Les Longines, un endroit rêvé pour fabriquer des garde

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Les Longines, un endroit rêvé pour fabriquer des garde
LES LIEUX-DITS DE L’ÉTÉ (3)
Les Longines, un endroit rêvé
pour fabriquer des garde-temps
Chacun sait que les montres
Longines sont fabriquées à
Saint-Imier. Ce que l’on sait
peut-être moins, c’est que le
nom de cette marque
mondialement connue
provient du lieu-dit sur lequel
l’entreprise a été implantée,
en mars 1866.
GILLES BÜRKI
ans la série des lieuxdits du Jura bernois
que Le JdJ se propose
de présenter durant
tout l’été, il en est un dont le
nom rayonne dans le monde
entier et qui, pourtant, n’est
pas forcément très connu en
tant que tel. Il s’agit du lieu-dit
Les Longines, à Saint-Imier,
sur lequel la célèbre marque
horlogère est implantée depuis
près d’un siècle et demi. En
mars 1866, en effet, Ernest
Francillon a acquis deux lots
de terrains constructibles à
proximité de Saint-Imier, sur
les rives de la Suze, au lieu-dit
précité, qui signifie longues
pâtures en ancien français.
Ce Lausannois d’origine possédait déjà un comptoir horloger, sis au cœur de la cité imérienne, qu’il avait repris à son
D
oncle Auguste Agassiz. Avec
ses employés, il y confectionnait à la main jusqu’à 20 000
garde-temps par année. Mais
Ernest Francillon s’est vite
rendu compte des limites des
comptoirs, notamment dans le
domaine du contrôle de la qualité et des délais requis par le
service à la clientèle, ainsi que
par l’absence d’un stock de pièces de rechange. Il était persuadé que le regroupement des
travailleurs et des machines
sous un même toit permettrait
d’atteindre une efficacité nettement plus élevée. D’où son
idée, après en avoir discuté
avec son oncle, de déménager
du côté des Longines et de
donner ce nom à son entreprise. Cet endroit n’a d’ailleurs
pas été choisi au hasard: d’une
part il est plat, d’autre part les
eaux de la Suze y coulent, bien
utiles pour faire tourner les
machines de manière particulièrement économique.
L’édification du premier bâtiment a débuté au printemps
1867 et une écluse a été construite au-dessus d’une chute
d’eau. Une petite turbine, qui
était destinée à alimenter en
énergie un parc de machines
novatrices, a été mise en ser-
En 1867, une petite turbine alimentait
en énergie un parc de machines
novatrices.
vice en juin. Tandis que les
premières pièces sortaient de
fabrication en mars de l’année
suivante, une seconde turbine
était installée en aval d’un réservoir de 600 mètres cube et
une seconde bâtisse était construite dans le prolongement du
premier édifice.
Dès lors, le site s’est développé petit à petit. Ainsi, par
exemple, le bâtiment dans lequel se trouvent actuellement
les musées Longines a été
construit en 1899. Celui qui
abrite la réception date de
1905. Et à partir de 1947, explosion de la demande oblige,
un nouvel agrandissement de
la fabrique a eu lieu. C’est
aussi durant cette période que
les installations hydrauliques,
qui n’avaient plus d’utilité, ont
été détruites et que le cours de
la Suze a été dévié au nord de
la fabrique (devant le bâtiment
principal), alors que jusque-là,
la rivière passait entre les bâtiments.
A noter qu’au début du siècle dernier, le lieu-dit Les Longines comprenait aussi une tuilerie (du côté de l’actuelle rue
des Noyes), ainsi que des tourbières. Le propriétaire de la
tuilerie possédait la ferme
«Sans-souci», qui existe toujours et qui se situe en face de
la fabrique horlogère, de l’autre côté de la Suze. A l’époque,
un paysan était locataire de
cette ferme et était rémunéré
pour acheminer la tourbe
jusqu’à la tuilerie. Cette dernière a brûlé dans les années
30 et bien plus tard, la société
SOUVENIRS Les célèbres montres Longines voient le jour dans ces immeubles de Saint-Imier.
Longines a racheté la ferme. A
l’heure actuelle, les terres son
encore exploitées par un agriculteur de la région, mais plus
personne n’y vit, puisque le
dernier locataire – Gottfried
Zeller – a pris sa retraite en
1987. Aujourd’hui, la grange a
(STÉPHANE GERBER)
été réaménagée afin de pouvoir y organiser des fêtes, notamment celle du 1er août.
/GB
Un trésor conservé très précieusement
Le lieu-dit Les Longines possède un certain
attrait touristique puisque l’on peut y visiter, sur
demande uniquement, les musées Longines,
installés au sein même de l’entreprise. Outre le
musée de l’Affiche, qui vise à présenter les
moyens qui ont été utilisés pour faire connaître
les garde-temps Longines, le musée du
Chronométrage, qui présente les innovations
réalisées par la marque imérienne dans ce
domaine, ou encore le musée Historique, le
visiteur pourra découvrir la fameuse bibliothèque
des livres d’établissages. Dans ces livres sont
répertoriées toutes les montres – soit environ
15 millions – qui sont sorties de l’usine entre
1867 et la fin des années 1960. L’informatique a
ensuite pris le relais.
Dès le début, Ernest Francillon souhaitait en
effet assurer la traçabilité de ses produits. Pour
chaque pièce, les livres d’établissages
renseignent notamment sur la date de sortie
d’usine, le type de calibre, le nom et l’adresse de
l’agent auquel il a été livré, ainsi que diverses
informations relatives au boîtier, au cadran et aux
aiguilles. /gb