Dossier Marguette Bouvier
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Dossier Marguette Bouvier
EXPOSITION MARGUETTE BOUVIER : une plume au service du Valais Médiathèque Valais - Sion Du 5 au 29 octobre 2011 1 MARGUETTE BOUVIER (1908(1908- 2008) : UNE PLUME AU SERVICE DU VALAIS Les années d’insouciance Marguette Bouvier est née, de parents français, le 25 août 1908 à Bénisaf (Algérie). Ancienne élève du peintre Gustave Moreau, sa mère, Geneviève Richard, est miniaturiste. Son père, Maurice Bouvier, ingénieur-agronome, dirige une mine de fer. Il est, également, féru d’alpinisme. Des rêves d’avenir… En 1913, la famille Bouvier décide de s’installer à Chamonix, à proximité de la grandmère paternelle de Marguette, Lucie. Tout juste âgée de cinq ans, la petite Marguette chausse sa première paire de skis et découvre la Mer de glace. C’est le temps de l’insouciance et des premières vocations : « explorer le Mont Blanc et devenir riche en ramassant tous les cristaux! ». A l’âge de 12 ans, son père veut faire d’elle une acrobate équestre. Marguette, elle, rêve de devenir danseuse étoile. Lui s’oppose catégoriquement à cette nouvelle aspiration : une fille de bonne famille ne fait pas carrière dans la danse, cette profession est réservée aux femmes de mœurs légères ! La jeune fille suivra tout de même les cours des Petits Rats à l’Opéra de Paris en cachette sous l’œil complice de sa mère. Les années sportives Le ski décliné sous toutes ses formes En 1924, la jeune femme s’initie au saut à ski. Quatre ans plus tard, soutenue par ses parents, son premier sponsor et fan club, elle participe aux Championnats internationaux de ski à Chamonix. Déçue de terminer la compétition en deuxième position (fond et style), mais non moins abattue, la vice-championne décide de tenter sa chance aux championnats de France de patinage artistique en couple. Mais la « malédiction » se poursuit puisque la sportive se classe à nouveau seconde. 2 Marguette Bouvier n’en démord pas pour autant puisqu’elle continuera la compétition jusqu’en 1935. Une sportive au sommet En 1929, par moins 40 degrés, la passionnée d’alpinisme atteint le sommet du Mont Blanc - là où d’autres s’étaient cassés les dents ; le skieur alpiniste Emil Petersen avait dû rebrousser chemin quelques jours plus tôt. Et Marguette, ce jour-là, entre dans l’Histoire. Elle est, en effet, la première femme à avoir effectué la descente en ski de la célèbre montagne. La vie d’artiste Dès sa jeunesse, Marguette avait côtoyé de grands artistes et auteurs comme Matisse, Rouault, Utrillo, Malraux, Valéry et Claudel. En 1926, la jeune femme assiste à une conférence sur l’écrivain essayiste, John Ruskin, donnée par le compositeur Ignace Paderewski. Et là, sa troisième vocation voit le jour : elle sera critique d’art. En 1928, Marguette entre à l’Ecole du Louvre qu’elle quittera, diplômée, en 1932. Commence alors une longue collaboration avec l’éditeur d’art suisse, Albert Skira, qui durera plus de 20 ans. Son travail lui permet d’accéder au panthéon des artistes et écrivains du XXe siècle : Maillol, Dufy, Bonnard, Vlaminck, Braque, Dalí, Cocteau, Valéry… La jeune reporter publie dans le Journal, le Jour, le Figaro, Panorama et Comoedia. Avec Skira, elle assiste au lancement de la revue surréaliste Minotaure et, dès 1944, écrit six articles dans Labyrinthe où elle signe aux côtés de Giacometti, Eluard et Maurice Chappaz. A la recherche de l’aventure Voler de ses propres ailes L’aventure, Marguette Bouvier y a goûté très tôt puisqu’à l’âge de six ans déjà, elle réalise son baptême de l’air à bord du biplan Farman piloté par son oncle maternel, Paul Richard. A Tindouf, village situé à l’extrémité sud du Maroc, la future aviatrice 3 fait œuvre de pionnière puisqu’elle sera la première civile à se faire déposer dans le désert marocain. En 1936, l’intrépide peut enfin voler de ses propres ailes, son brevet