« Lorsque j`étais enfant, je parlais comme un enfant, je pensais
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« Lorsque j`étais enfant, je parlais comme un enfant, je pensais
Homélie du dimanche 19 juin 2016 12ème dimanche du temps ordinaire de l’année C (Le style oral a été conservé) Par le Frère Jean Chers frères et sœurs, Nous avons reçu la foi au jour de notre Baptême comme le grand don de notre vie. Devenus adultes -et on n’a jamais fini de le devenir- nous nous sommes appropriés cette foi. Nous pouvons faire notre cette phrase de l’apôtre Paul : « Lorsque j’étais enfant, je parlais comme un enfant, je pensais comme un enfant, je raisonnais comme un enfant », ‘j’avais une foi d’enfant’, peut-on ajouter« Devenu homme j’ai mis fin à ce qui était propre à l’enfant » et je suis entré en Église dans une foi adulte. La foi de l’enfant, en effet, est en attente d’une foi adulte. C’est pourquoi, frères et sœurs, la question de Jésus à ses apôtres aujourd’hui a toute sa pertinence pour nous aussi. Toi qui es adulte, toi qui portes le nom de chrétien, pour toi qui suis-je ? La question est essentielle, on pourrait la formuler autrement : Suis-Je pour toi « un modèle », « un homme sage, « une valeur », comme disent bien des gens, suis-Je pour toi ce pour quoi le Père m’a envoyé : Le Chemin, la Vérité, la Vie ; le Fils du Dieu vivant, celui qui a donné sa vie pour toi ! Oui ! Parce que la Personne divine de Jésus n’est pas renfermée, enclose dans son humanité particulière, cette Personne divine peut entrer au plus intime des hommes qu’elle rencontre. « Père je veux qu’ils soient en moi et comme tu es en moi. » Par contre Jésus reste impénétrable à ceux qui veulent le sonder comme un individu, ainsi dans les Évangiles, nous voyons Jésus rester muet devant la curiosité d’Hérode; il espérait, lit-on dans l’Évangile de Luc, Hérode espérait lui voir faire quelque miracle, « il l’interrogeait avec force paroles, mais Jésus ne lui répondit rien. » Oui Jésus demeure impénétrable à toutes les tentatives d’analyse psychologique de sa personnalité car le sujet du Christ n’est pas humain ; le « Je » du Christ, c’est le « Je » de Dieu, c’est le Moi divin ! Jésus, ne peut être connu en profondeur qu’au sein de sa relation au Père, dans sa communion avec Lui dans l’Esprit Saint, où Il existe en Dieu comme Personne trinitaire. Jésus ne peut être connu que dans sa relation au Père qui est à l’origine de sa Personne elle-même. « Si vous me connaissiez, dit Jésus, vous connaitriez aussi mon Père » et ailleurs Il dira encore : « Nul ne connaît le Père si ce n’est le Fils et celui à qui le Fils veut bien le révéler. » La Personne divine du Fils unique de Dieu ne fait pas nombre avec nos personnes individuelles créées, nous voyons Jésus recensé à Bethléem à l’heure de sa naissance, car Il a une humanité particulière comme la nôtre mais cette humanité est absolument unique et transcendante, c’est l’humanité du Fils de Dieu fait Homme, consubstantiel au Père et au Saint-Esprit. Pour vous qui suis-je ? C’est dans ce contexte que retentit la question posée par Jésus. Si Jésus nous pose cette question, comme Il l’a posée à ses apôtres, cette question n’est pas un piège, c’est en vue d’un sursaut de foi de notre part ; Jésus en nous interpellant ainsi nous attire vers le haut, Il n’attend pas de nous une réponse facile, une réponse toute faite. « Vous tous par le Baptême, nous a rappelé Paul dans la lettre aux Galates, vous avez été unis au Christ, vous avez revêtu le Christ ! » Pesons, toute la densité de cette Parole : « Vous avez revêtus le Christ » et St Paul nous dit ailleurs que « Dieu nous a élus dans son Fils dès avant la fondation du monde » ; l’élection précède notre création; Dieu nous a personnellement aimés avant de nous créer, ou plus exactement « Il nous a créés parce qu’il nous aimait de toute éternité ». Cela veut dire que nous sommes créés parce que nous sommes élus, nous sommes chacun de nous, individuellement, désirés par Dieu, et cela est important de nous le rappeler -nous sommes ici absolument à l’opposé de la pensée janséniste. Un célèbre marseillais du Vème siècle, St Salvien, écrivait : « Dieu a un tel soin de ses créatures avant même de les créer, Il n’aurait rien créé si avant la création Il n’avait pas eu le souci de créer ». Oui, de même que Dieu nous a créé chacun, librement et par amour, nous sommes appelés à le choisir à notre tour et à le suivre, librement et par amour ; s’il y a une chose qui ne peut absolument pas être imposée, c’est bien la foi, mais par contre elle doit être continuellement proposée. Pour pouvoir choisir il faut connaître, d’où le sophisme des personnes qui disent : « Moi, je ne fais pas baptiser mon enfant pour qu’il puisse librement choisir sa religion lorsqu’il sera grand »… Comment pourra-t-il choisir une Personne qu’il n’a jamais connue et dont on ne lui a jamais parlé ? Toute demande de Dieu à l’homme est toujours un « veux-tu ? », ni contrainte, ni nécessité dans cette adhésion de l’homme à Dieu. Pour être vraiment libre, nous le savons, il faut accepter de se lier, c’est là tout le sens de l’engagement, en particulier de l’engagement chrétien. Penser que la liberté c’est être affranchi de tout conditionnement, de tout engagement est un leurre… Jésus n’est jamais aussi libre que lorsqu’Il est cloué à la croix ! Par le Baptême et la Confirmation, nous sommes, nous a rappelé Paul, « un dans le Christ ». L’unité donnée par notre adhésion au Christ dans l’Église n’est pas synonyme d’uniformité. Dans le Christ « unité » se conjugue parfaitement bien avec « diversité ». Cela n’est pas étonnant puisque nous sommes créés à l’image et à la ressemblance d’un Dieu qui est un et trois, en qui la communion des trois Personnes joue avec l’unité de chacune de ces Personnes. Tous, vous ne faites qu’un dans le Christ Jésus, revêtus du Christ, frères et sœurs, nous allons participer dans cette Eucharistie au festin des noces de l’Agneau ; prenons à nouveau conscience de la beauté et de la dignité de notre nom de chrétien et vivons avec la grâce de Dieu dans l’Esprit-Saint, ce que nous allons professer dans quelques instants dans le Credo, Amen.