La cogénération – trigénération - Institut de la Francophonie pour le
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IEPF-FichePrisme-Cogénération 24/02/04 08:53 Page 1 Thématique: Les technologies à haute performance énergétique F i c h e t e c h n i q u e P R I S M E nº 4 La cogénération – trigénération Problématique Principes de base Une des technologies prometteuses pour satisfaire les critères de meilleure efficacité énergétique et de moindres émissions de gaz à effet de serre est la cogénération, ou production combinée d’électricité et de chaleur (eau chaude ou vapeur). Dans plusieurs pays (tableau 1), les applications des systèmes de cogénération, dans les secteurs industriel et tertiaire, se multiplient, soutenues par plusieurs motivations convergentes: libéralisation du marché de l’électricité, favorisant l’émergence de la production décentralisée, indépendante ou non; développement des marchés dans de nouveaux créneaux, pour les entreprises de services énergétiques (y compris les producteurs et les distributeurs d’électricité) ; économies financières et énergétiques pour le consommateur ; triple avantage pour la collectivité (protection de l’environnement, préservation des stocks d’énergie fossile et émergence de nouveaux types d’emplois). La plupart des consommateurs ayant des besoins de chaleur ont aussi des besoins d’électricité. Ces deux formes d’énergie finale sont généralement produites séparément: Dans les pays africains, certaines sucreries et usines de transformation de bois avec séchage ont des besoins simultanés de chaleur et d’électricité et pourraient faire appel à la cogénération pour réduire leur facture énergétique. Quant à la trigénération, c’est à dire la valorisation de la chaleur cogénérée pour la production de froid, elle est pertinente pour les pays tropicaux et permettrait de diminuer la demande d’électricité de pointe dans les villes et les industries agroalimentaires. Tableau 1 : Part de la cogénération dans quelques pays en 2000 Pays Union Européenne-15 Électricité cogénérée (GWh) 258763 Canada env. 38900 États-Unis 304000 Brésil (voir WADE, 2003) 10 000 Source : Compilation de plusieurs sources par l’auteur Part de la production totale (%) 10,0 (18% visé en 2010) 7,0 8,0 3,0 • La chaleur à partir d’une chaudière à haut rendement alimentée au gaz ou au gazole; • L’électricité prélevée du réseau alimenté par des centrales électriques diverses. Les centrales électriques présentent un rendement de conversion d’énergie primaire en électricité limité entre 35 et 40% pour les centrales au charbon, de l’ordre de 55% pour les centrales à cycle combiné alimentées au gaz naturel et encore moins pour les centrales alimentées au fuel lourd ou au gazole. Or, pendant leur fonctionnement, ces centrales produisent de la chaleur qui n’est pas valorisée : gaz d’échappement (400-550 °C), intercooler (30-80 °C), eau de refroidissement du bloc moteur (75-120°C) et du circuit des lubrifiants (75-95°C). La récupération et la valorisation de la chaleur perdue, en vue d’améliorer l’efficacité de conversion de l’énergie primaire, traduisent le principe même de la cogénération classique, qui consiste en la production simultanée de chaleur et d’électricité à partir de la même installation (Figure 1). Un circuit équipé de plusieurs échangeurs récupérateurs en série permet de valoriser la chaleur disponible sous forme d’eau chaude (90-100 °C), ou parfois de vapeur basse pression (2 bar). Plusieurs circuits parallèles d’échangeurs récupérateurs peuvent aussi être utilisés pour produire de la chaleur pour différents types d’applications : eau chaude sanitaire (35-45 °C), chauffage (85-95 °C) ou vapeur (110-120°C). Le choix de la technologie est donc ainsi orienté par la qualité de chaleur nécessaire. Les grandeurs caractéristiques d’un groupe de cogénération sont: • Le rendement électrique, c’est-à-dire le facteur de conversion de l’énergie primaire consommée en électricité; • Le rendement thermique, c’est-à-dire le facteur de conversion de l’énergie primaire consommée en chaleur; • Le ratio électricité/chaleur (souvent noté E/Q), c’est-à-dire le rapport entre l’électricité et la chaleur produites par le groupe. Il influence le choix du groupe de cogénération, en fonction de l’application visée (demandeuse d’électricité ou de chaleur). IEPF-FichePrisme-Cogénération 24/02/04 08:53 Page 2 La cogénération – trigénération L’intérêt de la cogénération est l’augmentation du rendement énergétique de l’unité de production, passant de 24-40% en production d’électricité uniquement à 80-90 % en cogénération, correspondant à une utilisation plus efficace des ressources d’énergie primaire. Figure 1 : Schéma d’une installation de cogénération basée sur un moteur Thématique: Les technologies à haute performance énergétique F i c h e t e c h n i q u e P R I S M E nº 4 Problèmes