9-3 j'ai accroché avec cette
cité. J'ai aimé son côté scène de théâtre. Il fallait un décor qui permette de compenser l'absence de moyens
rendant impossible l'utilisation de figurants. La cité de Franc-Moisin permettait d'isoler les personnages
sur un fond architectural très stylisé, très expressif, presque symbolique.
Que vouliez-vous montrer de la vie dans une cité ?
D'abord, je voulais ne pas montrer ce que l'on a trop vu sur les cités. Je ne voulais pas reconduire cette
diabolisation des gens qui y vivent, perçus pour la plupart comme des vandales. Je voulais montrer ce qui,
moi, m'attendrit : la jeunesse, belle, pleine d'humour. Bien sûr, ces adolescents sont mal adaptés à l'espace
dans lequel ils vivent. On ne pourrait pas ne pas l'être quand on vit écrasé par un certain type
d'architecture. Mais je voulais surtout montrer la normalité des histoires qu'on vit dans ce monde-là.
Comment se manifeste cette normalité ?
Montrer des jeunes gens qui vivent, s'aiment, font du théâtre dans ce contexte, c'est à la fois une forme de
normalité, mais ça passe pour quelque chose d'incroyable. Parce que pour la plupart des spectateurs, la
cité, c'est d'abord la violence et la délinquance. Il suffisait alors de montrer la vie. Je tenais aussi à
montrer qu'il existe un vrai potentiel artistique dans cette population issue de l'immigration. En général,
ils se heurtent à un refus de prise en compte, ils ne sont pas intégrés au paysage. Cette injustice, c'est peutêtre ce qui me motive le plus pour faire des films. Même si il n'y a pas dans le film de marques politiques
trop visibles, si je veille à ce que les intentions ne prennent pas l'ascendant sur les personnages ou
l'histoire, ce qui compte, c'est cette place qu'il est nécessaire d'obtenir. Parce que c'est une chance pour le
paysage de pouvoir compter sur ces talents-là, parce que cette jeunesse et cette population ne sont pas
qu'une source de problèmes. Et aussi parce que la représentation a une très grande importance, même
dans la perception de l'autre, et dans la vision du monde de celui qui vote, de celui qui décide.
Il existe une autre discipline artistique en France, qui a fait beaucoup pour la visibilité des populations
issues de l'immigration, c'est le hip-hop. Pourquoi cette culture est-elle absente de votre film ?
Le hip-hop, le rap, le slam sont des formes d'expression très fortes. Mais je ne les ai pas utilisées de peur
que ça prenne trop de place. Le film est déjà très bavard, le rap l'est aussi, ça aurait été compliqué de les
articuler. Par ailleurs, je crois que, si on n'existe pas à l'image, on n'existe pas du tout. On peut faire toute
la musique qu'on veut, ça ne devient significatif que si on apparaît dans les images, et pas seulement dans
les clips, qu'une société produit d'elle-même.
La langue des personnages paraît aussi stylisée que celle de Marivaux.
Les dialogues étaient effectivement très écrits, à part une ou deux scènes un peu libres. La stylisation a
consisté à doser, à ne pas aller trop loin dans le langage de la banlieue, à limiter le verlan, sinon le film
devenait incompréhensible. Mais même si, pour les comédiens, cette langue-là était plus familière que
celle de Marivaux, elle restait un texte, qu'ils devaient apprendre et répéter, donc tout aussi dur à jouer
pour eux que Marivaux.
Le personnage de Lydia était-il dès le scénario celui d'une fille française blanche et blonde, ou l'est-il
devenu parce que vous avez été séduit par cette jeune comédienne ?
Je ne sais pas. Sara s'est imposée. Il fallait qu'elle fasse partie du film. Je me suis dit que ce n'était pas
important que ce personnage soit blanc ou pas. Mais peut-être qu' inconsciemment je voulais une blonde.
Peut-être qu'il y avait aussi dans ce choix une volonté d'ouverture, de ne pas faire de discrimination à
l'envers, comparable à celle que subissent généralement les comédiens arabes. Le personnage s'appelle
Lydia, et ce prénom n'est pas attaché à une culture particulière.
En tout cas, sa blondeur produit du sens. Son contraste physique avec Krimo donne au récit un côté
West Side Story.
Ce n'est pas du tout présent dans le scénario en tout cas. Aucun personnage ne mentionne cette différence
de couleur de peau, ce n'est pas un problème. On n'est pas dans Roméo et Juliette, ce n'est pas une
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tragédie. Mais la rencontre avec Sara a été décisive pour le film. Peut-être que sa blondeur y est pour
quelque chose. Mais je serais incapable de vous en dire plus.
La pratique du théâtre, dans le film, n'est pas spécialement un agent d'intégration. Il ne permet pas de
s'en sortir, on n'est pas dans une utopie de réussite sociale par le spectacle, ou même dans l'idée que
l'art rend la vie meilleure.
Il y a quelque chose qui me dérange dans l'idée de réussite. Tout ce que ça véhicule d'exceptionnel,
d'héroïsme individuel, ne m'est pas sympathique. Je ne supporte pas la tyrannie de la réussite dans le
spectacle en général. Mais j'ai quand même le sentiment que le personnage de Krimo ne connaît pas
d'échec. Malgré sa difficulté à sortir de sa bulle, il arrive à se déguiser, à se masquer, pour exprimer ses
sentiments. Il s'intéresse au monde de l'autre, à ce qui ne l'intéresse pas au départ, c'est un éveil. Le théâtre
ne vaut pas comme moyen de réussite, révélation d'un don particulier, mais initie à la possibilité du jeu.
Pourquoi avoir montré un cours de français aussi calme, des élèves aussi sages ?
Je connais des profs en banlieue qui arrivent à faire leur travail normalement. Et de toute façon, ces
scènes en classe n'ont pas pour vocation de refléter une réalité sociale. Il s'agissait surtout de montrer le
professeur comme une métaphore du metteur en scène.
Pour vous, un prof et un cinéaste, c'est un peu la même chose ? Le cinéma a une vocation
pédagogique ?
Peut-être. J'ai sûrement envie d'éduquer le regard du spectateur. Et en particulier son regard sur cette
jeunesse. En tout cas sinon de l'éduquer qui est un grand mot , du moins de le modifier.
Par quel spectateur aimeriez-vous que votre film soit vu ?
D'abord, je crois, par un spectateur qui ne connaîtrait pas directement les personnages de mon film et n'en
percevrait que des images qui me paraissent tronquées, renvoyées par les médias ou même certaines
fictions. Mais je suis également soucieux de voir comment vont réagir ceux qui sont proches des
personnages. Forcément, ils ne vont pas voir le même film que moi. Le film a été montré dans plusieurs
lycées, dans le 9-3 et à Créteil. Certains profs ont vraiment adhéré, ont pleuré même pour certains. Ils se
sentaient proches de la prof du film. D'autres au contraire ont rejeté quelque chose du film. Ils pensaient,
je crois, qu'il y avait un message pédagogique qui s'adressait à eux, et ne voulaient pas l'entendre. Les
élèves, eux, voulaient surtout savoir si Krimo et Lydia allaient vraiment sortir ensemble. Et puis il y a eu
beaucoup de commentaires sur la scène d'arrestation. "Ah putain, comme c'est vrai, c'est trop vrai
comment ça se passe." Ils se sont sentis très proche du langage des personnages.
Avez-vous pensé à d'autres films réalisés sur des lycéens, comme par exemple Passe ton bac d'abord ?
C'est un des rares Pialat que je n'ai pas vus. Récemment, un journaliste m'a parlé de L'Argent de poche, et
c'est un des rares Truffaut que je n'ai pas vus. Je ne sais pas quelles sont mes influences. Mais en revoyant
le film, ce qui m'a frappé, c'est de découvrir à quel point Krimo me faisait penser à un des personnages
qui me touchent le plus, celui de M. Hulot. Je me suis demandé dans quelle mesure je n'ai pas cherché à
reproduire inconsciemment ce qui, chez lui, m'émeut tant. J'aime tellement son côté décalé, qui n'arrive
pas à trouver sa place dans l'espace et la société, qui n'a pas les codes. Krimo a parfois les mêmes
attitudes, la même façon de s'exprimer par marmonnements.
En filmant un contrôle policier, vous vous confrontez à quelque chose qui a déjà été beaucoup
représenté dans le cinéma français. Comment avez-vous abordé ce passage obligé du film de
banlieue ?
D'abord je ne suis pas sûr que les contrôles de police soient filmés de façon courante dans le cinéma
français. Et, en tout cas, je ne crois pas qu'on ait beaucoup vu ce que je montre, trois filles plaquées par
des flics... Je ne me suis pas posé la question de filmer ça différemment. Je ne crois pas par ailleurs que le
film nie la réalité : le père de Krimo est en prison... Et il y a des contrôles et des arrestations dans les cités,
plusieurs par jour. A la cité de Franc-Moisin, on descend acheter son pain et on tombe sur une arrestation.
Il fallait donc en parler.
La scène, filmée au plus près des adolescents, n'est-elle pas construite pour que le policier déclenche
l'hostilité du spectateur ?
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Je n'ai pas posé un regard accusateur sur l'homme policier mais sur une fonction, la réalité d'un système
dont on ne peut pas faire abstraction lorsqu'on situe une fiction dans une cité. Il y a une grande injustice
dans ces contrôles dans des entrées d'immeubles. Ce sont les seuls lieux où les adolescents peuvent se
réunir, vivre leurs histoires d'amour, et ils sont soumis sans arrêt à une grande tension et humiliation. Pour
que ce soit manichéen, il aurait fallu que je montre des adolescents qui n'ont rien fait soumis à la brutalité
de la police. Là, leur voiture est possiblement volée... Je n'ai pas l'impression du tout que cette scène soit
manichéenne. C'est un témoignage sur quelque chose de très quotidien.
