Editorial 2013 - CHU de Montpellier
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Editorial 2013 - CHU de Montpellier
2013 NUMERO 26 Ce bulletin est rédigé et diffusé par la Pharmacologie Médicale et le CHU de Montpellier sans aide de l'industrie pharmaceutique. Ce travail est un travail d'équipe, nous ne sommes pas infaillibles. Merci de nous signaler toute erreur et de revenir vers nous pour toute question. La déclaration d’un effet indésirable médicamenteux (EIM) ou d'une dépendance est une obligation légale qui permet de détecter et d'évaluer la fréquence de survenue de ces effets (Décret du 13 mars 1995). Il faut considérer cette déclaration obligatoire non pas comme une contrainte administrative, mais comme un devoir de santé publique dont les patients et le corps médico-pharmaceutique sont les bénéficiaires directs. Editorial 2013 Maintenant que nous avons passé ensemble sans encombre notable la date du 21 décembre 2012, tout devient possible. En tenant compte de l'étymologie du mot originel "apocalypse" (apokalypsis = révélation), nous osons espérer, qu'en 2013, la révélation de l'importance de la notification spontanée sera une évidence pour tous les professionnels de santé! Afin de faciliter cette activité, rentrant dans le champ de la qualité, et de l'évolution du rapport bénéfice/risque des médicaments (anciens et nouveaux), vous disposerez au cours du premier quadrimestre 2013 d'un outil plus performant : la télé-déclaration pour la pharmacovigilance. Cet outil accessible pour les professionnels de santé et les patients devraient rendre plus exhaustive la notification des effets indésirables. Cet outil informatique devrait également vous permettre à terme de recevoir des informations ciblées et des alertes dans des délais beaucoup plus courts. Toute l'équipe du Département de la Pharmacologie Médicale vous adresse leurs vœux pour cette année 2013 et vous remercie par avance de votre participation à l'évolution partagée des vigilances. Dr D. Hillaire-Buys PHARMACOVIGILANCE Quoi de neuf depuis Octobre au niveau de l'ANSM? Tétrazépam et risque cutané Le tétrazépam (Myolastan® et génériques), qui fait partie de la classe pharmaco-thérapeutique des benzodiazépines, est utilisé en France pour ses propriétés myorelaxantes. Une enquête de pharmacovigilance, portant sur la période du début de commercialisation jusqu’à juin 2012, a mis en évidence une fréquence élevée d’effets indésirables cutanés parmi lesquels des syndromes de Stevens-Johnson, des syndromes de Lyell et des syndromes d’hypersensibilité médicamenteuse (DRESS). http://ansm.sante.fr/S-informer/Actualite/Tetrazepam-Myolastan-et-generiques-des-effets-indesirables-cutanes-parfois-graves-sont-susceptibles-deremettre-en-cause-le-rapport-benefice-risque-de-ces-specialites-Point-d-information 1 Benzodiazépines et démence : une association ? En janvier 2012, l’ANSM a dressé un état des lieux de la consommation des benzodiazépines (BDZ) en France. Chaque année, environ 20% des Français consomment au moins une benzodiazépine, ou apparentée. Parmi les effets indésirables connus des BDZ, se trouvent les troubles mnésiques et cognitifs. Deux études ont étudié le lien éventuel entre la démence et la consommation de BDZ. Une étude prospective britannique, a suivi 1134 patients sur 22 ans et a mis en évidence un risque majoré de démence non vasculaire (OR 3,34 ; IC95% [1,10-10,18]) avec les benzodiazépines, d’autant plus important que l’exposition est « courte » (< 4 ans) (OR 4,38 ; IC95% [1,15-16,75]). La cohorte PAQUID (étude bordelaise) conduite sur 3669 patients a mis en évidence un risque augmenté de démence chez les personnes ayant déjà consommé des benzodiazépines (OR 1,7 ; IC95% [1,2-2,4]), le risque étant d’autant plus important chez les anciens usagers non consommateurs depuis 2 à 3 ans (OR 2,3 ; IC95% : 1,2-2,4)2. 1 J Gallacher, P Elwood, et al. Benzodiazepine use and risk of dementia : evidence from the Caerphilly Prospective Study (CaPS). J Epidemiol Community Health. 2012 Oct.66(10):869-73. 