Google mécanique - Stratégies Emploi

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Google mécanique - Stratégies Emploi
Google mécanique
internet
13/02/2014 Quand une agence d’e-réputation rémunère des internautes sur le Turc mécanique d'Amazon, afin qu’ils tapent des requêtes sur Google et
discréditent une blogueuse, cela donne un cas d’école. Explications.
Payer des internautes, installés à l'autre bout du monde, pour qu'ils salissent la réputation d'un adversaire ou d'un concurrent sur internet...
l'idée peut sembler saugrenue mais, dans l'univers impitoyable du Web, elle est courue. La preuve avec la mésaventure survenue à Sophie
Gourion, une rédactrice Web, trentenaire, qui tient un blog, plutôt féministe, baptisé «Tout à l'ego». «Le 21 janvier, j'ai reçu un mail pour me
prévenir que quelqu'un avait posté une commande sur le Turc mécanique d'Amazon demandant aux internautes de taper sur Google “Sophie
Gourion malhonnête”», relate la blogueuse, encore un peu sous le choc.
Le Turc mécanique d'Amazon (Mechanical turk), c'est une place de marché, créée en 2005, sur laquelle on peut soumettre des micro-tâches.
Son nom fait référence à un canular célèbre, qui date du XVIIIe siècle, dans lequel un prétendu automate jouait aux échecs. Le Turc
mécanique d'Amazon n'a, lui, rien d'un canular: sur la place de marché, les services sont bien réels et rémunérés entre 1 cent et 1 dollar (0,73
euro). Les missions proposées sont très éclectiques: répondre à des questionnaires, décrire une photo, légender une vidéo...
Toutes les tâches que les robots peinent à réaliser tout seuls, en particulier la reconnaissance d'image, car elle reste problématique pour les
moteurs de recherche. Autres missions: juger et noter des articles ou des fiches descriptives de produits.
Avant de pouvoir utiliser la plateforme, il faut remplir un questionnaire, et tout le monde n'est pas accepté. Un premier filtre, donc, mais qui
n'empêche pas les internautes de recourir à des pratiques limites. Et donc, des petits malins mal intentionnés utilisent le Turc mécanique dans
une campagne de dénigrement pour gâter une e-réputation et mieux faire ressortir la sienne, par contrecoup. C'est ce qui s'est passé pour
Sophie Gourion, qui avait eu des échanges vifs avec un blogueur, après avoir dénoncé ses propos misogynes publiés sur un blog donnant
des conseils de drague.
En réaction, l'agence d'e-réputation gérant ce blog a donc acheté des requêtes sur le Turc mécanique contre Sophie Gourion. Comme le
pot-aux-roses a été découvert, l'agence a été obligée de retirer sa demande sur la plateforme d'Amazon. Mais cette forme de «Google
bombing» (bombardement Google), beaucoup utilisée au moment des élections pour discréditer les adversaires électoraux, aurait suffi pour
entacher la réputation d'une blogueuse, en faisant remonter des mots clés défavorables dans les suggestions de Google.
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