observés et solutions techniques 2 • Turbines à vapeur : La vapeur haute pression générée par une chaudière est ensuite détendue dans une turbine (production d’électricité). La chaleur est disponible sous la forme de vapeur (utilisation directe) ou d’eau chaude (utilisation indirecte – chauffage). • Turbines à gaz : Les gaz issus de la combustion, chauds et d’enthalpie élevée, sont détendus dans une turbine entraînant un alternateur (production d’électricité). La chaleur des gaz après la détente (de 400 à 600°C) est récupérée pour produire la vapeur ou l’eau chaude. L’enthalpie des fumées et donc la chaleur disponible peuvent être augmentées, si les gaz après détente sont rebrûlés, mais le rapport chaleur/ électricité est aussi modifié. • Moteurs à combustion interne (gaz, diesel): Les fumées issues de la combustion sont refoidies jusqu’à 120 °C pour les moteurs à gaz, et jusqu’à 200°C pour les moteurs diesel. • Moteurs à combustion externe comme le Stirling: Ces moteurs sont destinés à être utilisés en combinaison avec les systèmes de gazéification, ce qui permettrait de diminuer le besoin d’épuration du gaz issus des gazogènes. Les utilisations pour la conversion du biogaz sont aussi envisagées. Tableau 3 : Classification par la taille (kW) Toute structure ayant une consommation régulière de chaleur présente théoriquement un potentiel pour la cogénération : hôtels, hôpitaux, écoles, piscines, maisons de repos, industries pratiquant du séchage (bois, laiteries, détergents, etc.), industries pharmaceutiques et agroalimentaires, immeubles de bureaux et de logements ou encore réseaux de chaleur (milieu municipal). Toutefois, le choix et le dimensionnement de la technologie en fonction des besoins sont cruciaux pour garantir le succès d’implantation d’une installation de cogénération. Différentes technologies disponibles Le tableau 2 présente les différentes technologies de base disponibles: Pays Micro Autriche < 50 Belgique 1-10 France < 36 Mini – 10-100 36-215 Petite 50-200 100-500 215-1000 Moyenne 200-700 – – Grande > 700 > 500 > 1000 Dimensionnement d’une installation Le dimensionnement d’une installation de cogénération consiste à choisir les équipements susceptibles de couvrir au mieux les besoins énergétiques du site d’application. Le choix porte sur le type de technologie, la puissance installée, la connexion au réseau électrique, la période de fonctionnement. D’emblée, il doit être décidé si le dimensionnement se fait selon les besoins électriques ou les besoins de chaleur, Tableau 2 : Résumé des caractéristiques des technologies Technologie Turbines à vapeur Ratio E/Q >0 Rendement > 0,85 0,5-0,8 0,3-0,45 0,6-0,8 0,5-0,7 Industries et secteur tertiaire Moteurs à combustion interne (gaz, diesel) Puissance Biomasse: jusqu’à 5 MW Fossiles: jusqu’à des centaines de MW 500 kW-300 MW 20 kW-1 MW (en développement) 2,5 kW-6100 kW (gaz) 5 kW-1700 kW (diesel) 0,4 – 0,9 0,8-0,9 Moteurs à combustion externe 1-15 kW 50 kW (en développement) 0,3 – 0,4 0,5-0,7 Besoins en chaleur à basse température (résidentiel, hôpitaux, commercial, bâtiments, certaines industries) Résidentiel, commercial, petites industries Turbines à combustion Applications appropriées Besoin élevé en vapeur de procédé (agroalimentaire, papeteries) IEPF-FichePrisme-Cogénération 24/02/04 08:53 Page 3 La cogénération – trigénération Les données collectées les plus usuelles sont les factures mensuelles mais des mesures sur site sont parfois nécessaires: pour l’électricité, enregistrement des impulsions quarthoraires sur période de 2 à 3 semaines, si possible en incluant les jours fériés; pour la chaleur, enregistrement des impulsions de démarrage de la chaudière, du débit d’alimentation de la chaudière en combustibles ou encore du débit instantané d’eau chaude à la sortie de la chaudière. Dans certains cas, la consommation de chaleur peut être directement déduite du profil de température extérieure. Des facteurs correctifs peuvent être pris en compte pour « normaliser » la consommation en fonction d’une année climatique type. Dans le cas d’un nouvel établissement, les besoins thermiques et électriques sont calculés à partir de la littérature ou sont simulés sur base des données caractéristiques de l’activité. Ces données permettent d’élaborer le diagramme de chaleur et la monotone de chaleur, outil principal orientant le choix de l’unité de cogénération, représentant la demande de chaleur horaire ou puissance appelée classée en ordre décroissant. L’objectif est de choisir entre une puissance thermique élevée et le nombre d’heures de fonctionnement de cette puissance: une faible puissance fonctionnera longtemps et de façon continue, une grande puissance fonctionnera moins longtemps et de façon plus discontinue. Si le dimensionnement est dirigé par la demande en électricité, c’est la monotone de l’électricité 300 200 100 