2 R Lagnaoui, B Bégaud et al. Benzodiazepine use and risk of dementia : a nested case-control study. Journal of Clinical Epidemiology 55 (2002) 314318. ème CONTRACEPTIFS ORAUX COMBINES (COC) 3 génération Une analyse réalisée par l’EMA confirme un risque augmenté (x2) de thrombose veineuse (phlébite, embolie pulmonaire), deux fois plus élevé chez les femmes utilisant un COC de 3e génération (contenant du désogestrel ou du gestodène) ou un COC contenant de la drospirénone par rapport aux femmes utilisant un COC de 2e génération contenant du lévonorgestrel. L’ANSM rappelle qu’il existe également un risque de thrombose artérielle (accident vasculaire cérébral, infarctus du myocarde) quelle que soit la génération de la pilule utilisée. http://ansm.sante.fr/S-informer/Actualite/Contraceptifs-oraux-combines-COC-et-risque-de-thrombose-veineuse-Preferer-les-pilules-de-deuxiemegenerationcontenant-du-levonorgestrel-Lettre-aux-professionnels-de-sante VALDOXAN® Agomélatine : et risque d'’hépatotoxicité Il est rappelé aux prescripteurs que des contrôles de la fonction hépatique doivent être réalisés chez tous les patients traités par Valdoxan® à l’instauration du traitement, puis périodiquement après trois semaines, six semaines douze et vingt-quatre semaines et par la suite en cas d’augmentation de la posologie d’agomélatine, avec la même fréquence de contrôle qu’à l’instauration du traitement. En cas d’augmentation des transaminases, le dosage sérique des enzymes hépatiques devra être répété dans les 48 heures. Valdoxan® doit être immédiatement arrêté en cas d’augmentation des transaminases sériques supérieure à 3 fois la limite supérieure de la normale, ou si les patients présentent des symptômes ou des signes suggérant une atteinte hépatique http://ansm.sante.fr/S-informer/Informations-de-securite-Lettres-aux-professionnels-de-sante/Valdoxan-agomelatine-Information-importantedepharmacovigilance- relative-au-risque-d-hepatotoxicite-Lettre-aux-professionnels-de-sante Dr V. Pinzani-Harter -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Directeurs de la Rédaction : Dr HILLAIRE-BUYS, Dr. V. PINZANI-HARTER Ont participé à la rédaction de ce journal : H. PEYRIERE, C EIDEN, D HILLAIRE-BUYS, V. PINZANI-HARTER, MA THOMPSON-BOS, JL FAILLIE , S BOIX, V BRES. Service de Pharmacologie Médicale et Toxicologie Hôpital Lapeyronie 34295 MONTPELLIER Cedex 5 Tél. : Secrétariat : 04.67.33.67.57/49 – Internes : 04.67.33.67.56 Fax : 04.67.33.67.51 Mails: [email protected], [email protected], [email protected] Site internet: http://www.chu-montpellier.fr/fr/vigilance/ 2 Les nouveaux anticoagulants : RCP synoptique Action Indications Contreindications Précautions d'emploi Pharmacocinétique Effets indésirables fréquents Antidote spécifique Interactions médicamenteuses XARELTO® 10/15/20mg (Rivaroxaban) Effet anti Xa (1) Prévention des événements thrombo-emboliques veineux chez patients opérés pour PTH ou PTG (2) Prévention des AVC et des embolies systémiques chez patients présentant une FA non valvulaire avec facteur(s) de risque : IC congestive, HTA, âge≥75 ans, diabète, antécédents d'AVC ou d'AIT (3) Traitement des thromboses veineuses profondes et prévention des récidives de TVP ou d'EP - Hypersensibilité - Saignement évolutif cliniquement significatif - Atteinte hépatique associée à une coagulopathie et à un risque de saignement cliniquement significatif - Grossesse et allaitement PRADAXA® 75/110/150mg (Dabigatran) Effet anti IIa (1) Prévention des évenements thromboemboliques veineux chez patients opérés pour PTH ou PTG (2) Prévention de l’AVC et de l’embolie systémique chez patients présentant une FA avec facteurs de risque : IC (NYHA≥2), FEVG <40%, antécédents d'AVC ou d'AIT ou d' embolie systémique, âge ≥75 ans ou âge ≥65 ans avec diabète, coronaropathie ou HTA - Hypersensibilité - Saignement évolutif cliniquement significatif - Atteinte hépatique majeure - Insuffisance rénale sévère (ClCr<30ml/min), - Altération spontanée ou pharmacologique de l'hémostase, - Lésion organique susceptible de saigner - Patients porteurs de valves cardiaques. - Traitement concomitant avec tout autre agent anticoagulant, dérivés de l'héparine, anticoagulants oraux - Traitement concomitant : kétoconazole par voie systémique, ciclosporine, itraconazole, tacrolimus Comme pour tout traitement anticoagulant, une