RMV 07 - Revue de Médecine Vétérinaire

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RMV 07 - Revue de Médecine Vétérinaire
Cas cliniques et traitements chirurgicaux de
radius-curvus dits à « radius court » chez 2
chiens
C. BISMUTH1*, M. MILLET1, F. COLLARD1, P. MAITRE1, T. CACHON1, E. VIGUIER1
1
Service de Chirurgie, CHEVAC, VetAgro Sup, 1 avenue Bourgelat 69280 Marcy-L’étoile, FRANCE.
*Auteur chargé de la correspondance : [email protected]
RÉSUMÉ
Les formes de radius curvus dites à « radius court » sont moins fréquemment
observées que les radius curvus classiques et se caractérisent par un arrêt partiel
ou total de la croissance du radius qui conduit à un défaut d’angulation de
l’avant bras, une subluxation du coude et des difficultés locomotrices parfois
majeures. Une chienne Braque Allemand de 4 mois et un chien Labrador de
7 mois ont été présentés à l’École Nationale Vétérinaire de Lyon pour une
déformation au niveau de leur avant-bras gauche correspondant à un radius
curvus « à radius court ». Étant donné la boiterie importante s’aggravant avec
la croissance, un traitement chirurgical a été réalisé dans les 2 cas. Le Braque
Allemand a été traité par ostéotomie correctrice du radius et par une fixation
externe d’allongement de type Ilizarov alors que le Labrador a subi une ostéotomie correctrice du radius et une fixation externe standard sans allongement
osseux. En dépit des signes d’arthrose du coude associés au radius curvus,
des résultats fonctionnels et esthétiques satisfaisants ont été obtenus par chacune
des 2 techniques. Ces 2 cas cliniques démontrent l’intérêt d’une correction
orthopédique précoce des déformations du radius dont les modalités dépendent
de l’âge de l’animal et de l’importance des lésions associées sous contrôle
radiographique.
Mots clés : Radius curvus, chien, radiographie, centre de
rotation d’angulation, fixation externe, ostéogenèse par
distraction.
Introduction
Les difformités de l’avant-bras sont les difformités de membre
les plus rapportées chez le chien avec une prévalence d’environ
0,74 % [14]. Le radius-curvus dit à « radius court » est moins
fréquent que le radius curvus à « ulna court » avec comme
conséquences sur l’avant bras: un défaut de longueur, une déviation (varus ou valgus), une rotation avec ou sans courbure
de l’os concerné, une subluxation du coude et un handicap
parfois majeur. Celui-ci est majoritairement lié à une fermeture
de la plaque de croissance (PDC) distale du radius (14 % des
radius-curvus [8]) et se rencontre chez les jeunes chiens en
croissance. Cette difformité est considérée comme difficile à
gérer, avec des déformations dans plusieurs plans (convexité
crâniale, varus ou valgus et rotation). Il est nécessaire de choisir
le type de correction chirurgicale de manière judicieuse en
fonction de l’âge de l’animal, et donc du potentiel de croissance restant, et du degré d’atteinte.
SUMMARY
Case reports of radial deformity and orthopaedic treatments in 2 dogs
Radial deformities due to premature partial or complete stop of the radius
growth are less frequently recorded than radial deformities due to ulna alterations but they also lead to an exaggerated antebrachial angulation, elbow
subluxation and to locomotion difficulties, sometimes severe. A female, 4
month old, German Braque and a male, 7 month old, Labrador were presented
for a radial deformity of the left thoracic limb due to premature closure of
the distal radial growth plate. For the first dog, a corrective radial osteotomy,
an ulna ostectomy and a distraction osteogenesis with a modified Ilizarov external fixation were performed whereas only a corrective radius osteotomy
and a standard external fixation were proposed for the second dog. Although
arthrosis was present in the elbow in both cases, the 2 orthopaedic treatments
have given satisfactory functional and visual outcome. These 2 case reports
point out the benefit of an early corrective surgery depending on the animal
age and on the intensity of the radiographic deformity and associated injuries.
Keywords: Radial deformity, dog, radiography, center of
rotation of angulation, external fixation, distraction osteogenesis.
Une chienne Braque Allemand de 4 mois, destinée à la
chasse, et un chien Labrador de compagnie de 7 mois sont
présentés à VetAgro Sup pour une difformité au niveau de
l’avant-bras gauche. Les deux chiens présentent en effet une
diminution marquée de la taille du membre, une convexité crâniale de l’avant-bras et un carpe en varus. Aucun antécédent
n’est disponible pour le Braque Allemand et aucun traumatisme n’est rapporté pour le Labrador. Les deux chiens ont été
référés par leur vétérinaire traitant à VetAgro Sup pour le traitement chirurgical de cette difformité aux vues du handicap
et du préjudice esthétique engendrés.
Le but de cet article est dans un premier temps de présenter
les cas cliniques et de décrire la thérapeutique choisie. Puis,
les principes généraux de ces traitements seront abordés en
précisant les caractéristiques de chacun, la complexité de réalisation, les limites de correction et l’importance du suivi clinique. Enfin, en s’appuyant sur les résultats obtenus, les
complications et le pronostic de cette affection seront finalement abordés.