Vous avez montré votre film à des enseignants ; êtes-vous curieux de savoir ce qu'en penseraient des
policiers ?
Un policier qui verrait le film vous dirait que ça se passe exactement comme ça. Ils ont des consignes, ils
doivent agir de la sorte. Ce que je montre a un nom, c'est une palpation, et ça se produit tout le temps.
Donc je ne crois pas qu'un policier voyant la scène se dira "je suis le méchant". Il reconnaîtra simplement
quelque chose de banal et quotidien. Mais je serais curieux que des policiers voient le film et qu'on en
parle après. J'aimerais savoir s'ils se rendent compte qu'ils ont affaire à des personnes qui ont une histoire,
des sentiments, comme les personnages de mon film, et sur lesquelles tout à coup on tombe dessus.
Dans le film, les filles s'appellent "mon frère" entre elles...
C'est une traduction de l'arabe. Dans ma génération, on disait "cousin", "cousine". Maintenant ils disent
tous "mon frère". Mais "mon frère" vaut pour le masculin comme le féminin, on ne peut pas le traduire
par "ma soeur". Vous y voyez un signe de domination masculine ? Je ne sais pas... Peut-être. Moi ça
m'amuse, mais ça dit peut-être la nécessité d'endurcissement des filles dans la cité. En disant "mon frère"
entre elles, elles ne sont plus une fille mais l'égal des mecs, elles ne sont pas des victimes...
La question du voile est absente du film. Mais avec ce type de notations, quelque chose d'assez fort se
dit sur l'identité sexuelle, la dureté de la vie en cité pour une fille...
C'est pas facile d'être une fille dans une cité. C'est pas facile d'être un garçon. C'est pas facile d'être un
enfant. Bref, c'est très difficile. Il y a un sentiment généralisé de rejet qui éteint les gens qui y vivent.
Après, la question d'être une fille est attachée à des problèmes particuliers, mais qui prennent leur place
dans un ensemble plus vaste. Moi, je suis arrivé enfant dans une cité autour de Nice, la cité des Moulins.
Je suis né en Tunisie. La génération d'adolescents actuels, qui est née à la cité, est plus à l'aise que la
mienne. Elle s'affirme davantage, cherche moins ses repères. Elle est décomplexée.
Jean-Marc Lalanne
07/01/04
2. CRITIQUES
Après avoir marchandé, emprunté, tiré la corde au maximum, Lydia a enfin sa belle robe. Elle
parade au milieu des immeubles, passe devant les appartements de ses copines, habillée en princesse fin
XVIIIème. Au pays des baskets et des joggings, on craint qu'elle se fasse moquer même si elle rayonne à
l'évidence dans son costume. Tout le monde s'accorde à le dire : elle est sublime. Forte tête, elle sait où
elle va et rien ne l'empêchera d'arriver à ses fins, goulues, gourmandes et insatiables. Lydia connaît tous
ses voisins depuis l'enfance. Elle sait où ils habitent, dans quelle tour, à quelle fenêtre, c'est un peu
comme si tout ce monde faisait partie de sa famille. Véritable ouragan, elle veut réussir ce qu'elle
entreprend. Choisie pour jouer dans la pièce de fin d'année, elle répète encore et encore le texte du Jeu de
l'Amour et du Hasard. Ses partenaires doivent suivre, vaille que vaille, malgré les embrouilles et les
désaccords. A travers cette histoire entre collège, institutions sociale et culturelle, et débrouilles des
squares où on traîne, Abdellatif Kechiche décrit une adolescence d'aujourd'hui. Adultes en devenir, ces
jeunes hésitent à affirmer leurs désirs, ici sans doutes moins qu'ailleurs. C'est discrètement souligné,
efficacement présent, sans étendards socio-politiques.
Krimo passe à côté de Lydia dans sa jolie robe. Il en tombe raide dingue comme on disait avant.
Aujourd'hui et ici, on dit qu'il la kiffe. Autres mots qu'on ne parvient pas toujours à déchiffrer, dont on ne
perçoit tout d'abord que la violence. Après un millier de « je vais te tuer » de « fils de pute » ou de « casse
les couilles », on sait que ce n'est pas du premier degré, que ces mots ont un autre poids, et leur brutalité
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s'estompe. « Je voulais démystifier cette agressivité verbale et la faire apparaître dans sa dimension
véritable de code de communication. » confiait le réalisateur. Argot début de siècle destiné à ne se faire
comprendre que des gens auxquels il est adressé, il est comparable aux expressions des tontons flingueurs
années soixante. Sous-jacentes, percent pudeur et timidité, comme si le langage pour dire simplement les
malaises et les envies était impossible à trouver, trop cru à dire.
Loin de stigmatiser la banlieue, loin des clichés volés et des trahisons documentaires paternalistes,
Kechiche montre la vie dans la cité sous un jour des plus banals. Il s'éloigne des images des cités, des
barres, des tours, et montre avant tout la vitalité et la vie des « quartiers populaires » comme il les appelle.
On est donc plongé dans une histoire d'adolescents qui ne savent comment faire avec leurs émotions,
bouleversés par leurs émergences. Krimo et Lydia ont, tous deux, une bande de copains avec qui ils
partagent tout. Etrangères l'une à l'autre, elles ne sont pas rivales comme dans les films. Toutes deux ont
besoin que chacun reste fort et ne se laisse envahir ni par le doute, ni par l'amour. Esquiver le piège,
échapper aux confessions sentimentales, éviter adroitement de se dévoiler sous peine d'être pris pour trop
sérieux, trop allumeur, trop théâtral…
En mettant les mots de Marivaux au cœur de la cité, le réalisateur fait preuve d'audace. Mêlant les
répliques aux dialogues, il offre un regard pétri de contrepoints. Au milieu de la pression quotidienne et
des difficultés permanentes qui sont d'autant plus une galère réelle qu'elles ne sont pas le sujet premier du
film, tous se débattent avec leurs envies et leurs idéaux. Adaptant le style du dramaturge en se
l'appropriant, il habille tous ses personnages d'une personnalité propre loin de toute caricature. Beaucoup
de bruit pour rien ? Juste pour dire haut et fort combien Lydia, Abdelkrim, Frida, Rachid, Nanou et les
autres existent et peuvent être beaux sans être assistés, transformés en concept, en problème, en jeune de
banlieue, quand bien même ils habitent la terrifiante cité...
Anne-Laure Bell
On sait déjà ce que l’on va lire, ce qui va se dire. "Un autre regard sur la banlieue", "Un
éclairage réjouissant sur la cité", etc. C’est un passage obligé. Film de banlieue comme il y a des films de
genre, L’Esquive s’envole gaiement vers l’annihilation joyeuse des clichés et des préjugés, et son
approche critique se doit de passer par la case sociétale. En pleine crise de foi - de laïcité pour être exact la France ne sait plus voir dans ses banlieues que de spectaculaires zones de non-droit, d’inculture et de
tournantes, avec ou sans voile. Seulement, il faudrait être aveugle pour ne discerner au contraire dans le
film d’Abdellatif Kechiche qu’une ode à la Seine Saint-Denis, grassouillette de bons sentiments, d’argot à
l’ancienne, pour une ambiance de comédie sociale façon années 80, complètement détachée de son temps.
Pour ça, il faudra revenir la semaine prochaine et se farcir le douloureux Les Amateurs de Martin Valente.
La force de L’Esquive ne réside pas dans une quelconque réévaluation qualitative de la banlieue, mais
dans un dévoilement parallèle, autrement plus juste. La cité Franc-Moisine que nous dépeint Kechiche
n’est pas atemporelle, mais bien ancrée dans son époque; pas dénuée de culture, mais attachée à celle qui
lui est propre. Le réalisateur connaît ses classiques: la séquence d’introduction, bouillonnante, sur le fil du
rasoir, en témoigne, convoquant Wesh, Wesh qu’est-ce qui se passe et les "Jusqu’ici tout va bien" de La
Haine. Mais l’habilité de Kechiche est de refermer aussitôt la porte de la violence larvée ainsi entrouverte.
Témoignages de sa conscience sociale et de son refus d’un angélisme malvenu, les passages obligés du
film de banlieue ne manquent donc pas à l’appel, mais se cantonnent à cette fonction. La confrontation
avec les forces de l’ordre en est l’illustration évidente: tout est en place pour arpenter les terres de Rabah
Ameur-Zaïmeche (incompréhension entre jeunes et flics, drogue, violence), mais la coupe subite, suivie
d’une étonnante ellipse, stoppe l’escalade avant son point culminant.
De fait, vouloir à tout prix coller une étiquette politique sur le front de Kechiche, envie certes
fondée, revient à ne pas voir l’essentiel: l’humain - quant à savoir si l’humain est par nature politique,
laissons cela aux aristotéliciens. Car L’Esquive est aussi et surtout du cinéma, des acteurs détaillés par
une caméra à la fois proche et collective, une galerie de personnages, et une invitation aux voyages.