Comme pour tout traitement anticoagulant, une surveillance surveillance clinique est recommandée : clinique est recommandée : - Risque hémorragique - Risque hémorragique - Insuffisance rénale (IR) - En cas d'IR ou Insuffisance hépatique - Interactions médicamenteuses (cf.) - Interactions médicamenteuses (cf.) - Actes chirurgicaux, infarctus du myocarde - Colorants : E110 (Allergie) - Biodisponibilité 80 à 100% - Biodisponibilité 6.5% - Elimination: 2/3 hépatique, 1/3 rénale sous forme - Ne pas ouvrir les gélules (biodisponibilité ↑ de 75%) inchangée - Dabigatran etexilate se transforme en dabigatran (forme - ½ vie environ 10h (faible clairance systémique) active) puis élimination rénale sous forme inchangée - Substrat de la P-gp (glycoprotéine-P) - ½ vie 11h (augmentée si atteinte rénale) - Substrat des CYP 3A4 et 2J2 - Substrat de la P-gp - Saignements et hémorragies (toutes localisations) - Saignements et hémorragies (toutes localisations) - Anémies - Anémies - Fièvre, nausées, œdèmes périphériques - Fièvre, nausées, diarrhées, vomissements - Anomalies du bilan hépatique - Anomalies du bilan hépatique Non disponible Non disponible Charbon actif pour limiter l'absorption Mesure répétitives du temps de thrombine. Le temps de Probablement non dialysable thrombine dilué permet de prévoir l'effet pharmacodynamique Substance dialysable Addition du risque hémorragique : Addition du risque hémorragique AINS, aspirine, antiagrégants plaquettaires, AINS, aspirine, antiagrégants plaquettaires, thrombolytiques, thrombolytiques, anticoagulants anticoagulants Diminution de l’élimination rénale (↑Xarelto) : Diminution de l’élimination rénale (↑ Pradaxa) : - IR fonctionnelle : diurétiques, AINS, IEC, sartans - IR fonctionnelle: diurétiques, AINS, IEC, sartans - IR organique : anti-infectieux (aminosides, - IR organique: anti-infectieux (aminosides, vancomycine, amphotéricine B), cytotoxiques vancomycine,amphotéricine B), cytotoxiques (MTX, (MTX, platines), immunodépresseur (ciclosporine, Platines), immunodépresseur (Ciclosporine, tacrolimus), tacrolimus), autres (déférasirox, mannitol, lithium, autres (déférasirox, mannitol, lithium, produits contrastes produits contrastes iodés, fibrates) etc. iodés, fibrates) etc. Inhibiteurs de la Pgp (↑Xarelto) : Inhibiteurs de la P-gp (↑Pradaxa) : vérapamil, amiodarone, atorvastatine, dipyridamole, vérapamil, amiodarone, atorvastatine, dipyridamole, macrolides, antifongiques azolés, inhibiteurs de macrolides, antifongiques azolés, inhibiteurs de protéases, protéases, lopéramide lopéramide etc… Inhibiteurs du CYP3A4 et deP-gp (↑ Xarelto) : Inducteurs de la P-gp (↓Pradaxa) : amiodarone, dronédarone, vérapamil, macrolides, Rifampicine, millepertuis, carbamazépine, phénytoine antifongiques azolés, inhibiteurs de protéases, cimétidine, jus de pamplemousse Avec les inducteurs du CYP3A4 et inducteurs de la P-gp (↓Xarelto) : phénytoïne, carbamazépine, phénobarbital, rifampicine, névirapine, millepertuis.. 3 XARELTO® 10/15/20mg PRADAXA® 75/110/150mg (Rivaroxaban) (Dabigatran) (1) PTH ou PTG : (1) PTH ou PTG (2) FA 10mg/j à commencer 6-10h après la chir. Durée: 2 sem. pour PTG, 5 sem. pour PTH 110mg 1 à 4h après chirurgie 150 mg x 2/j en 2 prises puis 220mg en 1 prise/j (2) FA : Durée: Posologie 20mg/j en une prise - 10j pour PTG - 28-35j pour PTH (3) TVP : J1 à J21 : 2 prises de 15 mg /j J22 et suivants : 20mg/j en une prise Insuffisance rénale : Age : Age : - non recommandée chez les - non recommandée chez les < 18 ans (1) PTH ou PTG : 30<ClCr<80: Aucune adaptation patients < 18 ans - > 80 ans = 110mg x 2/j en 2 prises 15<ClCr<29: Utilisation avec prudence - > 75 ans: 150mg/j en 1 prise - 75-80 ans : 150mg x2/j ou 110mg ClCr<15: Non recommandée x2/j en 2 prises si facteurs de (2) FA : Poids : risque associés 50<ClCr<80: Aucune adaptation Patients < 50 kg ou > 100 kg: pas 15<ClCr<49: Adaptation : 15 mg/j en 1 d'adaptation mais surveillance Poids : Surveiller les patients < 50 kg prise étroite ClCr<15: Non recommandée IR : 50<ClCr<80: Aucune adaptation (3) TVP : IR : 50<ClCr<80: Aucune adaptation 30<ClCr<50: 150mg/j en 1 prise 30<ClCr<50: 150mgx2/j en 2 prises 15<ClCr<49: J1 à J21: 2 