0 1 1001 2001 3001 4001 5001 6001 7001 8001 Temps (heures) Le prix de l’électricité influence le choix du groupe de cogénération puisqu’un surdimensionnement peut améliorer le gain annuel grâce à la revente d’électricité supplémentaire, ou à l’économie réalisée sur l’achat d’électricité (dans un environnement à coût élevé d’électricité, l’autoconsommation sera privilégiée). La stratégie retenue dépend de la différence entre le prix de vente et de rachat d’électricité par le distributeur local. Par ailleurs, certaines législations conditionnent l’octroi des subventions aux installations de cogénération à l’utilisation de toute la chaleur cogénérée. Dans ce cas, un optimum doit être trouvé entre la consommation de chaleur et la production d’électricité. Valorisation de la biomasse Les technologies de valorisation énergétique de la biomasse, surtout lorsqu’elles passent par une production de gaz (biométhanisation, gazéification) se prêtent bien à la cogénération d’autant plus que le gain environnemental est plus important, grâce à l’utilisation de biomasse plutôt que d’énergie fossile comme énergie primaire. Cette combinaison est envisageable dans les industries de transformation de bois pratiquant du séchage et les unités de traitement biologique des déchets (ménagers, abattoirs, stations d’épuration, industries agroalimentaires, brasseries, etc.) et procure un bilan particulièrement favorable pour celles situées dans les zones hors réseau électrique des pays en développement et qui doivent transporter du diesel sur de longues distances pour alimenter leurs groupes électrogènes en auto-production. Ces installations ont pour principal inconvénient le montant élevé des investissements initiaux requis, mais ceux-ci sont amortis rapidement du fait du faible coût de combustibles pendant l’exploitation. nº 4 Il est donc nécessaire de bien évaluer les besoins de chaleur et d’électricité de l’établissement concerné ainsi que leurs variations journalière, hebdomadaire, mensuelle, si possible à partir d’une année complète de référence. Il est préférable de choisir une année de référence de consommation faible si l’activité de l’établissement est susceptible de diminuer et/ou si des mesures d’utilisation rationnelle d’énergie sont prévues, et inversement une année de consommation élevée si l’activité est susceptible d’augmenter, par exemple si une extension de l’établissement est envisagée. Une analyse des consommations d’énergie des dernières années et des projets éventuels planifiés permet de connaître la tendance à la hausse ou à la baisse pour les années à venir. Figure 2: Exemple de monotone de chaleur dans un immeuble d’appartements Thématique: Les technologies à haute performance énergétique F i c h e t e c h n i q u e P R I S M E • Dans les pays visant des gains énergétiques et des réductions d’émissions, le dimensionnement sur la base des besoins en chaleur est indiqué parce qu’il procure une meilleure efficacité énergétique des systèmes de cogénération. Si les besoins locaux d’électricité sont insuffisants pour consommer toute l’électricité produite, celle-ci doit impérativement être reprise par le réseau local à des conditions correctes (prix, prime à la tonne de CO2 évitée, etc.). • Lorsque le prix de l’électricité est très élevé, le porteur de projet peut dimensionner son installation de manière à couvrir le maximum de ses besoins en électricité. Dans ce cas, il n’est pas rare que toute la chaleur co-générée ne soit pas consommée, ce qui entraîne une réduction du rendement utile. qui devra être utilisée. La Figure 2 montre un exemple de monotone de chaleur, à partir de laquelle on peut déduire qu’un cogénérateur de 100 kWth ne fonctionnerait que 1000 heures par an que deux groupes de 50 kWth chacun fonctionneraient à puissance nominale l’un pendant plus de 3000 heures, l’autre pendant 1 000 heures. Puisque les cogénérateurs peuvent fonctionner jusqu’à 50 % de leur puissance nominale, la deuxième option permet de couvrir une plus grande partie des besoins en chaleur, la plage allant, dans ce cas, de 25 à 100 kWth. Puissance (kWth) puisqu’un paramètre crucial de la faisabilité et la rentabilité des systèmes est l’utilisation de la puissance thermique disponible en cogénération: 3 IEPF-FichePrisme-Cogénération 24/02/04 08:53 Page 4 La cogénération – trigénération Trigénération La chaleur récupérée lors de la production d’électricité peut aussi être utilisée, en partie ou totalement, dans les machines frigorifiques munies d’un cycle à absorption ou à adsorption. C’est la trigénération, particulièrement intéressante pour les pays tropicaux où la climatisation contribue largement à la demande de pointe électrique. Dans les régions à climat tempéré, les deux modes de fonctionnement peuvent alterner (production de chaleur en hiver et de froid en été). Le potentiel de la trigénération