BGE Meyer Transport 25 11 09 - F

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BGE Meyer Transport 25 11 09 - F
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
Arrêt du 25 novembre 2009
Première Cour de droit civil
_________________________________
Composition
Juge Klett, présidente
Juge Corboz,
Juge Rottenberg Liatowitsch,
Juge Kolly,
Juge Kiss,
Greffier Widmer.
_________________________________
Parties
Hans Meyer AG Birr, Lättenstrasse 3, 5242 Birr,
Recourante,
représentée par Me Werner Schib, avocat,
Jurastrasse 4, case postale, 5001 Aarau,
contre
1. Société Suisse des Entrepreneurs (SSE),
Weinbergstrasse 49, case postale, 8035 Zurich,
2. Le syndicat UN1A,
Weltpoststrasse 20, 3015 Berne,
3. SYNA, syndicat interprofessionnel
Josefstrasse 59, case postale, 8031 Zurich 5,
Intimés,
Tous trois représentés par Me Brigitte Bitterli, avocate,
Pelzgasse 15, case potale 2430, 5001 Aarau
_________________________________
Objet
Convention nationale; assujettissement,
Recours contre le jugement de l’Obergericht du canton
d’Argovie, tribunal civil, 1ère chambre, du 9 juin 2009.
Etat de fait:
A.
D’après l’extrait du registre du commerce, la société Hans Meyer AG Birr (recourante) a pour
but la réalisation de travaux de fouille, d’excavation et de terrassement, des activités de transport,
la livraison de gravier, l’enlèvement d’ordures ménagères et l’exploitation de camions
multibennes (welaki) pour gros conteneurs et caisses de transport de meubles.
Par action en date du 17 décembre 2004 et réplique en date du 27 mai 2005, la Société Suisse des
Entrepreneurs, le syndicat UN1A et Syna, syndicat interprofessionnel (intimés) ont requis le
Tribunal du district de Brugg de constater que l’entreprise de la recourante est assujettie aux
clauses de la Convention nationale du secteur principal de la construction 2003-2005 telles
qu’étendues par le Conseil fédéral et que les clauses étendues sont directement applicables aux
conditions d’engagement de l’entreprise.
Le Tribunal de district a admis l’action le 3 avril 2007 et prononcé la constatation demandée. Par
jugement du 9 juin 2009, l’Obergericht du canton d’Argovie a rejeté le recours en appel interjeté
par la recourante.
B.
La recourante forme un recours en matière civile pour solliciter l’annulation du jugement de
l’Obergericht et le rejet de l’action. Elle conclut subsidiairement à l’absence d’assujettissement
de ses départements Transports, Unité de tri et Atelier aux clauses de la Convention nationale du
secteur principal de la construction 2003-2005 telles qu’étendues par le Conseil fédéral et,
partant, à l’inapplicabilité des clauses étendues aux conditions d’engagement relatives à ces
activités. A titre subsubsidiaire, elle conclut au renvoi de la cause devant l’autorité précédente
pour nouvelle décision.
L’autorité précédente a renoncé à la présentation de déterminations. Les intimés ont pris position
sur le recours par écriture du 21 septembre 2009.
Le recours s’est vu conférer un effet suspensif par prononcé présidentiel le 22 septembre 2009.
Considérants:
1.
Le présent recours est dirigé contre une décision finale rendue par une autorité cantonale de
dernière instance (art. 75, al. 1 et art. 90 LTF) en matière civile (art. 72, al. 1 LTF;
ATF 128 II 528 consid. 2a, p. 531; arrêt 4A_300/2007 du 6 mai 2008 consid. 1, non publié in:
ATF 134 III 399; arrêt 4A_283/2008 du 12 septembre 2008 consid. 1, non publié in:
ATF 134 III 541). Selon les constatations incontestées de l’autorité précédente, la valeur
litigieuse déterminante pour la recevabilité du recours en matière civile dépasse 30 000 francs
(art. 74, al 1, let. b LTF), raison pour laquelle le recours est également recevable de ce point de
vue, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si la valeur litigieuse minimale de 15 000 francs visée
à l’art. 74, al. 1, let. a LTF pourrait, le cas échéant, être applicable en l’espèce (cf. arrêt
4A_283/2008 du 12 septembre 2008 consid. 2, non publié in: ATF 134 III 541; Corboz, in:
Corboz et al. [éditeur], commentaire de la LTF, 2009, N. 24 sur l’art. 74 LTF).
Les autres conditions de jugement au fond du recours en matière civile étant elles aussi remplies,
il convient d’entrer en matière sur le recours – sous réserve de motifs recevables (art. 95 et
97 LTF) et de motivation suffisante (art. 42, al. 2 et art. 106, al. 2 LTF).
2.
Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l’autorité précédente (art. 105, al. 1
LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l’autorité précédente que si les faits
ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l’art. 95 LTF
(art. 105, al. 2 LTF). En l’occurrence, «manifestement inexacte» signifie «arbitraire»
(ATF 133 II 249 consid. 1.2.2). De plus, la correction du vice doit influer sur le sort de la cause
(art. 97, al. 1 LTF).
Le recourant qui souhaite attaquer les constatations de fait de l’autorité précédente ne peut se
contenter d’opposer aux constatations faisant l’objet du grief ses propres allégations sur les faits
ni se limiter à indiquer comment il estime que les moyens de preuve devraient être appréciés. Au
contraire, il doit démontrer de manière claire et fondée dans quelle mesure les constatations
critiquées (ou l’absence de constatations) sont manifestement inexactes ou reposent sur une
violation du droit au sens de l’art. 95 LTF (cf. ATF 133 II 249 consid. 1.4.3; 133 III 350 consid.
1.3, 393 consid. 7.1, 462 consid. 2.4). Si le recours en matière civile invoque un établissement
arbitraire des faits, il convient de noter que le juge du fond dispose d’une marge d’appréciation
non négligeable dans l’évaluation des moyens de preuve; le recourant devra donc démontrer dans
quelle mesure le tribunal cantonal a abusé de son pouvoir d’appréciation, notamment en tirant
des conclusions manifestement indéfendables, en ignorant des faits pertinents ou en décidant
arbitrairement de ne pas les prendre en considération (cf. ATF 132 III 209 consid. 2.1; 129 I 8
consid. 2.1; 120 Ia 31 consid. 4b p. 40; 118 Ia 28 consid. 1b p. 30). Il n’y a pas lieu d’entrer en
matière sur une simple critique des constatations de fait de l’autorité précédente si cette critique
ne satisfait pas aux exigences ci-dessus. Autrement dit, il n’y a pas lieu d’entrer en matière sur de
simples moyens d’appel (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3, 396 consid. 3.1 p. 399). Si le recourant
souhaite compléter les faits, il doit démontrer, avec renvois aux pièces du dossier, qu’il a déjà
produit devant les autorités précédentes tous les faits lui paraissant pertinents ainsi que tous les
moyens de preuve adéquats, conformément au droit procédural (arrêts 4A_214/2008 du 9 juillet
2008 consid. 1.2, non publié in: ATF 134 III 570; 4A_526/2008 du 21 janvier 2009 consid. 3.2).
3.
Le litige porte sur l’assujettissement de l’entreprise de la recourante – entreprise reconnue
comme une entreprise mixte – à la Convention nationale du secteur principal de la construction
2003-2005 (CN).
