Marie Diaz, loin du Forez, si près du cœur
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Marie Diaz, loin du Forez, si près du cœur
Portrait d’illustrateur Rennes Marie Diaz, loin du Forez, si près du cœur © Marie Diaz « Trois de mes grands-parents étaient d’origine espagnole, venus en France avec l’exil économique des années 1920-1930. Nous habitions dans le Forez. Pour moi, la Bretagne correspond à un désir ancien. À cause des vacances, de l’océan, des sentiers douaniers, de la richesse culturelle, l’archéologie, la musique. Et puis, la vie a fait que... Je suis issue d’une famille d’enseignants. Chez nous, les livres avaient une valeur immense. C’était la région de Saint-Étienne, aussi, avec tout un arrière-plan ouvrier et la chance de faire autre chose de sa vie. Raconter pour ceux qui n’ont pas eu le bonheur qu’on leur raconte des histoires. Oui, mes parents lisaient, nous emmenaient dans les musées, au cinéma et en voyage. Je suis le produit type de l’ascension sociale de la classe moyenne en France. Mes parents mettaient audessus de tout la culture, l’humain et la nature. » Au lycée, Marie Diaz est une bonne élève. Pourtant, elle n’aime pas l’école. « Je m’y sentais emprisonnée, l’imaginaire étouffé, menacée dans mon individualité, forcée de m’adapter à la norme. L’ennui mortel. La création a été pour moi une rébellion permanente contre ce conformisme de la société ! » La porte de sortie, ce sera l’école d’art graphique Émile-Cohl, à Lyon. « Je n’aurais même pas osé en rêver ! » Elle y côtoie d’autres dessinateurs, tout aussi passionnés et inadaptés qu’elle à la rigueur scolaire. Avec un bac littéraire et trois ans © Marie Diaz 10 © Marie Diaz d’études spécialisées qui lui donnent un bon bagage technique, Marie peut se jeter à l’eau. « C’est un combat qui commence, pour prendre confiance en soi, pour se trouver un style, pour exister auprès des éditeurs. » Âgée d’à peine 21 ans, Marie Diaz part aux États-Unis, à Disney World, où elle exécute des portraits, où elle apprend la langue. « Ce n’est pas très glorieux, comme travail. » Mais un brin initiatique, sans doute. « J’étais perdue dans ce désert culturel, cette machine économique à broyer de l’humain. En Floride, je ne rêvais que de Bretagne. » Au retour, en 1996, Marie a 23 ans. Elle trouve à se faire éditer aux éditions Magnard, où elle illustre un roman jeunesse et des ouvrages destinés aux écoles. « J’ai d’abord répondu à des commandes pour illustrer des romans jeunesse, dont Le Souffle de la Pierre d’Irlande, d’Éric Simard, devenu ensuite un ami. Puis les éditeurs ont compris que les contes étaient ma grande source d’inspiration. » Sa version illustrée de Barbe-Bleue connaît un grand succès. Les premières créations originales se font en parallèle, comme l’album qui édite des ouvrages en langue bretonne pour le secteur éducatif. » Le conte Olf Nita hag Avel ar C’hreisteiz vient de sortir, un recueil de comptines accompagné d’un CD. « Je suis heureuse d’avoir vu La Reine des glaces traduit en basque, en castillan et en catalan. J’ai envie d’aller vers l’oralité, aussi. Je travaille dans ce sens avec la conteuse écossaise Fiona Macleod. J’ai envie de peindre. Et une grande partie de mon travail, ce sont les interventions, de la primaire au collège. Cette mission de transmission est importante pour moi. C’est un contrepoint nécessaire, qui donne du sens à mon travail, et étant donné l’ambiance très tendue qu’il y a dans les écoles en ce moment, ça apporte de la fraîcheur. Et puis, il faut reconnaître que c’est en grande partie cela qui me fait vivre. Pourtant, en tant que fille d’enseignant, je n’avais pas du tout prévu de faire ça. Mais quand on voit les yeux qui s’allument… » Marie Diaz propose également des expositions qui peuvent être louées par des bibliothèques et des établissements scolaires, montrant les différentes étapes de la création d’un livre illustré. Elle se déplace pour les accompagner et les présenter aux écoliers. http://mariediazillustratrice.blogspot.com http://repertoire.la-charte.fr/repertoire/i254-mariediaz Bibliographie sélective : Flanagan et la baleine, Magnard, 1998 © Marie Diaz Se définissant comme un pur produit de l’ascension sociale des classes moyennes, Marie Diaz mesure sa chance d’exercer le métier qu’elle aime. Cela ne l’empêche pas d’explorer de nouveaux univers, dont celui de la langue et de la culture bretonnes. Flanagan et la baleine, écrit et illustré, conte né d’un os de baleine trouvé sur une plage de la baie de Galway… Et puis, quelque chose l’attire depuis toujours… « Les langues. L’anglais est ma langue magique, venue, je crois, de mes premiers éblouissements de fiction, Mary Poppins, Peter Pan et le Charlie et la Chocolaterie de Roald Dahl. Malheureusement, il n’y a pas eu de transmission familiale de l’espagnol. Sans doute à cause d’un désir d’intégration. Aujourd’hui, je prends des cours du soir de breton. C’est une volonté militante qui m’a poussée à contacter TES, La Grande Récolte des potirouillons, illustrateur : S. Couillerot, Magnard, 2000 Le Grand Départ de Flanagan, Magnard, 2000 Barbe-Bleue, auteur : Charles Perrault, Magnard, 2003 Le Voleur de saisons, auteur : Marie-Nathalie Quaranta, Pemf, 2004 Les Baguettes d’ivoire, auteur : Didier Dufresne, Bilboquet, conte, 2004 La Fille du rajah, conteur : France Alessi, Bilboquet, 2005 La Tapisserie de soie, auteur : Didier Dufresne, Vilo Jeunesse, conte, 2007 Les Orangers de Tahiti, auteur : Roxane-Marie Galliez, Balivernes Éditions, conte, 2008 La Reine des glaces, illustrateur : Miss Clara, Gautier-Languereau, un conte d’Andersen adapté par Marie Diaz, 2010 Olf Nita hag Avel ar C’hreisteiz, texte de Chantal de Marolles, éditions TES-CRDP, 2011