Voyage de Krimo, dans sa chambre couverte de voiliers à l’aquarelle; voyage de Lydia, qui s’évade au
pays de Marivaux dans sa robe d’époque; le nôtre également, dans un pays proche géographiquement, et
pourtant étranger par ses us, coutumes et avant tout par sa langue. Nous voici donc au pays d'on n'est pas
des marques de vélo, familier et lointain tout à la fois. Avec la même tendresse que Jean-Pierre Thorn,
Kechiche s’applique à nous y guider, en anthropologue culturel attentif. Le documentariste empruntait le
chemin de l’art, via le hip-hop. Le narrateur de fiction choisit la voie du langage. Prenant le contre-pied
de la représentation télévisuelle qui, même dans ses visées les plus exigeantes (Strip-Tease), a pris la
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fâcheuse habitude d’endormir l’oreille en sous-titrant tout ce qui pouvait s’écarter du français "correct",
Kechiche nous confronte sans détour à cette langue virevoltante, dont l’abord est une première et
essentielle étape du cheminement à l’intérieur du film. Jouant sur une grammaire, un accent et une
syntaxe qui lui sont propres, des néologismes, des importations de l’arabe, et autres panachages
linguistiques réjouissants, le parler banlieue ici convoqué sonne comme un patois en perpétuelle mutation.
De fait, si l’on rit, et on rit souvent dans L’Esquive, c’est avec et non contre cette langue.
Aussi, c’est avec une grande perspicacité que Kechiche place en sous-texte de son film les
marivaudages des Jeux de l’amour et du hasard. Ne pas y voir une justification intellectuelle, ni un
moyen de tirer la sonnette d’alarme contre la fuite d’une culture dite classique. Marivaux fonctionne ici
sur le mode allégorique, en parallèle. C’est d’universalité qu’il s’agit. Dans la pièce comme dans le film,
le langage sert de travestissement à la réalité: c’est un signe de reconnaissance et c’est aussi par lui qu’on
est trahi. Les dialogues, signés Ghalya Lacroix (mais qu’on imagine aussi aisément façonnés au gré des
improvisations), sont ainsi l’axe central du film, celui par lequel tout se révèle. Admirer la facilité avec
laquelle Lydia (Sara Forestier, épatante) passe de sa langue qu’on pourrait dire natale à celle de
Marivaux, allant jusqu’à perdre son accent (car c’est bien d’une langue étrangère qu’il s’agit), c’est déjà
saisir beaucoup du personnage, de sa confiance en soi et de son aisance. Voir le corps de Magalie
(Aurélie Ganito, parfaite dans l'un des rôles les moins évidents du film) refuser d’une larme ce que sa
bouche tente de faire croire, c’est déjà dire beaucoup de son ambiguïté. Entendre la prof de français
(Carole Franck, très juste) faire le lien entre Marivaux et ses élèves en s’interrogeant sur l’emploi des
mots, c’est renseigner sur sa persévérance pédagogique. Mais c’est avec Krimo que l’on perçoit le mieux
le télescopage des différentes strates langagières. Obligé de jongler entre différentes langues, qui vont
jusqu’à modifier son prénom selon l’interlocuteur, il est constamment trahi par celles-ci. Le passage de
l’appartement familial à la rue, dans un premier temps, se fait par une première usurpation de langage.
Mais c’est lorsqu’il passe l’habit d’Arlequin que son ambivalence se dévoile véritablement. Non qu’il
explose sur scène, bien au contraire: le rôle est acheté, il ne lui revient pas de droit, et en conséquence ne
lui sied pas. Cette fois, c’est à son tour d’être étranger en son pays. Perçue comme un outil pour parvenir
à ses fins, cette langue finit par le trahir lorsque, répétant seul avec Lydia, il détourne le texte de
Marivaux: ce n’est plus à Lisette qu’il propose d’unir "votre bouche avec la mienne" (par ailleurs titre de
travail du film), mais à Lydia qu’il avoue son envie de mêler "ma bouche avec la tienne". Seulement, bien
sûr, Lydia "vesqui". Lisette aussi. Et si tout cela n’était finalement que prétexte à raconter une histoire
d’amour déçue? C’est ça qui serait spectaculaire.
Guillaume Massart
" L'Esquive " est le deuxième film d'Abdellatif Kechiche faisant suite à " La faute à Voltaire
" (2000) première œuvre assez mal accueillie à l'époque, apparentée à un énième pladoyer " anti-banlieue
" dont les journalistes commençaient à suspecter les intentions opportunistes avant même d'y prêter la
moindre attention. Or si le contexte dramaturgique de " L'Esquive " reste le " 93 ", un univers qui forge
les êtres et les distingue, Abdellatif Kechiche a voulu élargir les limites du soit disant type " film de
banlieue " et virvolte avec aisance cette fois ci sur le thème universel des prémices de la naissance de
l'amour chez de jeunes adolescents. A. Kechiche est solidement arimé au " Jeu de l'Amour et du Hasard "
de Marivaux en point de fuite naratif et donne notamment au personnage de la prof la mission d'en tirer la
morale déclinable: " Voyez-vous, si la bourgeoise se déguise en bonne, elle n'en reste pas moins
bourgeoise. Et avec qui se mariera-t-elle ? Avec le bourgeois bien entendu. " Ainsi transparaît l'ordre
immuable de la réalité sociale, valable au XVIII ème siècle comme aujourd'hui dans les cités, les riches
avec les riches, les miséreux avec les miséreux. Pour peu qu'il soit difficile à entendre et à accepter, le
constat ne serait rien si " L'Esquive " n'était porté en permanence par une admirable direction d'acteur. De
celle-ci, tirée systématiquement vers l'improvisation, découle une spontanéité impressionante à un tel
niveau qu'elle apparaît inégalée: la rapidité du flux du langage, l'argot, les mimiques des comédiens
fusionnent pour figurer au spectateur une sensation d'intimité terriblement forte, fascinante et pour le
moins enthousiasmante. A Belfort, journalistes, critiques et public furent unanimes : Abdellatif Kechiche
y fut couvert de Prix
Olivier Bombarda
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lI s’est passé quelque chose, peut-être un vol ou une attaque, une bande de garçons est réunie pour
une sorte de conseil de guerre. Les visages, l’agitation, le branle-bas d’avant combat rejettent les
immeubles et la banlieue elle-même dans un arrière-plan aléatoire. Passé le désir du passage en force, le
banlieue-film s’est replié, dans un double mouvement d’économie et de relaxation, vers une autre
expérience de l’intimité des cités. Fini le temps des grues de La Haine et du montage-force de De
l’amour, place à une DV mobile, et surtout privilège du quotidien au détriment du récit traumatique. Le
politique n’y est plus à prendre ou à laisser, et le collectif désormais filmé dans sa plus simple idée :
agrégat flottant (les copains, la bande) où le positionnement d’un seul corps filtre le récit et le propos.
L’Esquive est l’accomplissement de ce retour vers la spontanéité des sentiments, l’esquisse des portraits et
l’attention à ce qui ne fait plus (plus maintenant) événement. Par excellence, le passage obligé du genre la scène du contrôle de police - y est amortie par une ellipse consécutive, comme oubliée dès le raccord
suivant. Abdellatif Kechiche esquive. Attendu sur la banlieue, il filme avant tout l’adolescence
Ado apathique et taciturne, Krimo voudrait sortir avec Lydia, sa blonde copine de classe, très
occupée par les répétitions du Jeu de l’amour et du hasard qu’ils étudient à l’école. Elle esquive, passe
pour une allumeuse. Les copains du silencieux Krimo s’en mêlent, lui mettent la pression, ses copines
aussi. Tout le monde parle, un peu à tort et à travers. Le film tente de saisir cela, ce débordement sonore,
cette frénésie de vocabulaire qui fait l’ordinaire des conversations adolescentes, en se placant au milieu
des échanges. Il y a, c’est entendu, quelque chose de sportif dans ces joutes oratoires, où insultes,
apostrophes et jurons fusent comme des balles. C’est la limite où le film pourrait virer de bord, en
transformant chaque dialogue en performance, à la manière de ces concours de tchatche d’où le rap a
émergé. C’est justement là, en embrassant cette limite, que Kechiche parvient à esquiver le panneau.
Prendre le dialogue au pied de sa lettre, tant dans ses rafales de néologismes dignes de Queneau
que dans ses blancs, ses approximations, permet de restituer la dimension ordinaire et quotidienne de cette
oralité. Sans céder au spectacle ni renoncer à la justesse et à la précision. Lorsque Magali, l’ex de Krimo,
vient menacer Lydia qui trône au milieu de ses copines sur un banc, enlacée et protégée par elles, la
parole y est filmée à la fois dans son unité, comme langage codé compris de tous, et dans ses différences,
qu’un montage alerte saisit au vol. Et surtout comme une navette suspendue à un fil invisible reliant les
personnages entre eux.
Elle n’existe réellement qu’à condition qu’elle atteigne son but, c’est-à-dire faire mal, faire peur,
faire rire. La performance langagière est alors reléguée au second plan par les sentiments inscrits sur les
visages : peur, colère, inquiétude, défi. Langue performative et non performance de la langue, la parole
existe moins à travers ses effets de style qu’à travers ses effets concrets. Paradoxe : le langage des cités
est justement un langage enflé d’injures non littérales. Si chacun était réellement atteint par les insultes
ponctuant toutes les phrases, alors il n’y aurait plus d’amitié. Mais c’est d’une autre parole qu’il est
question ici, et qui affleure miraculeusement entre les lignes alors qu’elle a du mal à exister dans la cité :
un discours amoureux ou d’amitié pudiquement tapi sous un déluge de vocables blessants. Il n’empêche
que Kechiche filme aussi ce danger-là, la disparition de l’amitié (entre Krimo et Lydia s’y substitue un
embarras consécutif à l’esquive), la fragilité des liens. La frénésie lexicale des dialogues made in 9-3 se
mêle à des motifs traditionnels - l’intrigue, le complot, les tractations sentimentales -, en dynamise
ressorts et palpitations. S’y joue une maîtrise du langage dont l’ajustement fabrique la fiction, de même
que la maîtrise de l’espace.