prises de 15mg/j ClCr<30: CI et 110mg 2 fois par jour si facteurs puis J22 et suivants 15mg/j en une prise de risques associés IH : pas de données, donc non ClCr<30: CI Adaptations ClCr<15: Non recommandée recommandé posologiques IH : pas de données, non recommandé Insuffisance hépatique: - Modérée: Pas d'adaptation posologique Inhibiteurs P-gp : si traitement - Sévère avec coagulopathie : CI concomitant avec amiodarone, Inhibiteurs de la P-gp (vérapamil) : quinidine ou vérapamil: 150mg/j 110mg 2 fois /j, pas d'adaptation si en 1 prise et prendre les 2 association avec amiodarone et traitements au même moment quinidine et prendre les 2 traitements au même moment IR modérée et association avec Inducteurs de la P-gp ( Rifampicine, inhibiteurs de la P-gp : 75mg/j millepertuis, Carbamazépine, Phénytoine etc): Non recommandé - Patient sous Xarelto, passage à un anticoagulant par voie parentérale : débuter l'injection 24 h après l'arrêt de Xarelto - Patient sous anticoagulant par voie parentérale, passage à Xarelto : débuter Xarelto au moment de l'arrêt de Relais: Changement l'injection. de traitement - Patient sous Xarelto, passage à un AVK : débuter l'AVK et arrêter Xarelto dès que INR> 2 - Patient sous AVK passage à Xarelto : Arrêt AVK, débuter Xarelto dès que INR< 3 Risque hémorragique élevé : ↓la posologie à 110mgx2/j - Patient sous Pradaxa, passage - Patient sous Pradaxa, passage à à un anticoagulant par voie un anticoagulant par voie parentérale : débuter l'injection parentérale : débuter l'injection 12h 24 h après l'arrêt de Pradaxa après l'arrêt du Pradaxa - Patient sous anticoagulant par - Patient sous anticoagulant voie parentérale, passage à Pradaxa : débuter Pradaxa au par voie parentérale, passage à Pradaxa : débuter Pradaxa au moment de l'arrêt de l'injection moment de l'arrêt de l'injection. - Patient sous Pradaxa, passage à un AVK : Si ClCr> 50ml/min: débuter AVK 3j avant l'arrêt du Pradaxa Si ClCr entre 30 et 50 ml/min: débuter AVK 2j avant l'arrêt du Pradaxa - Patient sous AVK, passage à Pradaxa: Arrêt de l'AVK et débuter Pradaxa dès INR < 2 L'équipe du CRPV 4 La prescription en DCI, pourquoi? Dr JL.Faillie La Dénomination Commune Internationale (DCI) d'une substance active pharmacologique est une appellation définie par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour être utilisable sans ambiguïté dans un grand nombre de langues. La DCI est un nom non commercial et distinct de la dénomination chimique de la substance. Le nom commercial est le nom choisi par le fabricant pour commercialiser la spécialité, ce nom pouvant être différent selon le fabricant et selon les pays de commercialisation. A titre d'exemple, cétirizine est la DCI du Zyrtec® (nom commercial) retrouvé également sous le nom de Reactine® au Canada. Notons que, parmi les exceptions, le paracétamol est une DCI mais c'est l'appellation acetaminophen qui est utilisée aux USA (ex : TYLENOL®). Depuis 1992, la directive européenne 92/27/EEC recommande l’usage des DCI pour l’ensemble des pays de l’Union Européenne. Environ 12 % des prescriptions sont réalisées en DCI en France, ce qui est très inférieur pratiques britanniques et allemandes (80% au Royaume-Uni et 35 % en Allemagne selon une étude en 2006).1 Mais la récente loi de renforcement de la sécurité sanitaire des médicaments et produits de santé du 29 décembre 2011 prévoit que la prescription en DCI sera rendue obligatoire. Son application sera effective lorsque les logiciels d'aide à la prescription seront adaptés, c'est-àdire au plus tard au 1er janvier 2015. L'incitation à utiliser les DCI est un progrès pour la communauté médicale et pour la prise en charge des patients. Tout d'abord parce qu'il est évident qu'un langage commun international est préférable pour les communications entre médecins de différents pays ou pour la prise en charge de patients étrangers ou à l'étranger. Ensuite parce que la DCI n'est pas un nom choisi au hasard : une DCI comprend des « segmentsclés » utilisés comme suffixes, préfixes ou segments intermédiaires qui caractérisent le groupe thérapeutique du principe actif, son mécanisme d’action, son origine ou sa parenté chimique. Par rapport au nom