LA vIE SOCIALE DES éLèvES à LA MATERNELLE : UN IMPACT
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LA vIE SOCIALE DES éLèvES à LA MATERNELLE : UN IMPACT
Programme Actions concertées 38 La persévérance et la réussite scolaires résultats de recherche la vie sociale des élèves à la maternelle : un impact important sur la participation scolaire chercheure principale Nicole Royer Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) depuis que le ministère de l’éducation, du loisir et du sport (mels) a renouvelé son programme de formation, la vie sociorelationnelle des enfants à l’école et les compétences de nature sociale reçoivent une attention nouvelle. Pendant tout leur cursus scolaire, les élèves sont de plus en plus amenés à travailler en équipe et à développer des liens de collaboration entre eux. Or, le rôle joué par la vie sociorelationnelle des jeunes élèves dans le processus d’adaptation et d’intégration à l’école est peu connu. Afin de mieux comprendre l’influence de la vie sociale des élèves et la participation en classe au début de la scolarisation, une recherche dirigée par Nicole Royer, professeure en sciences de l’éducation à l’UQTR, confirme que la qualité des relations interpersonnelles établies et maintenues par l’élève dès la maternelle avec ses camarades de classe influence son sentiment d’appartenance envers l’école et sa motivation à apprendre. Amitiés entre élèves Pendant de nombreuses années, les recherches se sont penchées sur la relation enseignant-élève. Or, de plus en plus les chercheurs tentent de mieux comprendre les relations entre les élèves et comment les liens d’amitié, l’approbation et le rejet des pairs, ainsi que l’inclusion dans des réseaux sociaux influencent la persévérance et la réussite scolaires. Du même souffle, le Renouveau pédagogique implanté ces dernières années dans les écoles québécoises encourage les enseignants à introduire, dans leurs pratiques pédagogiques, différentes formules d’apprentissage par les pairs comme la pédagogie par projet, la pédagogie collaborative, le tutorat et diverses formes d’apprentissage coopératif. Réalisée dans le cadre d’une action concertée du Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture en collaboration avec le MELS, l’étude de Nicole Royer a confirmé ce que plusieurs enseignants savent intuitivement : plus un élève est accepté dans sa classe, a des liens d’amitié réciproques et se sent intégré dans un réseau social, plus son engagement envers l’école est fort avec des conséquences potentiellement positives sur les résultats scolaires. Et ces résultats de recherche s’appliquent autant aux garçons qu’aux filles, bien que l’intégration dans les réseaux « La qualité des relations sociaux varie en fonction du genre. interpersonnelles entre enfants Dès l’entrée à la maternelle, la à l’intérieur de la classe est vie sociale des élèves joue un rôle directement liée aux important sur leurs comportements comportements d’apprentissage d’apprentissage et leur participation en classe. Selon ce qu’a constaté l’équipe et de participation dès le de Nicole Royer, trois principaux paradébut de la scolarisation. » mètres caractérisent la vie sociale des jeunes : les relations d’amitié, le degré d’acceptation dans un groupe et la place du jeune dans les réseaux de pairs. « Ces différentes facettes de la vie sociale en classe facilitent ou, au contraire, rendent plus difficile la participation de l’enfant à la vie de la classe et, par conséquent, influencent son rendement ou le rythme de ses apprentissages », précise la chercheure. Au total, 343 élèves du préscolaire et du premier cycle du primaire de cinq écoles de la région de la Mauricie ont participé à l’étude qui s’est déroulée de 2003 à 2005. « La qualité des relations interpersonnelles entre enfants à l’intérieur de la classe est directement liée aux comportements d’apprentissage et de participation dès le début de la scolarisation », affirme Nicole Royer, responsable de la recherche. « La participation de l’élève aux activités d’apprentissage devient un élément déterminant de sa réussite scolaire », souligne la chercheure. Or, la motivation à participer repose sur la conjoncture favorable de facteurs cognitifs, affectifs et relationnels en jeu dans les activités d’apprentissage de la classe. Les recherches ont montré que les élèves rejetés éprouvent des difficultés constantes à trouver des partenaires de jeu et de travail à l’école. Le fait d’être