L`auto se réinvente en Picardie

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L`auto se réinvente en Picardie
RÉGION À LA UNE 3
SAMEDI 18 JUILLET 2015 COURRIER PICARD
INDUSTRIE-RECHERCHE
L’auto se réinvente en Picardie
Si la Picardie n’a pas de constructeurs automobiles, elle possède plusieurs
équipementiers, à la pointe de l’innovation.
lus légère et donc moins
gourmande, mais aussi plus
fiable et plus confortable…
L’automobile de demain existe déjà. Du moins elle est en train de
prendre forme sur les écrans des
ingénieurs et techniciens qui s’activent, autant chez les constructeurs que chez les équipementiers.
De ce point de vue, la Picardie est
en droit de réclamer, de concert
avec le Nord-Pas-de-Calais, sa part
de paternité dans la voiture du futur. Réunies en une seule entité le
1er janvier prochain, les deux régions constituent un pôle automobile de tout premier plan. Il réunit
des assembleurs dans le Nord
(PSA, Toyota, Renault) et de nombreux équipementiers en Picardie,
dont certains jouent un rôle clé en
matière de recherche et d’innovation.
Les laboratoires universitaires ne
sont pas en reste, à l’image du
centre de recherche de l’UTC (Université technologique de Compiègne). Il participe à plusieurs
programmes, souvent en partenariat avec les industriels.
P
Faurecia adore les végétaux
D’ici quelques années, les plastiques à base de pétrole auront
tous disparu au profit de matières
végétales… Chez Faurecia à Méru,
spécialisé dans les intérieurs de
véhicules, il y a bien longtemps
que l’on est passé de la réflexion
aux actes. Témoins, ces planches
de bord et ces habillages de
portes qui font appel à des fibres
végétales, extraites tantôt du lin,
tantôt du chanvre et qu’on trouve
aujourd’hui dans des véhicules de
série, à l’image de la 308. Témoins
aussi ces décorations en bois, réservée jusqu’ici aux Rolls et autres
Bentley, et qui feront demain leur
apparition sur les véhicules de
« Monsieur tout le monde ». Grâce
à un procédé inédit qui permet de
travailler le bois sur des épaisseurs de quelques dixièmes de
millimètres, et donc de le mettre
en forme à la demande.
Conduire en supervisant
Comprendre la scène située en
avant du véhicule, anticiper et éviter les pertes de contrôle, imaginer
une conduite partagée entre
l’homme et la voiture… Dans le
centre de recherche de l’UTC financé par la région Picardie, les voitures bardées d’équipements optroniques se pilotent grâce à un
joystick, comme dans un vulgaire
jeu vidéo. « Nous travaillons activement sur des systèmes d’aide à la
conduite, indique Philippe Bonnifait, enseignant chercheur spécialisé dans le véhicule intelligent.
L’idée, c’est qu’à terme, le pilote du
véhicule devienne superviseur… »
Automatiser en partie la conduite
tout en autorisant une reprise en
main par le conducteur ; ici, on attend désormais avec impatience
de pouvoir débuter les essais en
grandeur réelle, sur route, grâce à
l’introduction prochaine d’une
carte grise spécifique permettant
de faire rouler des véhicules sans
pilote.
Des essais, le centre technique
Valéo Amiens en réalise à longueur
Au centre technique Valéo (en haut, gauche) on travaille sur les embrayages du futur, alors que Faurecia (en haut à droite)
réinvente le tableau de bord. A l’UTC, on planche sur le véhicule autonome et la réduction du bruit avec des matérieux isolants.
« Depuis l’arrivée
du moteur à explosion,
la voiture n’a pas connu
d’évolution majeure. Là,
on franchira un cap »
Philippe Bonnifait, UTC
d’année. Sur piste, au sein d’un
centre d’ingénierie qui a des allures de forteresse. Logique ; c’est
ici que se pensent les transmissions du futur. À l’initiative de
l’équipementier et en partenariat
souvent avec les principaux
constructeurs ; Ford, Volvo, Renault, PSA, VAG, Tata…
Le site a ouvert en 1999, lorsque
Valéo a choisi d’implanter à proximité des unités de production
d’Amiens, Abbeville et Étaples, son
centre technique. Il regroupe aujourd’hui plus de 250 ingénieurs et
techniciens qui planchent sur des
transmissions plus souples, plus
efficientes, plus légères et, fin du
fin, faciles à usiner, coûts obligent :
« Il existe une relation très étroite
entre le design et la capacité à usiner
les produits que nous pensons ici.
L’activité procès tient aujourd’hui
une place très importante dans la recherche », rappelle Michel Forissier
directeur R&D du pôle systèmes de
propulsion.
D’où, l’intérêt de la mitoyenneté
avec le centre de production d’embrayages d’Amiens. Car ici, on ne
se contente pas de penser les
transmissions à partir de modèles
mathématiques ; on usine aussi les
prototypes qui serviront à valider
les nouveaux concepts.
Concept : le mot va bien à Faurecia. À mi-chemin entre le cockpit
d’un avion de chasse et la voiture
que nous pratiquons quotidiennement, Faurecia, équipementier
GAGNER DU POIDS À TOUT PRIX
LE CHIFFRE
▶C’est une obsession chez les
kilos de matériaux absorbants en
moyenne sur un véhicule, destinés à
6atténuer
le bruit du moteur. L’UTC travaille
constructeurs ; gagner du poids
coûte que coûte, pour alléger la
consommation et les émissions
de CO2. Chez Valéo, comme chez
Faurécia ou à l’UTC, ces gains
de poids sont au coeur de la
démarche d’innovation.
▶Le bruit est lui aussi devenu
un ennemi. D’ici 2020, les
niveaux sonores devront avoir
baissé de 4 décibels. Énorme !
français a mis au point dans son
centre technique de Méru (60) un
étonnant
démonstrateur.
Un
condensé des techniques qui entreront demain dans la composition d’une planche de bord. Nouveaux matériaux, parfois à base de
végétaux, absence de boutons, manettes et autres cadrans, le tout
remplacé par un simple écran tactile rétractable…
Une première mondiale ; jusqu’ici, ou les écrans étaient tactiles,
ou ils étaient rétractables, jamais
les deux à la fois. Demain, il suffira
d’effleurer cette surface comme on
le fait avec une tablette pour allumer ses feux, changer de station de
radio ou augmenter le flux d’air en
direction des places arrières… La
vitesse et les informations, elles,
s’afficheront sur une projection
« tête haute ».
À quel horizon tout cela ? D’ici 10
à 15 ans, ces équipements seront
produits en série, révolutionnant
la voiture : « Depuis l’arrivée du moteur à explosion, l’automobile
n’avait pas connu d’évolution majeure, rappelle Philippe Bonnifait.
Là, on franchira vraiment un cap ! »
PHILIPPE FLUCKIGER
LA PHRASE
« L’automobile est en pleine révolution,
ce n’est donc pas étonnant qu’elle innove
autant. On réalise que la voiture de
à réduire cette masse avec des matériaux demain ne sera pas celle d’aujourd’hui »
Laurence Joly, INPI (propriété industrielle)
plus légers et plus efficients.
TRE02.

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