Dans La Faute à Voltaire, le premier film de Kechiche, la kermesse popu et les solidarités
clandestines formaient l’horizon de la réconciliation. L’humeur a changé, mais pas la ligne de conduite :
inscrire colère et frustrations d’un collectif dans les vibrations d’un seul corps. Partant de là, privilège du
gros plan sur les visages, les petits attroupements, les silences de Krimo (Osman Elkharraz), le menton
haut de Lydia (Sarah Forestier), les yeux en colère de Fryda (Sabrina Ouazani, sidérante). Et si la cour où
répètent les élèves s’ouvre à une circulation, au gré des fâcheries et des emplois du temps, la scène de
théâtre ne sert pas à transformer les personnages (pas de transfiguration via la scène, ni de révélation),
mais seulement à modifier les données de l’espace du dialogue. Kechiche mesure ce qui passe du
quotidien au théâtre, ce qui s’y perd, ce qui reste en coulisses. Krimo, qui achète à un copain le rôle
d’Arlequin contre une paire de baskets et une console de jeux, ne peut pas séduire Lydia via la scène.
Il n’y a pas sa place, il ne peut y être filmé qu’en gros plan : son introversion, son aphonie butée
n’éclairent aucune scène quand Lydia, belle parleuse, rayonne. Lui peine à s’exprimer s’il ne comble pas
le champ, si le silence n’est pas fait autour de ses murmures endormis. Elle, qui passe du verlan à
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Marivaux dans le même plan, utilise l’espace théâtral comme le prolongement d’un hall d’entrée
d’immeuble, une convention se substituant à une autre. Krimo en est incapable
L’échec de son stratagème, la fluidité introuvable entre deux territoires hétérogènes, tout cela est
écrit sur sa moue boudeuse et ses yeux vides. Il n’est qu’un enfant, accrochant aux murs de sa chambre
les dessins de voiliers exotiques que lui offre son père depuis sa prison. Tout le monde cherche un
passage secret d’une scène à une autre ; tout le monde joue et fait jouer (même l’interventionniste et
brutal ami de Krimo, bien décidé à prendre les choses en main, en passe par une mise en scène quasi
vaudevillesque pour débloquer la situation). Mais le corps éteint de Krimo résiste en silence, oppose sa
douceur à tout travestissement ou métamorphose et sombre dans la mélancolie du renoncement. Une
esquive, la dernière, le rejette enfin dans la douloureuse obscurité des coulisses.
Jean Philippe Tessé Les cahiers du cinéma.
Sa robe XVIIIe siècle, Lydia l'aurait voulue avec un volant. Et d'une autre couleur. « Mais enfin, lui
dit une copine, c'est la couleur qui est terrible, t'es folle ou quoi ? La couleur, ça la met grave en valeur.
Franchement, y aurait pas la couleur, laisse tomber ! » Dans le lycée de sa cité de banlieue parisienne,
Lydia répète Le Jeu de l'amour et du hasard. Excitée comme une puce, elle arrive en compagnie de
Krimo, qui lui a prêté 10 euros pour se la payer, sa robe, à la répétition, où l'attendent depuis une heure
Frida, qui interprète Sylvia, et Rachid très à l'aise dans son rôle d'Arlequin. Elle la ramène un peu avec sa
robe, Lydia, alors Frida s'énerve : « On n'en a rien à branler des costumes. Ce qu'il faut, c'est le sentiment
des personnages, que ça vienne de l'intérieur, tu vois. Faut pas voir l'apparence, faut voir ce qui se dégage
etc. Ce qui compte, c'est la vérité etc., tu vois ? » Krimo est interloqué qu'on puisse s'engueuler pour ces
bêtises. Le théâtre, c'est pas son truc, lui qui n'a pas lu un livre de sa vie. Son rêve, il l'accroche sur les
murs de sa chambre : ces voiliers sur lesquels il embarquera avec sa mère et son père, quand celui-ci
sortira de prison. Seulement, soudain est-ce la robe ? , c'est comme s'il voyait Lydia pour la première
fois. Elle lui plaît d'autant plus qu'avec Magali, sa meuf, c'est fini. Pour se rapprocher de Lydia, Krimo va
user d'un subterfuge digne de Marivaux. Il offre des cadeaux à Rachid pour qu'il renonce à jouer
Arlequin. Et le voilà, en salle de classe, pantelant, le regard vide, qui marmonne un texte qu'il s'est forcé à
apprendre par coeur et ça n'a pas été facile ! un texte tordu auquel il ne comprend rien. « Articule, lui
demande la prof, change de manière de bouger, change de manière de parler. Amuse-toi ! » Krimo en est
incapable. Qui plus est, Lydia ne fait que l'esquiver, comme Lisette esquive Arlequin. Et s'il se jette sur
elle pour l'embrasser, elle le repousse pour constater : « Putain, t'as niqué ma robe ! » C'est vraiment la
cata... Abdellatif Kechiche (La Faute à Voltaire) a construit son film en blocs compacts. En affrontements
permanents. C'est à qui parlera le plus vite, gueulera le plus fort. La réunion de Marivaux et des gamins
de la cité est, pour lui, une réflexion plaisante et passionnante sur le langage, mais aussi un moyen de
montrer une violence masquée qui menace de s'embraser à la moindre étincelle. Dans cette mini-société
close sur elle-même, donc hystérique, les alliances fluctuent au nom d'une morale, terrifiante dans sa
rigueur : parce qu'elle n'a pas immédiatement accueilli ni rejeté Krimo, qui lui demandait de sortir avec
elle, Lydia est accusée par ses copines d'être une fouteuse de merde, une « sans pitié ». Et le personnage
le plus extravagant le plus inquiétant aussi sous son apparente décontraction c'est Fathi, le petit macho
qui met son grain de sel dans les affaires de coeur de son pote Krimo. Sous la constante tendresse du
regard, la mise en scène est tendue comme un film qui menacerait à chaque instant de se rompre. On sent
chez Abdellatif Kechiche un peu comme chez Jacques Doillon, quand il filme les émois des Petits Frères
ou les ados bourgeois du Jeune Werther la volonté d'aller jusqu'au bout du paroxysme. D'exacerber le
réalisme pour créer un monde troublant, à mi-chemin du reportage et de la fiction. A la frontière de la
vérité et du conte. Alors, peu à peu, le sabir coloré des ados de ban- lieue s'harmonise avec les imparfaits
du subjonctif de Marivaux. En définitive, les uns et les autres ne font que parler d'amour. Même s'il est de
plus en plus difficile de privilégier les sentiments dans une société où l'incompréhension rôde et où
l'intolérance menace. Abdellatif Kechiche n'a rien d'un idéaliste ni d'un utopiste. Mais, avec l'aide de
comédiens amateurs étonnants de vigueur et de fraîcheur (Sara Forestier est une étonnante Lydia, mais
tous sont remarquables), il réussit l'alliance rare de la lucidité et de l'espoir. L'Esquive décrit, donc, le
monde tel qu'il est et le rêve tel qu'il pourrait être. C'est, au sens le plus noble du terme, un film politique.
Et un film politique superbe. Pierre Murat
Pierre Murat
Télérama, Samedi 10 janvier 2004
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.Contrairement à ce que l'on pourrait croire, l'Esquive n'est pas un film facile. Loin d'être une
simple captation de la vie des jeunes habitants des cités, il articule son propos autour d'une intrigue
clairement inspirée par le théâtre de Marivaux: la représentaion du Jeu de l'amour et du hasard dans un
spectacle de fin de trimestre est l'un des enjeux du récit, mais ce théâtre fournit aussi au film son modèle
de fonctionnement centré sur les imbroglios amoureux et le rôle fondamental accordé au langage.
L'intrigue amoureuse proprement dite est à la fois simple, par le petit nombre de personnages
qu'elle met en jeu, et compliquée: Abdelkrim, dit Krimo, un adolescent d'une quinzaine d'années, plutôt
renfermé et secret, se fait congédier par Magalie, qui est sa petite amie depuis deux ans. Il se laisse
ensuite entraîner par Lydia, une amie d'enfance, dans un jeu mi-amoureux, mi-théâtral, dont la pièce de
Marivaux est le centre: Krimo "flashe" sur Lydia étrennant sa belle robe d'actrice, il assiste aux
répétitions, puis soudoie le garçon qui doit jouer Arlequin, l'amoureux de Lydia-Lisette, pour pouvoir
travailler la pièce avec elle, et donc jouir davantage de sa présence. On le voit, la pièce de Marivaux n'est
pas un élément annexe de l'intrigue, mais bien plutôt ce qui la déclenche et lui fournit une partie de ses
développements: le garçon, alors en plein désarroi amoureux, semble sensible à la part d'exceptionnel que
découvre le théâtre, au charme de cet "autre monde", si différent du décor terne de la cité. Mais le charme
ne sera pas assez puissant: paralysé à la fois par l'amour et par son handicap scolaire, Krimo se révèlera
incapable de tenir son rôle, et sera finalement évincé de la représentation, ce qui coupera court à ses
relations avec Lydia.