3.1 En cas de convention de branche ou d’industrie, les employés travaillant dans une branche
économique donnée sont assujettis à la convention collective de travail (CCT). La branche
économique à laquelle appartient l’entreprise est déterminée en fonction de l’activité qui confère
sa caractéristique à l’entreprise. A cet égard, l’élément déterminant n’est pas l’inscription au
registre du commerce mais l’activité effective. Conformément au principe de l’unité tarifaire, la
CCT s’applique à l’entreprise tout entière et donc aussi aux travailleurs étrangers à la profession,
sachant que certains niveaux de fonctions et certains contrats de travail particuliers font
régulièrement exception. Quoi qu’il en soit, une entreprise peut regrouper plusieurs entreprises
relevant de branches différentes. Une seule et même entreprise peut également être composée de
plusieurs secteurs d’entreprise justifiant une attribution différente parce qu’ils revêtent une
autonomie suffisante, également reconnue comme telle de l’extérieur. Dans ce cas, les différents
secteurs de l’entreprise peuvent relever de conventions collectives différentes. Le critère
d’attribution déterminant en matière de convention industrielle est donc la nature de l’activité qui
confère sa caractéristique à l’entreprise ou au secteur d’entreprise autonome – et non à
l’entreprise en tant que représentant économique de plusieurs secteurs (ATF 134 III 11 consid.
2.1 avec renvois). Déterminer les activités qui sont exercées au sein d’une entreprise ou d’un
secteur d’entreprise autonome et dans quelles proportions constitue une question de fait. En
revanche, déterminer, parmi les activités constatées, celles qui confèrent sa caractéristique à
l’entreprise constitue une question de droit.
Conformément à l’art. 1, al. 1 de la loi fédérale du 28 septembre 1956 permettant d’étendre le
champ d’application de la convention collective de travail (RS 221.215.311; ci-après: LECCT),
l’autorité compétente peut, par un décision spéciale (décision d’extension), à la requête de toutes
les parties contractantes, étendre le champ d’application d’une convention collective conclue par
des associations aux employeurs et aux travailleurs qui appartiennent à la branche économique
visée et ne sont pas liés par cette convention. La décision d’extension vise à imposer des
conditions de travail minimales uniformes à toutes les entreprises opérant sur le même marché et,
ce faisant, à éviter qu’une entreprise offrant des conditions de travail dégradées puisse en retirer
un avantage compétitif jugé déloyal. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, appartiennent à
une même branche économique toutes les entreprises qui, parce qu’elles offrent des produits ou
des prestations de même nature, sont en concurrence directe les unes par rapport aux autres
(ATF 134 III 11 consid. 2.2 p. 13 s.). Le but poursuivi par la déclaration d’extension, à savoir
prévenir tout avantage compétitif déloyal, ne peut être atteint que si tous les prestataires opérant
sur un marché donné sont par principe tenus de respecter les règles de la CCT concernée. Dès
lors qu’une entreprise s’installe dans des proportions manifestement non négligeables sur un
marché soumis à une CCT étendue, les principes généraux d’assujettissement sont applicables
(ATF 134 III 11 consid. 2.4).
3.2 La CN est une convention de branche (ATF 134 III 11 consid. 2.3 p. 14) qui a été étendue
par l’arrêté du Conseil fédéral en date du 22 août 2003 (Arrêté du Conseil fédéral étendant le
champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la construction en
Suisse; FF 2003 5537). Le champ d’application de la convention nationale, du point de vue du
genre d’entreprise, tel que délimité à l’art. 2 de cette dernière englobe les entreprises et parties
d’entreprises, sous-traitants et tâcherons indépendants qui emploient des travailleurs, ayant une
activité en particulier dans les secteurs suivants: bâtiment, génie civil, construction de routes,
terrassement, démolition, décharges, extraction de sable et de gravier, transport de et aux
chantiers, fabrication et transport de matériaux stockables.
L’autorité précédente a constaté à juste titre que le «transport de et aux chantiers» n’était pas
mentionné dans la délimitation du champ d’application, du point de vue du genre d’entreprise,
des clauses étendues de la CN visée à l’art. II.2, al. 3 de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le
champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la construction en
Suisse. Elle a estimé que cette absence était l’expression d’une décision intentionnelle du
législateur de restreindre le champ d’application, du point de vue du genre d’entreprise, et que
par conséquent, l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention
nationale pour le secteur principal de la construction en Suisse ne s’appliquait pas, par principe,
aux entreprises proposant des prestations de «transport de et aux chantiers» ainsi que des
prestations de «transport de matériaux stockables». Selon elle, les prestations de transport
effectuées par la recourante «à partir de chantiers» (bennes basculantes, engins à crochets,
camions multibennes, tracteurs) ne peuvent donc pas être, par généralisation, assujetties à
l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le
secteur principal de la construction en Suisse, comme l’a fait la juridiction de première instance.
Cependant, l’autorité précédente a ensuite conclu que les prestations de la recourante qui
relèvent, du point de vue du genre d’entreprise, du champ d’application de l’arrêté du Conseil
fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la
construction en Suisse, à savoir les travaux de démolition et de terrassement, mais aussi les
activités de décharge et de recyclage, sont celles qui confèrent sa caractéristique à l’entreprise de
la recourante – les prestations de transport également proposées ne revêtant qu’un caractère
subalterne. Dans ces circonstances, l’autorité précédente estime qu’il importe peu de savoir si ces
prestations de transport, offertes à des tiers lorsqu’elles concernent des matériaux de
terrassement, relèvent ou non des clauses étendues de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le
champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la construction en
Suisse, comme l’ont fait valoir les intimés. Elle a également conclu qu’il n’existait pas, au sein
de la société de la recourante, des secteurs d’entreprise revêtant une autonomie à ce point
suffisante et reconnue de l’extérieur qu’il soit possible de rattacher ces secteurs d’entreprise à
des conventions collectives différentes. Dans ces conditions, l’autorité précédente a confirmé la
constatation de la juridiction de première instance, à savoir que l’entreprise de la recourante
(dans sa globalité) était assujettie aux clauses étendues de la convention nationale pour le secteur
principal de la construction en Suisse 2003-2005 telles qu’étendues par le Conseil fédéral et que
les clauses étendues étaient directement applicables aux conditions d’engagement de l’entreprise.
4.
4.1 Lorsqu’elle a examiné si les prestations énumérées dans l’arrêté du Conseil fédéral étendant
le champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la construction en
Suisse confèrent à l’entreprise mixte de la recourante sa caractéristique, l’autorité précédente
s’est fondée sur le site Internet de cette dernière. D’après celui-ci, la recourante propose les
prestations suivantes:
- transport par bennes basculantes
- transport terrestre
- travaux de terrassement mécanique avec excavatrices et trax montés sur roues à chenilles et sur
pneus
- travaux de démolition
- travaux avec grue sur camion et grue sur pneumatiques
- service de bennes avec camion multibennes et engins à crochets
- enlèvement des ordures ménagères et des déchets verts
- collecte du verre, transformation et livraison de sable de verrerie et de gravillons de verre
- évacuation et stockage de déchets et de marchandises encombrantes, hormis les liquides et les
matières toxiques
- unité de tri de marchandises encombrantes
- matériaux de recyclage, fabrication et livraison
- livraison de tout-venant, sable calcaire, pierres de carrière, pierres de construction, ballast et
poudre d’argile
4.2 L’autorité précédente a par ailleurs statué que la recourante opérait incontestablement dans
les secteurs du gravier, des travaux de démolition et de terrassement et que cette activité entrait
dans le champ d’application de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la
convention nationale pour le secteur principal de la construction en Suisse. Selon elle, il est
également établi que la recourante exploite une entreprise de décharges et de recyclage au sens
de l’art. II.2, al. 3 de l’arrêté.