commercial (ou nom de fantaisie), l'utilisation de la DCI permet donc, grâce aux principaux segments-clés (on en compte 300 au total), d'identifier des informations pharmacologiques utiles et importantes sur le médicament. Il existe de nombreuses exceptions mais parmi les segments-clés les plus courants on retrouve par exemple -coxib pour les inhibiteurs de la cyclo-oxygénase 2 (COX-2, ex : celecoxib) ; -mab pour les anticorps monoclonaux (monoclonal antibodies, ex ; infliximab) ; -olol pour les béta-bloquants (ex : atenolol) ; -pril pour les inhibiteurs de l'enzyme de conversion (ex : captopril) ; -vastatin(e) pour les inhibiteurs de l'HMG-CoA reductase (ex : simvastatine)… D'ailleurs, -orex étant le segment-clés désignant les agents anorexigènes, l'utilisation de la DCI aurait permis aux professionnels de santé d'identifier le benfluorex (principe actif du Médiator®) comme étant avant tout un anorexigène. Pour plus de détails, voir les dossiers spécifiques publiés dans les numéros de juillet et décembre 2012 de la revue Prescrire.2,3 Un autre avantage important de l'utilisation de la DCI est que cela limite les erreurs médicamenteuses : confusions entre les différents noms des substances actives, non respect de contre-indication, surdosage par prise multiples d'une même substance… Il a été montré que les confusions entre noms commerciaux étaient plus fréquentes et potentiellement plus graves que les confusions entre DCI. 4 5 En Septembre 2010, l’Afssaps a présenté un rapport des signalements d’erreur ou de risque d’erreur liés à la dénomination des médicaments. De nombreuses confusions avaient été rapportées entre DCI (ex : prednisone / prednisolone, simvastatine / pravastatine cefotaxime / cefoxitine) mais les confusions entre noms commerciaux étaient plus nombreuses et semblaient plus préoccupantes car elles concernaient souvent des classes pharmacologiques très différentes (cf. tableau 1).5 Par exemple, une confusion entre Lamictal® et Lamisil®, a eu pour conséquence un syndrome de Lyell vraisemblablement aggravé par un surdosage en lamotrigine.6 Un syndrome hémorragique sévère a également été rapporté suite à une erreur de délivrance entre Previscan® et Permixon®.7 Finalement, même si la prescription en DCI nécessitera pour les professionnels de santé un effort d'apprentissage et de changement de pratique (qui doit également passer par l'enseignement initial en DCI), cet effort ne semble pas vain pour la qualité des soins des patients. 1. Projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de sante. Etude d’impact. Juillet 2011. http://www.assemblee-nationale.fr/13/projets/pl3714-ei.asp 2. Rev Prescrire 2012 ; 32 (350) : 940-946 3. Rev Prescrire 2012 ; 32 (345) : 536-540 4. Hoffman JM, Proulx SM. Medication errors caused by confusion of drug names. Drug Saf. 2003 ; 26 (7) : 445-52. 5. Liste des confusions de noms recensées au Guichet Erreurs Médicamenteuses. Afssaps. Septembre 2010. http://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/017fce5b9a509a4388b2b0a914038205.pdf 6. Le Loarer F, Carré-Gislard D, Baricault S, Bravard P. Severe drug eruption caused by a medication error. Ann Dermatol Venereol. 2009 ; 136 (4) : 364-5. 7. Chiche L, Thomas G, Canavese S, Branger S, Jean R, Durand JM. Severe hemorrhagic syndrome due to similarity of drug names. Eur J Intern Med. 2008 ; 19 (2) : 135-6. Tableau 1. Liste des confusions entre noms de marques rapportées au Guichet Erreurs Médicamenteuses (2005-2010) 5 : Pensez à consulter régulièrement nos sites Internet Pharmacovigilance, Pharmacodépendance et Antenne Médicale de Lutte contre le Dopage Lien : http://www.chu-montpellier.fr/fr/vigilance/ 6 Grossesse et radiodiagnostic Les examens d'imagerie médicale, en particulier ceux faisant appel aux radiations ionisantes, suscitent souvent de l'inquiétude lorsqu'ils ont lieu au cours de la grossesse. Il s'agit très majoritairement d'investigations réalisées en tout début de grossesse, alors que la grossesse n'est pas connue. Rappelons que l'échographie et l'IRM (Imagerie par Résonance Magnétique), sont des techniques sans irradiations. Les données concernant l'IRM au cours de la grossesse sont encore