Ce résumé a un défaut: il n'est fait que selon le point de vue de Krimo, alors que le film, fidèle en
cela à son modèle théâtral, multiplie les points de vue sur l'intrigue, selon les regards et les commentaires
que portent sur elle les personnages. Car ce qui est bien montré, c'est que dans le monde des adolescents,
l'amour ne saurait être une affaire uniquement privée: les copines de Lydia commentent "l'entrée en
scène" de Krimo, s'inquiètent des dispositions de Lydia à son égard, elles s'indignent, houspillent ou
compatissent; Rachid, le copain de Krimo, s'irrite du trouble que vit son ami, va jusqu'à des menaces pour
obtenir une mise au clair des sentiments de chacun. L'indécision de Lydia fait durer le suspens, nourrit
l'intrigue, et cette publicité des relations, on le sent bien, est à la fois ce qui les intensifie et ce qui les
paralyse. Le cheminement secret de l'amour devient l'objet de débats publics, et cela rejoint bien le
contenu du théâtre de Marivaux, dans lequel, qu'il s'agisse du Jeu de l'amour et du hasard ou de la
Double inconstance, l'évolution des sentiments est à la fois souterraine et très discutée, que ce soit entre
les principaux intéressés ou entre les personnages secondaires. La pression de la famille ou du groupe
social joue dés lors un rôle non négligeable dans une relation qui pourtant ne semble concerner que deux
individus: c'est ce que montrent et Marvaux et Abdellatif Kechiche.
Mais l'Esquive n'est pas la simple transposition des principes de l'intrigue marivaudienne dans
l'univers des cités, ou plutôt cette transposition ne saurait être simple. Le jeu des sentiments "parle" aux
jeunes comédiens amateurs, mais le thème de la disconvenance sociale aussi: la scène que l'on voit
plusieurs fois travaillée et répétée oppose, au moment où vont se révéler leurs véritables conditions, une
Lisette fine, au langage mesuré, point déplacée dans le rôle de la maîtresse, et un Arlequin plus maladroit,
aux galanteries excessives, qui donne du maître une image plutôt parodique. Dans le cadre du cours de
théâtre donné aux adolescents, le professeur insiste à la fois sur l'enjeu de la scène: la révélation d'une
disparité sociale -- la servante proposant sa main à un maître, le valet proposant la sienne à une dame -- et
sur la manière dont Marivaux résoud le problème en évitant finalement à ses personnages de se déclasser.
La fin du film montre que la petite troupe d'amateurs représentera bien l'ensemble de la pièce; mais la
scène choisie est à la fois l'une des plus accessibles -- les enjeux dramatiques et le comique de langage y
sont particulièrement perceptibles -- et l'une de celles où ce problème de la disconvenance est vraiment
central. Par ailleurs, en échangeant sa place de spectateur contre celle d'acteur, Krimo apporte au
personnage d'Arlequin la charge d'un amour encore non formulé, qui pourrait donner à la scène une plus
grande force dramatique. Mais le poids du réel est trop grand -- nouvelle illustration du Paradoxe sur le
comédien de Diderot --, et l'amoureux reste transi, bloqué à la fois par son sentiment et par le langage
étranger dans lequel il a essayé de se glisser pour le dire. La disparité entre les classes -- tous les
personnages appartiennent au même milieu -- est remplacée par une inégalité dans la maîtrise du langage
et de la communication.
En effet, le film montre bien que, malgré l'aide apportée par l'enseignante, la relation des élèves
avec le texte n'est pas facile: même éclaircie par une grille de lecture simple, la pièce de Marivaux
apparaît en effet comme un langage autre, un univers linguistique difficile à aborder pour certains d'entre
eux, et en particulier pour Krimo. Cette coexistence et cette opposition de différents types de langage est
un autre des enjeux du film, qui, mine de rien, multiplie les difficultés pour l'appréhension du spectateur
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adulte de 35 à 77 ans... A la langue allusive et parfois contournée du dramaturge du XVIIIe siècle
s'oppose la "tchatche" que pratiquent les adolescents entre eux, ce feu roulant d'interjections,
d'exclamatives, de métaphores et de termes argotiques qui constamment travestissent leur discours et
exagèrent leurs sentiments jusqu'à l'esbrouffe: Krimo "kiffe" Lydia, dont la robe "déchire" parce qu'elle
est "trop belle", et cet amour le rend "ouf", pendant que Lydia se fait traiter de "pute" par Magali, furieuse
d'avoir été évincée, mais aussi par Rachid ou même par ses copines, qui ne comprennent pas ses
hésitations et s'irritent de la voir mener le garçon par le bout du nez. Ce langage "saoûlant", fréquemment
agressif -- on pense parfois à la Haine, de Mathieu Kassovitz --, est, par rapport à celui de Marivaux, une
autre forme d'esquive : l'extraversion, l'exagération constante ne permettent pas de dire la subtilité,
l'indécision des sentiments. Même les confidences entre filles, les dialogues avec le choeur des copines
qui commentent l'action, ne permettent pas à l'héroïne de ce marivaudage moderne de voir plus clair dans
ce qu'elle veut, tant les relations entre filles et garçons semblent codées, régies par un ensemble de valeurs
établies que ce langage reflète à sa façon, évoquant les droits, les règles de comportement, la vengeance
qu'autoriserait un code d'honneur approuvé par le groupe.
Les adultes, eux, ne sauraient intervenir dans ces querelles; un troisième type de langage leur est
d'ailleurs réservé, et l'on voit ainsi Fatih, si brutal parfois dans ses paroles et ses gestes avec Lydia et ses
amies, tenir à la mère de Krimo un langage déférent et neutre, un langage susceptible de rassurer les
adultes et de dresser un écran protecteur entre eux et les activités des jeunes. Ce jeu avec différents
langages, qui est présent aussi chez Marivaux, montre bien que les mots dissimulent plus qu'ils
n'explicitent la réalité, et que l'habileté dans le maniement des différents niveaux de langue est la marque
d'une certaine maîtrise. Fatih, expert en petits trafics, en négociations et en tentatives d'intimidation, tente
de jouer ce rôle de maître de jeu, tout comme désire le faire Lydia, qui sait marchander le prix de sa robe
avec acharnement, et revendique le droit de différer sa décision. Tous deux s'opposent à Krimo, mutique,
mal à l'aise avec le langage, et qui tente en désespoir de cause d'exprimer son désir par le geste, quitte à se
faire rembarrer. Mais quand on n'est pas doué avec les mots, quel langage peut-on employer? Le langage
visuel. Celui des dessins de voyage et d'évasion que Krimo reçoit de son père emprisonné; celui des
gestes, des expressions, des regards; celui de la caméra qui en les captant capte derrière les mots les états
d'âme des adolescents; le chagrin, la timidité, la peur, la colère, l'émotion, ce sont les images qui les
disent, et Adellatif Kechiche rejoint ici le cinéma d'un Ken Loach, ce cinéma qui n'a pas son pareil pour
mettre en valeur la beauté propre de ses personnages, et leur humanité singulière.
Catherine Raucy
Pour faire écho à la vision du film, on recommandera la lecture de De Marivaux et du Loft, petites
leçons de littérature au lycée, de Catherine Henri (éditions P.O.L., 2003).
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3. LES LIEUX ET TEMPS DU FILM
1. LES DIFFÉRENTS LIEUX
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Tout se passe dans la cité et presque intégralement en extérieur. On peut mettre de côté:
l'appartement de Krimo et sa mère , seul lieu d'intimité mais dans lequel la parole circule peu.
le couloir ou entrée de l'immeuble ( là où des confidences peuvent se faire: scène de rupture entre
Magali et Krimo; scène de négociation de Krimo et Rachid)
la classe ( la classe est un lieu plus présent, qui revient par trois fois, intéressant à étudier avec les
élèves. On retrouve ce lieu par trois fois.
1. Lors d'une répétition où la prof explicite la thématique de la pièce de Marivaux : Nul ne peut
échapper à sa condition sociale. Cette explication sera d'ailleurs provoquée par une question de
Lydia qui place la prof de français en arbitre suite à son altercation avec Frida lors de la répétition
en extérieur.
2. Lors de la seconde répétition, c'est Krimo qui endosse le rôle d'Arlequin. Mal à l'aise, sous les
rires étouffés de ses camarades, il a du mal à suivre les indications de jeu données par la prof.
3. La troisième répétition en classe met Krimo en difficulté. La prof s'impatiente et désespère face à
son incapacité à « sortir de lui-même », à « prendre du plaisir »...Krimo choisit la fuite ( esquive).
On peut s'interroger sur le calme des élèves et sur l'activité théâtrale. Une telle situation est-elle
réaliste? Peut-être faut-il se replacer dans le contexte d'un film ( mise en scène) et la volonté du
réalisateur de ne pas dépeindre la banlieue comme un lieu d'affrontement permanent. ( voir
interview ). voir ci -après)
la salle ( sorte de gymnase) où se déroule la représentation .( épilogue)
On remarquera que la vie sociale des jeunes se situe en bas, entre les immeubles dont ils ne
connaissent que les fenêtres ( voir les multiples appels de la rue...), le lieu principal étant cette aire de jeu
ayant l'aspect d'un amphithéâtre, où les jeunes vont répéter. Le théâtre s'invite par ce lieu même dans la
cité. On y retrouve la scène, les gradins, le décor ( les immeubles) et les coulisses ( tout ce qui entoure ce
lieu central) dans lesquelles tout se noue et se dénoue....