concerne tous les consommateurs d’une quantité suffisante et régulière de froid, qu’ils consomment seulement du froid (entrepôts frigorifiques de conservation et de conditionnement des aliments) ou de la chaleur et de froid (abattoirs, industries pharmaceutiques, chimiques et agro-alimentaires, immeubles de bureaux et certains parcs de logements). Thématique: Les technologies à haute performance énergétique F i c h e t e c h n i q u e P R I S M E nº 4 La valorisation de l’unité de cogénération pour la production de froid peut être réalisée de deux manières: 4 • Indirecte: La chaleur récupérée de l’unité de cogénération est utilisée pour produire de la vapeur ou de l’eau chaude dans une chaudière classique. L’unité de réfrigération est alors alimentée par l’eau chaude ou la vapeur provenant de la chaudière. Ce système présente l’avantage de disposer d’eau chaude ou de vapeur pour d’autres applications. • Directe: La chaleur récupérée est envoyée directement au générateur de l’unité de réfrigération. Ce système présente l’avantage de ne pas utiliser de chaudière, permettant une économie en frais d’investissement et de maintenance. En outre, le système est plus compact. Les machines frigorifiques classiques à compression consomment exclusivement de l’électricité ; leur coefficient de performance (COP), représentant le rapport entre l’effet frigorifique utile et l’énergie consommée, est élevé‚ entre 2,5 et 5. Par opposition, les machines frigorifiques à trigénération consomment quasi-exclusivement de la chaleur; leur COP est faible, entre 0,6 et 1,2. L’intérêt de la trigénération est mis en évidence si le rendement global de conversion de l’énergie primaire en froid est évalué, en tenant compte du rendement de production de l’électricité consommée par les cycles à compression (0,25 à 0,55). La trigénération offre deux types de technologies: • Les machines à absorption utilisent, comme absorbantréfrigérant : a) Le couple Eau-Ammoniac adapté pour les moyennes et grandes puissance à des températures de refroidissement inférieures à 5°C. Les applications sont de type industriel, pour une puissance frigorifique allant jusqu’à plusieurs MW. b) Le couple Bromure de Lithium-eau, utilisé pour le conditionnement d’air (T>5°C) dans les bâtiments. Le COP est plus élevé (0,7-1,2). • Les machines frigorifiques à adsorption fonctionnent avec le couple gel de silice/eau. Les applications concernent les besoins en eau froide jusqu’à 3 °C (applications dans les nouvelles constructions). Les machines disponibles sur le marché répondent à une puissance frigorifique nominale de 50 à 353 kWf. Par rapport aux machines à absorption au Bromure de Lithium à un seul étage, elles offrent un meilleur COP pour de plus faibles températures d’eau chaude (65-85°C). Résultats attendus et stratégies de mise en œuvre Efficacité énergétique Le choix de la cogénération répond à plusieurs types de besoins: satisfaction de besoins en chaleur (froid) et électricité, volonté d’économie d’énergie et de réduction d’émissions, production d’énergie décentralisée. En tant que production décentralisée, la cogénération permet de réduire les investissements dans les infrastructures de réseau.Ainsi, elle permet d’optimiser le système de production électrique en tenant compte de la localisation des besoins et des coûts globaux de production, transport, et distribution. Par ailleurs, un facteur important de la cogénération est qu’elle permet de réduire les pertes de distribution, évaluées en moyenne à 7 % dans les pays de l’OCDE, plus élevées dans les pays en développement. En réduisant la demande d’électricité du réseau central et parfois en lui fournissant des surplus, la cogénération contribue à une augmentation nette de la puissance disponible sur le réseau et donc à une meilleure fiabilité et sécurité de l’approvisionnement. La trigénération présente également des intérêts importants, en particulier pour contribuer aux politiques d’électrification des pays en développement, puisque la chaleur récupérée sur les installations décentralisées peut servir à la climatisation des hôtels et immeubles. Le calcul des économies d’énergie et donc des émissions évitées mérite une attention particulière, étant donné la possibilité d’inscrire la cogénération et la trigénération dans le cadre des projets visant la réduction des émissions de gaz à effet de serre et encadrés par le mécanisme de développement propre et l’application conjointe du Protocole de Kyoto. L’encadré ci-joint décrit une méthodologie de calcul des économies d’énergie. La figure 3 illustre l’économie d’énergie primaire engendrée par la trigénération par rapport à la production séparée du froid dans un cycle à compression (COP=3,5), de la chaleur dans une chaudière (Q = 90 %) et l’électricité dans une Turbine Gaz Vapeur (E = 55 %). Dans le cas de la production séparée, les