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L’INVITÉ
Jean-Michel Aulas – Président Fondateur de CEGID
Au moment où Jean-Michel Aulas cédait à deux fonds anglo-saxons Cegid, la société
informatique qu’il avait créée en 1983, afin de conforter son développement international,
il recevait le Club Siparex et ses invités dans son nouveau stade. En effet, difficile de
savoir ce qui l’emporte chez le Président de l’OL, de la passion de l’entreprise ou de celle
du football. Dans l’enceinte de cet équipement, le premier entièrement numérique en
Europe, il a répondu aux questions de la Lettre Siparex.
Apparemment rien ne vous prédestinait
à devenir un chef d’entreprise, comment
s’est opérée ce que l’on pourrait appeler
une mue sociale ?
Effectivement mon père était professeur de
lettres, devenu journaliste et ma mère professeur de mathématiques. La liberté était pour
eux quelque chose d’essentiel donc lorsque j’ai
eu envie de créer ma première entreprise ils
m’ont encouragé. C’était un petit Cap Gemini
qui mettait à disposition des entreprises, des
ingénieurs et des analystes financiers dans un
contexte où la demande était incroyable. Après
trois ans d’existence, on était 250 salariés. Ce
fut ma première opération de création et de
transmission.
Avec Cegid, vous avez été un pionnier en
introduisant ce qu’on appelle aujourd’hui
le concept de disruption ?
Si le mot est nouveau, les ruptures technologiques ont été permanentes depuis 30 ans pour
Cegid. Autour de trois séquences essentielles,
l’ouverture d’un marché nouveau autour du plan
comptable 82, l’émergence en 1983 de l’ordinateur individuel, avant de passer des grands
centres de traitement qui concentraient les données à des solutions individuelles qui mettent
en avant l’utilisateur, c’est-à-dire le client.
Quels sont les facteurs clés qui vous ont
permis de réussir cette transformation
numérique ?
Par définition le numérique se transforme en
permanence, donc il a fallu faire preuve d’anticipation et effectuer les bons choix. Cegid, c’est
plus de 300 M€ de chiffre d’affaires pour son
prochain exercice avec l’ambition de le doubler
dans les 3 ou 4 ans qui viennent. Faire des
choix comporte toujours une part importante
d’incertitude avec à la clé des enjeux colossaux.
Ce qui fait la qualité d’un management, c’est
de se tromper un peu moins que les autres !
Pour y parvenir, il faut rester en permanence en
contact avec le client et dans le numérique on
a affaire à des jeunes générations, qui ont une
vision totalement différente, ce qui nous oblige
à nous remettre en question en permanence
et à maintenir une moyenne d’âge compatible
avec cette évolution. Il faut aussi faire preuve
d’agilité afin de rentabiliser le plus vite possible
nos investissements. Et pour ce faire, trouver
des partenariats. Par exemple, pour le développement de Cegid dans le Cloud on a réussi
à convaincre IBM de faire une « usineCloud »
pour nous. Si on avait voulu la développer
nous-mêmes, nous serions arrivés trop tard,
alors qu’aujourd’hui nous comptons parmi les
premiers acteurs européens.
Quelle est la transformation la plus remarquable à vos yeux ?
Il y a trente ans, Cegid démarrait avec le
développement et la vente de progiciels.
Aujourd’hui nous mettons à la disposition de
nos 110 000 clients, qui représentent 400 000
utilisateurs dans 73 pays, des web services
à travers un portail. La programmation existe
toujours mais elle est faite une fois pour toutes
pour un ensemble de clients, ce qui évite d’avoir
chez soi l’ordinateur, l’informaticien, la sécurité,
les antivirus… C’est un business model qui
transforme une solution ponctuelle, en quelque
chose de récurrent et on sait que tous les investisseurs et les banquiers raffolent du récurrent.
En 1983 je démarrais l’année avec moins de 1%
de chiffre d’affaires acquis, aujourd’hui c’est
près de 64 %.
C’est une forme d’abonnement ?
C’est typiquement de l’abonnement où le numérique permet non seulement de développer avec
les ingénieurs de manière industrielle des services, mais aussi de les simplifier, ce qui permet
d’en abaisser de façon considérable le coût tout
en sécurisant l’ensemble de leur utilisation.
Sans faire injure à votre réussite d’industriel, vous êtes plus connu en Europe
comme président d’un club de football.
Vous vous êtes appuyé sur les mêmes
ressorts qui ont permis la réussite de
Cegid pour faire de l’Olympique Lyonnais
un grand club ?
repris l’OL, le football était dans une économie
où seules les performances passées donnaient
de la puissance aux clubs existants. Quand on
est entrepreneur, on essaie plutôt de définir une
stratégie à long terme, c’est ce que j’ai fait.
On s’est rendu compte que la contribution d’un
match à un instant donné pouvait se transformer
en une animation et en une économie récurrente permettant de construire un club avec
des moyens importants et d’utiliser ces moyens
pour développer des performances sportives.
Ce qu’on pouvait définir comme une spirale
vertueuse du sport.
La construction du Grand Stade est-elle
l’aboutissement de cette spirale vertueuse ?
Tout à fait puisqu’on n’est pas uniquement dans
un club sportif mais en présence d’un club qui
est l’actionnaire majoritaire de 50 hectares
d’installations qui génèrent un nombre croissant
de revenus extra-sportifs, notamment en BtoB
avec l’organisation d’événements. Les deux
actionnaires principaux ont investi à peu près
250 M€. Le modèle lyonnais, avec un financement 100% privé, est aujourd’hui unique et
ce qui a été fait à Lyon devrait se faire partout
en France pour transférer au privé des investissements financiers qui étaient auparavant
uniquement à la charge des collectivités et de
l’État, c’est-à-dire du contribuable.
Alors, ce stade ?
C’est le premier stade numérique au monde. À
partir du smartphone que vous avez dans votre
poche, vous pouvez directement commander
vos billets, vous véhiculer à l’intérieur du stade,
y accéder, digitaliser les billets de tram ou
de TGV, ou payer votre carte de parking, et à
l’intérieur du stade grâce à la géolocalisation,
commander ce que vous voulez et en plus être
livré à votre place. Donc tout un ensemble de
services sophistiqués et intégrés que l’on peut
payer avec une carte sans contact. C’est donc
un outil qui sert l’image de Lyon et celle des
entreprises lyonnaises.
D’une certaine façon oui. En 1987, quand j’ai
27, rue Marbeuf Paris 8e, Tél. : 01 53 93 02 20 • 139, rue Vendôme Lyon 6e, Tél. : 04 72 83 23 23 • Nantes • Lille • Besançon • Strasbourg • Limoges • Dijon • Madrid • Milan • Munich
Contact : Priscille Clément, Directeur de la communication, [email protected] - Internet : http://www.siparex.com - La Lettre de Siparex/I.S.S.N. - 1244-1643
Directeur de la publication : Bertrand Rambaud. • Conception, réalisation : Capmot.
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