Jean-Pierre BARBIER-JARDET Né le 22 octobre 1938 à La Seyne

Transcription

Jean-Pierre BARBIER-JARDET Né le 22 octobre 1938 à La Seyne
Jean-Pierre BARBIER-JARDET
Né le 22 octobre 1938 à La Seyne (Var)
Adresse
325 Lieu-dit Le COLLET
83170 LA CELLE
Téléphones 04 94 69 13 61 et 06 09 28 05 86
Adresse
électronique [email protected]
Site
www.barbier-jardet.net
ETUDES ET VIE PROFESSIONNELLE
1955-1959 Ecole Normale d'Instituteurs à Draguignan.
Certificat d'aptitude professionnelle.
1968-1971 Certificat d'aptitude à l'enfance inadaptée.
1973-1975 Diplôme de psychologue de l'Education.
(Université de Provence).
1964-1978 Montages poétiques et représentations théâtrale sur des
textes de E. Guillevic, N. Hikmet, F.G. Lorca, T. Corbière,
J. Rictus, P. Eluard, V. Maïakovski, Ho Chi Minh,
L. Hughes, A. Rimbaud, N. Gogol, F. Kafka.
1973-1978 Diplôme d'études universitaires générales.
Licence de psychologie clinique.
Maîtrise de psychologie clinique.
(Université de Provence).
1978-1980 Licence de philosophie.
(Université de Provence).
1980-1988 Participant à la section clinique de l'Université de
Paris VIII, département de psychanalyse.
PUBLICATIONS ET INÉDITS
1960 L'Allumette et le soleil.
Recueil de poèmes.
(Editions Pierre-Jean Oswald).
1967 En cours de vie.
Recueil de poèmes.
(Editions Pierre-Jean Oswald).
1980 Tout Homme étant présumé innocent.
Article dans le bulletin de l'Association Française des
psychologues de l'Education (numéro 32).
1981 Les Insecticides.
(Poèmes sur des gravures de Corine Brunet).
1983 Une Fiction de la loi sur les personnes mortes.
Article dans le bulletin de l'Association Française des
psychologues de l'Education (numéro 45).
1988 Choix de poèmes.
Revue «Nota Bene».
(Editions de la Différence).
1988 Nature morte aux miroirs aux alouettes.
Recueil de poèmes édité avec le concours
du Centre National des Lettres.
(Editions Belfond).
1991 Le Brasier.
Roman.
(Editions Le Pré aux Clercs, Pierre Belfond).
1994 Le Soleil et la mort en face.
Roman.
(Editions SWING — Jean-Pierre FIORE).
1996 Feus les autoportraits.
Recueil de poèmes.
(Editions A.R.C.A.M.—Gérard Murail).
1998 Bufo.
Recueil de cinq nouvelles.
(Editions In Octavo— L. Camacho).
1999 L'effroyable Chanson du poète voyant.
Pièce de théâtre en neuf mouvements.
(Éditions L’Harmattan - 2011)
2000 Du Sang sur la méthode rose.
Roman.
(Editions Les Presses de Valmy— Daniel Bontemps)
2002 Les Mues de l'ombre.
Recueil de poèmes.
2003 La Boîte de conserve.
Pièce de théâtre en trois actes.
2005 ETC.
Roman.
(Editions Orizons-L’Harmattan- Daniel Cohen)
2010 Amarré à un corps-mort
Roman
(Editions Orizons-L’Harmattan-Daniel Cohen)
SCÉNARIOS
1984-1989
Le Brasier
(en collaboration avec Eric Barbier).
Sortie du film
30 janvier 1991
Réalisation
Eric BARBIER.
Production
Jean-François LEPETIT.
Société FLACH FILM.
WARNER BROS.
Distribution
1995
Alpha du Centaure.
Extrait de
L'effroyable Chanson du poète voyant.
Pièce de théâtre en neuf mouvements.
(Éditions L’Harmattan - 2011)
EXTRAIT :
CINQUIÈME MOUVEMENT
RÊVEUSEMENT
Ô prolétariat exécuté :
C'est le rêve qu'ils ont amputé,
L'amour, tu, sous leurs talons de fer !
Face au coma du peuple, que faire ?
La couronne de laurier délire,
Féerie foulée au pied des tyrans !
Gommer soudain l'horreur par la lyre,
Mais le mal actuel tue le chant !
Le poète marche face à des photographies représentant la grande marée d'équinoxe.
LE POÈTE
Moi qui ai toujours contemplé la mer, je ne l'ai jamais rencontrée ! Eloigné de son appel, injustement
séparé de cette matrice écumante comme d'un totem féminin, je poussais des lamentations de caïman
pour m'enchâsser en sa présence d'émeraude. L'esprit rêveur, fidèle aux êtres du foyer, je me suis
embarrassé les pieds à maintes reprises dans les dentelles qu'elle brodait au bord des plages déréglées,
dans la respiration lugubre d'une nuit piquetée d'étoiles de dernière grandeur, mon visage livré aux
fouets engourdissants des embruns. Un effluve d'ambre gris d'après l'amour émanait du grand large sur
lequel, à peine orphelins de mes yeux, se perdaient mes regards qui sombraient dans les berceaux des
creux infinis, balancés par des vagues plus douces que des aïeules.
