Installation : Hommage à Alexander Calder

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Installation : Hommage à Alexander Calder
Installation : Hommage à Alexander Calder
La rénovation des façades du Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain a nécessité un
chantier de plusieurs années. Afin de mettre à l’honneur cet évènement, Gilbert Perlein,
Conservateur en chef du patrimoine et directeur du musée, a souhaité faire appel à un artiste
de renommée internationale. Comme un signal fort aperçu dès les abords de la vieille ville, le
choix porté sur une œuvre, à l’échelle de la ville et du bâtiment, de l’artiste belge Arne Quinze
apparaît comme une évidence. Tels des musées à ciel ouvert, ses installations investissent le
paysage urbain et s’offrent aux regards des passants curieux. De ses premiers graphes, du
début des années 1990, à ces récentes structures publiques au format colossal, Quinze a
rapidement ressenti le besoin d’investir l’espace public. L’armature éphémère imaginée au
MAMAC s’inscrit en droite ligne des projets monumentaux réalisés ces dernières années :
Structured Chaos, Rio de Janeiro, Brésil, 2012 ; Rock Strangers, Ostend, Belgique, 2012 ;
Red Beacon, Shanghai, Chine, 2010 ; ou encore Camille, Rouen, France, 2010.
La sculpture nommée Hommage à Alexander Calder est composée d’une multitude de
planches en bois naturel, parfois teintées d’orange électrique ou de blanc, se développant sur
plus de 70 mètres de long et 12 mètres de haut. Mises bout à bout, elles s’étendent sur plus de
20 kilomètres. Croquis, dessins techniques et maquettes préparatoires constituent la base de
ses travaux monumentaux. L’installation de l’ensemble qui a lieu du 8 au 19 avril 2013 est
filmée pas à pas. Cette documentation « Work in progress » visible sur le site Internet de
l’artiste, participe au mode d’appropriation de la part du public. L’installation établit un
dialogue entre la ville, l’architecture du musée et le public. La conception est aussi importante
que l’œuvre finale laquelle sera visible jusqu’au 27 octobre 2013.
L’écologie est une notion fondamentale dans le travail de l’artiste qui nous invite à adopter
une attitude humble face à la nature. Il met un point d’honneur à utiliser uniquement du bois
possédant l’écolabel EFC garantissant la gestion durable des forêts. Le caractère cinétique et
organique d’une telle sculpture la rend vivante et nous rappelle que l’on se sent parfois
infiniment petit face à la puissance de la nature. Malgré la volonté de l’homme à vouloir la
maîtriser, celle-ci prendrait toujours le dessus. L’installation conquière à la fois l’espace
urbain, la structure muséale ainsi que celui qui la regarde. L’invasion commence dès
l’esplanade Niki de Saint Phalle (entre le musée et le théâtre) jusqu’aux façades, de l’intérieur
de la place Yves Klein jusqu’au cœur du musée au niveau du troisième étage ; la salle de
400m² appartient progressivement à la sculpture dévorante. L’œuvre nous donne l’impression
constante d’être en mouvement : elle paraît vouloir indiquer au visiteur venant du Vieux-Nice
le parcours à suivre afin de découvrir tant son évolution que l’institution muséale elle-même.
Les passerelles vitrées du musée donnent l’occasion au spectateur d’observer la structure en
jouant sur les liens extérieur/intérieur, dedans/dehors. S’emparant du bâtiment jusqu’à
appropriation, l’œuvre ne fait plus qu’un avec le musée.
La multiplicité des planches de bois qui s’entremêlent et dont on ne parvient plus à distinguer
un élément en particulier, nous renvoie à notre position en tant qu’individu perdu dans
l’immensité du monde. Pour l’artiste, chaque chevron correspond à un visiteur potentiel. Une
analyse de la condition humaine autour des dualités fragilité/force, immuable/éphémère, ainsi
que la notion de résilience transparaissent dans les travaux d’Arne Quinze. En effet, si
l’homme est un être fragile, il possède également la faculté de pouvoir se dépasser dans
l’adversité. De même, les fines « branches » de l’armature à l’aspect si frêle semblent pouvoir
s’animer d’un moment à l’autre au moindre souffle de vent tels des Mikados®. Cependant,
une fondation composée de dix socles en béton donne à l’ensemble un côté indéfectible et
engage le visiteur à s’y abriter. Le titre, Hommage à Alexander Calder, est sans équivoque :
l’installation se situe entre stabilité et mobilité, à l’image de la sculpture voisine StabileMobile en métal peint (Alexander Calder, 1970) au niveau de l’esplanade. Si un être humain
peut être assimilé à une de ces multiples branches, l’artiste crée de ce fait une cohésion sociale
dans une société basée de manière de plus en plus affirmée sur l’individualisme. Ici, il
rassemble et produit le lien entre les visiteurs à l’image de ces branches qui s’enchevêtrent
formant une œuvre commune.
Une installation artistique dans l’espace public est le meilleur moyen de toucher le plus grand
nombre. Elle inspire l’idée de liberté dans son mouvement et dans son existence éphémère : si
elle n’est à personne, elle appartient à tout individu qui prend le temps de la regarder. La
sculpture monumentale donnée à voir au MAMAC permet de renouveler le regard sur
l’institution muséale accentué par son côté fugace et temporaire : l’œil parfois trop habitué à
percevoir un paysage quotidiennement, ne le voit plus. De part cette rencontre avec l’œuvre,
Arne Quinze souhaite provoquer une expérience nouvelle et développer des sensations
positives chez le visiteur. La démarche de proposer une expérimentation inédite au passant
par le simple fait de poser son regard sur une œuvre dans un espace accessible à tous, donne
l’occasion à chacun de s’approprier une image du MAMAC à travers sa propre lecture.