valeurs entre parenthèses désignent l’énergie primaire consommée si c’est le rendement moyen du parc électrique (E = 38 %) qui est considéré. E et Q désignent respectivement les rendements électrique et thermique du groupe de cogénération. L’économie d’énergie primaire est alors, selon la référence, de 10% ou 44%. Le calcul de l’économie d’énergie primaire, de l’index et par conséquent des émissions évitées et de la rentabilité économique dépend du scénario de référence considéré IEPF-FichePrisme-Cogénération 24/02/04 08:53 Page 5 La cogénération – trigénération Figure 3 : Comparaison statique de la production séparée et de la trigénération I= Pʼ – P 1 =1– E COP Q Pʼ + + (1–) Q E COPc E Q avec: P et P’ les quantités d’énergie primaire consommées respectivement en production combinée et séparée pour satisfaire les besoins de chaleur (Q), d’électricité (E) et de froid (Pf) COP le coefficient de performance de l’unité de réfrigération par ab/adsorption COPc le coefficient de performance de l’unité de réfrigération par compression Q E les rendements thermique et électrique du groupe de cogénération Q E les rendements thermique (respectivement électrique) de la chaudière (respectivement centrale) de référence la fraction de chaleur cogénérée utilisée pour produire le froid ; lorsque le paramètre est nul, il n’y a pas production de froid et on est en cogénération chaleur et électricité; lorsqu’il est égal à l’unité, toute la chaleur cogénérée sert à la production de froid. nº 4 Les économies d’énergie primaire engendrées par les installations de cogénération et trigénération peuvent être exprimées par un index (I) qui représente le gain relatif d’énergie primaire par rapport à la production séparée d’électricité, chaleur et froid. L’index d’économie d’énergie est donné par la relation générale suivante: pour la production séparée. Ce scénario doit dans tous les cas représenter la situation spécifique du contexte d’application. Le tableau 4 présente des exemples de référence proposés dans certains pays. Dans la plupart des pays en développement, la pointe électrique est assurée par des générateurs diesel. Ainsi, toute unité de cogénération connectée au réseau électrique substituerait la production de groupes diesel. Ces derniers peuvent être donc considérés comme centrale de référence pour calculer les économies de combustibles diesel réalisées. Cette solution a été aussi proposée lors des discussions sur l’application du Mécanisme pour un Développement Propre (MDP). Tableau 4: Exemples de références proposées Cas > 1 MWe Exemple de référence Centrale Turbine Gaz Vapeur à Cycle Combiné de rendement 55% et chaudière à gaz de rendement thermique 90% (Europe) 100 kWe-1 MWe Production de chaleur : – Chaudière à gaz de rendement thermique 90% Production d’électricité : – Centrale au charbon de rendement 36% – Ou parc moyen de production électrique de rendement 38%. (Pays-Bas) 10-100kWe Rendement moyen du parc de production (mini ou micro- électrique diminué des pertes de distribution cogénération) (environ 5%) et rendement thermique moyen d’environ 80% (Allemagne) Nombreux pays Générateurs diesel en développement Aspects financiers L’analyse de rentabilité d’un projet de cogénération se fonde sur l’évaluation des coûts annuels répartis en investissement, frais d’exploitation et frais de combustibles (tableau 5). Thématique: Les technologies à haute performance énergétique F i c h e t e c h n i q u e P R I S M E Calcul des économies d’énergie 5 IEPF-FichePrisme-Cogénération 24/02/04 08:53 Page 6 La cogénération – trigénération Tableau 5 : Ordre de grandeur des coûts de la cogénération Technologie Turbine à vapeur Turbine à gaz Moteur à gaz Moteur diesel Coût d’investissement (€/kW installé) 900 – 2100 400 – 900 245 – 6800 (formule 5783 P-0,39) 550 – 2650 Coût d’entretien (€cents/kWh) 0.15 – 0.23 0.48 – 0.53 0.60 – 3.25 (formule 5.45 P-0,26) 0.44 – 2.66 Thématique: Les technologies à haute performance énergétique F i c h e t e c h n i q u e P R I S M E nº 4 L’investissement pour une centrale de cogénération comprend: 6 • Le coût des équipements: – Groupe de cogénération; – Raccordement du circuit de chauffage au groupe de cogénération; – Raccordement électrique; – Réseau de chaleur (distribution,sous-station,raccordement); – Tampon de stockage si c’est nécessaire, qui permet le stockage du surplus d’eau chaude lorsque la production du cogénérateur est supérieure à la demande; la chaleur ainsi stockée est utilisée lorsque la demande est supérieure à la production ou encore pendant les heures d’arrêt; – Récupérateur sur fumées; – Chaudières d’appoint, sauf si elles sont déjà disponibles pour la même utilisation ; les chaudières d’appoint servent à assurer le surplus de demande lorsque la puissance demandée est supérieure à celle des groupes de cogénération ou lorsque celle-ci est inférieure