rejeté peut augmenter les perceptions négatives de l’élève envers l’apprentissage et contribuer à une forme de désengagement envers l’école. « Les élèves moins bien acceptés dans la classe sont considérés plus à risque sur le plan du décrochage scolaire et de la délinquance à l’adolescence », a relevé Nicole Royer lors de la recension des écrits sur le sujet. Qualité des relations et participation en classe Ainsi, à quatre ans déjà, il n’est pas rare qu’un enfant recherche la présence de pairs particuliers et qu’il manifeste son intérêt pour la réciprocité et la coopération avec quelques pairs de son choix. En plus des bénéfices directs sur le développement de l’enfant, les amitiés favorisent l’adaptation à la maternelle. L’équipe a relevé que, de façon générale, plus l’élève se sent bien dans son groupe ou plus il est choisi comme quelqu’un avec qui les autres aiment jouer ou travailler, meilleure est sa participation aux activités proposées par l’enseignante. Aussi, les résultats de cette recherche révèlent des différences entre les garçons et les filles. Par exemple, un plus grand nombre de filles que de garçons sont considérées comme populaires par leurs pairs et les garçons sont plus nombreux à être rejetés par leurs pairs en classe. Ce qui laisse penser que la vie sociorelationnelle des garçons « L’enseignante qui organise n’influence pas de la même manière leur attitude et leur tout au long de l’année des activités comportement à l’école qu’elle propices aux échanges spontanés le fait pour les jeunes filles. entre enfants et qui aménage l’espace conséquemment permet que des liens interpersonnels puissent se nouer et se maintenir. » « L’ensemble des résultats fait ressortir l’importance de favoriser les relations entre enfants dans la classe, d’encourager les amitiés et de prévenir les rejets, estime Nicole Royer. La qualité de la vie sociorelationnelle des élèves est une bonne porte d’entrée pour les apprentissages. » Pédagogie interactive Comment l’enseignante peut-elle exercer une influence sur l’émergence de liens d’amitié réciproques en classe ? « Le climat émotionnel de la classe relève en grande partie de l’enseignante », affirme Nicole Royer. Pour l’enseignante, une façon de faciliter la coopération entre les élèves consiste à permettre le regroupement entre amis. Cette stratégie est souvent accueillie avec scepticisme par crainte que les amis, lorsque placés en équipe de travail, soient moins attentifs aux activités d’apprentissage. « Les études ébranlent ce préjugé, affirme la chercheure. Les enfants qui ont des amis en classe ont moins tendance à déranger l’ensemble du groupe. » Parmi les stratégies visant à favoriser la formation des liens d’amitié, les chercheurs ont relevé que les stratégies peu intrusives, comme prévoir des périodes d’activités libres ou laisser les enfants explorer leurs affinités interpersonnelles se sont avérées les plus courantes. « Elles peuvent sembler triviales à première vue, notent-ils, mais elles constituent néanmoins d’importants précurseurs aux relations d’amitié. » Formuler des commentaires à propos des activités que les enfants font ensemble ressort aussi comme une stratégie ayant le mérite de soutenir les échanges et de stimuler la poursuite de l’activité d’apprentissage. En offrant des occasions aux élèves de parler de leurs intérêts et de leurs expériences, en permettant aussi de se regrouper par affinités, l’enseignant contribue à la création d’un climat émotionnel favorable à l’engagement et au sentiment d’appartenance de l’élève. « L’enseignante qui organise tout au long de l’année des activités propices aux échanges spontanés entre enfants et qui aménage l’espace conséquemment permet que des liens interpersonnels puissent se nouer et se maintenir. C’est avant tout dans le cadre d’une pédagogie interactive, à l’intérieur des activités en groupe et en dehors des moments centrés sur l’enseignante, que les interactions entre enfants peuvent suivre leur cours », concluent les chercheurs. partenaires Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport référence La participation et la persévérance académiques dans des contextes pédagogiques en changement : étude du rôle de la vie sociale des élèves au début de la fréquentation scolaire, Nicole Royer, Université du Québec à Trois-Rivières, 2007, 202 pages. Une réalisation de : • Fonds de recherche sur la société et la culture • Ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport