La droite gagne le pari de l`union - Haut-Rhin

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La droite gagne le pari de l`union - Haut-Rhin
DÉPARTEMENTALES - PREMIER TOUR
3
ELECTIONS L’alliance UMP-UDI arrive en tête
L’ÉDITORIAL
La droite gagne
le pari de l’union
de Dominique Jung
La méthode de l’apnée
A
Fort de sa première place avec plus du tiers des suffrages, l’UMP, alliée à l’UDI,
devrait faire basculer une quarantaine de départements au second tour. Elle a
surtout porté un rude coup au Premier ministre et a renforcé sa base électorale.
A
près vingt ans d’éclipse
pour la droite aux élections locales, la grande
marée bleue qu’attendait Nicolas Sarkozy devrait atteindre son plein dimanche prochain. « Le vent du changement
souffle et passe par les départements », constatait hier le président de l’UMP sans triomphalisme face à un résultat prévisible
et confirmé par les urnes.
Le 29 mars ressemblera au
21 avril dans beaucoup de cantons, avec des duels entre candidats de droite et binômes du
Front national. Les appels de
Manuel Valls à choisir le candidat de droite face à celui du FN
devrait permettre à l’alliance
UMP-UDI d’enlever la mise dans
les départements qu’il convoitait.
La cible Valls touchée,
le maillage local renforcé
Face à cette situation de tripartisme, Nicolas Sarkozy s’est surtout attaché à verrouiller le débat d’entre-deux-tours dès hier
soir. « Pas d’accord ni local ni
national avec le FN. Nous
n’avons rien à voir avec lui. Pas
de vote pour le Front national ni
pour la gauche au second tour si
nous n’avons pas de candidat ».
Le fameux « ni FN - ni gauche »
demeure donc de mise.
Si Nicolas Sarkozy reste modeste, c’est qu’avec un score estimé
entre 35 % et 38 %, la droite
dépasse à peine le total de tous
les partis de gauche réunis.
L’opposition peut en revanche
enregistrer ce matin trois motifs
Nicolas Sarkozy a répété hier soir qu’il n’y aurait pas d’accord avec le FN, mais qu’en cas de duel
FN-PS, il n’y avait pas à choisir. PHOTO AFP
de satisfaction.
D’abord, la majorité en place a
bel et bien été sanctionnée, à
commencer par son chef, le Premier ministre. En se positionnant sur l’échiquier politique
comme un leader de gauche qui
ne déplaît pas aux électeurs de
droite, Manuel Valls est devenu
la cible de l’UMP. « Les électeurs
ont mis dans le mille. C’est un
échec personnel pour Manuel
Valls et son cabinet qui ont organisé ce scrutin, découpé les cantons et voulu tant d’agressivité,
pendant cette campagne », a
lancé Laurent Wauquiez, secrétaire général de l’UMP, qui parle
« d’autoritarisme matamore » à
propos du Premier ministre.
Deuxième enseignement positif
vu de l’UMP, l’union de la droite
et du centre a fonctionné.
« C’est le meilleur rempart contre le Front national. Les Français l’ont démontré », souligne
Alain Juppé qui prend soin d’associer le MoDem au succès. Le
maire de Bordeaux, positionné
sur le créneau rassembleur du
centre gauche au gaullisme, est
aussi un gagnant de la soirée.
Enfin, l’UMP va retrouver ce soir
un maillage du territoire par des
élus locaux. Ces relais dans la
France d’en-bas avaient manqué
en 2012 à Nicolas Sarkozy pour
relayer le programme, motiver
les troupes et mener campagne.
Au soir du premier tour, un an
après la reconquête des villes,
les bases électorales de l’UMP
ont retrouvé une solidité depuis
longtemps abandonnée.
PASCAL JALABERT
R
Plus d’électeurs que prévu
Le niveau inattendu de la
participation, quoique médiocre, a pour conséquence
de permettre davantage de
triangulaires au second
tour, voire quelques quadrangulaires.
Les sondeurs se sont lourdement trompés sur ces élections,
et d’abord sur le niveau de
l’abstention. Elle était annoncée à des records, et elle est
effectivement élevée, sans doute autour de 50 %, mais moins
que prévu.
Ce résultat est lourd de conséquences pour le second tour.
Les candidats doivent avoir en
effet recueilli le score assez élevé de 12,5 % des suffrages exprimés pour être qualifiés. Un
haut niveau de participation rabaisse donc le seuil, et devrait
déboucher sur davantage de
triangulaires, et mêmes quelques quadrangulaires.
À 50 % environ, l’abstention est
beaucoup plus élevée qu’aux
cantonales de 2008 (35,13 %),
alors que le scrutin était couplé
aux municipales. Mais elle est
inférieure aux dernières élections cantonales de 2011 où elle
avait nettement dépassé 55 %.
Même constat positif par rapport au dernier scrutin tenu en
France, les européennes de
mai 2014, où l’abstention
s’était établie à plus de 57 %.
