La Fed se refuse à relever ses taux - Le Temps

Transcription

La Fed se refuse à relever ses taux - Le Temps
La Réserve fédérale se refuse à relever ses taux - LeTemps.ch
Page 1 sur 2
Politique monétaire Vendredi 18 septembre 2015
La Réserve fédérale se refuse à relever ses taux
Par Stéphane Bussard new york
La présidente de la Fed, Janet Yellen, invoque le ralentissement chinois et
la volatilité des marchés. L’institut craint désormais un risque de déflation
L’ancien secrétaire du Trésor américain Lawrence Summers et le Fonds monétaire international avaient
averti. Une hausse prématurée des taux directeurs aux Etats-Unis serait une «grave erreur». Jeudi, lors
d’une conférence de presse très attendue, la présidente de la Réserve fédérale (Fed) Janet Yellen leur a
donné raison. Malgré des pressions considérables pour changer de cap monétaire pour la première
fois depuis juin 2006, la Fed maintient ses taux directeurs dans une fourchette de 0 à 0,25%. La
principale raison invoquée par la banque centrale relève de l’état de l’économie mondiale. «Les
perspectives à l’étranger semblent être devenues plus incertaines. Des inquiétudes plus vives
concernant la croissance en Chine et dans d’autres marchés émergents ont, selon la présidente de la
Fed, conduit à une volatilité sur les marchés financiers.»
Les critiques de la politique monétaire accommodante de la Réserve fédérale relèvent que les
fondamentaux de l’économie américaine sont bons. «Il est temps de laisser le marché décider. Je ne
sais pas comment on va s’extraire de cette politique monétaire monstrueuse», relève le libertarien Ron
Paul, ex-candidat à la Maison-Blanche en 2012. Le produit intérieur brut du second trimestre a été
revu à la hausse à 3,7% et les consommateurs, endettés peu après la grave crise financière de 20082009, sont à nouveau plus prompts à dépenser. Le taux de chômage est passé en cinq ans de près de
10% à 5,1% en août. Le pays crée trois millions d’emplois par année, un niveau jamais atteint depuis
1999. Janet Yellen prévoit un taux de croissance de 2,1% pour 2015 et de 2,3% pour 2016. Le
chômage devrait lui aussi baisser à 5% d’ici à la fin de l’année et à 4,8% en 2016.
La présidente de l’institut d’émission a justifié le statu quo en soulignant que l’inflation (0,3% en
juillet) va rester à un taux très bas tout au long de 2015, bien en dessous de l’objectif des 2%. Avec
une baisse du prix de l’énergie en raison d’un baril de pétrole en dessous de 50 dollars et de prix à
l’importation à la baisse, Janet Yellen craint un effet négatif sur l’inflation et un risque de déflation.
L’économie américaine reste pourtant solide même si, poursuit la patronne de la Fed, les exportations
ont un impact négatif sur la croissance en raison d’un dollar qui s’est fortement apprécié ces derniers
mois (entre +16 et +20%) et d’une demande mondiale en recul. Une hausse des taux directeurs aurait
créé un risque, explique la Fed, de voir des capitaux des pays émergents affluer vers les Etats-Unis et
renforcer encore davantage le dollar.
La prudence de la banque centrale américaine peut surprendre. En 2012, ses responsables laissaient
entendre qu’ils maintiendraient les taux proches de zéro jusqu’à ce que le taux de chômage chute à
6,5%. Il est aujourd’hui de 5,1%. Au sein du Comité de politique monétaire de la Fed, il n’y a toutefois
pas eu unanimité jeudi. Jeffrey Lacker, président de la Réserve fédéral de Richmond s’est opposé à la
décision de maintenir les taux inchangés. Plusieurs économistes estiment cependant que le marché de
l’emploi offre encore une marge de manœuvre, les salaires n’ayant que peu augmenté depuis la crise.
Le taux de la population active reste toujours en dessous de son niveau d’avant la crise. En août
http://www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/2026ca54-5d79-11e5-af59-94bd5b6861b3/La... 22.09.2015
La Réserve fédérale se refuse à relever ses taux - LeTemps.ch
Page 2 sur 2
dernier, le vice-président de la Fed, Stanley Fischer avait pourtant estimé que le marché de l’emploi
aux Etats-Unis était suffisamment porteur pour se permettre de hausser les taux.
Janet Yellen s’applique à rassurer. La reprise économique aux Etats-Unis depuis la crise a été bonne.
Ce sont surtout le ralentissement de l’économie mondiale et son possible impact sur l’économie
américaine qui ont poussé la Fed à la prudence. Pour Janet Yellen, il est question de «renforcer la
confiance». Mais il n’est pas question «d’altérer fondamentalement» la politique de la Fed. Le Comité
de politique monétaire se réunira encore en octobre et en décembre. La Réserve fédérale pourrait
décider à ces occasions de changer le cap d’une politique d’assouplissement monétaire sans
précédent. Choisir le moment d’augmenter les taux reste délicat. Trop tôt et le risque de déflation
pourrait devenir réel. Trop tard et l’inflation pourrait vite dépasser l’objectif des 2% et laisser la Fed
avec une marge de manœuvre plus restreinte.
© 2015 Le Temps SA
http://www.letemps.ch/Facet/print/Uuid/2026ca54-5d79-11e5-af59-94bd5b6861b3/La... 22.09.2015