La recourante conteste la dernière constatation, alléguant que cette dernière repose sur une
appréciation arbitraire des moyens de preuve. Elle affirme n’exploiter qu’une unité de tri de
marchandises encombrantes, ce qui n’a rien de commun avec la mise en décharge et le tri de
matériaux de construction, dans la mesure où l’unité de tri ne reçoit aucun matériau de
construction ou de démolition.
La constatation litigieuse dressée par l’autorité précédente tient à ce que la recourante exerce
explicitement, d’après son site Internet, des activités de recyclage telles que visées à l’art. II.2,
al. 3 de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale
pour le secteur principal de la construction en Suisse, ainsi que des activités d’évacuation de
déchets et de marchandises encombrantes, et qu’elle se trouve dès lors en situation de
concurrence directe avec d’autres entreprises de décharges et de recyclage. Le descriptif
d’entreprise du 8 avril 2004 joint par la recourante à sa prise de position sur le rapport de la
SUVA datant du 25 septembre 2006 fait lui aussi expressément état d’activités de recyclage de
matériaux non bitumineux de démolition de routes, de béton et de déchets de construction ainsi
que de l’exploitation d’une décharge.
La recourante n’avance aucun élément susceptible de témoigner du caractère arbitraire de la
constatation litigieuse à la lumière de ces considérants. Tout d’abord, il est faux d’affirmer,
comme le fait la recourante, que l’autorité précédente n’a dressé la constatation attaquée que sur
la base de son site Internet. Au contraire, elle a également pris en considération le propre
descriptif d’entreprise de la recourante en date du 8 avril 2004. Elle a clairement motivé la
conclusion selon laquelle la recourante exploite une entreprise de décharges et de recyclage au
sens de l’art. II.2, al. 3 de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la
convention nationale pour le secteur principal de la construction en Suisse. Cette conclusion ne
saurait être jugée a priori arbitraire uniquement parce que l’autorité précédente accorde aux
moyens de preuve cités dans son exposé des motifs plus de poids qu’aux déclarations du témoin
Eichelberger devant la juridiction de première instance, lesquelles, selon l’interprétation de la
recourante, seraient en contradiction avec l’appréciation des moyens de preuve par l’autorité
précédente. Sur ce point, la recourante formule des critiques de nature purement appellatoire sur
lesquelles il n’y a pas lieu d’entrer en matière.
4.3 La recourante fait grief à l’autorité précédente d’avoir appliqué arbitrairement les
articles 184, al. 1 et 202 du code de procédure civile du canton d’Argovie en acceptant comme
moyen de preuve un rapport de la SUVA en date du 25 septembre 2006, demandé par la
juridiction de première instance afin de déterminer les critères sur la base desquels la recourante
est classée, du point de vue des assurances, non pas dans la catégorie des entreprises de transport
mais dans celle des entreprises de construction. Aux termes de l’art. 184, al. 1 du code de
procédure civile du canton d’Argovie, il n’est possible de présenter de nouveaux faits et de
nouvelles offres de preuve une fois la procédure allégatoire achevée que si ce retard est
excusable. Selon la recourante, les intimés ont présenté leurs allégations factuelles concernant le
classement de son entreprise par la SUVA avec un retard insuffisamment motivé, ce qui aurait
dû justifier le refus de toute nouvelle preuve concernant cette question. Toujours selon la
recourante, la disposition de l’art. 202 du code de procédure civile du canton d’Argovie, selon
laquelle le tribunal peut s’adjoindre des moyens de preuve non proposés par les parties, n’y
change rien, dans la mesure où cette disposition ne s’applique qu’aux faits présentés dans les
temps. L’Obergericht dans sa majorité aurait donc arbitrairement passé outre, à cause du
caractère notoirement connu du classement de la recourante par la SUVA – ce qui est
manifestement inexact.
Le grief de la recourante est dénué de tout fondement. Selon les constatations de l’autorité
précédente, le rapport de la SUVA a certes été demandé par la juridiction de première instance
après que les intimés eurent invoqué le classement de la recourante, par la SUVA, dans le secteur
principal de la construction du point de vue des assurances. Mais le rapport n’a pas été demandé
pour déterminer comment la recourante a été classée mais selon quels critères ce classement a été
opéré. Dans ces conditions, il importe peu que les intimés aient fait valoir trop tardivement le
classement de la recourante par la SUVA, d’autant que l’on conçoit mal dans quelle mesure ce
classement, effectué aux fins des assurances, pourrait revêtir, en tant que tel, un caractère décisif
dans le cas d’espèce. Il est par ailleurs inexact de prétendre que l’autorité précédente aurait, dans
sa majorité, considéré le classement de la recourante par la SUVA comme notoire et aurait dès
lors supposé qu’il était possible de recueillir des preuves à ce sujet malgré le caractère tardif de
l’allégation des intimés. En réalité, l’autorité précédente était majoritairement d’avis que les
intimés avaient établi en temps utile, et de manière substantielle, quelles étaient les prestations –
de nature à justifier son classement dans le secteur de la construction – proposées sur le marché
par la recourante. Sur ce point, elle estime que la juridiction de première instance avait le droit,
en application de l’art. 202 du code de procédure civile du canton d’Argovie, de faire appel à un
moyen de preuve non demandé par les parties, en l’occurrence un rapport de la SUVA, d’autant
qu’il est notoirement admis que les entreprises de construction comme les entreprises de
transport assurent leurs employés auprès de la SUVA et que les primes sont calculées en fonction
des risques d’accidents encourus dans les différentes branches d’activités. La recourante ne
prétend pas que l’autorité précédente (dans sa majorité) aurait fait preuve d’arbitraire par ce fait.
Si tant est qu’il fut recevable, son grief s’avère dès lors non motivé.
4.4 La conclusion de l’autorité précédente selon laquelle les prestations de la recourante relevant,
du point de vue du genre d’entreprise, du champ d’application de l’arrêté du Conseil fédéral
étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la
construction en Suisse, à savoir les travaux de démolition et de terrassement, mais aussi de
décharge et de recyclage, sont celles qui confèrent sa caractéristique à l’entreprise de la
recourante, alors que les prestations de transport également proposées ne revêtent qu’un
caractère subalterne, repose sur une appréciation approfondie de la masse salariale, du produit
brut ainsi que des effectifs de chacun des secteurs de l’entreprise.
