rio est deja grand
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ARCHIVES FOOTBALL En 2006, L'Équipe publiait un portrait de Rio Mavuba, né vingt et un ans plus tôt sur un boat people, une embarcation où ses parents avaient trouvé refuge pour fuir la guerre civile en Angola… PROLONGATIONS MARDI 31 JANVIER 2006 PORTRAIT DU MARDI RIO EST DEJA GRAND RIO MAVUBA, vingt et un ans, est l’une des pièces maîtresses de Bordeaux, 2e de la L 1 et adversaire de Lyon, dimanche. Dimanche soir, au stade de Gerland, les Girondins viendront se frotter aux intouchables de la L 1 avec une petite idée derrière la tête. Faire tomber l’ogre lyonnais et s’en rapprocher à 6 points au classement. Pour ce faire, Bordeaux pourra compter surRio Mavuba, son poumon du milieu de terrain. Sa perle aussi. BORDEAUX – de notre envoyé spécial À propos de Mauresmo « J’AI AIMÉ sa victoire à Melbourne. C’était sa première dans un tournoi du Grand Chelem. Elle attendait ce sacre depuis sept ans. Elle a réussi là quelque chose de grand et elle a enfin réalisé un de ses rêves. J’espère pour elle que ce sera son année, qu’elle parviendra à redevenir numéro 1 mondiale. Elle a connu des moments de doute et elle a eu assez de force de caractère pour les surmonter et rester compétitive. C’est une championne discrète dans laquelle je me retrouve. Un exemple dont j’aimerais pouvoir m’inspirer. » fuir la guerre civile en Angola, en mars 1984. Quatrième d’une fratrie de douze enfants, il a gardé de ce destin particulier les images furtives d’une enfance « multiculturelle et sympa » de Mont-de-Marsan à Bordeaux. Mais il porte aussi le poids des confidences de ses aînés, qui lui ont raconté une autre dure réalité : « Des fois, chez nous, il n’y avait rien dans le frigo. » « La vie l’a formé, témoigne Charles Camporro, le directeur sportif des Girondins de Bordeaux. Il aborde donc la haute compétition comme il a été obligé de mener sa vie, avec abnégation et sans jamais oublier de se mettre au service des autres. » HORS JEUX À propos des banlieues « JE N’AI PAS apprécié la façon dont on a traité le problème des banlieues. Malgré tout ce qu’on a vu ou entendu, je crois que le dialogue n’est toujours pas noué. Bien sûr, il y a eu des images choquantes et des erreurs ont été commises. Mais, quand on vit en banlieue, on a peu de moyens de s’exprimer et de se faire entendre. Il faudrait ouvrir un grand débat public avec les gens concernés pour définir comment intégrer les banlieues. Si, en tant que sportif de haut niveau, je peux aider à faire avancer les choses, j’y suis prêt. Je n’oublie pas d’où je viens, de la Bastide, un quartier populaire de la rive droite de Bordeaux… » Rio Antonio MAVUBA (Photo Pierre Lahalle) France. Vingt et un ans, né le 8 mars 1984 en mer, au large de l’Angola. 1,75 m ; 68 kg. Milieu défensif. Club : Bordeaux (formé au club). Palmarès : néant. 1er match en L 1 : Montpellier Bordeaux (1-2) le 10 janvier 2004. 1re sélection : France - BosnieHerzégovine (1-1), le 18 août 2004. 2 sélections, 0 but ; 13 sélections espoirs ; 82 matches, 1 but en L 1 ; 5 matches, 0 but en Coupe d’Europe (tous en C 3). (Photo Ludovic Carême/L’Équipe) gné, le clone, la copie certifiée conforme de Jean Tigana, l’un des quatre membres du carré magique des années 80 avec Giresse, Fernandez et Platini ? Sélectionneur de l’équipe de France Espoirs et ancien coéquipier de Tigana à Bordeaux, René Girard ne réfute pas cette évidence. « Le rapprochement est inévitable, admet-il, et c’est un grand compliment pour Rio. Mais ils sont humainement différents. Le moteur de Tigana, c’était de ne pas se faire oublier. Et il avait besoin d’exprimer des choses. Rio, lui, fonctionne sur un autre registre, il a autant envie de réussir mais il est plus paisible et moins exubérant. Il montre peut-être moins ce qu’il a vécu. Pour moi, c’est le p ro to ty pe d u foo tb a ll eu r moderne. Il s’adapte, sans saute d’humeur ni état d’âme tout en gardant ses valeurs. Il sait où il va et comment. » Copain de promotion, complice au quotidien depuis l’âge de sept ans, Mathieu Valbuena lève le voile sur un autre aspect de la personnalité de son meilleur ami. « On le croit timide mais c’est un vrai leader, assure le milieu de terrain de Libourne SaintSeurin. Dans la vie, il ne lâche rien et quand il s’est mis quelque chose dans la tête, il s’y tient. C’est un caractère fort et intransigeant. Mais, face aux gens qu’il ne connaît pas, il se réfugie dans sa coquille. » '' Moi, j’ai grandi en apprenant à me serrer la ceinture. » Enfant, lorsqu’on lui demandait quel métier il voudrait exercer plus tard, il lui arrivait de répondre « footballeur aux Girondins de Bordeaux » . Aujourd’hui, il avoue vivre sa consécration « comme un rêve qui s’est réalisé ». Et qu’il voudrait prolonger même si le Real, la Juventus ou Arsenal ont jeté un œil sur lui. « C’est mon club et j’aimerais l’aider à grandir. Je n’en partirai pas pour le plaisir de partir. Je me retrouve dans la façon dont cette équipe se comporte. Et dans ce Le foot est un milieu d’argent où gravitent trop de gens mal intentionnés. Des gens qui