de pilote en poche. Elle peut alors « servir de taxi » à son père, épuisé par de longues cavalcades dans ses champs d’eucalyptus marocains recouvrant quelques 35 mille hectares. De 1934 à 1938, la journaliste publie dans L’Air dix-sept reportages vécus en direct. Un clin d’œil à l’enfance Pour son premier vol en solitaire, Marguette Bouvier décide de relier l’Afrique du Nord à la Vallée du Rhône. Décision hautement symbolique puisque ce périple l’entraînera au cœur des paysages de son enfance. Tous les chemins mènent au Mont Blanc En 1945, elle vit aux côtés de Malraux la libération de Strasbourg, suit les généraux Schlesser et Guillaume, lors des marches sur Colmar et Stuttgart. Ses reportages paraissent dans le Journal de Genève, Servir et La Patrie Suisse. En Autriche, le Commandant en chef, le Général Béthouart, est un ami de jeunesse... connu sur les pistes de ski à Chamonix! Marguette et la Suisse Vers un retour au calme Lassée par cinq guerres (la guerre civile d’Espagne, la guerre d’Indochine, la guerre d’indépendance de l’Algérie et les deux guerres mondiales), Marguette Bouvier aspire à la paix et gagne, en 1955, la Suisse, pays neutre par excellence. Ses années au pays de Dame Helvétie sont riches en productions journalistiques puisque la reporter collabore au Journal de Genève et à la Tribune de Lausanne. A la recherche de l’air vivifiant du Valais Après une brève incursion en Espagne, Marguette Bouvier gagne le Valais à la recherche de l’air vivifiant des Alpes pour soigner l’asthme de sa fille, Cisca. Elle s’installe successivement à Verbier, Chamonix et Sion. La journaliste collabore à la Feuille d’Avis du Valais, au Nouvelliste du Rhône, ainsi qu’à Treize Etoiles et 4 Construire. Entre 1959 et 1964, elle sillonne le Valais central se fixant tantôt à Montana, Sion et Vercorin. En 1965, cette femme en éternel mouvement regagne la plaine sédunoise, tout en effectuant de courts séjours à Paris. Dans les coulisses des grands artistes A la création de la Fondation Pierre Gianadda, Marguette Bouvier s’installe à Martigny, en signe d’amitié pour Léonard Gianadda. En 1978, elle entre, comme collaboratrice régulière, au Confédéré, sous la houlette d’Adolphe Ribordy. A 70 ans, sa plume est toujours aussi vivace et prompte à se mettre au service de l’art. Dans la nouvelle rubrique culturelle qu’elle a créée, la journaliste relate, en effet, les événements organisés par la Fondation Pierre Gianadda. Elle présente aussi les expositions de la Fondation Louis Moret, du Manoir de Martigny et de la plupart des galeries valaisannes. Ses chroniques introduisent le public valaisan dans les coulisses des grands artistes français et espagnols comme Goya, Rodin, Gauguin… Elles accordent, également, une grande place aux artistes suisses et valaisans: Alberto Giacometti, Paul Klee, Hans Erni, Edouard Vallet…. Son activité en faveur de la promotion de l’art ne s’arrête pas à sa production journalistique puisque Marguette organise aussi des conférences à Chamonix, allant jusqu’à coller elle-même les affiches. Un pont culturel entre la plaine de Martigny et la montagne de Chamonix est né. En 2008, quelques mois avant sa mort, une rétrospective sous forme d’exposition lui est d’ailleurs consacrée au musée alpin de Chamonix. Quelques amitiés picturales valaisannes L’activité journalistique de Marguette pour le Confédéré l’a amenée à connaître et fréquenter de nombreux peintres valaisans : Marie Gailland, Michel Favre, André Raboud, Fernand Dubuis, Marie-Antoinette Goret… Parmi eux, elle a tissé de nombreuses amitiés. Petit inventaire non exhaustif de ses rencontres picturales valaisannes : en 1985, la journaliste écrit une série d’articles sur l’art de Suzanne Auber qui expose au Manoir de Martigny. A cette occasion, la femme de lettres entretient une correspondance serrée avec l’artiste peintre qui, pour la remercier, lui offre une de