4.4.1 En particulier, l’autorité précédente tient pour incontesté que sur les 70 collaborateurs
employés en 2003 par la recourante, 6 travaillaient dans le domaine des travaux de terrassement,
3 au sein de la gravière, 2 au sein de l’unité de tri, 35 dans le domaine du transport et 24 en
atelier/comme aides, ainsi que dans l’administration et à la direction. En 2004, l’effectif de la
recourante n’a diminué que d’un employé. En 2003, la masse salariale, d’un total de
3 812 833 francs, était répartie comme suit: travaux de terrassement 463 337,85 francs; gravière
165 310,60 francs; unité de tri (à classer dans les activités de recyclage) 172 802,70 francs;
transports 1 634 828,65 francs. La masse salariale affectée aux services d’aide et aux activités de
location, d’atelier/réparation et de bureau (y compris les activités de chef de chantier) était de
1 376 553,45 francs.
L’autorité précédente a donc conclu, à l’issue de son examen des moyens de preuve, que 40% de
la masse salariale de la recourante dans le domaine des transports était affectée aux transports
pour le compte de tiers et que les transports effectués pour son propre compte étaient réalisés
exclusivement dans le cadre et en tant qu’élément constitutif de la gamme de prestations
proposée, laquelle entre dans le champs d’application, du point de vue du genre d’entreprise, de
l’arrêté du Conseil fédéral, dans la mesure où les activités proposées par la recourante
parallèlement aux transports pour le compte de tiers, à savoir les travaux de démolition et de
terrassement, l’exploitation d’une gravière, d’une décharge et d’une unité de recyclage, relèvent
entièrement du champ d’application, du point de vue du genre d’entreprise, de l’arrêté du
Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur
principal de la construction en Suisse. Dès lors, la masse salariale de 2 436 279,55 francs
affectée aux activités de production (masse salariale totale de 3 812 833 francs moins la quotepart de 1 376 553,45 francs dévolue aux fonctions de service, exclues du champ d’application
conformément à l’art. 2, al. 4 de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la
convention nationale pour le secteur principal de la construction en Suisse) était affectée à
hauteur de 653 931,45 francs maximum (40% de la masse salariale totale de 1 634 828,65 francs
dévolue aux transports), soit un quart, aux transports effectués pour le compte de tiers. Les trois
quarts restant concernaient des activités assujetties aux clauses étendues de la CN, conformément
à l’art. II.2, al. 3 de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention
nationale pour le secteur principal de la construction en Suisse.
Même en ce qui concerne le nombre de collaborateurs employés dans les différents secteurs de
l’entreprise, l’autorité précédente part du principe que 40% tout au plus des prestations de
transport sont réalisées pour le compte de tiers et, qu’en outre, les chauffeurs affectés aux
transports pour le propre compte de l’entreprise et ceux affectés aux transports pour le compte de
tiers touchent fondamentalement la même rémunération. Dans ces conditions, elle estime que sur
les 46 employés affectés à la production en 2003 (70 moins 24), 14 tout au plus (40% des 35
chauffeurs de l’entreprise) effectuent des transports pour le compte de tiers. Autrement dit, 70%
(46 moins 14 employés) du personnel affecté à la production effectuent des prestations visées à
l’art. II.2, al. 3 de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention
nationale pour le secteur principal de la construction en Suisse.
Le produit brut réalisé dans les secteurs assujettis à l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ
d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la construction en Suisse
(travaux de construction et de terrassement, gravier et décharge, unité de tri) a atteint en 2003
6 101 031,29 francs, contre 5 994 787,40 francs pour les recettes tirées des activités de transport,
d’enlèvement des ordures ménagères, du service de bennes, de conteneurs et de l’exploitation de
camions multibennes (welaki). Cependant, l’extension du champ d’application des dispositions
des CCT ayant pour objectif premier de protéger les employés, l’autorité précédente estime que
ce n’est pas la capacité bénéficiaire de l’entreprise qui est déterminante pour trancher la question
de l’assujettissement de l’entreprise mais la densité de ses effectifs, laquelle se traduit dans le
nombre d’employés et la masse salariale qui s’y rapporte.
4.4.2 A ce sujet, la recourante fait valoir qu’il aurait fallu appeler Hanspeter Meyer comme
témoin et lui demander quelles missions de transport la recourante effectuait, pour le compte de
qui et dans quelles circonstances. Selon elle, l’autorité précédente a violé à ce titre les règles de
preuve inscrites à l’art. 8 du code civil suisse. Cependant, elle se contente de déclarer avoir
sollicité dans sa duplique, lors de la procédure de première instance, l’audition comme témoin de
Hanspeter Meyer. Elle n’affirme nullement avoir fait grief, lors de la procédure devant l’autorité
précédente, de l’absence de prise en compte de cette offre de preuve par la juridiction de
première instance ni avoir introduit ou maintenu sa requête devant l’autorité précédente,
conformément au droit de la procédure. Les constatations de l’autorité précédente n’offrent
aucune indication en ce sens. Dès lors, l’autorité précédente ne peut se voir reprocher aucune
violation du droit à l’administration des preuves, pour autant que ce grief soit recevable puisque
les instances cantonales n’ont pas été épuisées (art. 75, al 1. LTF; ATF 134 III 524 consid. 1.3
p. 527).
4.4.3 La recourante critique comme étant arbitraire la constatation selon laquelle 40% de sa
masse salariale dans le domaine des transports était affectée aux transports réalisés pour le
compte de tiers. Elle cite à l’appui de ses dires la déposition du témoin Eichelberger qui se serait
exprimé en ces termes: «Nous travaillons également pour des entreprises de construction. Les
missions de transport réalisées pour d’autres représentent environ 30 à 40%. Sinon, nous avons
aussi nos propres missions. Ces chiffres sont sans garantie.» Les motifs pour lesquels il est censé
ressortir de cette déclaration que seuls 40% des travaux de terrassement font l’objet de transports
pour le compte de tiers, comme l’invoque la recourante, et que les conclusions de l’autorité
précédente, diamétralement opposées et attaquées, sont réputées manifestement indéfendables,
ne sont pas clairement identifiés. Et ce d’autant moins que l’autorité précédente s’appuie, dans
ses conclusions, non seulement sur la déposition du témoin appelé mais aussi sur le rapport de la
SUVA daté du 25 septembre 2006 et sur la propre prise de position de la recourante en date du 3
novembre 2006, ce que la recourante se garde bien d’évoquer. Pour autant qu’il soit
suffisamment motivé et puisse dès lors être considéré comme recevable, ce grief est mal fondé.
4.4.4 La recourante critique également comme arbitraires les conclusions de l’autorité
précédente selon lesquelles les transports effectués par l’entreprise pour son propre compte (soit
60% de la totalité des transports) sont réalisés exclusivement dans le cadre et en tant qu’élément
constitutif de la gamme de prestations entrant dans le champ d’application, du point de vue du
genre d’entreprise, de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la
convention nationale pour le secteur principal de la construction en Suisse. Selon elle, ces
conclusions ne sont en rien étayées et se trouvent être en parfaite contradiction avec la réalité des
faits. En effet, la masse salariale des transports effectués pour son propre compte, soit 980 896
francs (c’est-à-dire 60% de 1 634 828,65 francs) dépasserait la masse salariale des secteurs
terrassement, gravière et unité de tri, qui représentent en tout 801 451,15 francs. Un scénario qui,
selon elle, se reproduit aussi pour le nombre d’employés. Sur les 35 employés affectés au
transport, 21 (soit 60% de l’effectif) ont été mobilisés pour effectuer des transports pour le
propre compte de l’entreprise. Ce chiffre de 21 employés l’emporte nettement sur celui des 11
collaborateurs effectivement employés dans le domaine de la construction. Aux yeux de la
recourante, les activités de transport n’ont par conséquent pas été réalisées «dans le cadre et en
tant qu’élément constitutif» de la gamme des prestations de construction.