Un des très rares plans d'ensemble du film: « l'amphithéâtre » , lieu des répétitions. On y distingue la
scène ( le jeu) ; les gradins ( public), le décor ( les immeubles et leurs multiples fenêtres...)
2. LE THÉÂTRE DANS LE FILM:
Le film lui-même est divisé en trois actes:
1. Le premier acte est centré autour de Lydia - Krimo . Après l'annonce de la rupture par Magalie,
Krimo va rencontrer Lydia sur laquelle il va littéralement « flasher ». C'est un véritable coup de
foudre qui se produit dès qu'il la voit dans sa robe de théâtre ( effet du costume?). A partir de là, il
n'aura de cesse de la conquérir, avec toute la maladresse qui le caractérise. Dans cet acte, c'est
Lydia qui est au centre, décidant de tout, menant son entourage selon son bon vouloir ( en dépit
des velléités de résistance de Frida). Krimo est dans l'ombre...il la contemple. ( Lydia est souvent
filmée en subjectif, vue par Krimo)
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2. ( 00.31) Le second acte commence avec la négociation secrète menée par Krimo auprès de
Rachid afin de lui « acheter » son rôle d'Arlequin. Il s'agit d'un stratagème à la « Marivaux » pour
approcher sa Belle. Krimo va alors se forcer à apprendre son rôle, ce qui lui demandera des
efforts considérable vu son comportement scolaire ( il n'a jamais lu un livre et il n'écoute pas en
classe...). Mais ce qu'il n'arrivera pas à dominer, c'est sa timidité ( ou la peur du ridicule)...autant
dire que le stratagème est voué dès le départ à l'échec. Parallèlement, en coulisse, ses copains
découvrant le changement de comportement de Krimo vont provoquer l'intervention de Fathi.
3. (01.11) Le troisième acte est celui de la prise en main de la situation par Fathi. Ce dernier
« cuisine » Krimo qui vient d'abandonner son rôle d'Arlequin, puis va agresser Frida qui répète
seule son rôle. Son intervention « musclée » va provoquer l'émoi chez les filles qui vont à leur
tour devoir s'impliquer dans l'histoire de coeur de Lydia-Krimo-Magali. La mise en scène
imaginée par Fathi va tourner court par l'intervention de la Police, et on comprend au cours de la
représentation théâtrale que Magali a trouvé un nouvel amoureux. Tout le monde se réconcilie,
sauf Krimo qui reste à l'extérieur, n'osant pas entrer et regarder la pièce . ( 01.56) Epilogue: Lydia
appelle Krimo enfermé dans sa chambre. Il ne répond pas, et elle s'en va....
Acte 1: le coup de foudre....
Acte 2: Le stratagème de Krimo
Acte 3: Fathi prend les choses en main
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3. LES FENÊTRES VUES DE LA RUE.....
C'est dans la rue et sur le « no man's land » entre les immeubles que vivent et se rencontrent les jeunes.
Krimo interpelle Magalie
Lydia présente sa robe à sa copine.
Fathi discute avec la mère de Krimo
Lydia appelle Krimo
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4. LES PERSONNAGES DU FILM
1. LES ADULTES
Ils sont peu présents et cantonnés à l'intérieur ( aux coulissent du film pourrait-on dire), dans
leur environnement habituel.
–
Le chinois dans l'atelier : Il doit faire face à la « tchache » de Lydia qui discute ferme le prix de
fabrication de la robe, avec par ailleurs une totale mauvaise foi. Visiblement, elle revient sur le prix
convenu au départ....Il finit par céder et casser le prix face au « bulldozer » Lydia! On peut
accessoirement se demander quelle est la « légalité » de atelier de couture situé dans les sous sol d'un
immeuble...
–
La mère de Krimo: On pourra remarquer que c'est le seul appartement qui nous est ( très peu)
montré de l'intérieur. On la verra par trois fois.
1. Quand Krimo rentre, elle fait son repassage chez elle On comprend qu'elle vit seule avec son fils,
son mari étant en prison. Krimo refuse de l'accompagner rendre visite à son père, ce qu'elle
accepte sans insister...
2. Plus tard, lorsqu'il rentre tard, on la trouve fatiguée, allongée sur le divan après la visite à son
mari. Krimo se montre attentionné envers sa mère qui lui transmet par ailleurs un dessin de
voilier peint par son père et que Krimo va afficher dans sa chambre, à côté de dizaines d'autres...
3. Enfin, on la voit à sa fenêtre quand elle est interpellée par Fathi et dans l'appartement quand elle
jette un regard interrogateur sur Krimo qui s'efforce d'apprendre son texte.
–
La professeur de français: Elle incarne l'adulte à l'aise dans sa classe, convaincue du bien fondé de
son activité théâtrale et cherchant à communiquer son enthousiasme. Cependant, si celui-ci passe
auprès de Lydia, Frida et Rachid, les plans de coupe sur certains élèves montrent que d'autres sont
pour le moins indifférents. C'est ainsi qu'un plan subjectif de Krimo nous le montre en train de
griffonner des obscénités au lieu de prendre en note le devoir dicté par la prof. On sait dès le départ
que son stratagème ne pourra pas marcher ( « il n'a jamais lu un livre de sa vie » dit par ailleurs sa
petite amie Magalie)
Deux figures de femmes: la mère et la prof....
–
les policiers: Les policiers ne se distinguent pas en tant qu' individus. Ils représentent l'institution,
uniquement sous son aspect répressif. Le langage qu'ils utilisent est lui-même agressif , tout comme
leur comportement. Au cours de l'intervention, la femme va frapper Frida au visage avec le livre
qu'elle trouve dans sa poche....livre que le réalisateur, malicieusement, nous montre en très gros plan,
usagé, écorné par l'utilisation intensive qui en a tété faite, ce qui échappe au policiers qui ne semblent
même pas reconnaître là un classique ! ( preuve de leur ignorance culturelle?)
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L'intervention est extrêmement réaliste mais sa violence est désamorcée par la forte éllipse qui suit.
2. LES JEUNES
1. La prééminence du groupe
Les jeunes se définissent d'abord par leur appartenance au groupe de leurs congénères: les
garçons ensemble, les filles ensemble. Ils ne se mélangent que dans le cadre du couple. La pression sur les
individus est très forte . Tout se sait très vite . Les rumeurs vont bon train dans la cité et chacun dit son
mot sur les affaires de coeur du voisin. Les précautions infinies que Krimo prend avant de dévoiler sa
demande à Rachid ( « tu le jures sur le Coran de La Mecque ») montre bien que le fait de garder un secret
doit être entouré d'infinies précautions...Cela rejoint le fonctionnement très codifié de cette micro société.
Fathi reproche à Krimo de s'être déshonoré en ayant simplement commencé à jouer au théâtre ( sous
entendu, un homme ne saurait se déguiser et jouer sur scène) et il veut obliger Lydia à se prononcer ( « tu
kiffes ou tu kiffes pas »).
Le groupe des garçons
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–
–
Krimo ( de son vrai prénom Abd El Krim).
C'est le seul dont on voit la mère et dont on a
quelques bribes d'informations sur sa situation
familiale: son père est en prison et tous les trois
rêvent de partir vers les îles ...( des dessins de
voiliers – réalisés par le père- tapissent sa
chambre...). C'est un garçon taciturne, timide,
en échec scolaire et qui se livre sans doute à de
petits larçins ( voir son « trésor de guerre »...)
Fathi. Le « caïd » , « monteur de coups », plus
âgé, il ne semble plus aller en classe. Protecteur
de Krimo et régisseur du quartier, il dirige son
clan, cherchant à oeuvrer pour son bien. Fathi
représente en quelque sorte le « gardien de
l'orthodoxie », veillant à ce que les « codes »
de la cité soient respectés.
Slam: Camarade de classe de Krimo ( on le
voit souvent en plan de coupe dans les scène en
classe) , il est directement au courant de
l'évolution de Krimo et rapporte la situation à
Fathi.
Rachid: Passionné par le jeu théâtral, il est dans
la classe de Krimo mais en dehors du groupe
de copains de Fathi. Il se laisse « corrompre »
par Krimo pour qu'il lui laisse son rôle
d'Arlequin.
Le groupe des filles
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Lydia. Aime jouer , mettre en scène,
commander ...elle ne sera déstabilisée que
lorsque Krimo lui demandera de sortir avec
lui....mais elle reprend vite ses esprits. Son
échange de regard avec Krimo à la fin de la
représentation et le fait qu'elle prenne
l'initiative de l'appeler laisse une fin ouverte à
l'histoire d'amour....
Frida: Partenaire principale de Lydia et prompt
à s'énerver dès que quelque chose ne lui plaît
pas.
Nanou: Copine et confidente , dans la même
classe que Frida et Lydia, elle fait fonction de
médiatrice toue en contribuant à faire circuler
les « petits potins » du quartier..
Hanane, petite amie de Rachid.
Magali: Elle ne fait pas partie du groupe de
copines. Petite amie de Krimo qui par dépit,
décide de rompre tout en continuant de le
désirer; Magali est un personnage très touchant
car tout en douleur. Son amour pour Krimo est
« dévorant » ( cf à Lydia « tu peux le bouffer
ton Krimo ») et l'attitude du groupe de filles
envers elle extrêmement dur...Mais les chagrins
d'amour se soignent et on la voit à la fin avec
un nouvel amoureux.
Le groupe des garçons: les barres, le métal, le béton... Le groupe des filles: le banc, l'herbe...On est
On reste un peu à l'écart du groupe...
en général plus proche d'elles que des garçons....