limitées, surtout pour le 1er trimestre mais les éléments actuellement disponibles ne mettent pas en évidence d'augmentation de risque pour le fœtus. L'IRM fœtale se développe actuellement dans le cadre du diagnostic anténatal. Les radiographies et le scanner utilisent des radiations ionisantes. L'exposition aux radiations ionisantes in utero peut être responsable d'anomalies chez le fœtus, qui dépendent de la dose administrée, mais aussi de l'âge gestationnel au moment de l'exposition. Les effets identifiés chez le fœtus sont un retard de croissance intra-utérin et des atteintes du système nerveux central, avec en particulier microcéphalie et retard mental. Les radiations ionisantes peuvent être responsables de mutations et de lésions chromosomiques ; mais l'effet mutagène et carcinogène des radiations ionisantes reçues in utero est très difficile à évaluer et la probabilité de développer un cancer dans ces conditions semble actuellement quasi identique à celui de la population générale. En ce qui concerne la dose administrée, il importe de connaître la localisation de l'examen et la dose reçue par l'utérus (et non la dose totale délivrée lors de l'examen). Les actes de radiodiagnostic à l'étage susdiaphragmatique seront donc très peu irradiants pour l'embryon. Lorsque le Centre Régional de Pharmacovigilance du Languedoc-Roussillon (CRPV-LR) est saisi pour une exposition chez une femme enceinte, un calcul de la dose-gonade est réalisé par des radiophysiciens du CHRU avec lequel le CRPV a mis en place une procédure, depuis 2002, selon les paramètres spécifiques à chaque patiente et donc chaque acte réalisé. Les références publiées par l'IPSN (Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire) et l'expérience acquise par le CRPV-LR depuis plus d'une dizaine d'années montrent que la dose reçue à l'utérus lors des examens de radiodiagnostic courants est le plus souvent largement inférieure à 50 milligray = mGy (le gray correspondant à la dose absorbée). Or la dose seuil reçue à l'utérus est fixée à 100 mGy et le risque demeure faible jusqu'à 200 mGy. En ce qui concerne l'âge gestationnel au moment de l’irradiation, il est admis que la loi du « tout ou rien » s'applique pendant les deux premières semaines de grossesse, une irradiation à ce stade de la grossesse étant considérée sans conséquences pour la suite de la grossesse ou entraînant une fausse couche spontanée. Entre la 2ème et la 8ème semaine de grossesse, il existe un risque de malformations du système nerveux central (notamment microcéphalie) mais la dose seuil est supérieure à 200 mGy. La période de risque maximal en ce qui concerne le système nerveux central se situe entre la 8ème et la 15ème semaine de grossesse, avec une dose seuil, qui se situe autour de 100 mGy ; ce risque diminue ensuite entre la 16ème et 25ème semaine de grossesse. 7 L'utilisation d'un produit de contraste iodé hydrosoluble (la majorité des molécules) ne pose pas de problème particulier avant la 12ème semaine de grossesse (période à partir de laquelle la thyroïde fœtale devient fonctionnelle et peut capter l’iode). Au-delà, l'emploi de tels produits peut être envisagé si nécessaire, en prévoyant par sécurité un bilan de la fonction thyroïdienne du nouveau-né, en particulier si l'exposition a eu lieu près du terme et si l'enfant est prématuré. L’utilisation du gadolinium au cours de la grossesse est encore limitée mais les données disponibles à ce jour n'ont pas mis en évidence d'effet tératogène ou foetotoxique. Certaines molécules disposent de données animales rassurantes et sont privilégier (cf CRPV) En résumé : Pour tous les actes de radiodiagnostic courants, les doses délivrées sont le plus souvent très inférieures aux doses seuils au-delà desquelles un risque tératogène, de FCS ou de cancer pourrait survenir. De plus, il s'agit le plus souvent d'irradiations à un stade très précoce de la grossesse, lorsque celle-ci n'est pas connue, et donc avant la période de risque maximal pour le système nerveux central (8-15 SG). Il est donc justifié de rassurer une patiente en cas d'exposition fortuite à un acte de radiodiagnostic courant. Une évaluation de la dose reçue à l'utérus par