à la puissance minimale admissible des groupes; – Système de traitement des fumées, lorsque c’est nécessaire. • Le coût d’installation: – Surcoût d’investissement dû au local abritant l’installation de cogénération; – Local pour les chaudières d’appoint; – Génie civil; – Ingénierie (étude); – Frais d’autorisation. • Et les frais généraux. Les frais d’exploitation englobent les frais d’entretien, de personnel et éventuellement du coût de la puissance de réserve, c’est-à-dire celle que la compagnie d’électricité garantit à l’exploitant pour pallier les pannes. Les frais annuels d’entretien peuvent être considérés comme pourcentage de l’investissement ou, dans le cas d’un contrat de maintenance, comme frais fixe par unité d’énergie négocié avec le contractant en fonction de la taille de l’installation. Le contrat de maintenance est, pour l’exploitant d’une installation de cogénération, le moyen le plus sûr et confortable, mais il est aussi plus onéreux. Selon le type et la charge du moteur, une révision générale est nécessaire après 25000 à 65000 heures de fonctionnement. Le coût de la révision générale des unités de cogénération à gaz varie entre 15 et 25% du coût d’investissement, ce qui est très positif lorsqu’on sait qu’après une révision générale, le groupe est capable de fonctionner encore autant d’heures qu’un nouveau groupe. Les frais de combustibles comprennent le coût de la puissance et le coût de l’énergie. Ils englobent la consommation d’énergie primaire du groupe de cogénération et des chaudières d’appoint ainsi que la consommation d’électricité pour le fonctionnement des pompes. Certains utilisateurs préfèrent des chaudières d’appoint au mazout surtout lorsque le coût de la puissance pour le gaz est très élevé. L’intérêt économique de la cogénération est qu’elle permet une réduction de la facture annuelle d’énergie de l’ordre de 10 à 45 % par rapport à la situation sans cogénération, grâce principalement aux éléments repris ci-dessous. Le gain annuel se calcule par l’expression : Gain annuel = gain sur la facture électrique + gain sur les factures d’entretien – surcoût frais de combustibles + recette (éventuelle) de vente d’électricité + autres recettes Le temps de retour simple est égal au surcoût d’investissement divisé par le gain annuel. Malgré le surcoût d’investissement, les temps de retour observés varient entre 3 et 10 ans et entre 2,5 ans et 7 ans si certains financements tels que les aides à l’investissement et les certificats verts sont attribués comme rétribution pour les réductions d’émissions. On notera que la rentabilité économique des installations de trigénération est lourdement pénalisée par le coût d’investissement élevé des machines à absorption ou à adsorption. Néanmoins, la trigénération améliore la rentabilité de l’unité de cogénération dans les bâtiments en lui permettant de fonctionner aussi en été. De plus, ces technologies permettent de supprimer le recours aux fréons utilisés dans les machines à compression et qui comptent parmi les gaz à effet de serre, dont certains, destructeurs d’ozone, ont même été interdits totalement d’utilisation. Stratégie de mise en œuvre L’implantation d’un programme de développement de la cogénération nécessite la disponibilité de professionnels ayant acquis une expertise dans le diagnostic énergétique aussi bien dans l’administration de l’énergie, chez les clients bénéficiaires, que dans les bureaux d’études.Avant de mettre en œuvre la cogénération dans un établissement, il est absolument nécessaire d’identifier et d’instaurer les mesures d’utilisation rationnelle de l’énergie afin d’éviter le risque de surdimensionnement de l’installation. Les critères de décision sont la connaissance des besoins à couvrir, le prix de vente ou de rachat de l’énergie, la disponibilité des combustibles et la politique locale en faveur de l’efficacité énergétique. Les besoins de chaleur doivent être importants et réguliers de manière à garantir un fonctionnement régulier de l’unité de cogénération. Un minimum de 5 000 heures de fonctionne- IEPF-FichePrisme-Cogénération 24/02/04 08:53 Page 7 La cogénération – trigénération Conclusion L’économie d’énergie procurée par la production combinée dépend fortement de la référence choisie et, en cas de trigénération, de la proportion de chaleur utilisée pour la production de froid. Chaque cas est spécifique, la décision d’investir dans une unité de co-/trigénération se basera donc sur une analyse fine des besoins réels d’électricité, de chaleur et de froid de l’établissement mais aussi du coût des investissements et du prix des énergies. La cogénération pourra contribuer à la diminution de la pression sur la pointe électrique journalière dans les centres urbains des pays en développement, d’une part parce qu’elle limite la demande électrique des autoproducteurs, et d’autre part, parce