2. Le langage:
La parole est au coeur du film.. Le langage des jeunes de la cité côtoie le texte « précieux » de
Marivaux dont ils sauront s'emparer, tout comme ils savent adapter leur langage selon les circonstances.
On peut ressortir quelques scènes emblématiques au cours desquelles le langage s'adapte selon
la situation et l'interlocuteur:
1. Dès la première scène, c'est un choc brutal, un « coup de poing » que nous assène le
réalisateur. Nous sommes les témoins d'une vive discussion entre jeunes et nous nous retrouvons
littéralement « bombardés » par un flot ininterrompu et tout azimuth de paroles difficilement
compréhensibles.
2. Lors de la première répétition , le dialecte de la cité fuse au cours de l'altercation entre
Frida et Lydia . On se retrouve , par un effet d'emboîtement, spectateur d'une autre scène dans
laquelle celle de Marivaux vient, de manière incongrue, s'imbriquer...
3. Fathi lui aussi adapte son langage à ses interlocuteurs: Lorsqu'il parle à la mère de
Krimo, il adopte un ton très poli, voire déférent. Il emploie ce même ton envers les policiers qui
eux, à l'inverse emploient un langage peu châtié, émaillé de termes justement employés dans le
langage des cités ( comme s'il y avait renversement, ou contamination...)
3. Le statut de l'individu.
Il est entièrement subordonné à celui du groupe ( du clan). L'individu doit se conformer à un
modèle prédéfini, assez machiste.
– Les garçons ne doivent pas faire de théâtre ( activité de « pédé » dit Fathi)
– Les rapports garçons filles sont soumis à des règles ( cas de la demande de Krimo qui exige une
réponse claire et immédiate)
– Les filles, bien qu' extérieurement très libres dans leur langage, sont soumises aux garçons . Elles en
adoptent d 'ailleurs le langage ( elle s'appellent « mon frère »; disent « je m'en bats les couilles »...) et
s'habillent comme eux....( pantalon et veste en « jeans » )
– Dans chaque groupe ( garçons et filles) , chaque individu est en permanence sous le regard et le
jugement des autres membres du groupe. Rien ne passe inaperçu, les « ragots » vont bon train.
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5. LE POINT DE VUE ET LA MISE EN SCÈNE
1. LE COSTUME, LE PERSONNAGE
C'est une des questions ( avec celle du langage) qui est au coeur du film.
Lydia apparaît avec sa robe qu'elle vient de faire confectionner. Elle en est tellement fière qu'elle
va la faire admirer par ses copines, entraîner Krimo à la répétition pour qu'il la voit jouer, et traverser
ainsi habillée toute la cité. C'est ce qui déclenchera le rire de Frida qui pense que le costume n'est qu'
apparence, au contraire de Lydia qui estime être plus dans le personnage avec l'habit ( l'habit fait le
moine?) . Cette discussion ( tranchée par Rachid qui citera le cas d'un acteur qui ne sent dans son
personnage que lorsqu'il a mis ses chaussures !) est au coeur du sujet. C'est d'ailleurs par l'échange entre
autre de vêtements ( vraisemblablement volés) que Krimo va obtenir et revêtir l'habit d'Arlequin.
Qu'est-ce qu'incarner un personnage? Frida sans le dire est dans la ligne de « l'Actor Studio » :
pour elle , tout est dans l'intériorité du jeu, du ressenti profond...C'est ce qu'elle cherche à exprimer avec
ses propres mots.
Krimo va suivre de loin cette polémique, ne semblant pas y comprendre grand chose
d'ailleurs....et quand il se décidera de revêtir le costume d' Arlequin, ce sera justement pour de mauvaises
raisons car il n'a de toute évidence rien compris au théâtre et au jeu d'acteur. Il n'est pas Arlequin. Il reste
Krimo cherchant à conquérir Lydia. ( il transforme par deux fois le texte lors de la répétition avec Lydia
cf « sur ma bouche avec la tienne »). Le costume n'est pour lui qu'un déguisement, un moyen pour
approcher de plus près Lydia et lui déclarer son amour. On est dans le vif du sujet de la pièce de
Marivaux....
Mais au-delà de la pièce et des personnages joués dans le cadre du théâtre, il existe aussi des
personnages joués dans le cadre du film. Nous sommes globalement dans le cadre d'une mise en scène
cinématographique...on a donc ici un effet d'emboîtement. ( Sara Forestier par exemple joue le rôle de
Lisette, mais elle joue d'abord celui de Lydia... les dialogues sont entièrement écrits et appris car elle ne
parle pas naturellement le langage des cités). Frida, Fathi et tous les autres sont aussi des personnages,
même s'ils viennent de la cité.
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2. ETUDE DE LA PREMIÈRE SÉQUENCE: MISE EN CADRE ET MISE EN SCÈNE
La première scène est emblématique de l'ensemble du film: elle commence par un très gros plan
de Fathi dont le regard passe d'un visage à un autre. L'arrière plan est évacué. On est plongé dans le coeur
même du groupe ( passage de visages, de mains, de bras flous en premier plan ...effets de volets rapides,
montage serré très rythmé...) La caméra est très mobile et on a l'impression d'images « volées », prises sur
le vif....( effet de réalité). Par ailleurs, le dialogue est dense, difficilement compréhensible car les paroles
se recouvrent, mais aussi par le fait du langage employé, véritable langue étrangère pour le commun des
spectateurs.
Krimo n'est pas dans le groupe au départ. Il arrive un peu en retard ( déjà décalé) et a du mal à
s'intégrer à la conversation générale. Son attitude « d'esquive » est visible et se confirme dans le plan
suivant où, au lieu de poursuivre l'action ordonnée par Fathi, il va s'arrêter et appeler Magali. On
remarque que le titre s'inscrit d'ailleurs sur lui lors de cette scène.
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6. COMPLÉMENTS: « LE JEU DE L'AMOUR ET DU HASARD » .
L'intégralité de la pièce est consultable sur le site: http://www.alalettre.com/marivaux-jeudelamour.htm
1. RÉSUMÉ DE LA PIÈCE
Acte I
M. Orgon, désire marier sa fille Silvia à Dorante, le fils d'un de ses vieux amis. Silvia évoque ce mariage
avec Lisette, sa femme de chambre, et lui confie les craintes qu'elle a d'épouser ce jeune homme qu'elle ne
connaît pas. Orgon, en père libéral, accepte que sa fille change de rôle avec Lisette, afin qu'elle puisse
ainsi mieux observer son futur mari. Silvia et Lisette échangent donc leurs vêtements et leurs identités
M. Orgon amusé , indique à son fils Mario, que Dorante a eu la même idée et qu'il va se présenter chez
eux déguisé en serviteur. Dorante s'est rebaptisé Bourguignon, tandis que son valet, Arlequin, se fait
passer pour Dorante.
Monsieur Orgon et son fils, Mario, qui seuls connaissent le stratagème des quatre jeunes gens, se taisent
et décident de laisser ses chances au jeu de l’amour et du hasard .
Silvia, bien décidée à sonder son futur prétendant, est rapidement troublée par Bourguignon. Elle trouve
que ce valet a une belle prestance et beaucoup de distinction. De même le jeune noble est impressionné
par le charme et par la noblesse de caractère de celle qu'il croit être une domestique.
Acte II
Les entrevues entre maîtres et valets déguisés sont autant de quiproquos. Silvia et Dorante s’étonnent
d’être sensibles aux charmes de personnes de rang social inférieur. De leur côté Lisette et Arlequin
profitent de leur nouveau statut pour séduire celui ou celle qu’ils prennent pour un maître ou une
maîtresse. Lisette avoue même à Orgon, le père de Silvia, qu'Arlequin qu'elle prend pour Dorante, n'est
pas insensible à ses avances. Avec beaucoup d'esprit, Orgon autorise Lisette à se faire aimer d'Arlequin.
Ce jeu de rôles ne serait qu'un simple divertissement s'il ne touchait les protagonistes dans leur amour
propre. Silvia et Dorante sont en effet troublés d'éprouver un tendre attachement pour des valets. En plus
lorsque Silvia réalise que sa servante gagne les faveurs d'Arlequin/Dorante, elle se sent atteinte dans sa
fierté.
Lorsque Silvia apprend enfin de Dorante, qui n'en peut plus, sa véritable identité, elle éprouve un vif
soulagement. Triomphante, elle décide toutefois, de ne pas se dévoiler, et de poursuivre le jeu à sa guise.
Acte III
Silvia, son père et son frère vont maintenant agir tous les trois de concert. Dorante , lui est perturbé. Il
autorise son valet à épouser celle qu'il croit encore être Silvia. La vraie Silvia, elle, profite de la situation
pour essayer d'obtenir de Dorante la preuve de son amour. Elle voudrait qu'il aille jusqu'à demander en
mariage celle qu’il croit encore être une femme de chambre. Aidée de son frère Mario qui excite la
jalousie de Dorante, Silvia triomphe finalement de celui-ci. Jaloux, désespéré, il est prêt à s'enfuir. C'est
ce qui pousse Silvia à lui avouer enfin son amour et sa véritable identité. Après les jeux de masques et du
hasard, tout rentre dans l'ordre : Arlequin et Lisette, démasqués se jurent, malgré leur désillusion, un
amour éternel. Tout se termine dans la joie par une dernière pitrerie d'Arlequin.