L’autorité précédente a tiré la conclusion attaquée (voir le considérant 4.4.1 ci-dessus) du fait
que les activités proposées par la défenderesse parallèlement aux prestations de transport
réalisées pour des tiers, en l’occurrence des travaux de terrassement et de démolition ainsi que
l’exploitation d’une gravière, d’une décharge et d’une unité de recyclage, relèvent pleinement du
champ d’application, du point de vue du genre d’entreprise, de l’arrêté du Conseil fédéral
étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la
construction. Elle a ainsi démontré le bien-fondé de ses conclusions, en ce sens que les transports
effectués par l’entreprise pour son propre compte ne sont pas réalisés en tant que fin en soi mais
bien en rapport avec les autres activités menées par la recourante, lesquelles tombent
indiscutablement dans le champ d’application, du point de vue du genre d’entreprise, de l’arrêté
du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur
principal de la construction. Ainsi appréhendée, la constatation de fait selon laquelle les activités
de transport réalisées par l’entreprise pour son propre compte le sont dans le cadre et en tant
qu’élément constitutif des activités exercées dans les domaines du terrassement, de la démolition,
du recyclage ainsi que de l’exploitation de gravière et de décharge, lesquelles sont
indiscutablement assujetties aux dispositions de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ
d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la construction, ne parait
nullement arbitraire, ce qui n’ôte rien au fait que la masse salariale imputable aux transports et le
nombre d’employés mobilisés pour ces mêmes transports l’emportent sur les autres.
Cette conclusion, qui se réfère à des circonstances de fait, ne préjuge en rien de la réponse à la
question à examiner ci-après (considérant 5) de savoir si – juridiquement parlant – ce sont les
activités relevant de domaines incontestablement assujettis aux dispositions de l’arrêté du
Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur
principal de la construction ou les activités de transport en rapport avec ces domaines (activités
qui en termes de salaires comme d’employés pèsent plus lourd) qui confèrent sa caractéristique à
l’entreprise de la recourante.
4.4.5 Un autre grief relatif à l’arbitraire de l’autorité précédente concerne, cette fois, la
constatation selon laquelle une partie des recettes comptabilisées sur le compte «3020
Transports/chauffeurs/enlèvement d’ordures ménagères» couvrirait la livraison de gravillons et
de sable et, par conséquent, devrait aussi être attribuée au secteur Extraction de sable et de
gravier, conformément à l’art. II.2, al. 3 de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ
d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la construction (et non à
celui des transports).
L’autorité précédente n’a dressé la constatation critiquée que dans le cadre d’un considérant
complémentaire et secondaire pour son jugement. Elle a, à ce sujet, fort justement observé que
l’assujettissement de l’entreprise ne dépendait pas, du point de vue de la protection des
travailleurs visée par l’extension du champ d’application de la CN, de la rentabilité de la
prestation proposée mais bien de la densité des effectifs, laquelle se traduit dans le nombre
d’employés et la masse salariale qui s’y rapporte (considérant antérieur 4.4.1 in fine). Le grief ne
porte par conséquent sur aucune constatation susceptible d’influer sur le sort de la cause, raison
pour laquelle il n’y a pas lieu d’entrer en matière à ce sujet (art. 97, al. 1, LTF).
5.
5.1 La recourante invoque le fait qu’en assujettissant son entreprise au secteur de la construction,
l’autorité précédente a violé l’art. 1, al. 1, LECCT ainsi que l’art. II.2, al. 3 de l’arrêté du Conseil
fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la
construction. La CN est, selon elle, une convention collective de travail qui s’applique au secteur
de la construction. La recourante ne tomberait donc sous le coup de l’arrêté du Conseil fédéral
étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la
construction que si elle gérait une entreprise relevant du secteur de la construction. Selon elle,
seule peut être considérée comme entrepreneur de construction la personne qui fournit une
prestation de construction dont ne relève pas le transport de marchandises, indépendamment du
fait de savoir si des matériaux de construction sont livrés ou enlevés. Or il ressortirait des
constatations dressées par l’autorité précédente que, mesurées à l’aune de la masse salariale
comme du nombre d’employés, les activités de transport prédominent largement sur les autres
activités de la recourante et que les secteurs d’activité de son entreprise soumis à l’arrêté du
Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur
principal de la construction sont secondaires. C’est donc bien l’activité de transport qui
confèrerait sa caractéristique à l’entreprise de la recourante. Classer le secteur du transport
comme élément constitutif de la gamme des prestations terrassement/démolition/gravier, alors
qu’il l’emporte de loin sur tous les autres secteurs d’activité de l’entreprise, serait totalement
irrecevable. Aucun état de fait ne saurait justifier sur le plan juridique et au regard de la
protection des travailleurs que des collaborateurs de la recourante employés exclusivement
comme chauffeurs soient assujettis aux dispositions de la CN, dans la mesure où celle-ci a
précisément pour but la protection des travailleurs du secteur de la construction, lesquels sont
affectés à des tâches physiques autrement plus dures et pénibles que celles des chauffeurs. La
recourante estime avoir le droit d’être traitée sur un pied d’égalité par rapport aux autres
entreprises de transport et non aux entreprises de construction qui disposent, à la rigueur, d’un
petit secteur des transports doté d’un nombre restreint de chauffeurs. Comme l’aurait du reste
reconnu l’autorité précédente, les entreprises de transport comme celle de la recourante sont, aux
termes de l’art. II.2, al. 3 de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la
convention nationale pour le secteur principal de la construction exclues du champ d’application
dudit arrêté, raison pour laquelle l’autorité précédente aurait enfreint cette disposition puisqu’elle
aurait – à l’encontre même de ses propres considérants – assujetti les activités de transport de la
recourante aux dispositions de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la
convention nationale pour le secteur principal de la construction.
5.2 L’argument de la recourante fait long feu. Il n’a pas échappé à l’autorité précédente que le
nombre des employés affectés aux activités de transport de la recourante dépasse celui des
collaborateurs employés pour les travaux de terrassement et de démolition ainsi que
l’exploitation d’une gravière, d’une décharge et d’une unité de recyclage et que la masse
salariale relative au secteur des transports est tout aussi prédominante. Elle a par contre considéré
que le fait que les employés productifs soient essentiellement affectés au transport du matériel
(gravier, matériel de terrassement et de décharge) relevait de la nature même des activités d’une
entreprise implantée dans les travaux de terrassement, l’exploitation de décharge ou l’extraction
de gravier. Nul ne saurait donc prétendre, comme l’invoque la recourante, que l’autorité
précédente a, à l’encontre de ses propres considérants, assujetti par généralisation les activités de
transport de la recourante aux dispositions de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ
d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la construction.