Apparaît la photographie de William Elwin.
WILLIAM ELWIN
Au Vietnam, quand nous investissions un village, nous prenions un homme au hasard, nous l'attachions à
un arbre et nous lui demandions : « Que sais-tu ? » Il était incapable de répondre ; il n'avait jamais
entendu notre langue ; et quand il l'aurait comprise, nous aurait-il donné des renseignements qui
auraient porté préjudice à sa famille, à ses amis, à son peuple ? Alors nous le torturions, nous lui
entaillions la peau à la pointe de nos baïonnettes et au fil de nos coutelas. Il hurlait à nous rendre fous !
Nous remplissions un seau d'eau salée et nous lui plongions la tête dedans. Nous lui prenions l'oreille,
nous la lui coupions. Enfin, nous tuions l'homme à petit feu en lui enfonçant le plus lentement possible
nos baïonnettes au travers du corps. Après cet acte, je n'ai plus pu pénétrer une femme, j'étais devenu
tout à fait impuissant. A bout, j'ai déserté le corps d'armée dans lequel j'avais été affecté.
LE POÈTE
A déchiffrer ces rumeurs de gréements qui montaient, au hasard de l'entrelacs des lames, jusqu'à la
cavalcade des cumulus, jusqu'au tournis de la pensée, nous nous composions, la mer et moi, un visage
d'intimité. Nos sillages solitaires se côtoyèrent et tout à coup s'unirent au cours d'une chamade que je
sentis battre en moi comme le bannissement profond et terrible de toute passion chevaleresque dont les
hennissements de douleur, après la fracture du saut de haie, exigeaient qu'on l'achevât. Le tonnerre de
titans de ces vagues déferlantes semblables à des suaires immaculés jetés à la face cireuse de l'horizon
décédé, m'assourdissait, court-circuit suprême au-delà des échos à l'agonie qu'aucun mortel ne
ressuscitera jamais en regards éperdus. Toutes ces lames de haut fond partaient à l'assaut de l'azur en
sculptant une cascade de cristal ascendant ; toutes ces lames de haut fond se formaient comme une
lointaine manade ondulante et embuée qui roulait des croupes de montagnes et mouraient en plein
drame, en souillant d'une écume mordorée les commissures du sable carbonisé, sous l'œil accusateur de
la lune qui se dardait au-dessus du fauteuil à bascule des eaux.
Apparaît la photographie de Cao Van Nguyen.
CAO VAN NGUYEN
Les machines soufflantes des soldats américains sont entrées en éruption au fond de nos abris souterrains.
Leurs gueules de reptiles ont craché du gaz lacrymogène par rafales et des tornades de poudre vénéneuse
de chlorobenzalmalononitrile. A peine avions-nous respiré ces produits toxiques que nous avons été
frappé d'obnubilation, que nous sommes tombés dans le coma, bouches béantes vers le ciel, assoiffés
d'air pur, le souffle fermé à double tour par les verrous bloqués des muscles respiratoires ; nous avons
été secoués de dysenteries et de vomissements insoutenables et sanglants ; nos nerfs optiques ont coupé
court à tout influx sensible et nous avons été plongés dans la nuit irréversible de la cécité ; et les enfants
que nous sauvegardions dans les nids de nos entrailles de femmes, nous avons été forcées de les mettre
au monde avant terme, morts…
LE POÈTE
Dans l'aura d'une nuit intemporelle, je m'agenouillai face au ventre érugineux de la mer qui s'ouvrait
indéfiniment. Les poissons volants de mes yeux plongeaient pour percer le mur de coquilles et d'algues
de l'arche d'alliance : mouvant miroir aux abysses intra-utérins. Seul face à toi, mon Dieu, face à la
déchéance de la lame comme de mon corps, face à cet ensorcellement de l'amour bref — Ah, cette
lassitude de souffrir avec quelle infinie douceur, mon bien-aimé irrésolu, avec cette écharde d'abandon,
d'absence et d'oubli en plein cœur —, la mer indomptée porte plus haut la plainte démente de ma
poitrine excoriée vive et les frissons de mon âme froissée et esseulée.
