Kundera, si libre de ses racines - MARIANNE en

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Kundera, si libre de ses racines
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N° 416 Semaine du 09 avril 2005 au 15 avril 2005
Dans "le Rideau", l'écrivain explore, en compagnie de ses auteurs favoris, cet art à part entière qu'est
pour lui le roman.
Auteur : Duteurtre Benoît
«Mon Président» : le
morceau de reggae rigolo
de Toz
Le 17/02/2007 20:50
Dans ses romans, Kundera a donné une place nouvelle aux idées, utilisées comme un élément du récit au même
titre que les personnages ou les descriptions. Il est aussi l'un des rares écrivains capables d'écrire un livre théorique
à la façon d'un roman. Sous sa plume, les réflexions
prennent vie comme des protagonistes, elles entrent en
scène, s'effacent, puis réapparaissent sous un nouvel
éclairage. Cette magie de la composition caractérisait
déjà l'Art du roman et les Testaments trahis, deux livres
où l'auteur maniait l'intelligence comme un
divertissement. Il reprend sa réflexion dans le Rideau *
un « essai en sept parties » , sorte d'autoportrait littéraire
de l'auteur avec ses héros (Kafka, Sterne, Rabelais...) et
ses thèmes favoris (l'histoire, la spécificité romanesque,
l'oubli...). L'anecdote, la lecture, le souvenir personnel y
servent de point de départ à un libre cheminement nourri
par la contradiction.
Torreton dénonce
«l'intimidation violente»
de l'UMP à l'égard des
journalistes de TF1
Le 16/02/2007 18:58
Un certain goût du
lynchage
Le 16/02/2007 18:24
Pluralisme.org dénonce
le système des
parrainages
Le 16/02/2007 19:06
La quête de l'identité européenne
« À l'époque où le monde russe a voulu remodeler mon
petit pays à son image, j'ai formé mon idéal de l'Europe
ainsi : le maximum de diversité dans le minimum
d'espace ; les Russes ne gouvernent plus mon pays
natal, mais cet idéal est encore plus en danger. .. » En lisant ces lignes, au début de la deuxième partie, le lecteur
pourrait espérer que l'écrivain lui apporte un élément de réponse au prochain référendum ! Dès la page suivante, il
comprendra que ce plaidoyer en faveur de la diversité n'est qu'une première proposition, contrebalancée par une
idée plus importante : la conscience d'un destin européen commun qui a trouvé son prolongement dans l'art du
roman ; mais aussi la nostalgie d'une Europe disparue, qui cherchait « son identité dans le miroir de sa philosophie
et de ses arts » . Loin de tout nationalisme, Kundera oppose le « petit contexte » patriotique au « grand contexte »
de l'histoire artistique tout entière; Est-ce à dire qu'il réclame une Europe sans frontières ? Pas davantage, car,
probablement, la seule revendication dé ce livré est. de ne pas "confondre les questions politiques et les questions
esthétiques.
La question de la spécificité romanesque est omniprésente au coeur de ces pages. Réflexion salutaire face à
l'embrigadement volontaire des écrivains au service des grandes causes ; mais aussi parce que, depuis plusieurs
décennies, les avant-gardes adorent brouiller les pistes en regardant, par exemple, les arts plastiques comme un
royaume du concept, la musique comme un prolongement de la science acoustique, ou le roman comme un terrain
d'expression idéal pour le lyrisme poétique... Kundera, lui, n'a pas renoncé aie répéter : la force d'un art réside dans
ce qu'il est seul à pouvoir nous apporter, dans ce qui ne peut pas s'exprimer par d'autres moyens ; et la valeur
particulière du roman tourne, depuis toujours, autour d'une constante préoccupation : l'exploration de l'existence et
de son mystère. En ce sens, le roman n'est pas une catégorie de la « littérature » , mais un art en soi avec ses
moyens propres (le récit, les personnages...). Les techniques, les histoires ont changé au fil des siècles, mais un fil
continu relie les époques du roman, comme il relie les chapitres de ce livre, depuis Cervantes qui « envoya don
Quichotte en voyage et déchira le rideau » , Fielding, l'auteur de Tom Jones qui parlait d'un art « prosaï-comi-épique
» , jusqu'à Flaubert qui ambitionnait d' « aller dans l'âme des choses » .