qu’elle pourrait fournir au réseau le surplus de production. Dans les industries de transformation de bois, la cogénération au bois diminuera considérablement la consommation de gazole, actuellement privilégiée par les installations situées hors du réseau central. Une autre application intéressante est la production de vapeur pour le dessalement de l’eau de mer. À côté des énergies renouvelables, la cogénération permettra à l’avenir aux pays en développement de contribuer aux efforts mondiaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Comme toute technologie de production décentralisée d’énergie, elle améliore finalement la fiabilité de l’approvisionnement énergétique tout en diminuant les coûts de transport et de distribution de l’énergie électrique. Références Eurostat, 2003. Combined Heat and Power Plants Statistics in the EU, 2000. ISBN 156263106. Région wallonne, 2003. Réaliser une étude de pré-faisabilité d’une cogénération dans les Règles de l’Art. http://energie.wallonie.be Tchouate, P.M. et L. Bolle, 2002. Économie d’énergie en trigénération. International Journal of Thermal Sciences, vol. 41, pp. 1151-1159. WADE, 2003. National Survey of Decentralized Energy in Brazil 2003/02. World Alliance for Decentralized Energy. Association CogenSud, publications, études de cas et outils de calcul disponibles en ligne. www.cogensud.be European Association for the Promotion of Cogeneration . Voir en particulier la rubrique Projects, EDUCOGEN (nombreuses publications en ligne). www.cogen.org Site portail de l’énergie en région wallonne.Voir en particulier la rubrique Cogénération (publications, informations, logiciels). http://energie.wallonie.be Les fiches techniques PRISME (Programme International de Soutien à la Maîtrise de l’Énergie) sont publiées par l’IEPF. Directeur de la publication : El Habib Benessahraoui, directeur exécutif, IEPF Comité éditorial : Sibi Bonfils, directeur adjoint, IEPF Jean-Pierre Ndoutoum, responsable de programme, IEPF Supervision technique : Maryse Labriet, Environnement Énergie Consultants Rédaction : Dr.-Ing. Pépin Magloire Tchouate Héteu Université catholique de Louvain (Belgique) Édition et réalisation graphique : Communications Science-Impact nº 4 Idéalement, la cogénération pourrait être intégrée dans la définition et l’occupation des nouvelles zones franches industrielles. En effet, les industries susceptibles de s’y installer peuvent être classées par type et profil d’énergie utile de manière à optimiser le dimensionnement des installations de cogénération. De même, l’installation de séchoirs à bois ou le renouvellement des chaudières et groupes frigorifiques à compression dans les hôtels et immeubles de bureaux devrait susciter une étude de faisabilité pour la cogénération. Sites Internet L’Institut de l’énergie et de l’environnement de la Francophonie est un organe subsidiaire de l’Agence intergouvernementale de la Francophonie (AIF). Il a été créé en 1988 par la Conférence générale de l’Agence, suite aux décisions des deux premiers Sommets des chefs d’État et de Gouvernement des pays ayant en commun l’usage du français. Son siège est situé à Québec, au Canada. Sa mission est de contribuer au renforcement des capacités nationales et au développement des partenariats au sein de l’espace francophone dans les domaines de l’énergie et de l’environnement. Institut de l’énergie et de l’environnement de la Francophonie (IEPF) 56, rue Saint-Pierre, 3e étage Québec (QC) G1K 4A1 Canada Téléphone: (1 418) 692 5727 Télécopie: (1 418) 692 5644 Courriel: [email protected] Site Web: www.iepf.org L’Agence de l’efficacité énergétique du Québec (AEE) est un organisme public dont la mission est d’assurer la promotion de l’efficacité énergétique pour toutes les sources d’énergie et dans tous les secteurs d’activités. Les mandats de l’Agence portent sur l’encadrement législatif du domaine de l’efficacité énergétique, sur la conception et l’application de programmes de promotion, sur la réalisation de projets de démonstration, ainsi que sur le développement de matériel et d’outils d’information, de formation et de sensibilisation à l’intention de tous les consommateurs d’énergie. L’AEE assume également un mandat de promotion de l’expertise québécoise en efficacité énergétique à l’échelle internationale. Agence de l’efficacité énergétique du Québec 5700, 4e Avenue Ouest, B405 Charlesbourg (Québec) G1H 6R1 Téléphone: (1 418) 627-6379 Télécopie: (1 418) 643-5828 Courriel: [email protected] Site Web: www.aee.gouv.qc.ca Thématique: Les technologies à haute performance énergétique F i c h e t e c h n i q u e P R I S M E ment est à conseiller, dépendamment de la tarification en vigueur pour l’électricité dans le pays ou la région concernée. Par ailleurs, il est souvent nécessaire de rechercher la meilleure solution technologique. Cela revient à simuler le fonctionnement de plusieurs tailles et types de cogénérateur et du stockage de chaleur pour finalement choisir la solution la plus rentable mais qui soit adaptée à la demande en chaleur et en électricité de l’établissement étudié. 