charter schools

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charter schools
Brève Vigie, 6 avril 2009
Les « charter schools » aux États-Unis : des écoles innovantes, et efficaces ?
Les charter schools (écoles à charte) que défend Barack Obama pourraient, selon la
Brookings Institution, ne pas être la réforme la plus efficace pour améliorer le système
d’enseignement secondaire américain.
Depuis la création en 1988 de la première école de ce type, le modèle des charter schools est
controversé. D’aucuns estiment que l’autonomie est essentielle à de meilleurs résultats et
stimule, en prime, les écoles traditionnelles aux alentours. D’autres pensent que l’autonomie
et la concurrence en matière scolaire ne donnent aucun résultat concret.
Les charter schools sont une particularité américaine : ce sont des écoles publiques
autonomes. Fonctionnant comme des écoles privées, elles sont basées sur un projet éducatif
innovant et original, explicité dans leur « charte ». En contrepartie, elles sont soumises à une
évaluation par les résultats de leurs élèves aux tests nationaux. En fait, les charter schools
sont des établissements expérimentaux, censés introduire de la nouveauté dans le système
public d’enseignement. Elles possèderaient ce don de pouvoir évacuer la « bureaucratie » de
l’éducation américaine au profit d’une logique de performance.
Actuellement, 10 % des écoles primaires et secondaires appartenant au système public
d’éducation sont des charter schools. Elles ne sont pas autorisées à demander à leurs élèves
des frais de scolarité ni à les sélectionner (l’admission se fait ainsi très souvent sur loterie).
Cependant, elles disposent d’une grande latitude dans l’organisation administrative et dans les
pratiques d’enseignement. Une charter school de New York, « The Equity Project »,
expérimentera ainsi à la rentrée 2009 la corrélation entre résultats scolaires et qualité des
professeurs, expérimentation qui déplaît d’ores et déjà aux syndicats de professeurs. Pour
inciter les meilleurs professeurs à participer au projet, le salaire des sept enseignants qui
débuteront en septembre est fixé à 125 000 dollars US par an hors bonus, soit 92 000 euros,
contre 49 000 dollars US annuels, soit 36 000 euros, pour un professeur américain en
moyenne.
Les charter schools sont le cheval de bataille du président Obama. Son agenda concernant la
réforme de l’enseignement public comporte quatre points : étendre l’éducation aux premiers
âges, encourager de nouveaux enseignements et de nouvelles qualités (créativité, pensée
critique et entreprenariat), accroître la qualité des professeurs (salaires incitatifs,
licenciements de professeurs inefficaces, enseignements non conventionnels), et accroître la
durée de scolarité annuelle et quotidienne. Ces quatre points ne sont applicables que dans un
système dynamique et innovant. Ce sont les charter schools qui doivent mener la
revitalisation de l’école américaine selon Barack Obama. En sont-elles capables ?
© Futuribles, Système Vigie, 6 avril 2009
La Brookings Institution a récolté les résultats des élèves de charter schools dans la ville de
Milwaukee (Wisconsin), de l’année scolaire 2000-2001 à 2006-2007. Les résultats de l’étude
sont les suivants :
- pour certaines matières, comme les mathématiques, les élèves de charter schools s’en
sortent mieux que les élèves des écoles publiques traditionnelles, mais on ne peut établir la
même corrélation dans toutes les disciplines (pour la lecture, par exemple, les résultats des
élèves ne sont pas corrélés à la nature de l’école dont ils ont suivi les enseignements) ;
- les bonnes performances en mathématiques se dénotent dans les premières années scolaires
de l’étude, et se confondent avec celles des écoles publiques traditionnelles par la suite, la
réussite semble donc due à l’enthousiasme initial du corps professoral ;
- l’impact positif de l’enseignement des charter schools sur les résultats d’un élève s’estompe
au cours de la scolarité de l’élève ;
- les charter schools les plus anciennes et celles qui ont précédemment été des écoles
traditionnelles, ont de meilleurs résultats (cela témoigne de l’importance de la maturité du
modèle), les meilleurs résultats étant enregistrés par les écoles traditionnelles « converties » ;
- la mobilité des élèves a un impact négatif sur leurs performances (quelle que soit l’école
qu’ils quittent, quel que soit leur niveau scolaire) et cette mobilité est un facteur plus
déterminant que la nature de l’école à laquelle les élèves sont allés ;
- il n’y a aucune preuve concrète que la présence d’une charter school stimule les
performances des écoles traditionnelles aux alentours.
Si les charter schools ont un effet globalement positif (et rarement l’effet inverse), elles ne
sont pas, selon la Brookings Institution, le coup de fouet attendu par Washington. Il
semblerait par exemple plus pertinent de comprendre les composantes de la mobilité des
élèves et d’y remédier. La stabilité dans les études est en bien plus forte corrélation avec les
résultats que la nature de l’école.
Jean-Baptiste Moulin, Futuribles International
Source : LAVERTU Stéphane, WITTE John. The Impact of Milwaukee Charter Schools on
Student Achievement. Washington, D.C. : The Brookings Institution Issues in Governance
Studies,| n° 23), mars 2009, site Internet
www.brookings.edu/papers/2009/03_charter_lavertu_witte.aspx ; GOOTMAN Elissa. « At
Charter School, Higher Teacher Pay ». The New York Times, 7 mars 2008, site Internet
www.nytimes.com/2008/03/07/nyregion/07charter.html.
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Mots-clefs : États-Unis / Éducation. Formation / Établissements d’enseignement
© Futuribles, Système Vigie, 6 avril 2009