2. TEXTE DE LA SCÈNE JOUÉE PAR LYDIA – FRIDA- RACHID (KRIMO)
SCÈNE 5 - ARLEQUIN, LISETTE
ARLEQUIN
Ah ! Madame, sans lui j'allais vous dire de belles choses, et je n'en trouverai plus que de communes à
cette heure, hormis mon amour qui est extraordinaire ; mais à propos de mon amour, quand est-ce que le
vôtre lui tiendra compagnie ?
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LISETTE
Il faut espérer que cela viendra.
ARLEQUIN
Et croyez-vous que cela vienne ?
LISETTE
La question est vive ; savez-vous bien que vous m'embarrassez ?
ARLEQUIN
Que voulez-vous ? Je brûle, et je crie au feu.
LISETTE
S'il m'était permis de m'expliquer si vite.
ARLEQUIN
Je suis du sentiment que vous le pouvez en conscience.
LISETTE
La retenue de mon sexe ne le veut pas.
ARLEQUIN
Ce n'est donc pas la retenue d'à présent qui donne bien d'autres permissions.
LISETTE
Mais, que me demandez-vous ?
ARLEQUIN
Dites-moi un petit brin que vous m'aimez ; tenez je vous aime moi, faites l'écho, répétez Princesse.
LISETTE
Quel insatiable ! eh bien, Monsieur, je vous aime.
ARLEQUIN
Eh bien, Madame, je me meurs ; mon bonheur me confond, j'ai peur d'en courir les
champs ; vous m'aimez, cela est admirable !
LISETTE
J'aurais lieu à mon tour d'être étonnée de la promptitude de votre hommage ; peut-être
m'aimerez-vous moins quand nous nous connaîtrons mieux.
ARLEQUIN
Ah, Madame, quand nous en serons là, j'y perdrai beaucoup, il y aura bien à décompter.
LISETTE
Vous me croyez plus de qualités que je n'en ai.
ARLEQUIN
Et vous Madame, vous ne savez pas les miennes ; et je ne devrais vous parler qu'à
genoux.
LISETTE
Souvenez-vous qu'on n'est pas les maîtres de son sort.
ARLEQUIN
Les pères et mères font tout à leur tête.
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LISETTE
Pour moi, mon coeur vous aurait choisi dans quelque état que vous eussiez été.
ARLEQUIN
Il a beau jeu pour me choisir encore.
LISETTE
Puis-je me flatter que vous êtes de même à mon égard ?
ARLEQUIN
Hélas, quand vous ne seriez que Perrette ou Margot, quand je vous aurais vue le martinet à la main
descendre à la cave, vous auriez toujours été ma Princesse.
LISETTE
Puissent de si beaux sentiments être durables !
ARLEQUIN
Pour les fortifier de part et d'autre jurons-nous de nous aimer toujours en dépit de toutes les fautes
d'orthographe que vous aurez faites sur mon compte.
LISETTE
J'ai plus d'intérêt à ce serment-là que vous, et je le fais de tout mon coeur.
ARLEQUIN se met à genoux.
Votre bonté m'éblouit, et je me prosterne devant elle.
LISETTE
Arrêtez-vous, je ne saurais vous souffrir dans cette posture-là, je serais ridicule de vous y laisser ; levezvous. Voilà encore quelqu'un.
SCÈNE 6 - LISETTE, ARLEQUIN, SILVIA
LISETTE
Que voulez-vous lisette ?
SILVIA
J'aurais à vous parler, Madame.
ARLEQUIN
Ne voilà-t-il pas ! Eh ma mie revenez dans un quart d'heure, allez, les femmes de chambre de mon pays
n'entrent point qu'on ne les appelle
SILVIA
Monsieur, il faut que je parle à Madame.
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7. PISTES PÉDAGOGIQUES COMPLÉMENTAIRES
Dossier des Grignoux. ( possibilité de commander le dossier sur le site de l'association)
http://www.grignoux.be/
1. IMAGES DE LA CITÉ:
1. Confronter les images que les élèves ont de la cité ( par le biais de médias par exemple) à celle
donnée dans le film.
Découvrir les intentions de l'auteur: Quels sont les partis pris du réalisateur ?
– Décrire les sentiments de jeunes, montrer les relations amoureuses en montrant leur permanence
quelque soit l'époque et la société...
– Décrire la vie quotidienne dans la cité aujourd'hui ( occupation, relations entre filles et garçons,
relation avec l'institution -école; police; parents...)
– Casser les clichés que nous avons de la vie dans les cités...
–
–
2. Etude du langage.
Quel rôle tient-il dans la langue adoptée par les jeunes des cités ?
Citez des moments ou un personnage utilise des niveau de langue différents..
2. THÉÂTRE ET THÉÂTRALITÉ.
Développer le thème du costume/ déguisement.
1. Doit-on forcément revêtir un costume pour jouer un rôle?
2. Costume et déguisement: quelles différences? ( Krimo ne se déguise-t-il pas? ...alors que Lydia
porte un costume?)
Le théâtre à l'école:
1. Qu'apporte le jeu théâtral aux élèves?
2. Le théâtre: une activité pour les filles ?
La scène de théâtre.
1. En quoi le lieu de répétition des jeunes est-il « théâtral »?
2. En quoi la cité elle-même est-elle un « théâtre »?
3. LE CHOIX DU TITRE, LE CHOIX DE LA PIÈCE
Expliquez le choix du titre.
1. A quel moment est-il question d'esquive ? ( Lydia, quand elle répète avec Krimo mais ausssi à
travers son refus de donner une réponse à sa demande )
2. Krimo lui-même ne pratique-t-il pas l'esquive? (Dès la fin de la première scène, il s'esquive et le
titre s'inscrit sur lui à l'image/ quand il quitte la classe suite à son échec / quand il reste derrière la
vitre et part avant la fin de la représentation ).
Le choix de la pièce:
1. Le choix de la pièce n'est pas un « hasard »... En quoi le thème de la pièce trouve-t-il son double
dans le récit du film? ( les codes, les intrigues amoureuses, le stratagème de Krimo, puis celui de
Fathi, les obstacles au désir amoureux....)
2. Dites en quoi ce que dit Marivaux ( voir ci-dessous) s'applique à l'intrigue du film
3. Pourriez-vous tirer « une morale » à ce film?
Au sujet de son œuvre, Marivaux écrit:
"J'ai guetté dans le cœur humain, toutes les niches différentes où peut se cacher l'amour lorsqu'il craint
de se montrer, et chacune de mes comédies a pour objet de le faire sortir d'une de ses niches…..
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Dans mes pièces, c'est tantôt un amour ignoré des deux amants:; tantôt un amour qu'ils sentent et qu'ils
veulent se cacher l'un à l'autre; tantôt un amour timide qui n'ose se déclarer; tantôt enfin, un amour
incertain et comme indécis, un amour à demi-né, pour ainsi dire, dont ils se doutent, sans en être bien
sûrs et qu'ils épient au-dedans d'eux-mêmes avant de lui laisser prendre l'essor."
Le personnage de Krimo:
1. En quoi tient-il une place privilégiée dans le film?
2. Le rêve de Krimo? Sa relation amoureuse? Son comportement social ?
3. Ses ressentiments à la fin du film?
4. ETUDE DE L'AFFICHE
L'analyse avant le film pourrait se faire en présence du résumé du film afin d'y apporter quelques
éléments d'interprétation. On pourra s'arrêter sur le rapport qu'elle entretien avec le sujet. ( comparaison
avec celle de « La Haine » de M Kassovitz
–
–
–
–
Présence des deux personnages principaux en gros plan. Renvoi aux cadres du films constitués en
grande majorité de cadres très serrés et à la thématique du film centrée plus sur les relations entre les
individus que sur l'environnement social et la Cité.
Dynamisme du visage de Lydia ( extériorisation du personnage) qui contraste avec le regard vague de
Krimo sur le hors champ ( inhibition, absence du personnage) ....deux personnalités antagonistes.
La police du titre en noir légèrement destructurée....cassures, ruptures....on peut également faire le
rapprochement après coup avec l'état du fascicule ( « le jeu de l'amour et du hasard ») qui sort de la
poche de Frida lors de l'intervention policière....
Présence en bas de l'affiche du personnage en costume du XVII ème, dans une gestuelle affectée.
Rappel de la thématique du film en rapport avec le titre.
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8. SITES À CONSULTER
Critiques:
http://www.fluctuat.net/1283-L-Esquive-Abdellatif-Kechiche
http://archive.filmdeculte.com/film/film.php?id=721
http://www.alsace-cinemas.org/IMG/pdf/esquive.pdf
Fiche « Le France »
http://www.arte.tv/fr/cinema-fiction/cinema-sur-ARTE/cette-semaine/L-esquive/1670004.html
http://www.cahiersducinema.com/article1406.html
http://www.telerama.fr/cine/film.php?id=146246&onglet=critique
http://ecrits-vains.com/cinema/raucy45.htm
http://www.ac-versailles.fr/PEDAGOGI/ses/outils/films/menu_esquive.html
réflexions. Echange entre un prof de français et le réalisateur. article de Télérama
http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=18359063&cfilm=48230.html
Bande annonce, extrait interview réalisateur et actrice ( Sarah Forestier) aux césars.
http://www.cinehig.clionautes.org/article.php3?id_article=335
séquence
http://ww2.ac-poitiers.fr/daac/spip.php?article182
Fiches pédagogiques pour élèves
http://www.lesinrocks.com/index.php?id=67&tx_article[notule]=198075&cHash=2088f1db18
Entretien avec le réalisateur
Yves Maussion
Coordinateur Cinéma audiovisuel
Action Culturelle
Rectorat de Nantes
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