7 IEPF-FichePrisme-Cogénération 24/02/04 08:53 Page 8 La cogénération – trigénération Étude de cas La cogénération dans un centre aquatique en Belgique Raisons et description du projet Après une étude consistant à établir le cadastre énergétique de la ville, les besoins d’électricité et de chaleur des bâtiments ont été analysés du point de vue de l’efficacité énergétique de leur satisfaction. Les résultats de cette étude ont montré que le centre aquatique (comprenant piscine et autres jeux) représentait un site pertinent pour l’implantation d’une installation de cogénération du fait de ses besoins importants en électricité et chaleur concentrés au même endroit. Un pré-dimensionnement de l’installation de cogénération a donné des premiers résultats encourageants, et la Ville a décidé de commander une étude de faisabilité auprès d’un bureau d’études spécialisé. Les résultats techniques et financier de l’étude de faisabilité sont présentés ci-après. Résultats techniques et financiers Thématique: Les technologies à haute performance énergétique F i c h e t e c h n i q u e P R I S M E nº 4 Résultats techniques Type de l’unité de cogénération Puissance optimale Rendement de l’unité de cogénération Durée de fonctionnement «simulée» 8 Moteur au gaz naturel 200 kWe / 312 kWth 34% (élect.)/51% (therm.) 4752 heures Résultats énergétiques AVANT cogénération Consommation de combustible 2801541 kWhp de gaz naturel Besoin net en chaleur 2521387 kWhth (rendement de 90%) Consommation d’électricité 1311660 kWhe (pointe max. de 338 kWé) Résultats énergétiques APRÈS cogénération Consommation de combustible 4000 940 kWhp de gaz naturel soit une surconsommation de combustible de 1199399 kWhp de gaz naturel Production de chaleur par cogénération 1436305 kWhth (57% des besoins) Achat de chaleur 1083528 kWhth (43% des besoins) Production d’électricité par cogénération 950400 kWhe Auto-consommation de l’électricité produite 590156 kWhe (45% des besoins) Achat d’électricité1 721302 kWhe (55% des besoins) 1. Une partie des besoins en électricité est satisfaite par des achats plutôt que par la consommation de l’électricité produite parce que l’installation a été dimensionnée selon les besoins de chaleur. Par conséquent, pendant certaines heures de production, la puissance électrique fournie par le cogénérateur est supérieure à la demande interne de l’entreprise. Le surplus est alors vendu sur le réseau électrique local. Par contre, l’entreprise doit acheter de l’électricité du réseau soit quand la puissance produite par le cogénérateur est inférieure à sa demande, soit en périodes d’arrêt du cogénérateur. Résultats économiques AVANT cogénération Facture combustible 62383 € HTVA Facture électrique 94022 € HTVA Résultats économiques APRÈS cogénération Facture combustible 90642 € HTVA Facture électrique (achat) 45710 € HTVA Facture des entretiens et d’assurance 7603 € HTVA Vente de l’électricité excédentaire 6867 € HTVA Rentabilité du projet de cogénération (hors aides) Investissement net 180000 € HTVA Hypothèse 1 – Certificat à 65 €1 Vente de 291 certificats verts 18886 € Gain annuel net2 38202 € Temps de retour simple3 4,7 années Hypothèse 2 – Certificat à 100 €1 Vente de 291 certificats verts 29055 € Gain annuel net2 48372 € Temps de retour simple3 3,7 années 1. Le prix des certificats verts est fixé par le régulateur, la Commission Wallonne pour l’Énergie dans ce cas-ci, en tenant compte du marché, du volume et de la volonté politique d’encourager la production verte. Au moment de l’étude, le certificat vert valait 65 €. Il vaut à ce jour 83 €. La valeur de 100 € représente une valeur fictive à des fins de simulation. 2. Factures après cogénération – Factures avant cogénération – Vente électricité excédentaire – Vente certificats verts 3. Investissement / Gain annuel Résultats environnementaux Émissions de CO2 évitées Nombre de certificats verts (1 CV = 456 kg CO2) Économie en énergie primaire1 132492 kg CO2 291 certificats 528600 kWhp de gaz naturel 1. Économie d’énergie primaire = électricité produite par le cogénérateur divisé par le rendement d’une TGV (ici 55 %) + chaleur cogénérée divisée par le rendement de la chaudière de référence (ici 90 %) – énergie primaire consommée par le cogénérateur Stratégie de mise en œuvre et financement Suite à ces résultats plutôt encourageants, le cahier des charges a été commandé par la Ville, avec l’option d’un financement sur fonds propre. Le projet final a été présenté en novembre 2003 au Conseil d’administration qui a approuvé le lancement de l’appel d’offre pour janvier 2004. La mise en service de l’installation est prévue pour mars 2005.