un radiophysicien, en particulier pour des examens concernant l'étage sous-diaphragmatique, permet de renseigner avec précision le corps médical et les patientes. Extrait de bibiographie : Thompson-Bos MA, Fourcade M, Hillaire-Buys D. Radiations et produits de diagnostic, "Médicaments et grossesse : prescrire et évaluer le risque", Jonville-Béra AP, Vial T, Elsevier Masson 2012 De Santis M, Cesari E, Nobili E, Straface G, Cavalieres AF, Caruso A. Radiations effects on development. Birth Defects Res C 2007; 81:177-82, IPSN publication 84 de la CIPR. 2008 Sur les bonnes tables : CRPV du Nord-Pas de Calais Hypomagnésémie : penser aux Inhibiteurs de la Pompe à Protons ! L’hypomagnésémie est une perturbation électrolytique pouvant avoir des conséquences cliniques sévères ou potentiellement graves comme la survenue de crises de tétanie, de convulsions, de troubles du rythme cardiaque ou encore de perturbations électrolytiques associées de type hypocalcémie ou hypokaliémie. Les étiologies de l’hypomagnésémie sont nombreuses : elles peuvent être secondaires à un défaut d’absorption intestinale, à un excès de pertes rénales, ou plus rarement d’origine génétique ou encore iatrogène. Quelques médicaments sont en effet connus pour être à l’origine de cas d’hypomagnésémie en favorisant l’élimination rénale du magnésium, comme les diurétiques de l’anse, les diurétiques thiazidiques, le cisplatine, les aminosides ou encore la ciclosporine [1]. Depuis quelques années, les Inhibiteurs de la Pompe à Protons (IPP) semblent devoir être également considérés comme pourvoyeurs de ce type d’effet indésirable. La littérature compte ainsi une trentaine de cas d’hypomagnésémie sous IPP. Elles apparaissent dans la plupart des cas après quelques années d’exposition et sont rapidement et systématiquement réversibles à l’arrêt du traitement [2]. Les mécanismes mis en jeu sont encore discutés : l’hypochlorhydrie induite par les IPP pourrait modifier l’absorption intestinale du magnésium. Les IPP pourraient également jouer un rôle sur les canaux ioniques TRPM6 impliqués dans le transport actif du magnésium au niveau gastro-intestinal [2]. A ce jour, seuls les résumés des caractéristiques de l’oméprazole et de l’ésoméprazole mentionnent l’hypomagnésémie parmi les effets indésirables de ces médicaments (effet indésirable considéré comme très rare). Au vu de la large prescription des IPP, cet effet indésirable mérite à notre avis d’être gardé en mémoire. [1] Nutrition clinique et métabolisme. 2004. 18 :127-130. ; [2] QJM. 2010.103 :387-95. 8 ADDICTOVIGILANCE Spécialités à base de Fentanyl : attention risque de mésusage ! Quatre spécialités contenant du fentanyl à libération immédiate et indiquées uniquement dans le traitement des accès douloureux paroxystiques chez les patients cancéreux déjà traités par des antalgiques opiacés sont commercialisées à ce jour en France. Par ailleurs, une spécialité contenant du fentanyl à libération prolongée est également disponible, le Durogésic®. En 2008, l'AMM du fentanyl à libération prolongée (Durogésic®) a été élargie au traitement des douleurs chroniques quelques soient leur origine. Cependant, dans cette indication, le manque d'études probantes n'a pas permis l'obtention d'un SMR suffisant afin d'envisager le remboursement des spécialités (Durogesic, patch de fentanyl, antalgique – Avis de la commission de la transparence du 10 décembre 2008. Consultable sur http://www.has-sante.fr/) Les spécialités à libération immédiate et leurs caractéristiques sont résumées dans le tableau : Actiq® Abstral® Effentora® Instanyl® Forme galénique Pulvérisation nasale Applicateur buccal Sublingual Oravescent Commercialisation 2002 2009 2010 2010 Dosage disponible (µg de 200, 400, 600, 800, 1200, 100, 200, 300, 400, 600 100, 200, 400, 600, 800 50, 100, 200 fentanyl) 1600 Biodisponibilité 50% 70% 65% 89% ± 30 min 15 min 10 min 7 min Délai d'action AMM Traitement des accès douloureux paroxystiques chez les patients cancéreux déjà traités par des antalgiques opiacés Le mésusage est défini par une utilisation en dehors des recommandations de l'AMM, en dehors de l'usage abusif. Ce risque, associé à un risque de détournement