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TRAITEMENTS ORTHOPÉDIQUES DE RADIUS CURVUS À RADIUS COURT CHEZ 2 CHIENS
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Cas cliniques
EXAMENS CLINIQUES ET ORTHOPÉDIQUES
A l’examen dynamique du Braque Allemand, on constate
une boiterie permanente importante avec appui du membre
thoracique gauche et à l’examen statique, une très nette différence de longueur entre les deux membres antérieurs, malgré
une longueur comparable du carpe, des métacarpes et des phalanges. Le membre atteint présente une convexité crâniale
anormale et le carpe est tenu en varus. La manipulation du
coude et du carpe n’entraine pas de douleur. La mobilité du
coude est normale et celle du carpe diminuée. Son examen
clinique général et le reste de son examen orthopédique ne révèlent aucune autre anomalie.
A l’examen dynamique du Labrador, il est possible de noter
une boiterie importante du membre thoracique gauche et à
l’examen statique, la même difformité que celle du Braque
Allemand a été constatée : le membre est de taille très nettement
diminuée et le carpe est tenu en varus. La manipulation du
coude et du carpe est non douloureuse, la mobilité du coude
est normale et celle du carpe diminuée. Le reste de l’examen
orthopédique et clinique ne montre pas d’autre anomalie.
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
Deux vues radiographiques crânio-caudale et médio-latérale
des deux radius-ulna sont alors réalisées pour les deux chiens
ainsi qu’un comparatif du membre controlatéral.
Pour le Braque Allemand, on note, sur la vue médio-latérale,
une convexité anormale de l’extrémité distale du radius
gauche ainsi qu’un varus du carpe sur la vue de face (figure 1).
Une ossification partielle de la PDC distale du radius compatible avec une fermeture partielle médiale de la PDC distale
est visible. On note, de plus, une incongruence articulaire du
coude (2 mm entre la tête radiale et le processus coronoïde
médial de l’ulna). En réalisant les mesures standards requises
(angle de convexité et angle de varus-valgus), on note un raccourcissement de 5,7 cm du radius gauche (35% de raccourcissement par rapport au membre sain), une convexité crâniale
de 114° et un varus de 35° (tableau I). La chienne présente
donc un radius curvus dit « à radius court » avec fermeture
prématurée de la partie médiale de la PDC distale du radius.
Le Labrador présente également une convexité crânio-latérale
du radius gauche associée à un varus du carpe (figure 2). La
Radius (cm)
Ulna (cm)
CCR (°)
IRU (mm)
Pré-Op.
10,5
15,5
114
2
Braque allemand
Post-Op.
18,4
21,8
140
0
FIGURE 1 : Radiographies préopératoires (vues crânio-caudale et médiolatérale du radius-ulna) du Braque Allemand de 4 mois, représentation
des mesures des angles de convexité crâniale (angle C : angle obtenu
à l’intersection des perpendiculaires entre les 2 surfaces articulaires
du coude et du carpe en vue médio-latérale) et de varus-valgus (angle
V : angle obtenu à l’intersection des perpendiculaires entre les 2 surfaces articulaires du coude et du carpe en vue crânio-caudale) et ossification partielle de la plaque de croissance (PDC) distale du radius
(flèche bleue) (Service d’Imagerie, CHEVAC, VetAgro Sup).
présence d’un ancien trait de fracture en regard de la corticale
caudale et médiale de l’extrémité de la diaphyse du radius associée à des productions osseuses semble être à l’origine de
la difformité. Il serait donc fortement probable qu’une fracture
Salter-Harris type V (Tableau II) ait entrainé une fermeture
partielle médiale de la PDC distale du radius et donc un radius
curvus à « radius court ». Enfin, le coude présente une incongruence radio-ulnaire (2 mm entre la tête du radius et le processus coronoïde médial de l’ulna) et des signes d’arthrose
discrets (suspicion de fragmentation du processus coronoïde).
VSOp.
+0.6
+0,6
+0.3
+0,3
-20
-20
Pré-Op.
14,3
19,9
139
2
Labrador
Post-Op.
15,5
20,1
157
0,7
VSOp.
-4.5,
-4,5
-0.4
-0,4
-4
-4
CCR : convexité crâniale du radius ; IRU : incongruence radio-ulnaire ; Pré-Op. : mesures orthopédiques du membre atteint préopératoires ; PostOp. : mesures orthopédiques du membre atteint postopératoires ; VSOp. : variations observées des mesures entre le membre sain et le membre opéré.
TABLEAU I : Mesures orthopédiques préopératoires et postopératoires des radius-ulna réalisées sur les 2 cas cliniques décrits (braque allemand de 4 mois et labrador de 7 mois) présentant un radius-curvus dit à « radius court ».
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BISMUTH (C.) ET COLLABORATEURS
Aux vues des anomalies décrites et du handicap engendré,
une chirurgie correctrice est indiquée dans les deux cas. Les
mesures obtenues ainsi que l’âge des deux chiens sont les critères principaux permettant de poser l’indication chirurgicale
puis de choisir le traitement le plus adapté.
