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Les expatriés à la peine
646 mots
29 juin 2008
Le Monde
21
Français
(c) Le Monde, 2008.
Cet Euro fait la part belle aux équipes dont les joueurs évoluent dans les clubs nationaux
Pour bien figurer à l'Euro, misez sur les internationaux qui jouent dans leur pays d'origine. Telle pourrait
être la conclusion des trois semaines de compétition qui viennent de s'écouler. Quel que soit le résultat
de la finale entre l'Allemagne et l'Espagne, dimanche 29 juin, du stade Ernst-Happel de Vienne, ce
constat restera statistiquement valable.
Dans cette édition de l'Euro, ce sont les équipes rassemblant les plus grosses concentrations de
joueurs évoluant dans des clubs du championnat national qui ont été le plus loin dans le tournoi.
Meilleur exemple en la matière, la Russie. L'équipe de Guus Hiddink s'est présentée à l'Euro avec un
groupe de 22 joueurs issus de clubs russes sur 23. Suivent l'Allemagne (19 sélectionnés jouent dans
des clubs allemands), l'Espagne et l'Italie (18) puis la Turquie (16). Parmi ces cinq équipes figurent
donc les quatre demi-finalistes de l'Euro 2008, l'Italie ayant de son côté atteint les quarts de finale.
L'équipe de France, éliminée au premier tour, ne compte en revanche que neuf internationaux recrutés
parmi les clubs de Ligue 1.
" Si les joueurs convoqués par Luis Aragones évoluent, pour la plupart d'entre eux, dans les clubs
espagnols, c'est avant tout parce que ces clubs ont les capacités économiques et financières de les
garder ", constate Loïc Ravenel, maître de conférences au Centre d'études sur le sport et l'observation
des territoires (Cersot, université de Franche-Comté). " Le constat est le même en Allemagne. Des
clubs comme le Bayern Munich ou le Werder Brême ont les moyens d'offrir de hauts salaires à leurs
joueurs cadres pour leur couper l'envie d'aller voir ailleurs ", poursuit le géographe-chercheur.
Au sélectionneur Joachim Löw de puiser ensuite dans ce réservoir à talents que constitue le club
bavarois, champion d'Allemagne 2008 : les Lukas Podolski, Miroslav Klose, Bastian Schweinsteiger ou
Philipp Lahm forment l'ossature de son impressionnante Mannschaft, tandis que Michael Ballack, le
capitaine, n'a quitté que récemment la Bavière pour Londres.
Ce qui est vrai en Europe de l'Ouest commence à le devenir en Russie. " Grâce à leur richesse
nouvelle, les grands clubs de Moscou et le Zénit Saint-Pétersbourg, récent vainqueur de la Coupe de
l'UEFA, parviennent pour l'instant à conserver l'immense majorité de leurs internationaux ", constate
Loïc Ravenel.
En France, seul l'Olympique lyonnais semble en mesure de retenir les meilleurs. Les neuf
internationaux issus de la Ligue 1 qui ont rejoint les Bleus sont majoritairement lyonnais. Mais au regard
des piètres résultats des Bleus à l'Euro, le chercheur s'interroge : " Le football anglais, allemand ou
espagnol est différent du nôtre. L'encadrement des Bleus a sans doute eu des difficultés pour récupérer
ses joueurs expatriés. Finalement, jouer à l'étranger peut-il être un facteur préjudiciable ? "
Une radiographie des deux prétendants au titre tend toutefois à prouver le contraire. Les saisons de
Fernando Torres et de Xabi Alonso à Liverpool, l'expérience de Cesc Fabregas à Arsenal, ont enrichi le
jeu des trois Espagnols, qui font aujourd'hui partie des hommes providentiels de Luis Aragones. Michael
Ballack ne cache pas s'être aguerri depuis son arrivée à Chelsea. " Mon jeu a beaucoup évolué : quand
tu reçois le ballon, tu n'as pas le temps de tergiverser, avant j'avais la mauvaise habitude de prendre
mon temps pour diriger le jeu, ici je ne le fais plus ", confessait le meneur de jeu à la presse allemande
peu avant l'Euro.
" La France n'a pas su cette fois s'appuyer sur ses expatriés. Pourtant, avec le même profil d'équipe,
les Bleus avaient atteint la finale du Mondial 2006 ", pointe Loïc Ravenel.
Simon Roger
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