ne me plaisent pas Rio Mavuba confirme cette tendance à mettre de la distance entre sa tribu et un milieu dont il se méfie. « Oui, je protège les miens et mon intimité, reconnaît-il, le foot est un monde un peu spécial. Un milieu d’argent où gravitent trop de gens mal intentionnés. Des gens qui ne me plaisent pas. '' qu’elle véhicule. Mais, si on me dit d’aller voir ailleurs… » Une telle éventualité n’est pas à l’ordre du jour. Pour l’instant, Bordeaux a une place à défendre, la Ligue des champions en point de mire et Lyon dans son viseur. « C’est l’occasion de s’étalonner face à l’un des meilleurs clubs d’Europe, se réjouit Mavuba. Ce sera un moment particulier. L’opportunité de prouver que Bordeaux n’est pas le dauphin de Lyon par hasard et de montrer qu’on peut rivaliser avec des joueurs de stature internationale. On n’a rien à perdre mais tout à gagner. » Et toujours cette arrière-pensée de rappeler à tous qu’il est bien digne de la grande équipe de France ? « Elle est dans un coin de ma tête mais je suis plus proche de la phase finale de l’Euro Espoirs au Portugal que de l’Allemagne. » L’Allemagne, justement, où, en 1974, le Zaïre fut la première nation sub-saharienne qualifiée pour une phase de finale de Coupe de monde. Mafula Mavuba, le père de Rio, faisait partie de cette équipe battue par le Brésil, l’Écosse et la Yougoslavie. Il est décédé en 1997. Rio Mavuba avait treize ans. Il lui arrive de s’adresser à lui, par la pensée. « J’espère qu’il est fier de moi… » ÉRIC CHAMPEL (*) Dernière rencontre de la 24e journée, Monaco-Lyon a été reporté en raison de l’état du terrain. Jaune Titulaire samedi face à Lens au poste de latéral gauche, Florian Marange a été le compagnon de chambre de Mavuba au centre de formation, à la fin des années 90. Il parle d’un « super mec qui n’a pas changé. C’est le même, spontané et heureux de vivre. Il adore chambrer et s’amuser. Avec “ Darche ” (Jean-Claude Darcheville), il anime le vestiaire et apporte en permanence de la bonne humeur. Mais, attention, c’est un aussi un meneur d’hommes. Il a un vrai charisme et l’âme d’un capitaine. Un jour peut-être même que ce sera lui le taulier de l’équipe de France. » « Pour un éducateur, ce gars-là sort de l’ordinaire. Il est respectueux, généreux et très attaché à la notion de groupe, confirme Jean-Louis Garcia, qui fut l’entraîneur de Rio Mavuba durant deux saisons, avec l’équipe de CFA des Girondins. C’est un chef de file. Il est altruiste, il possède des qualités physiques exceptionnelles, mais il doit se forcer. Il peut faire plus encore. Potentiellement, il peut transformer le jeu de son équipe. » Même couleur de peau, même poste, même allure frêle et fragile, mêmes qualités de récupérateur, même club, les similitudes sont multiples. Et confinent à la filiation. Rio Mavuba serait-il l’héritier dési- Noir LA MINI COOPER bariolée a disparu de la circulation. Rio Mavuba avait pris l’habitude de la garer un peu n’importe où, comme pour narguer toutes les grosses cylindrées docilement alignées sur le parking du Haillan. Parfois, il en descendait en oubliant d’éteindre la radio, pressé par le temps et distrait par sa propre joie de vivre. Depuis quelques semaines, le petit milieu de terrain bordelais n’affiche plus sa différence. Signe de l’évolution de son statut et de son standing, il s’est offert une Porsche noire de 300 chevaux, que l’on entend vrombir de loin. Le capitaine de l’équipe de France Espoirs enclenche soigneusement l’alarme avant de gagner les vestiaires. Et il arrive (presque) toujours à l’heure pour s’éviter d’être à l’amende et de cotiser à la caisse des retards dont il est le superviseur attitré. Le destin de Mavuba et celui des Girondins de Bordeaux sont à ce point liés et imbriqués que l’un et les autres font tout ensemble. Au même moment. Quand Rio Mavuba avoue « s’être fait son premier plaisir de joueur professionnel » en s’offrant une voiture de sport, les Girondins de Bordeaux retrouvent une partie de leur crédit dilapidé. Deuxièmes, invaincus depuis le début de l’année en Championnat, portés par une série de quatre victoires consécutives, ils affrontent Lyon, dimanche soir à Gerland, pour tenter de décrocher un treizième succès en L 1. Et pour revenir ainsi à six points des Lyonnais, même si ce sera avec un match en plus (*). Ménagé face à Lens samedi soir – il est entré en jeu à la 68e minute –, Rio Mavuba devrait participer à son 83e match d’affilée en L 1 depuis sa première apparition, le 10 janvier 2004 à Montpellier. « Si lui se sent capable de disputer un match tous les trois jours, il ne peut pas être performant tout le temps, explique Ricardo, l’entraîneur brésilien de Bordeaux. Même s’il m’impressionne par son professionnalisme et sa conduite. À tous les niveaux. Il n’a que vingt et un ans et c’est déjà un homme. Il est d’une étonnante précocité. » Une attitude dans le juste prolongement d’une trajectoire hors du commun. Rio Antonio Mavuba est arrivé dans le Sud-Ouest porté par les flots de l’errance. Il est né sur un boat people, sur une embarcation où ses parents avaient trouvé refuge pour JEUX