Traitement chirurgical et conduite
postopératoire
FIGURE 2 : Radiographies préopératoires (vues crânio-caudale et médiolatérale du radius-ulna) du Labrador de 7 mois montrant une convexité
crânio-latérale du radius gauche associée à un varus du carpe, et présence d’un ancien trait de fracture (flèche bleue) à l’extrémité de la
diaphyse du radius (Service d’Imagerie, CHEVAC, VetAgro Sup).
Dans le cas du Braque Allemand, une ostéotomie correctrice
du radius et une ostectomie de l’ulna ont été proposées en raison de son jeune âge afin de corriger les défauts d’angulation
et de rotation. Cette solution chirurgicale est associée à un allongement du membre à l’aide d’un fixateur externe de type
« Ilizarov » pour atteindre la longueur du membre opposé et
obtenir une longueur standard d’adulte. Une broche complémentaire est placée dans la métaphyse du radius distal pour
éviter un glissement latéral. Dans le cas du Labrador, plus âgé
et donc en fin de croissance, seule une ostéotomie correctrice
du radius est envisagée pour corriger les défauts d’angulation
et de rotation. La mise en place d’un fixateur externe simple
de type III (bilatéral avec une barre frontale et une entretoise)
permettra la fixation des abouts osseux. Les radiographies
postopératoires montrent un bon positionnement des implants
dans les 2 cas (figures 3 et 4) ainsi qu’une correction immédiate du varus et de la convexité crâniale.
Au total, on note un raccourcissement de 5 cm du radius atteint
(25 % de raccourcissement par rapport au membre sain), une
convexité crâniale de 139° et un varus de 21° (Tableau I).
La conduite postopératoire immédiate est identique pour les
deux chiens et consiste en la mise en place d’un traitement
antibiotique (cefalexine (Rilexine®) 12,5 mg/kg deux fois par
jour), anti-inflammatoire (méloxicam (Métacam®) 0,1 mg/kg
une fois par jour) et antiseptique local à la sortie des broches.
Type de fracture
Pronostic
Fracture-séparation au travers de la zone hypertrophique.
Bon : après réduction anatomique
et stabilisation précoce
Fracture-séparation à la fois au travers d’une portion
de la zone hypertrophique et de la métaphyse.
Bon : après réduction anatomique
et stabilisation précoce.
Fracture-séparation à la fois au travers d’une portion
de la zone hypertrophique et d’une portion de l’épiphyse.
Ce type de fracture possède donc une partie intra-articulaire.
Fracture-séparation à la fois au travers d’une portion
de la zone hypertrophique et d’une portion de l’épiphyse
et de la métaphyse. Ce type de fracture possède donc une
partie intra-articulaire.
Lésion de compression de la PDC.
Bon à moyen : arthrose, condyle
hypoplasique. Mauvais si réduction
non anatomique ou tardive.
Déformation possible.
Bon à moyen : arthrose
Mauvais si réduction non anatomique
ou tardive.
Déformation possible.
Mauvais : arrêt de croissance,
déformations.
TABLEAU II : Classification des fractures de Salter-Harris (d’après [10, 13]).
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TRAITEMENTS ORTHOPÉDIQUES DE RADIUS CURVUS À RADIUS COURT CHEZ 2 CHIENS
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FIGURE 3 : Radiographies postopératoires (vues crânio-caudale et médiolatérale du radius-ulna) du Braque Allemand de 4 mois montrant un
bon positionnement des implants du fixateur externe circulaire d’Ilizarov, le site d’ostectomie ulnaire et le site d’ostéotomie radiale avec
une greffe d‘os cortico-spongieux (Service d’Imagerie, CHEVAC,
VetAgro Sup).
FIGURE 4 : Radiographies postopératoires (vues crânio-caudale et médiolatérale du radius-ulna) du Labrador de 7 mois montrant un bon positionnement des implants (les tiges en carbone ne sont pas visibles
à la radiographie), le site d’ostéotomie radiale et la greffe d’os spongieux dans l’ouverture du coin de l’ostéotomie (Service d’Imagerie,
CHEVAC, VetAgro Sup).
Durant les 3 premiers jours postopératoires, le Braque Allemand a présenté un œdème du carpe et des phalanges traité
par des douches tièdes et froides. La distraction est commencée
3 jours après l’intervention à raison de 0.5 mm deux fois par
jour pendant les 3 premières semaines puis à raison de 1 mm
deux fois par jour. La chienne est rapidement confortable et
utilise le membre opéré normalement. Néanmoins, 6 semaines
après l’intervention, un écoulement accompagné de sensations
douloureuses a été noté au niveau d’une des broches proximales. Cet écoulement, qui persistera malgré la diminution de
la vitesse de distraction, entraînera le retrait de la broche à 8
semaines. Le contrôle radiographique effectué à cette période,
révèle une fracture de l’ulna (très probablement liée à une
chute, rapportée par le propriétaire). Lors du contrôle à 12 semaines, une cicatrisation osseuse complète du radius et de
l’ulna est obtenue et le fixateur est alors retiré. A 20 semaines,
la broche insérée dans le radius distal est retirée. Hormis une
discrète boiterie apparaissant après une période d’activité soutenue, la chienne a une activité complètement normale 3 ans
après l’intervention chirurgicale. L’examen orthopédique révèle
une absence de douleur à la manipulation du membre malgré
un discret valgus (figure 5A), et une perte de flexion du carpe
de 60 degrés mais sans douleur. Les radiographies réalisées
alors montrent (figures 5B et 5C) un membre de taille similaire
au membre non atteint, une arthrose modérée du coude et la
persistance d’une légère convexité crâniale (tableau I).
