hida tombeau des lucioles

Transcription

hida tombeau des lucioles
Le Tombeau des Lucioles
Etude du pré-générique
L’œuvre
Dessin animé japonais d’Isao Takahata, 1989 (1h25),d’après une nouvelle d’Akiyuki Nosaka (1967)
Un Manga , ou un « anim »
> Sens étymologique du mot japonais « manga » : « image dérisoire » ou « dessin non abouti ». Le
mot « manga » est dû au peintre Hokusaï (chez qui on le traduira plutôt par « esquisse spontanée »)
> Au Japon, succès des mangas dès la fin de la seconde guerre mondiale (format poche, noir et
blanc). Apparition du manga en France dans les années 1990, avec Dragon Ball, largement diffusé
(mangas papier et dessins animés).
> Au cinéma, on parle d’ « anims ».
> Les deux plus grands réalisateurs d’anims actuellement : Hayao Miyasaki et Isao Takahata. Se
rencontrent dans les années 60, vont donner au manga ses lettres de noblesses, en soignant
particulièrement les graphismes, en donnant de la profondeur à leurs personnages et de la
consistance à leurs récits. Fondent le studio Ghibli (Miyazaki : Nausicaa, Mon voisin Totoro, Princesse
Mononoké, Le Voyage de Chihiro, … ; Takahata : Pompoko, Mes Voisins les Yamada, …)
Le contexte historique
> La nouvelle d’Akiyuki Nosaka, « La Tombe des lucioles », est un récit autobiographique : il s’inspire
des événements vécus peu avant le dénouement de la seconde guerre mondiale : mort de ses
parents adoptifs sous les bombardements américains, mort de sa sœur adoptive (malnutrition).
> Source : http://site-image.eu/index.php?page=film&id=234&partie=placeOeuvre:
Le Japon de 1945
Il est certain que la politique de conquête menée dès le tournant du XXe siècle par le Japon, seule nation de
cette région du monde à avoir su échapper à l'époque au colonialisme dévorant des puissances occidentales,
prend elle-même d'emblée un tour colonial. Victoire sur la Russie en 1905, annexion de la Corée en 1910,
attaque des territoires chinois concédés à l'Allemagne en 1914 et récupération des concessions allemandes en
Chine et dans le Pacifique en 1919, prise de la Mandchourie en 1931 et poursuite d'un processus de conquête
tout au long des années suivantes, objectif fixé en 1938 de la création d'une très large "Sphère de co-prospérité
de la Grande Asie orientale", telles sont les d'étapes bien connues de cette expansion à long terme. On connaît
souvent tout aussi bien les grandes étapes de la Guerre du Pacifique : l'occupation de pays d'Asie du Sud-Est et
du Pacifique dès 1940, l'attaque surprise sur Pearl Harbour le 7 décembre 1941, la bataille de Midway, perdue
en juin 1942 et qui marque le début d'un renversement progressif de situation face aux États-Unis, la chute de
Leyte (aux Philippines) en octobre 1944, et jusqu'aux bombardements atomiques d'août 1945. Deux réalités
japonaises de cette période restent souvent moins largement connues : celle des bombardements
“conventionnels“ à engins incendiaires, et celle, presque aussi noire, des “années zéro” de l'après-guerre.
Les bombardements
Le Japon de 1945, dès avant la reddition d'août, est littéralement un pays en ruine. De mars à mai, les bombes
incendiaires américaines pleuvent les 23 plus importantes villes de l'archipel faisant quantité de victimes civiles.
C'est durant les neuf derniers mois de la guerre que le Japon enregistre 60% des pertes humaines de toute la
guerre, soit près de 900 000 militaires et plus de 600 000 civils. Ainsi donc, avant même le cauchemar atomique
qui s'abattra en août 1945 sur Hiroshima puis Nagasaki, les civils japonais furent victimes par centaines de
milliers de bombardements massifs, acharnés, tels que les décrit le film.
Nuit de l'après-guerre
La réalité du Japon à sa capitulation est celle d'un pays défait, un néant souvent difficile à imaginer pour
l'observateur étranger entraîné au cœur des métropoles en ruines. On l'a souvent décrite par des formules
établies, telle celle "des ruines et du marché noir". Comme chez tous les vaincus, un autre terme, plus