ALAIN MARLIAC
Je décris les nouveaux jouets de mort de la police : voici une poudre insecticide dont le jet atteint 300
kilomètres par heure ! Voici les acides à ronger la peau jusqu'aux os ! Voici la lèpre, la lèpre sous forme
de bombes bactériologiques ! Voici les armes électriques à haut voltage ! Voici des harpons à
électrocuter ! Voici des fusils lance-dards, des dards d'acier qui sifflent avec une évidence qui crève les
yeux ! Voici des matraques et des croix gravées dans la chair à grands coups ! Voici des barres d'acier aux
guirlandes de chaîne et des jambes fracturées, des côtes enfoncées, des foies éclatés ! Voici des fusils
lance-grenades, et la fuite éperdue d'un bétail à dos d'hommes ! Voici des fléaux à blé qui brisent les
crânes comme des coquilles de noix !
LE POÈTE
A peine un delta de terre lui barrait-il tout déferlement que la mer se rebellait et se mettait dans une
humeur irisée de chien de mercure. Mon âme s'aérait au souffle de cette révolte et s'abreuvait à l'élixir
capiteux de ces embruns d'insubordination. Ivre mort aux accords des orgues qui montaient des
cathédrales de conques et des rosaces d'oursins, je m'abandonnai à l'étreinte passionnée de ses bras de
mer, je fondis mes cristaux de sel gemme dans sa nuit foudroyée. Cette eau me travailla au corps
d'autant de morsures de murènes et porta disparus craintes et remords. Confondues par le crépuscule,
chantournées par le soleil, nos âmes, prises dans les remous d'une marmite du diable, se joignirent
comme deux osselets d'hospitalité.
CARLOS LOPEZ
Pendant des heures, les tortionnaires me fracassèrent le crâne, pendant des heures, les tortionnaires
m'écrasèrent la plante des pieds, pendant des heures, les tortionnaires me labourèrent les organes
génitaux. « Passons-lui le costume des dimanches ! » rugit l'un d'entre eux, l'écume aux lèvres. Il s'agit
du supplice de la baignoire, une baignoire remplie d'urine et d'excréments humains. Des nuits durant, ils
me plongèrent dans cette baignoire, des nuits durant ; quand on étouffe, on boit, l'asphyxie vient vite.
LE POÈTE
Mis au tombeau d'un gouffre, arrimés par des harnais d'algues, les atomes de mon apparence palpitaient
sous les coups de boutoir du ressac. Soudain fut dissoute mon apparence dans la solution du flux et du
reflux. Me voici mirage d'une pensée fulgurante, magie d'une vision dorée, désincarnation d'un arc-enciel, ectoplasme des hauts fonds sous le drap céruléen de la surface des flots, fœtus de la baie dans la
grande marée amniotique et inlassable qui monte et qui descend sur les hippocampes harnachés du
manège de la mer, ce manège aimanté par l'attraction démentielle d'une lune hors-la-loi. La mer
s'apaisait toute en clapotis de songes creux, mélangeant à sa palette du plomb fondu, des larmes de
résine et du miel d'anémones. Mise à mal par les tentacules d'une pieuvre de vérité, la mer partait à
l'assaut d'un récif d'idées reçues. Un de ces jours-ci, fuyarde impénitente, la floraison de mon âme sera
arrachée au flot, et, sous la coupe d'un destin monté de toutes pièces, se fracassera sur des récifs
inconnus de Dieu même.
RONALD SHARPIRO
Je fais partie des gardiens du pénitencier de Fort-Detrick. Vêtus de combinaisons étanches, de masques
et de gants de caoutchouc, on entre par surprise dans les cellules des détenus et on lave tout au jet :
personnes et objets. L'eau est concentrée en dichlorodiphényltrichloroéthane. Les prisonniers sont
nettoyés par force, réveillés en sursaut en plein sommeil ; pour ce faire, on les traîne par les pieds et les
testicules. On les immerge dans un bain additionné d'eau de Javel et on les décrasse à la brosse à lavepont. On en profite pour effectuer de fond en comble une désinfection de la cellule ; pour ce faire, on
emploie un produit qui dégage un gaz cyanogène, aussi bleu qu'un ciel sans nuage, aux effets suffocants.
Pour échapper à l'asphyxie, les détenus brisent les vitres à mains nues. On les sanctionne pour ces actes
de vandalisme…
LE POÈTE
La mer chante une antienne éternelle penchée sur les berceaux des nefs mises en eau. Cœurs de cumulus
gros de pluie, fleuves aux affluents fous d'amour, rosée d'étoiles aux gouttes jumelles sur le miroir du
crépuscule, artères et larmes humaines, vous cherchez-vous à votre insu dans mes reflets, mes abysses
mises sous clé et mes bruissements de plancton ?
Par les tressaillements des entrailles de la terre, par l'apocalypse de Har-Maguédon, par les cyclones qui
arrachent aux roches les cristaux de leurs yeux, que la mer prenne le mors aux dents, toutes vagues
dehors, sous le vent debout, teint aux émeraudes des rameaux, face au soleil, gland turgescent ! Ô délire
des éléments déchaînés, au milieu desquels, ultime représentant de l'espèce, écartelé dans le sacre d'une
nuit d'horreur, s'égosille la guitare basse et libre d'un rossignol insensé !

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