A
FIGURE 5 : Etat de la correction orthopédique du Braque Allemand 3 ans après l’intervention chirurgicale : A. Aplombs en vue crâniocaudale montrant un discret valgus, des membres de tailles identique et la persistance d’une discrète convexité crâniale de l’avantbras gauche (collection personnelle) ; Radiographies postopératoires correspondantes en vue médio-latérale (B.) et cranio-caudale
(C.) (Service d’Imagerie, CHEVAC, VetAgro Sup).
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BISMUTH (C.) ET COLLABORATEURS
Le membre a été rallongé de 7,9 cm soit 75 % de sa longueur
initiale et il persiste une convexité crâniale de 20° comparativement au membre controlatéral. La chienne esthétiquement
et fonctionnellement est quasi normale et les propriétaires ont
été extrêmement satisfaits du résultat.
Le Labrador a montré une perte d’appui ainsi que la présence d’un œdème majeur les premiers jours postopératoires.
Les jours suivants, l’appui est devenu plus important. Les
soins liés à la présence des fixateurs externes ont été effectués
tous les jours la première semaine puis tous les deux jours durant
la seconde. Au contrôle postopératoire réalisé à 2 semaines,
le chien était actif mais présentait une boiterie modérée associée
à un gonflement important des tissus mous. Un écoulement
sans instabilité était présent au niveau de la broche distale. Au
contrôle radiographique, les implants étaient toujours correctement en place mais une périostite était visible au niveau du
radius proximalement et médialement à la broche distale. Une
ostéomyélite étant suspectée, une antibiothérapie à la marbofloxacine (2 mg/kg per os une fois par jour) pendant 3 semaines a été mise en place. Quatre semaines après
l’intervention, l’œdème et l’écoulement ont disparu et la boiterie a été très nettement diminuée. Au suivi radiographique,
la cicatrisation osseuse semblait complète et la périostite sur
la corticale médiale du radius moins réactionnelle. Après retrait
du fixateur externe, l’antibiothérapie a été poursuivie pendant
3 semaines. Le dernier contrôle a eu lieu 3 mois après la chirurgie : le chien présentait une activité complètement normale
malgré une différence de longueur des deux membres antérieurs (figure 6A). A l’examen clinique, ce défaut de longueur
était compensé par une ouverture des angles scapulo-huméral
et huméro-radial. La manipulation du coude a été non douloureuse tout comme celle du carpe qui n’était plus en varus
malgré une diminution de sa flexion (90°). A l’examen radiographique, le radius a présenté un raccourcissement de 22 %
comparativement au membre sain (tableau I). Néanmoins,
cette diminution a représenté moins de 10 % de la hauteur au
garrot. Enfin, il a persisté une discrète incongruence radio-ulnaire
associée à une arthrose modérée (figures 6B et 6C). Le propriétaire s’est déclaré satisfait car le chien était actif et supportait bien les promenades.
Discussion
Chez le jeune en croissance, la PDC des os longs est l’élément le plus fragile comparé à l’os ou aux ligaments l’entourant (rupture à partir de 13 kg/mm³ pour l’os et de 1.5 kg/mm³
pour le cartilage de croissance) [20, 22, 26]. Au sein de la
PDC, la partie la plus fragile est la jonction entre les zones
hypertrophique et proliférative [5, 20, 26]. Chez le jeune, lors
d’un choc, le trait de fracture passe par la zone la plus fragile
c'est-à-dire la PDC, le plus souvent au niveau de la partie la
moins résistante, c’est-à-dire la zone des cellules hypertrophiques [15, 20, 26]. Le traumatisme est l’étiologie la plus
fréquente des déformations unilatérales et représentent 57 %
des causes de déformations selon une étude portant sur 185
cas [7]. La classification de Salter-Harris de ce type de fractures (Tableau II) permet de décrire la lésion en fonction des
zones concernées et du déplacement et de proposer un pronostic de récupération fonctionnelle du membre après traitement chirurgical [20, 22, 26]. Dans les deux cas décrits ici,
un tassement incomplet médial de la PDC a été observé ce qui
conduit à suspecter une fracture de Salter-Harris de type V
asymétrique, bien que la fermeture asymétrique soit plus fréquemment observée en partie latérale que médiale [13]. Le
diagnostic est difficile car il n’y a ni fracture vraie, ni déplacement visible à l’examen radiographique dans les premiers
jours qui suivent le traumatisme [26, 27], la lésion ne devenant
radiographiquement visible qu’au bout de 15 jours. Les déformations osseuses apparaissent plus tard, soit 2 à 4 semaines
après le traumatisme initial [7]. La fermeture incomplète de
la PDC est visible sur la radiographie comme une partie ossifiée
A
FIGURE 6 : Etat de la correction orthopédique du Labrador 3 mois après l’intervention chirurgicale : A. Aplombs en vue crânio-caudale
montrant un membre antérieur gauche plus court avec une ouverture de l’articulation du coude et de l’épaule, une absence de varus
et la persistance d’une convexité crâniale (collection personnelle) ; Radiographies postopératoires correspondantes en vue médiolatérale (B.) et cranio-caudale (C.) montrant la persistance d’une incongruence radio-ulnaire (étoile jaune) associée à une arthrose
modérée (étoile rouge) (Service d’Imagerie, CHEVAC, VetAgro Sup).