La quête de « ce que seul le roman peut dire » autorise d'ailleurs Milan Kundera à railler (gentiment) certaines
conceptions littéraires répandues dans son pays d'adoption... Découvrant un étrange classement des « livres qui
ont fait la France » , proposé pat le Journal du dimanche, il s'étonne d'y voir caracoler en tête Victor Hugo et de
Gaulle, tandis que Balzac ou Flaubert sont relégués dans les profondeurs du classement-hiérarchie
quasi-incompréhensible, vu de l'étranger où la littérature française est d'abord admirée pour ses grands romans du
XIXe siècle... et pas spécialement ceux d'Hugo. Une brève analyse de Quatre-vingt-treize montre (sans
exagération) combien le ridicule l'emporte dans les envolées romanesques du poète, pleines de clichés, de
personnages en carton-pâte, de sentiments grandiloquents. Bref, le génie lyrique et théâtral paraît impuissant sur le
terrain de la vérité romanesque, tel que l'ont exploré les Illusions perdues ou l'Education sentimentale.
Curieusement, pourtant, le brio du style et l'emphase morale semblent plus prisés chez nous que les insolences du
romancier; celles de Flaubert en particulier, soumis d'une époque à l'autre aux mêmes navrantes attaques signées
Sainte-Beuve, Barbey d'Aurevilly ou Montherlant.
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Omniprésente dans le Rideau, la question de l'histoire vient également déranger nos certitudes. Il semble
aujourd'hui admis que le XXesiècle a été entaché par un « excès » d'histoire - invoquée pour tout justifier, quand les
révolutions se transforment en dictatures. Dans la vie artistique également, un « terrorisme d'avant-garde » a
prétendu dessiner par avance les destinées du « nouveau roman » ou de la musique contemporaine. Nous en voilà
presque débarrassés ! A la lecture de ces pages de Kundera, on comprend pourtant que l'art, sans histoire, ne
serait qu'un horizon indifférencié, où le pastiche de Beethoven par un prix de conservatoire aurait la même valeur
que Beethoven lui-même.
Ce livre nous le rappelé : c'est l'histoire, l'histoire européenne, l'histoire du roman, cette découverte inlassable qui
donne à nos expériences esthétiques leur profondeur de champ - et qui justifie aussi la nostalgie qui affleure parfois
devant la fragilité de cette histoire. Kundera ne rejoint certes pas le camp des doctrinaires de l'histoire, toujours
prêts à confondre esthétique et politique. Il préfère montrer comment certains romanciers centre-européens ont
incarné une forme de résistance, qualifiée ici de « modernité antimoderne » . De Kafka à Gombrowicz en passant
par Musil et Broch, leurs audaces artistiques ont, paradoxalement, mis en lumière une certaine horreur de la
modernité. C'est probablement à cette lignée que se rattache Kundera, dans le « grand contexte » littéraire, et non
dans le « petit contexte » géographique (qui voudrait faire de lui un « écrivain slave » , notion dont il montre qu'elle
n'a rigoureusement aucun sens !).
Comme Gombrowicz ou Stravinsky, le voici désormais libre de ses attaches, éloigné de ses racines pour cheminer
dans un monde intime de questions qui, toujours, nous parlent. Qu'on n'attende rien de narcissique, d'égotiste, ni
d'impudique, dans ce jeu où la distance est toujours gardée. Quelques esquisses du Rideau avaient paru dans une
revue littéraire sous le titre « A bâtons rompus » ; et tel est bien le ton d'un livre longuement mûri, comme un
accompagnement du travail du romancier. Plus encore que dans l'Art du roman ou les Testaments trahis, Kundera y
atteint une parfaite liberté de discours ; il chemine d'une idée à l'autre sans effort apparent, mais avec une
étonnante rigueur (quand la même idée se referme, cent pages plus loin) ; il éveille notre curiosité, soulève des
dualités et des paradoxes (l'opposition kitsch/vulgarité, lyrisme/poésie) et nous révèle la profondeur qui peut se
cacher derrière ce que notre époque voudrait nous faire appeler simplement, comme un devoir : la lecture
*Gallimard, 16,90 € .
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19/02/2007 03:02
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