TTE-LII 02
Q LUNDI23MARS2015
près les municipales et avant les régionales, le
parti socialiste est en train de perdre la majorité
qu’il détenait dans les collectivités territoriales.
Manuel Valls peut se réjouir de faire mieux qu’aux européennes de mai 2014, il peut dire que le FN, contre lequel il s’est mobilisé, n’est pas le premier parti de France, cela n’empêche pas deux constats sans appel : deux
ans avant la présidentielle, le basculement à droite est
manifeste et la bipolarisation a vécu.
La nouvelle carte électorale comprend trois pôles : le
Front national s’invite durablement à côté de l’UMP/UDI
et du fragile bloc PS/divers gauche. Le FN, si absent
jusqu’alors dans les cantonales, améliore son implantation dans des secteurs ouvriers ou ruraux comme l’Yonne, le Lot-et-Garonne, le Tarn, les Pyrénées-Orientales, la
Meuse, la Moselle, la Haute-Marne, la Somme ou l’Aisne.
Quel que soit le nombre d’élus FN dimanche prochain,
cela souligne que le vote populaire, naguère ancré à
gauche, se déplace fortement vers l’extrême droite.
Pour minimiser le nombre de conseillers FN au soir
du 29 mars, le PS souhaite le retour du « front républicain ». Mais il en bénéficiera peu, car dans de nombreux
cas, ses candidats ont été éliminés dès hier. La désunion
de la gauche a fait des ravages, tandis que l’alliance
UMP-UDI qu’Alain Juppé recommandait chaudement a
montré son efficacité.
Pour la première fois, à cause du nouveau mode de
scrutin, les élections départementales ont un poids
national. Mais à court terme, cela ne changera rien.
Alors que Jean-Marc Ayrault a été remercié après les
municipales, Manuel Valls va rester à Matignon. C’est
moins la récompense de ses efforts qu’une méthode de
plongée en apnée. Le PS joue le tout pour le tout. Il assume le tournant social-démocrate, fait une croix sur les
régionales et serre les dents en espérant que d’ici à 2017,
l’amélioration de la situation économique lui redonnera
in extremis l’air frais qui lui manque tant.
R
ILS ONT DIT
À droite
Q Alain Juppé, maire de Bordeaux et candidat à la primaire UMP : ce
scrutin marque « un désaveu très net de la majorité gouvernementale […] Les Français disent clairement qu’ils n’ont pas confiance dans
la manière dont la France est gouvernée aujourd’hui ».
Au centre
Q Jean Arthuis, UDI : « Il faut revenir aux enjeux des territoires
départementaux. Une fois de plus, l’élection locale a été « nationalisée ». Au risque d’exaspérer. »
À l’extrême-droite
Q Marine Le Pen, présidente du Front national : « Sans implantation
locale préalable, avec un seul sortant sur 4 000 élus départementaux,
le Front national réussit l’exploit de dépasser dans une élection
locale son score des européennes […] Manuel Valls doit maintenant
écouter le message des urnes et avoir la décence de remettre sa
démission au président de la République, compte tenu des résultats
du PS. »
GROS PLAN
L’abstention a été moins forte que lors du dernier scrutin, les européennes de mai 2014 (57 %).
PHOTO AFP
« Mobiliser »
Le Premier ministre Manuel
Valls a résumé, dans son intervention, l’ambivalence du niveau de participation des
43 millions d’électeurs français
appelés à voter : il s’est d’un
côté réjoui que les Français
aient voté « plus que prévu »,
pour ajouter aussitôt que « trop
de Français ont encore fait le
choix de ne pas se rendre aux
urnes, et notre premier défi est
toujours là : mobiliser les élec-
teurs, leur redonner confiance ».
Comment expliquer une participation autour de 50 % ? En
positif, sans doute la mobilisation des électeurs de droite et
d’extrême droite, désireux de
sanctionner le gouvernement.
En négatif, le découragement
des électeurs de gauche et surtout des plus radicaux d’entre
eux.
Scrutin incompréhensible
N’oublions pas non plus une
donnée dénoncée hier soir par
Nicolas Sarkozy : les Français
ont voté hier pour des exécutifs
départementaux dont ils ne savent pas encore quels seront les
pouvoirs, puisque la loi qui en
décidera est en cours de discussion au Parlement. Des départements qui ont un temps été
voués à la disparition et que le
pouvoir a dotés d’un mode
d’élection aussi complexe que
paritaire.
F.B.
R
PHOTO AFP
Q Bernadette déçue par l’accueil
Bernadette Chirac a pris tout le monde de court en votant une
heure avant ce qui était prévu, hier, à Sarran. Il était 14h tout
juste lorsque l’épouse de l’ancien chef de l’État est arrivée. Elle
a été surprise de voir aussi peu de monde, se remémorant les
quelque 200 personnes qui attendaient le couple présidentiel,
ici, par le passé. « La presse a oublié que la femme de l’ancien
président venait voter », a-t-elle lancé. Armée de ses lunettes
de soleil, la candidate a voté et avait procuration pour Jacques,
son mari.