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TRAITEMENTS ORTHOPÉDIQUES DE RADIUS CURVUS À RADIUS COURT CHEZ 2 CHIENS
353
donc radio-opaque en place de la zone radio-transparente de
la PDC [14, 15, 24, 26].
Pour les segments à os double, la croissance de chacun des
os doit être identique et synchrone, donc toute fermeture prématurée d’une des PDC entraîne une difformité antébrachiale
puisque l’os non atteint continue sa croissance [20, 23]. La
croissance du radius est réalisée pour 60 % par sa PDC distale
et celle de l’ulna pour 85 % par sa PDC distale (en réalité 100 %
de la croissance en longueur) [7, 15, 26]. Une atteinte de la
PDC distale de l’ulna est ainsi plus rapidement décelable et
entraîne des difformités généralement plus marquées. Selon
la classification de Latte, les 2 cas reportés ici présentaient un
radius curvus de type 3 dont la fréquence est estimée à 14 %
au sein des radius-curvus (contre 49 % des radius curvus
consécutifs à une fermeture prématurée de la PDC distale de
l’ulna) [7].
Selon l’âge du chiot lors du traumatisme, le potentiel de
croissance restant de la PDC affectée détermine l’importance
du défaut de croissance, le raccourcissement et les déviations
possibles (ou futures) de l’os. La localisation et la quantité de
PDC atteinte détermine la présence ou non d’une asymétrie
de l’épiphyse et les défauts d’alignement ou de longueur [5,
22, 24, 26]. Les incongruences articulaires ont pour origine à
la fois le raccourcissement et les défauts d’alignement [7, 24].
Les lésions de la PDC distale de l’ulna sont rapidement visibles
par une déformation en valgus précoce s’aggravant avec la
croissance. Lors de la fermeture prématurée de la PDC distale
du radius, il survient un défaut d’alignement, un défaut de longueur et une incongruence articulaire. Le défaut d’alignement
est évalué à la fois par l’angulation générale du membre avec
un varus et une convexité crâniale anormale du radius et par
la rotation avec une pronation de la main mais ces lésions sont
observées plus tardivement par le propriétaire car le varus est
d’abord discret. Les défauts de longueur et d’angulation du
radius engendrent enfin une incongruence articulaire du coude
avec une augmentation de l’espace huméro-radial aboutissant
souvent à une fragmentation du processus coronoïde médial
de l’ulna (figure 7) [13, 15, 20, 22, 24, 26]. Les incongruences
au niveau du coude sont une cause de douleur et de boiterie
importantes entraînant inévitablement à long terme l’apparition
d’arthrose [5, 16, 21, 22, 24].
Les buts du traitement chirurgical sont axés sur les difformités
rencontrées et consistent dans un premier temps en une correction de l’alignement et de la rotation [14, 15, 20, 24], puis
dans un deuxième temps en la correction de la congruence articulaire du coude en modifiant le redressement du radius lors
de faibles déficits de longueur ou les défauts de longueur pour
les déficits plus importants [4, 5, 8, 14, 15, 20, 24].
Les deux chiens présentés dans ce travail ont subi une ostéotomie correctrice du radius de type ostéotomie en coin ouvert
après planification de la chirurgie à l’aide de 2 radiographies
orthogonales du membre atteint et du membre controlatéral
[15]. L’ostéotomie peut être simple transverse ou en coin et
donc réalisée à l’ostéotome ou moins souvent à la scie oscillante
mais l’utilisation d’une lame de scie en dôme est également
décrite [6]. Comme il est impossible de voir sur la même vue
le coude et le carpe de face, les erreurs de mesures des déviations
sur les deux projections ne sont pas négligeables et certains
auteurs recommandent de réaliser deux radiographies indéRevue Méd. Vét., 2012, 163, 7, 348-356
FIGURE 7 : Conséquences du radius curvus sur l’incongruence articulaire
du coude d’après [23] : 1. augmentation de l’espace huméro-radial;
2. écartement entre le bec de l’olécrâne et la fosse olécranienne; 3.
