La table est mise, le menu a changé! Une fois, deux fois, trois fois

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La table est mise, le menu a changé! Une fois, deux fois, trois fois
Le Livre vert. On en parlait depuis longtemps, très longtemps même
et de différentes manières. Le régime forestier que nous connaissons
a été mis en place en 1986. Depuis, plusieurs consultations et réformes se sont succédées.
À chaque fois, on a tenté d’améliorer
un régime basé sur le développement
d’une industrie de première transformation. Avec le temps sont apparus
les concepts de participation du public, de gestion intégrée des ressources
forestières, de forêt habitée, de seconde transformation, etc. À chaque
fois, RESAM a fait part de ses commentaires afin de défendre le droit des
régions de se développer et d’utiliser
l’ensemble des ressources du milieu
forestier.
Nous avons toujours été de ceux qui
demandaient des changements importants au régime forestier. Ces demandes étaient portées par la conviction que les groupements forestiers du
Québec et la forêt formaient les pierres
d’assises du développement des communautés fo­restières. Jusqu’où espérions-nous voir nos demandes se
matérialiser?
Le Livre vert qui a été déposé par le
ministre des Ressources naturelles et
de la Faune va beaucoup plus loin que
ce que plusieurs observateurs croyaient
possible. La proposition qui nous est
soumise représente une coupure net-
te avec le passé. Si nous disons que
la table est mise, nous devons aussi
dire que le menu a changé. Force
est d’admettre que le Ministre Claude
Béchard n’a pas eu peur de rompre
avec le passé. Certains tabous ont été
mis de côté ouvrant ainsi de nouvelles
possibilités. Il s’agit d’un geste courageux qui doit être salué.
Lorsque l’on compare le Livre vert au
mémoire que RESAM a déposé à la
commission Coulombe, nous constatons que plusieurs de nos demandes
trouvent maintenant écho. La régio­
nalisation des décisions, la gestion intégrée des ressources, l’intensification
de l’aménagement forestier en sont
quelques exemples.
Devons-nous avoir peur de ce document. À mon avis, non! Du point de
vue des orientations, comment être
contre l’idée de développer une industrie de la transformation plus dynamique
ou de donner certains pouvoirs aux
structures des régions? Comment militer contre l’idée de doubler la valeur
des produits de la forêt en 25 ans ou
d’enfin reconnaître l’importance de
l’industrie de l’aménagement? Ce se-
rait très difficile non!
Un Livre vert n’est qu’un document
d’orientation. L’absence de moyens
clairement définis soulève plusieurs
craintes légitimes mais baser notre
réflexion sur les orientations en appréhendant les pires des moyens
d’application nous mènera inévitablement vers un rejet du Livre vert. Rejeter ce document signifierait l’oubli
de nos racines profondes dans nos
milieux, de l’expertise développée au
fil des 35 dernières années et de la
main-d’œuvre qualifiée qui font de
nos organisations des entreprises collectives solides, efficaces et aptes à
prendre encore plus d’importance sur
l’échiquier forestier québécois.
Devons-nous être vigilants. Ça oui! La
mise en place d’un régime aussi différent comporte des dangers. Nous
travaillons dans du neuf et les mauvais
plis du départ auront des impacts importants à long terme. Un Livre vert
exprime une vision, des orientations
de développement. Il ne met pas
l’accent sur les moyens nécessaires
pour l’atteinte des objectifs. Ce sera
le travail qui devra être réalisé lors de
la consultation sur le projet de Loi qui
devrait être déposé à la fin juin.
D’ici-là, il reste beaucoup de travail à
accomplir. Après notre réflexion sur la
pertinence des orientations proposées
par le Ministre des Ressources naturelles et
de la Faune, nous définirons les balises qui
enca­dreront les moyens
Jean-Guy Rioux
de mise en œuvre de ce
Président du Regroupement
nouveau régime. L’une
des sociétés d’aménagement
d’entre elle sera de ne
forestier du Québec
pas ajouter aux structures déjà en place. Il
faudra plutôt les outiller pour qu’elles
puissent s’épanouir et jouer pleinement leur rôle. Une autre, sera de définir une vision claire du rôle que l’on
veut voir jouer par la forêt privée. Entre
temps, restons ouverts et soyons prêts
à prendre notre place en accord avec
ce que nous réclamons depuis plusieurs années.
éditoriaux
La table est mise,
le menu a changé!
Départ de
Madame Paule Têtu
J’ai appris avec surprise le départ de
Madame Paule Têtu, sous-ministre associée au ministère des Ressources
naturelles et de la Faune du Québec.
En mon nom et en celui de 26 000
propriétaires regroupés du Québec, je
désire la remercier pour tout le dévouement qu’elle a démontré envers la forêt
privée. Sans elle, le portrait ne serait
certainement pas le même. Merci
beaucoup et bonne chance dans vos
nouveaux projets.
Une fois, deux fois,
trois fois… Vendu!