Cette conclusion repose sur la considération suivante: aux termes de l’arrêté du Conseil fédéral
étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la
construction, les dispositions étendues de la CN s’appliquent aux entreprises qui se consacrent à
l’extraction de gravier, aux travaux de terrassement ou de démolition ainsi qu’à l’exploitation
d’une décharge et au recyclage. Comme l’a, à fort juste titre, observé la recourante, les
prestations de transport de et aux chantiers telles qu’énumérées dans la CN ou le transport de
matériaux de construction stockables ne sont pas mentionnés dans la délimitation du champ
d’application matériel de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la
convention nationale pour le secteur principal de la construction. Il y a donc lieu de se demander
si cela exclut de manière générale tout assujettissement, audit arrêté, des prestations de transport
de et aux chantiers, gravières ou décharges, indépendamment de la nature même des
marchandises transportées. Une question à laquelle il convient de répondre par la négative, au
regard de l’objet et de la finalité de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application
de la convention nationale pour le secteur principal de la construction, qui vise à imposer des
conditions de travail minimales uniformes à toutes les entreprises opérant sur le même marché et,
ce faisant, à éviter qu’une entreprise offrant des conditions de travail dégradées puisse en retirer
un avantage compétitif déloyal (considérant 3.1 ci-dessus). Parmi les prestations proposées sur le
marché dans le secteur des travaux de terrassement et de démolition, de la livraison de gravier,
d’exploitation d’une décharge ou de recyclage figurent nécessairement et comme partie
intégrante des prestations, outre la prestation de base proprement dite (c’est-à-dire les travaux de
terrassement et de démolition, la livraison de gravier ainsi que l’exploitation d’une décharge ou
le recyclage), l’acheminement et l’enlèvement des matériaux extraits ou à évacuer. Il est de
notoriété publique que les prestations de base et de transport offertes dans les secteurs en
question (terrassement et enlèvement du matériel de terrassement, extraction et livraison de
gravier, évacuation et transport des marchandises à évacuer) sont proposées aux bénéficiaires des
prestations (maîtres d’ouvrage) en tant que prestations uniformes même si de temps à autre, les
prestations de transport sont susceptibles d’être déléguées à des sous-traitants indépendants. Les
prestations de transport font alors partie intégrante de l’offre proposée sur les marchés concernés,
autrement dit des prestations de livraison de gravier, travaux de terrassement ainsi que
démolition et évacuation de gravats. Que les activités de transport représentent, dans une
entreprise qui, comme celle de la recourante, est fortement implantée sur ce marché, une masse
salariale plus élevée et nécessitent un effectif plus dense que les secteurs d’activité où cette
entreprise exerce ses activités principales, à savoir le terrassement, l’exploitation d’une gravière
et d’une décharge, n’y change rien. Car comme l’a fort justement souligné l’autorité précédente,
il est courant que la charge de travail générée par le transport de matériel de terrassement, de
matériaux de décharge ou de gravier dépasse celle requise par les travaux de démolition, de
chargement et déchargement ainsi que de stockage du matériel au moyen d’excavatrices ou de
trax. Si, en raison de telles circonstances, des entreprises qui, comme celle de la recourante,
exercent l’essentiel de leurs activités dans le secteur du terrassement et de la démolition, de la
livraison de gravier, de l’exploitation de décharge et du recyclage, se voyaient exemptées de tout
assujettissement à la CN, elles pourraient bénéficier d’un avantage compétitif déloyal par rapport
aux entreprises du secteur de la construction qui, bien que réalisant dans une proportion
marginale des prestations dans ces domaines (avec les transports allant de pair), se trouvent
néanmoins assujetties à la CN, dans la mesure où elles proposeraient à leurs employés –
contrairement à ceux de ces entreprises du secteur de la construction – des conditions de travail
dégradées.
Il en résulte que parmi les prestations de «transport de et aux chantiers» ainsi que de «transport
de matériaux stockables» exclues du champ d’application de l’arrêté du Conseil fédéral étendant
le champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la construction,
seules sont concernées celles qui portent sur des biens dont le transport ne fait pas partie
intégrante des prestations de construction à fournir en rapport avec ces derniers comme, en
l’occurrence, le transport de matériaux de construction de fabrication industrielle tels que les
briques en terre cuite, les fers d’armature et autres. Si, à l’inverse, les prestations de transport,
comme dans le cas de travaux de terrassement, de décharge ou de livraison de gravier, doivent
être considérées comme faisant partie intégrante des prestations de base assujetties à l’arrêté du
Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur
principal de la construction, elles sont couvertes par les dispositions étendues dudit arrêté.
Aussi l’autorité précédente a-t-elle décidé, non sans à-propos, que les prestations de transport
fournies par la recourante pour son propre compte – et en rapport avec ses activités de
terrassement, démolition, exploitation de gravière, décharge et recyclage – doivent être
considérées comme faisant partie intégrante des activités assujetties à l’arrêté du Conseil fédéral
étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la
construction et, partant, aux dispositions étendues de la CN. Le fait notamment que les
chauffeurs ne sont pas exposés aux mêmes charges de travail physique que certains autres
employés du secteur de la construction n’y change rien. Car dans une convention de branche
semblable à celle-ci, c’est à l’entreprise tout entière que, conformément au principe de l’unité
tarifaire, s’applique la CCT de la branche économique concernée à laquelle l’entreprise – de par
son activité caractéristique – appartient, sans qu’il soit besoin d’opérer de distinction en fonction
de catégories professionnelles relevant typiquement d’une autre branche économique à savoir,
dans le cas présent, l’industrie du transport (cf. considérant 3.1 ci-dessus). Ce n’est pas la
pénibilité du travail accompli par les personnes relevant de telles catégories professionnelles qui
est en cause. D’ailleurs, la recourante ne récuse nullement le fait que les activités des
conducteurs de grue, excavatrices ou trax relèvent du champ d’application matériel de l’arrêté du
Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le secteur
principal de la construction, bien que ces dernières ne soient pas liées à des charges de travail
physique plus pénibles que celles des chauffeurs de poids lourds.
Si le transport de matériel de terrassement, de gravier ou de matériaux de décharge est
appréhendé par les clauses étendues de l’arrêté du Conseil fédéral comme élément constitutif des
prestations uniformes proposées sur le marché dans les domaines du terrassement, de la livraison
de gravier et de l’exploitation d’une décharge, le fait que le transport de ce matériel ou de ces
matériaux corresponde à une prestation réalisée pour son propre compte ou pour le compte d’un
tiers (par exemple évacuation de matériaux extraits par sa propre entreprise ou par d’autres
entreprises de construction) n’a pas d’importance fondamentale. L’autorité précédente ne s’est
du reste pas prononcée sur la question. Il conviendrait par contre de décider si des entreprises de
construction qui évacuent du matériel de terrassement avec leurs propres véhicules doivent être
assujetties, pour leurs activités de transport, à d’autres conventions collectives de travail que les
entreprises qui se sont spécialisées en tout ou partie dans un sous-secteur du terrassement, en
l’occurrence l’évacuation de matériel de terrassement en qualité de sous-traitant, ce en quoi les
dernières seraient – compétitivement parlant – avantagées, sur le marché, par rapport aux
premières. Les prestations de transport fournies par la recourante à des tiers tombent par
conséquent elles aussi sous le coup des dispositions étendues de la CN, dès lors qu’elles
concernent du matériel de terrassement, du gravier ou des matériaux de décharge/de recyclage
provenant de chantiers.