Remodelage du processus coronoïde; 4. déplacement distal et latéral
de la grande échancrure sigmoïde du radius.
pendantes du carpe et du coude de face [3]. Des contrôles permanents peropératoires des axes sont, dans tous les cas, primordiaux avant l’ostéotomie puis lors de la stabilisation finale.
Une nouvelle méthode consistant en la détermination des
points de centre de rotation d’angulation ou CORA (« center
of rotation of angulation ») est utilisée en humaine, et est appliquée plus récemment au chien. Le CORA est déterminé radiographiquement par le point de croisement entre l’axe
anatomique du radius distal et l’axe anatomique du radius
proximal [3]. Lorsque les deux axes se croisent effectivement
au sein de l’os radial la difformité est considérée comme uniapicale comme dans les deux cas présentés ici (figures 8A et 8B)
[6]. Lorsque les deux axes se croisent à l’extérieur du radius,
il est tracé un axe dit intermédiaire permettant de déterminer
non pas un CORA mais deux et la difformité est qualifiée de
bi-apicale (figures 8C, 8D et 8E (commentaire 2)) [6]. L’ostéotomie de correction est alors centrée sur le ou les CORAs
afin de corriger les angulations : les difformités bi ou multiapicales deviennent rapidement un défi chirurgical. Il est à
noter que le scanner apporte une planification plus objective
(notamment lors de grande difformité en rotation) [2, 3, 24].
Ces buts chirurgicaux peuvent donc être atteints de manière
très différente et le choix du traitement dépend de nombreux
critères.
Chez les chiens pour lesquels il reste environ 2 à 3 mois de
croissance, ce qui représente un âge approximatif de moins
de 8 mois pour les races géantes, de moins de 7 mois pour les
races moyennes et de moins de 4 mois pour les petites races
[15] lors du diagnostic de radius curvus à « radius court », le
traitement le mieux adapté semble être de réaliser une ostéotomie correctrice du radius et une ostéotomie ou une ostectomie
de l’ulna puis d’allonger le membre [12, 20, 24]. Ainsi, le
Braque Allemand de 4 mois présenté ici possédait une grande
perte de longueur du membre (5,7 cm soit 35 % de raccourcissement du radius). Afin d’obtenir à la fin de la croissance
et après correction, les deux antérieurs de même longueur, il
est important de connaître le potentiel de croissance restant et
les longueurs des radius et ulna à l’âge adulte (valeur standard). La valeur de l’allongement sera la différence entre la
longueur finale désirée et la mesure constatée lors de la correction [12].
L’allongement dans notre cas a été de 57 % par rapport à la
longueur initiale mais des allongements allant jusqu’à 80 %
354
BISMUTH (C.) ET COLLABORATEURS
FIGURE 8 : Détermination radiographique du ou des CORAs (center of rotation of angulation) dans les cas de difformités uni-apicales
caractérisées par un CORA unique (A. cas du Braque Allemand, B. cas du Labrador) (Service d’Imagerie, CHEVAC, VetAgro
Sup)) et dans les cas de difformités bi-apicales caractérisées par 2 CORAs (C., D. et E. : la ligne verte représente l’axe de l’articulation distale et proximale, les lignes rouges sont les axes anatomiques des segments distal et proximal du radius et la ligne bleue
est l’axe anatomique du segment intermédiaire du radius, le CORA de chaque segment est donné par l’intersection des lignes bleue
et rouge) (d’après [6]).
ont été décrits [25]. La correction des difformités chez le
Braque Allemand a été réalisée dans ce travail en un seul
temps opératoire pour les déviations angulaires selon les trois
axes et l’allongement a été différé et réalisé progressivement
selon le principe d’« ostéogenèse par distraction » [5, 8, 15,
20, 22, 28]. Cependant, les corrections de difformités et de
longueur peuvent également être réalisées simultanément et
progressivement [13, 21]. Dans le cas du Braque Allemand,
la fixation des abouts osseux et la réalisation de la distraction
ont été obtenues par mise en place du fixateur externe d’ « Ilizarov » (Tableau III) [5, 8, 13, 15, 20, 22, 24]. Le Polyfix 6
moyen a été utilisé et la technique de pose est celle décrite
communément par Latte [9, 10].
L’ostéogenèse par distraction consiste en l’induction mécanique de la formation d’un nouvel os à la suite d’une séparation
graduelle des deux abouts osseux par effet de la contrainte en
traction : la tension appliquée induit une contrainte sur le cal
qui le pousse à s’allonger. La distraction a été commencée
après une période de latence de 3 jours afin de laisser la phase
inflammatoire se mettre en place et d’obtenir une organisation
du cal fibrineux. Ce dernier doit, en effet, être suffisamment
élastique pour supporter l’allongement sans se rompre et activer
l’ostéogénèse (et ainsi éviter les non-unions). Une période de
latence de 1 à 4 jours est communément recommandée chez
le chien en sachant qu’au-delà de 7 jours, il y a un risque de
formation de cal précoce [5, 15, 20, 22, 24]. La distraction
peut également débuter quasiment immédiatement sur les très
jeunes chiens en raison de leur fort potentiel d’ostéogénèse.