laconique, peut résumer tout aussi bien la première préoccupation de tous dans la misère noire de l'immédiat
après-guerre : “survivre”.
Analyse du pré-générique du film.
Le pré-générique : une introduction au film, un condensé des thèmes et des images que l’on rencontrera dans
le film.
> Voici un des plans proposés en classe pour l’étude de cet extrait :
I. Un monde difficile
1) UN PAYS EN GUERRE
Contexte historique (Japon, septembre 1945) : rappel de la situation. Américains contre Japonais. Blocus du Japon par
les Américains, bombes incendiaires sur Kobé, pertes civiles… (Voir ci-dessus)
2)
LA MORT DE DEUX ENFANTS
Setsuko, 4 ans et Seita 14 ans. Elle est morte de malnutrition, tout comme lui. Ironie : la boite de bonbons, seule chose
qui reste (temps d’avant, de l’enfance, …) devient une urne contenant les restes de la petite fille (elle contient des
ossements). Lui très sale, maigre, dénutri, seul. Trivialité de cette mort (corps détaillé par un lent travelling, plusieurs
plans), insecte.
3)
UNE MORT BANALISÉE/ L’INDIFFÉRENCE
Dans une gare, lieu de passage où les gens se croisent, beaucoup de monde, mais aucun regard sur le garçon, qui
provoque le dégoût plutôt que la pitié ou la compassion. Les hommes qui entretiennent la gare le touchent du bout de
leur balai, comme un quelconque déchet. Banalité de cette mort, on voit qu’il est un parmi tant d’autres… Pourtant une
femme lui dépose des boulettes de riz… Mais cette aide vient trop tard : nouvelle ironie.
II. La Traversée
1) A LA FRONTIÈRE
DE LA MORT
Entre deux mondes : le garçon est à l’agonie. Deux images de lui se
superposent : un « fantôme » regarde son agonie, assiste à sa propre
mort ; il se souvient : on entend la voix-off raconter : « La nuit du 21
septembre 1945, je suis mort… ».
Dans cet entre-deux, la petite fille Setsuko, renait littéralement de ses cendres ; on assiste aux retrouvailles des deux
enfants dans un ailleurs.
2)
LE PASSAGE
Symbolique du passage omniprésente : métaphore du train, par exemple. Train qui emmène ailleurs : ils sont seuls
dans un wagon, disparaissent dans un tunnel. Devenus spectateurs du monde : Setsuko assiste, de loin, à la mort de
son frère ; à travers les vitres du train, ils voient les bombes incendiaires s’abattre sur Kobé. Ils ne sont plus de ce
monde.
3)
LE JEU DES COULEURS
Le train comme en négatif : inversion des couleurs (ils sont passés de l’autre côté). Utilisation des couleurs très codée :
le monde des vivants représenté avec des couleurs froides (bleu, noir et blanc), le monde des morts est dans des
teintes chaudes, la couleur de base est le rouge. Rencontre de ces deux mondes au début, lorsque se superposent les
deux silhouettes du garçon.
III. Le fil rouge
1) LE ROUGE ET LA MORT
Le rouge est la couleur de l’autre monde dans cet extrait, et dans le film en général : Setsuko vivante : manteau bleu,
qui apparait rouge dans tout le pré-générique et le générique. On pourra dérouler ce « fil rouge » pendant tout le
film : indice d’un passage, toujours lié à la mort. Mort qui n’est pas violente ici, ce rouge n’est pas celui du sang (dans
la symbolique japonaise, le rouge a une connotation positive).
2)
LES LUCIOLES ET LA BOITE
La boite, rouge aussi, est très porteuse de sens : boite de bonbons, connotation très positive liée au plaisir de
l’enfance, à l’abondance et à l’insouciance. Elle nous apparait rouillée, dégradée ; devenue une urne de laquelle
s’échappent de petits ossements (ceux de la fillette). Entre les mains de Seita, elle redevient intacte.
Cette boite ramène la vie : des lucioles s’en échappent, on entend une petite musique enfantine (qui fait penser à une
boite à musique), et la fillette se relève, souriante. On retrouve cette boite dans le train, lorsque les enfants, au cours
de leur « voyage », partagent avec plaisir des bonbons.
La petite fille est assimilée aux lucioles, petit être fragile et éphémère. Cela nous ramène au titre, tragique.

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