Au vu de ce qui vient d’être exposé, l’autorité précédente a fort justement décidé que ce sont
bien les prestations relevant du champ d’application, du point de vue du genre d’entreprise, de
l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le
secteur principal de la construction qui confèrent sa caractéristique à l’entreprise de la recourante,
entreprise qui se trouve donc fondamentalement (cf. le considérant 6 ci-après) assujettie aux
dispositions étendues de la CN. Au-delà de sa constatation selon laquelle la masse salariale qui,
en 2003, incombait aux activités de production de la recourante, recouvrait environ aux trois
quarts des activités soumises aux dispositions étendues de la CN (considérant 4.4.1 ci-dessus),
on peut retenir – après ce qui vient précisément d’être exposé – que même les prestations de
transport (quantitativement mal appréhendées) fournies à des tiers et concernant du matériel de
terrassement, du gravier ou des gravats, sont assujetties aux dispositions étendues de la CN.
Outre les 70% de personnel identifié comme productif par l’autorité précédente
(considérant 4.4.1 ci-dessus), ceux des employés (quantitativement mal appréhendés) qui
effectuent de telles prestations de transport pour le compte de tiers, relèvent eux aussi de secteurs
soumis aux dispositions de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la
convention nationale pour le secteur principal de la construction.
6.
L’autorité précédente a réfuté l’existence, au sein de l’entreprise de la recourante, de secteurs
autonomes revêtant une autonomie suffisante, également reconnue comme telle de l’extérieur,
qui justifierait l’application d’une CCT différente.
La recourante invoque le fait que l’autorité précédente aurait violé le droit fédéral en refusant de
reconnaître les secteurs transport, unité de tri et atelier comme des secteurs autonomes de
l’entreprise. Ce grief, pour autant qu’il soit recevable, se révèle infondé.
6.1 Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, une entreprise ou un secteur d’entreprise au sein
d’une entreprise mixte est dit autonome uniquement lorsqu’il constitue une unité
organisationnelle proprement dite. Ce qui implique que les différents employés puissent recevoir
une attribution claire et précise et que les travaux correspondants ne revêtent pas, au sein du
périmètre des autres activités de l’entreprise, qu’un caractère secondaire. Il est par ailleurs dans
l’intérêt de la sécurité juridique d’exiger que le secteur d’entreprise concerné de même que ses
prestations et produits particuliers dispose, y compris aussi aux yeux de l’extérieur, du statut de
prestataire correspondant vis-à-vis du client. A l’inverse, le secteur d’entreprise n’a pas besoin,
pour être admis comme tel, de disposer d’une administration propre ou même de tenir une
comptabilité séparée (arrêt 4 C.350/2000 du 12 mars 2001 consid. 3d).
La question de la rupture du principe fondamental de l’unité tarifaire et, partant, de l’exception
accordée aux secteurs d’entreprise autonomes en matière d’assujettissement à une CCT se pose a
priori uniquement pour les secteurs d’entreprise qui offrent sur le marché des prestations relevant
d’autres branches, c’est-à-dire n’exerçant pas de pression concurrentielle sur ce même marché.
6.2 Il ressort de ce qui est exposé ci-dessus que les prestations de transports réalisées dans les
secteurs du terrassement, de la démolition, de la livraison de gravier, de l’exploitation de
décharge ou de recyclage font partie intégrante des prestations globales proposées sur le marché
de la construction et sont, de ce fait, assujetties aux dispositions étendues de la CN
(considérant 5.2 ci-dessus). Sur ce point, il est hors de propos d’exclure le secteur du transport de
l’entreprise de la recourante du champ d’application de la CN, au motif qu’il constituerait un
secteur d’entreprise autonome (considérant 6.1 ci-dessus).
La seule question qu’il convient de se poser à propos du secteur d’entreprise «Transports» est de
savoir si les prestations de transport qui ne sont pas fournies dans le cadre des prestations du
secteur de la construction telles que les transports terrestres, l’enlèvement des ordures ménagères
et des déchets verts ou encore la collecte de verre sont fournies dans le cadre des secteurs
d’entreprise autonomes. Or la recourante ne revendique nullement que ce soit le cas, autrement
dit que les chauffeurs effectuant de tels transports soient employés dans un secteur d’entreprise
autonome sur le plan organisationnel. Cela ne ressort pas davantage des constatations de
l’autorité précédente. Partant de la conception juridique erronée selon laquelle les prestations de
transport fournies dans le secteur du terrassement, de la démolition, de la livraison de gravier et
de l’exploitation d’une décharge ne sauraient relever des prestations fournies dans le secteur de
la construction, la recourante défend uniquement l’idée peu secourable que le secteur du
transport de son entreprise constitue, dans son ensemble, un secteur d’entreprise autonome.
Aussi les 35 chauffeurs ont-ils été affectés, dans le cadre des constatations de l’autorité
précédente, au seul secteur du transport, considéré comme unité non subdivisible. L’autorité
précédente n’a pas conclu qu’une partie d’entre eux devait être rangée dans la catégorie des
secteurs d’entreprise autonomes. Enfin, la recourante ne motive pas suffisamment, dans son acte
de recours, son grief à l’encontre des constatations de fait de l’autorité précédente, lesquelles
seraient incomplètes et reposeraient sur une violation du droit fédéral (considérant 2 ci-dessus).
6.3 L’unité de tri fait partie des activités d’exploitation d’une décharge et de recyclage opérées
par la recourante (cf. considérant 4.2 ci-dessus), activités qui, aux termes de l’art. II.2, al. 3 de
l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la convention nationale pour le
secteur principal de la construction sont assujetties aux dispositions étendues de la CN. Sur ce
point également, la question de savoir si l’on est en présence d’une rupture du principe d’unité
tarifaire et, par conséquent, d’une exception accordée, en matière d’assujettissement à la CN, aux
activités exercées au sein de l’unité de tri ne se pose pas (considérant 6.1 ci-dessus).
6.4 La recourante ne livre pas les motifs, au demeurant obscurs, pour lesquels l’autorité
précédente aurait dû reconnaître l’atelier comme un secteur d’entreprise autonome. De fait,
l’autorité précédente n’a pas reconnu – et ce n’est du reste pas non plus prétendu – que l’atelier,
de par ses prestations, opère sur le marché spécifique correspondant. Par conséquent, les
conditions présidant à sa reconnaissance comme secteur d’entreprise autonome ne sont d’emblée
pas réunies.
7.
La recourante prétend à la même égalité de traitement que les autres entreprises de transport et
estime qu’elle ne saurait être assimilée aux entreprises du secteur de la construction qui
disposent, tout au plus, d’un petit secteur de transport et de quelques chauffeurs. Selon elle, les
entreprises de transport réalisant des travaux de terrassement ne seraient pas – dans la pratique –
assujetties aux dispositions de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la
convention nationale pour le secteur principal de la construction. Qui plus est, elle aurait des
concurrentes qui, avec leur entreprise de transport, n’y seraient pas soumises. Aussi serait-elle
considérablement désavantagée par rapport à ses concurrentes et victime d’inégalité de
traitement si son entreprise de transport venait à être assujettie aux dispositions de l’arrêté du
Conseil fédéral.