La zone séparant ainsi les deux abouts osseux, visible sur la
radiographie à 8 semaines du Braque Allemand (figure 9) est
nommée interzone [20]. La partie centrale est la partie la plus
jeune de l’os en formation et la moins minéralisée, les parties
contre les ostéotomies sont les plus anciennes, l’os étant davantage minéralisé car il commence à subir un remaniement
FIGURE 9 : Aspect radiographique de l’interzone (encadré) lors d’ostéogenèse par distraction obtenue 8 semaines après correction du radius
curvus à radius court du Braque Allemand de 4 mois par pose d’un
fixateur externe d’Ilizarov (Service d’Imagerie, CHEVAC, VetAgro Sup).
osseux. Cette interzone doit être fréquemment contrôlée (toutes
les semaines puis tous les 15 jours), le plus généralement par
radiographie mais aussi par échographie et tomodensitométrie
[18, 19], pour évaluer l’adéquation entre la formation d’os
néoformé et la vitesse de traction [5, 20, 28] et adapter cette
Revue Méd. Vét., 2012, 163, 7, 348-356
TRAITEMENTS ORTHOPÉDIQUES DE RADIUS CURVUS À RADIUS COURT CHEZ 2 CHIENS
Type de fixation externe
Fixateur externe d’Ilizarov
355
Indications thérapeutiques
쏹 Déviations angulaires des segments osseux de plus de 20°
쏹 Déficits d’au moins 20 % de la longueur du membre
쏹 Persistance d’un fort potentiel de croissance
쏹 Subluxation articulaire d’au moins 3 mm
TABLEAU III : Indications thérapeutiques du fixateur externe d’Ilizarov (d’après [24]).
dernière aux capacités d’ostéogenèse et pour vérifier l’absence
de complication, une traction insuffisante pouvant conduire à
une fusion précoce des abouts osseux [5]. La vitesse de distraction utilisée pour le Braque Allemand a été conforme aux
recommandations, soit de 1 à 1.5 mm deux fois par jour en
raison de son jeune âge [9, 23, 24], la multiplicité de faibles
allongements permettant de ne jamais dépasser la limite
d’élasticité du cal mou. Lorsque la longueur désirée du membre
est atteinte, le fixateur est alors rigidifié, laissé en place jusqu’à
cicatrisation osseuse complète puis est finalement retiré [5].
L’utilisation d’un fixateur externe de type Ilizarov chez le
Braque Allemand a été très efficace malgré les contraintes
techniques (suivi intense, imagerie…) et les contraintes d’observance pour les propriétaires [5, 20]. Les diverses complications associées à l’utilisation du fixateur externe d’Ilizarov,
et de façon générale à l’ « ostéogenèse par distraction », sont
fréquentes, allant jusqu’à une prévalence de 65 % [11]. La première
complication décrite est la contracture des muscles fléchisseurs
[20, 28], les tendons des muscles fléchisseurs supportant très
mal l’élongation. Cette contracture peut même entraîner des
défauts d’angulation en exerçant des forces musculaires différentes sur les diverses faces de l’os [11]. Selon Latte [11], 4
contractures des fléchisseurs sont apparues parmi 29 allongements avec la méthode Ilizarov soit 14 %. Les autres complications sont des infections ou l’apparition d’œdème [14], mais
aussi des ruptures de broches, des ankyloses articulaires, des
atteintes nerveuses ou vasculaires, des consolidations prématurées ou encore des non-unions et des ostéomyélites [1, 5,
11, 14, 22, 28].
Dans le cas où les PDC ne sont pas encore complètement
fermées et n’assurent qu’un potentiel de croissance résiduel
(chiots de plus de 8 mois dans les cas des races géantes, de
plus de 7 mois dans le cas des races moyennes et de plus de 4
mois dans le cas des petites races), et où la perte de longueur
du membre est inférieure à 15 % de la longueur du membre
sain, la correction du radius curvus repose en général sur la
réalisation d’une ostéotomie ou une ostectomie ulnaire distale
de manière à faciliter les manipulations lors du réalignement
du membre [14, 20, 24]. Dans le cas du Labrador de 7 mois,
les corrections de convexité crâniale, de déviation en varus et
de longueur du membre ont eu lieu simultanément comme
dans la plupart du temps: en effet, à ce stade, il n’y a plus de
risque que la croissance résiduelle de toutes les autres PDC
n’entraîne encore un défaut de longueur ou l’apparition d’une
difformité après traitement. Le radius a ensuite été réaligné
par réalisation d’une ostéotomie « en coin ouvert » au niveau
du CORA [14, 20], avec mise en place d’une greffe d’os
spongieux dans l’espace crée par l’ouverture du coin lors du
redressement [5, 14]. L’ostéotomie a ensuite été stabilisée par
un fixateur externe, sans allongement du membre [17]. Cette
Revue Méd. Vét., 2012, 163, 7, 348-356
technique est très efficace, le postopératoire est simple mais
elle ne tolère pas les défauts de réduction. Le protocole de
mise en place du fixateur externe (SECUROS, barre carbone
de 9 mm), réside dans la mise en place parfaite des deux premières broches [17, 20] : la première broche est placée dans
la métaphyse radiale en dessous du CORA, parallèlement au
plan de flexion de l’articulation radio-carpienne et la deuxième
broche, dans la partie proximale de la diaphyse radiale, parallèlement à l’axe de flexion de l’articulation radio-humérale
en position neutre. L’ostéotomie est alors réalisée au niveau
du CORA parallèlement à la broche distale et perpendiculairement au grand axe du radius. Les corrections s’effectuent
en mobilisant les abouts de manière à obtenir les deux broches
parallèles et dans le même plan : les articulations du carpe et
du coude fléchissent alors normalement dans le même plan
[24]. Des corrections de détails sont encore nécessaires pour
optimiser l’alignement et la rotation en raison de la flexibilité
des broches. Enfin, l’utilisation, dans ce cas, de barres de
connexion en carbone est très intéressante: celles-ci sont très
légères, solides et surtout radio-transparentes ce qui facilite
la visualisation de la zone cicatricielle sur les clichés radiographiques de suivi.