ses compositions. Dans les années huitante toujours, une solide amitié a vu le jour entre Marguette et le peintre sculpteur, Angel Duarte. Tous deux 5 partagent le même attachement pour l’Espagne. La critique d’art admire, également, le coup de pinceau de Pierre Loye qui porte un regard perspicace sur le monde et l’actualité comme elle le soulignera dans une de ses chroniques pour le Confédéré : « sa peinture est une série de constats devant notre société éperdue de consommation ». Quant au peintre Michel Bernheim, elle lui consacre de nombreux articles dont un évoque son passage « de la haute couture à la peinture 1». 1 Titre donné à l’un de ses articles sur Bernheim pour « La Femme d'aujourd'hui », 26 octobre 1988. 6 Quelques dates clé 25 août 1908 : naissance de Marguette Bouvier à Bénisaf en Algérie 26 janvier 1910 : naissance de sa sœur, Hélène 1913 : déménagement à Chamonix, premiers cours de ski 1914 : installation à Paris, baptême de l’air à bord du biplan Farman avec, aux commandes, son oncle maternel, Paul Richard 1917 : rencontre avec le peintre, Henri Matisse 1924 : rencontre avec le futur alpiniste-romancier, Frison-Roche, qui fut le responsable de la coordination des premiers Jeux Olympiques d’hiver qui se déroulèrent à Chamonix 1926 : assiste à la conférence sur l’écrivain essayiste, John Ruskin, donnée par le compositeur Ignace Paderewski et décide de devenir critique d’art 1927 : couverture de l’arrivée, en avion, de l’Américain Charles Lindberg au Bourget, près de Paris 1928 : entrée à l’Ecole du Louvre, participation aux championnats internationaux de ski à Chamonix, Marguette est classée deuxième. Pigiste à la rubrique sportive au quotidien, Le Journal, qui marque le début de son activité journalistique 1929 : ascension du Mont Blanc, Marguette est la première femme à avoir effectué la descente en ski de la célèbre montagne 1930 : rencontre avec le peintre, Salvador Dalí, en Espagne, classée seconde aux championnats internationaux de ski au Mont Genèvre 1931 : rencontre à Paris avec l’écrivain français, André Malraux 1932 : diplômée de l’Ecole du Louvre, participation au lancement de la revue surréaliste Minotaure, aux côtés de Skira, Breton et Eluard 1933 : collaboration avec le Daily Mail 1934 : début d’une collaboration de cinq ans à la revue L’Air, journaliste au Figaro, première civile à se faire déposer dans le désert marocain 1935 : chroniqueuse artistique pour Comoedia, rencontre avec le peintre et sculpteur espagnol, Joan Miró, et le poète espagnol, Federico García Lorca 1936 : obtient son brevet de pilote 1937 : rencontre avec l’artiste-exploratrice, Ella Maillart, et l’écrivain français, Jean Cocteau 7 1938-1939 : mariage avec Jean Wilmès, secrétaire de rédaction de la revue Comoedia, rencontre avec l’artiste peintre mexicaine, Frida Kahlo 1942 : rencontre avec le peintre, Georges Braque, réalisation d’un reportage sur la vie quotidienne à Paris sous l’Occupation pour le journal La Suisse 1944 : collaboratrice à Labyrinthe, qui fait suite au Minotaure, rencontre avec Jean Giraudoux, Paul Claudel, Paul Valéry et Georges Duhamel 1944-1946: reportages de guerre dans le Journal de Genève, Servir et La Patrie Suisse 1950 : rencontre son second époux, l’aviateur, Francisco de Ceballos 1952 : naissance de sa fille, Francisca de Ceballos, à Grenoble 1956: traductrice-interprète, responsable de deux rubriques à la Tribune de Lausanne : “Le conte du lundi” et “Métiers de femmes” 1962 : collaboration à la Feuille d’Avis du Valais 1978 : installation à Martigny, collaboration au Confédéré 1981 : naissance de l’unique petite fille de Marguette, Ana. 1988 : retour aux origines, à 80 ans, Marguette Bouvier décide de retourner vivre à Chamonix 2003 : vit à Madrid aux côtés de sa fille, Cisca, de sa petite-fille, Ana et de son arrière- petite-fille, Johana 20 décembre 2008 : décès à Madrid, entourée des siens 8