Cet argument ne peut être suivi. Car dès lors que l’assujettissement de l’entreprise de la
recourante aux dispositions de l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ d’application de la
convention nationale pour le secteur principal de la construction s’est avéré pleinement justifié,
la recourante ne peut plus que prétendre au droit à l’égalité de traitement dans l’illégalité.
Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le droit à l’égalité de traitement dans l’illégalité est
reconnu exceptionnellement, dès lors qu’une pratique permanente, contraire à la loi, par une
autorité appliquant le droit existe et que l’autorité souligne qu’elle n’entend pas déroger, y
compris dans le futur, à cette pratique (ATF 134 V 34 , consid. 9; 127 I 1, consid. 3a, p. 2 ss.).
Ce que la recourante ne met nullement en évidence. Elle ne démontre pas, en particulier, que
certaines de ses concurrentes transportant du matériel de terrassement sont exemptées, avec le
même type d’activités, d’assujettissement à l’arrêté du Conseil fédéral étendant le champ
d’application de la convention nationale pour le secteur principal de la construction. L’autorité
précédente n’a pas admis que les sociétés dénommées par la recourante et par rapport auxquelles
elle prétend être défavorisée, étaient exemptées de tout assujettissement à l’arrêté du Conseil
fédéral et que leurs entreprises étaient comparables à celle de la recourante. Ce sur quoi la
recourante se garde de revenir.
8.
Enfin, la recourante critique comme arbitraire la fixation des frais de procédure et des dépens
induits par la procédure cantonale.
8.1 Si la recourante vise, par ses attaques, la détermination des frais d’instance et des dépens
induits par la procédure en première instance, son grief est irrecevable faute d’épuisement des
instances cantonales (art. 75, al. 1 LTF, ATF 134 III 524, consid. 1.3 p. 527).
La recourante ne prétend pas – et cela ne ressort du reste nullement des constatations de
l’autorité précédente – avoir attaqué, lors de la procédure devant l’autorité précédente, la fixation
des frais de première instance.
8.2 Pour ce qui est de la fixation des frais lors de la procédure devant l’autorité précédente, la
recourante fait essentiellement valoir que l’autorité précédente est partie d’une valeur litigieuse
surévaluée de 207 949 francs, alors que la valeur litigieuse déterminante s’élevait à 85 550 francs.
Lors de la procédure cantonale, le litige portait uniquement sur la période comprise entre janvier
2003 et septembre 2005. Si l’on s’en réfère à un courrier du représentant légal des intimés en
date du 4 mai 2007 adressé au président de la juridiction de première instance, la valeur litigieuse
devait être estimée pour cette période à 86 500 francs, montant correspondant aux contributions à
verser au Parifonds pendant cette même période. L’autorité précédente ayant estimé n’être tenue
de se prononcer, dans sa décision, que sur la période allant du 1er octobre 2003 au 30 septembre
2005, il serait arbitraire de fonder le calcul des frais sur une valeur litigieuse supérieure, en
l’occurrence 207 949 francs, valeur qui englobe également les contributions au Parifonds pour
les années 2006 à 2008.
Loin de s’exprimer précisément sur le montant de la valeur litigieuse lors de la procédure
cantonale, l’autorité précédente s’est contentée d’observer dans l’indication des voies de recours
de son jugement, que la valeur litigieuse dépassait 30 000 francs. La recourante est certes en
position de prouver que la note de frais du représentant légal des intimés lors de la procédure de
première instance du 4 mai 2007, note à laquelle la première instance s’est conformée dans son
évaluation des indemnités versées aux parties pour leurs dépens, se fonde sur une valeur
litigieuse de 207 949 francs qui, d’après une lettre du représentant légal datée du même jour,
s’obtient à partir de la somme des contributions que la recourante a dû verser, lors de l’admission
de l’action, au Parifonds Construction pour les années 2003 à 2008. La recourante se garde
cependant de démontrer que l’indemnité versée aux parties pour la procédure en appel,
indemnité que l’autorité précédente a fixée à 10 866,70 francs, se réfère aussi à cette valeur
litigieuse. Il n’est donc guère certain de devoir considérer comme prouvé le fait que l’autorité
précédente se soit basée, lors de la détermination des frais judiciaires relatifs à la procédure en
appel, sur une valeur litigieuse de 207 949 francs. La recourante démontre uniquement sur ce
point que, conformément au tarif déterminant, l’émolument judiciaire s’élève, pour cette valeur
litigieuse, à 10 564 francs, alors que l’autorité précédente a arrondi l’émolument judiciaire à
10 500 francs.
Quoi qu’il en soit, la question peut rester en suspens. Car le Tribunal fédéral n’annule une
décision cantonale pour violation de l’interdiction de l’arbitraire que lorsque cette décision est
indéfendable dans son résultat (ATF 35 V 2, consid. 1.3). Or, la recourante ne démontre pas que
l’autorité précédente aurait cédé à l’arbitraire dans son résultat lorsqu’elle est partie d’une valeur
litigieuse dépassant – dans des proportions non précisément chiffrées – les 86 550 francs
correspondant aux contributions au Parifonds pour les années 2003 à 2005 et qu’elle a calculé,
d’après ces éléments, le montant de l’émolument judiciaire et de l’indemnité versée aux parties
pour leurs dépens dans le cadre de la procédure en appel. Rien ne ressort par ailleurs en ce sens.
Car d’après les constatations de l’autorité précédente, les intimés peuvent tirer d’un
assujettissement de l’entreprise de la recourante aux dispositions étendues de la CN non
seulement des contributions mais aussi, au-delà de ces dernières, des pouvoirs de contrôle ainsi
que des demandes de sanction. En outre, l’assujettissement à une CCT déploie notoirement des
effets juridiques sur les relations entre l’entreprise assujettie et ses employés, dont les
conséquences financières sont difficiles à évaluer. Enfin, l’assujettissement joue également un
rôle dans la réglementation de la retraite anticipée des employés comme l’ont fait valoir les
intimés lors de la procédure devant l’autorité précédente et comme la recourante le concède dans
son recours. Aussi n’est-il pas démontré que l’autorité précédente a, dans son résultat, évalué les
frais de manière arbitraire. Le grief d’arbitraire se révèle infondé.
9.
Conclusion: En tant qu’il est recevable, ce recours doit être rejeté. La recourante sera, à l’issue
de la présente cause, tenue de supporter les frais et les indemnités (art. 66, al. 1 et
art. 68, al. 2 LTF). Une indemnité de 3 000 francs paraît être appropriée au travail effectif
accompli par les intimés dans la procédure devant le Tribunal fédéral (art. 8, al. 2 du Règlement
du 31 mars 2006 sur les dépens alloués à la partie adverse et sur l’indemnité pour la
représentation d’office dans les causes portées devant le Tribunal fédéral [RS 173.110.210.3].
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 5 000 francs, sont mis à la charge de la recourante.
3.
La recourante versera aux intimés une indemnité totale de 3 000 francs à titre de dépens pour la
cause portée devant le Tribunal fédéral.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties ainsi qu’à la 1ère chambre du Tribunal civil de
l’Obergericht du canton d’Argovie.
Lausanne, le 25 novembre 2009
Au nom de la Ie Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La présidente:
Le greffier:
Klett
Widmer