L’utilisation du fixateur externe conventionnel chez le Labrador a permis la correction des difformités mais la longueur
n’ayant pas été corrigée, le membre est de 22 % plus court que
le membre controlatéral, et une discrète incongruence articulaire
persiste au niveau du coude [21]. Malgré le fait que la tolérance
décrite soit de maximum 15% de différence de taille environ
entre les deux membres [21], le résultat fonctionnel est très
satisfaisant grâce à une adaptation par ouverture des angles
articulaires du membre atteint et par une discrète fermeture
des angles du membre controlatéral [8]. D’importantes lésions
vasculaires, tendineuses, musculaires ou encore nerveuses
suite à la correction simultanée de toutes les difformités ou au
mauvais positionnement des broches [17], ont pu être décrites
mais n’ont pas été rapportées dans le cas présent. Cependant
cette technique entraîne moins de complications que le redressement suivi de l’allongement [11, 17].
Le pronostic de radius curvus dépend fortement du degré
d’arthrose présent au niveau du coude et du carpe au moment
de l’intervention et donc des pathologies associées, telles que
notamment les fragmentations du processus coronoïde médial
[21]. D’autre part, plus la détection de la difformité est précoce et plus le potentiel de croissance demeure alors important
[15]. Ainsi, le pronostic pour l’arthrose après traitement était
meilleur dans le cas du Braque Allemand en raison de son
jeune âge et du faible développement des signes associés d’arthrose au niveau du coude.
En conclusion, les 2 cas reportés dans cette étude correspondent à des situations de radius curvus dits « à radius
356
court » liés à une fermeture de la PDC distale du radius en
partie médiale qui sont moins fréquentes que les difformités
des membres liées à une fermeture de la plaque de croissance
ulnaire. Même lors de détection précoce (cas du Braque Allemand) les incongruences engendrées au niveau du coude sont
les éléments majeurs de pronostic : ici, les 2 chiens présentaient une arthrose débutante du coude, qui au moment du
diagnostic, n’était toutefois pas encore invalidante. La déviation précoce et importante chez le Braque compromettait à
terme l’appui du membre en raison d’une longueur insuffisante ou d’une très forte déviation. Le traitement des radius
curvus à radius court ressemble beaucoup à celui des radius
curvus suite à la fermeture de la PDC distale de l’ulna et requiert une planification préopératoire nécessitant au minimum
deux radiographies orthogonales. En outre, la détermination
du CORA permet une planification précise des corrections
chirurgicales à effectuer. Le choix de la technique chirurgicale
repose sur le degré de difformité du membre atteint et le potentiel de croissance restant de l’animal mais dans tous les
cas, les résultats doivent être satisfaisants d’un point de vue
fonctionnel et esthétique. La pose d’un fixateur externe d’Ilizarov (cas du Braque Allemand) permet des corrections simultanées ou progressives de toutes les difformités (rotation,
varus-valgus, convexité crâniale, raccourcissement du segment osseux) et l’association d’une croissance progressive du
membre en longueur par stimulation de l’ostéogenèse par distraction, mais son utilisation est beaucoup plus contraignante
que ce soit pour le chirurgien ou pour les propriétaires et les
complications associées sont fréquentes même si en majorité,
elles restent mineures. Le traitement à maturité (cas du Labrador) est plus simple et consiste généralement en une correction simultanée de toutes les déformations avec mise en
place d’un fixateur externe ou d’une plaque. Quelle que soit
la technique retenue, le pronostic dépend du degré d’arthrose
présent au niveau du coude principalement mais aussi du
carpe. Ainsi, les difformités angulaires de l’avant-bras sont
fréquentes et doivent être traitées le plus tôt possible et de la
manière la plus adaptée possible.
Remerciements
Les auteurs tiennent à remercier les Drs DURAND et BAZILE
pour la référence de ces deux cas, ainsi que les membres du
service d’Imagerie du CHEVAC et tout particulièrement les
Drs RIGOUT et DAUVERT.
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