Imaginez. Des acheteurs de bois, tout plein d’acheteurs de bois. Du
président de grandes compagnies forestières jusqu’aux propriétaires
d’entreprises familiales tous assis dans une estrade. Avec un mélange
d’envie et d’inquiétude, ils regardent passer des camions de bois.
En conclusion
L’application
d’un
mécanisme
d’enchères est quelque chose de
complexe. L’idée de créer un marché
pour les bois de la forêt publique n’est
pas nouvelle mais était impensable
tant que tous les bois étaient garantis.
Maintenant, ce tabou semble tombé.
Nul ne peut prétendre connaître les
impacts sur le coût de la fibre. Toutefois, une industrie forte et innovante
sera toujours un gage d’une demande
importante. La forêt privée, qui souvent joue le jeu du marché saura
certainement trouver sa place si les
règles sont efficaces.
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vre en la matière. Est-ce possible que
la situation décrite précédemment se
concrétise? Peut-être, mais heureusement, il y a d’autres possibilités.
Qu’est-ce qu’une enchère?
Dans un contexte où les conditions
d’un marché parfait ne sont pas réunies notamment par la présence de plusieurs vendeurs et de plusieurs acheteurs, l’enchère peut être un moyen
utilisé pour fixer un prix de vente.
Différentes méthodes ont été développées afin de mettre en compétition les
acheteurs, elles peuvent se résumer à
ceci :1) sécuriser l’acheteur sur la vente afin qu’il diminue sa marge de sécurité. 2) l’insécuriser sur sa compétition
(les autres acheteurs) de manière à ce
qu’il soit forcé de divulguer la valeur
qu’il attribue au produit.
Selon le type de joueurs, de bien ou de
conditions de marchés les enchères
peuvent prendre des formes autres
que celle montantes décrites en introduction. Par exemple, aux PaysBas, les fleurs sont vendues selon le
principe d’enchères descendantes. À
l’aide d’un compteur électronique, le
prix diminue graduellement jusqu’à
ce qu’un acheteur accepte de payer le
tel système d’enchères
viserait deux objectifs :
l’allocation de bois et
la fixation de prix. En
limitant les usines de
Marc Beaudoin
seconde transformaDirecteur général du Regroupement
tion au marché des
des sociétés d’aménagement
enchères, nous créeforestier du Québec
rions un débalancement dans la fixation des
prix parce que nous n’aurions plus
une distribution homogène du profil
des acheteurs. Afin d’éviter ces défaillances, il serait plutôt opportun de
libérer une partie des bois pour la se­
conde transformation tout en gardant
suffisamment de bois pour créer un
marché.
Le Monde Forestier • Mars 2008
Soudain, une voix se fait entendre et
commence à demander des prix. Frénétiquement, chacun lève sa main et
les prix montent. Notre propriétaire
de petite entreprise se demande bien
comment il pourra compétitionner
avec la multinationale alors que cette
dernière se demande s’il pourra trouver tout le bois dont il aura besoin.
Les camions sortent de l’arène. Certains les regardent la larme à l’œil. Les
autres heureux se demandant tout de
même s’ils n’ont pas payé trop cher.
Pourquoi parler de cela? Le livre vert
du ministre Claude Béchard propose la
création d’un marché pour les bois de
la forêt publique. C’est ce marché qui
établira comment vaut le bois en forêt
publique. Ce prix aura des impacts
importants sur la forêt privée et agirait
normalement comme base de discussion pour le bois des producteurs
privés. Si le mécanisme de mise en
marché est faussé en forêt publique,
il faussera également les échanges en
forêt privée.
C’est pourquoi il est important
d’en connaître un peu plus sur
les enchères.
Malheureusement,
l’expérience québécoise est très pau-
prix indiqué.
Ceci dit, plusieurs questions demeu­
rent à répondre.
Qu’arrive-t-il s’il n’y a pas beaucoup
d’acheteurs?
Cette question revient souvent lorsque
l’on pense à la vente de bois. Les
enchères n’étant qu’un moyen
d’activer la compétition entre acheteurs, elles ne pourront rien s’il n’y
a pas suffisamment de compétition.
Un système québécois devra tenir
compte du faible nombre d’usines
dans quelques régions. Dans ces cas,
il faudra utiliser d’autres moyens pour
fixer le prix de vente.
Les petites entreprises ne pourront pas
compétitionner avec les grosses!
Il s’agit d’un problème réel. Un gros
joueur pourrait augmenter le prix artificiellement afin de faire mourir la compétition. Deux méthodes sont souvent
utilisées pour éviter cette situation. La
première, consiste à mettre suffisamment de bois en vente. Ainsi, le gros
joueur ne pourrait pas tout acheter le
bois disponible et s’il le faisait à un
prix élevé, il mettrait son entreprise en
péril. La seconde consiste à créer des
catégories de vente accessibles à certaines classes d’industriels.
Les enchères permettront aux usines
de seconde transformation d’obtenir
du bois.
Cette prémisse est vraie. Toutefois, un