d'utilisation à des fins d'usage abusif a entraîné la mise en place d'un Plan de Gestion des Risques national par l'ANSM, pour ces spécialités. Le CEIP de Nancy en charge de ce suivi a présenté un premier bilan en Commission Nationale des Stupéfiants et psychotropes en 2012: • Les ventes pour les spécialités Effentora®, Abstral®et Instanyl® sont en progression constante depuis leur mise sur le marché. La spécialité Actiq® reste, malgré la mise sur le marché des autres formes à libération immédiate de fentanyl, la spécialité la plus vendue en termes d’unités. • Type de mésusage constaté : L’ensemble des données indique une forte proportion de mésusages parmi les cas rapportés (Actiq® 90%, Effentora® 84%, Instanyl® 48%), la grande majorité des cas relevant d’un ou plusieurs types de mésusages. Pour les formes Actiq® et Effentora®, on retrouve pour une majorité des cas des indications hors AMM (environ 60% des cas déclarés), 9 Le deuxième mésusage notifié est l’absence de traitement de fond opioïde pour 47% des cas concernant la spécialité Actiq®, 37% Effentora®, 14% Instanyl®. • Abus, dépendance. La pharmacodépendance (définie selon les critères du DSM-IV) concerne 33% des cas rapportés pour Actiq®, 20% Instanyl®, 1% Effentora. Un usage abusif est décrit pour 9% à 19% des cas selon les spécialités. Ces utilisations hors AMM exposent le patient à une mauvaise prise en charge de son syndrome douloureux et à une augmentation des posologies et/ou à l'association de plusieurs molécules antalgiques. Commission nationale des stupéfiants et psychotropes - Compte rendu de la réunion du 20 octobre 2011 (22/02/2012) Résultats d'une enquête collaboration CEIP/CETD Mésusage de la spécialité Fentanyl : résultats d'une analyse rétrospective au Centre de Traitement et d'Evaluation de la Douleur (CETD) de Montpellier L'objectif de cette étude était de réaliser un état des lieux des patients pris en charge au CETD et recevant à l'admission un traitement antalgique à base de fentanyl. Tous les dossiers médicaux des patients hospitalisés entre 2007 et Juin 2012 au CETD et recevant du fentanyl, ont été analysés. Dans la période de l'étude, 37 patients ont été inclus. La médiane d’âge des patients hospitalisés était de 47 ans (écart: 20-78 ans), avec une prédominance de femmes (68 %). Tous les patients étaient sous fentanyl depuis plus de 6 mois. Le type de douleur ayant nécessité la mise en place d’un traitement par fentanyl, était des dorsalgies (39%), des polyalgies diffuses (32%), des douleurs neuropathiques (13%), des douleurs thoraciques (13%), et autre douleur (3%). A l’admission 51% des patients présentaient un état dépressif (63% de femmes) et la médiane de l'EVA à l'admission était de 7.5/10 [écart: 5-10]. Soixante huit pourcent des patients étaient sous la spécialité Durogésic patch, et 16% étaient sous Actiq, 16% prenaient les deux. Trois patients sous Actiq® (50%) ne recevaient pas de traitement antalgique de fond. A l’admission la médiane journalière des doses en équivalent morphine était de 240 mg (écart: 40-720 mg). A la sortie l’arrêt du fentanyl était constaté dans 46% des cas, dans 54% des cas de la posologie de fentanyl a été diminuée. Pour tous les cas, un mésusage du fait d'une utilisation hors indication ou hors délai a été constaté plutôt qu'un abus. La médiane des doses à l'admission était élevée. De part le potentiel d’abus et de dépendance évalué comme majeur des nouvelles formes galéniques de fentanyl, une augmentation des hospitalisations pour sevrage est à prévoir. Nous remercions le Dr Patrick Ginies ainsi que toute son équipe pour la conception et l'aide apportée à la réalisation de cette analyse. Laureau M, Eiden C, Giniès P, Peyrière H. Patients hospitalisés au centre anti-douleur du CHU de Montpellier pour un sevrage au fentanyl : analyse rétrospective. 7èmes Ateliers de la pharmacodépendance et addictovigilance. Biarritz, 29-30 Octobre 2012. Pour notifier un cas d'abus, de dépendance, de détournement d'utilisation, un nomadisme, une complication somatique liée à la consommation de substances, vous pouvez nous appeler 04 67 33 67 57/49, nous envoyer un fax 04 67 33 67 51, ou un mail [email protected] 10