La maladie de ma femme nous a encore rapprochés

Transcription

La maladie de ma femme nous a encore rapprochés
“LUNDI 13 JUIN 2016 ““
À LA UNE
Laurent Bastardoz
essaie d’aider sa femme
le plus possible
Le couple
veut rester
positif
3
«La maladie
de ma femme
nous a encore
rapprochés»
LAURENT
BASTARDOZ
Le journaliste de la RTS est parrain
de la nouvelle association Proches
aidants Valais. Pour sa femme, atteinte
de sclérose en plaques depuis 2009,
il est un soutien constant. Rencontre.
CHRISTINE SAVIOZ
Leur maison respire la tendresse. Sylvie (52 ans) et Laurent
Bastardoz (55 ans) semblent
plus proches que jamais. En couple depuis 1979 – «Quand je l’ai
vue la première fois, je me suis dit
que c’était la femme de ma vie»,
confie Laurent Bastardoz – ils savent tous deux que la maladie de
Sylvie Bastardoz (la sclérose en
plaques) aurait pu briser leur
complicité. «Cela nous a, au contraire, rapprochés car nous avions
des bases solides. Même si cela ne
veut pas dire que nous n’avons toujours que des hauts», confie
Laurent Bastardoz, sur la terrasse
de leur maison de Chenarlier.
Etre présent au quotidien
Journaliste à la RTS depuis 1995,
le quinquagénaire a décidé de
quitter la télévision pour la radio
l’an dernier afin d’avoir davantage
de disponibilité pour son épouse.
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«Sylvie ne peut plus conduire, marche avec difficultés et a des pertes de
mémoire; elle a toujours besoin de
quelqu’un pour l’amener où elle doit
aller.» Laurent Bastardoz a aussi
choisi de changer de média pour
passer davantage de temps avec
Sylvie. «Il y a quelques années, je
n’étais pas très présent à la maison.
Aujourd’hui, je veux rattraper ça.»
Proche aidant
depuis 2009
Depuis la détection de la sclérose en plaques de sa femme en
2009, le Valaiso-Neuchâtelois
est ainsi devenu un proche aidant. «Mais j’ai de la chance, car
Sylvie n’est pas très demandeuse de
services, se débrouille encore bien
toute seule et ne se plaint jamais!
Elle a tellement peur d’être un boulet alors elle s’occupe autant de moi
que moi d’elle», ajoute le journaliste qui parraine la nouvelle association Proches aidants Valais
(cf. encadré).
Sur le balcon de leur maison de Chenarlier, Laurent et Sylvie Bastardoz ne peuvent pas cacher leur tendre complicité. SACHA BITTEL
J’ai quitté
«
z
la télé pour la
radio afin d’être
plus présent
pour Sylvie.»
LAURENT BASTARDOZ
JOURNALISTE ET PROCHE AIDANT
Chez Laurent Bastardoz, la culpabilité apparaît souvent en filigrane. Il a mis du temps à accepter la maladie de sa femme. «Au
début, j’étais très révolté. Sylvie
avait consacré sa vie à nos deux
filles et quand, enfin, elle pouvait
réaliser son rêve professionnel de
travailler avec des enfants, elle est
tombée malade! Il y a une réelle injustice.» Une réalité d’autant
plus difficile à accepter que lui,
au contraire, a pu réaliser son
rêve d’enfant en devenant journaliste sportif. «Il y a une période
où j’ai vraiment été égoïste. Je m’en
rends compte avec le recul. Parfois,
je me demande d’ailleurs si ce n’est
pas un peu à cause de moi et de
mon absence que Sylvie a trop dû
en faire et est tombée malade»,
confie-t-il d’une voix douce.
Ne pas s’apitoyer
sur le passé
A l’écoute de ces propos, Sylvie
Bastardoz le regarde avec surprise. «Ça, tu ne me l’avais jamais
dit, souffle-t-elle, tout en rassurant immédiatement son époux.
Tu n’as rien à voir dans ma maladie. Et puis, c’est du passé, c’est
derrière.» Pour elle, l’important
est de rester positive et de vivre
pleinement chaque instant. «Je
ne pense jamais au pire. Même
lorsque je vais faire une IRM pour
voir l’évolution de ma maladie»,
ajoute Sylvie Bastardoz. Comme
pour prouver ses dires, elle a soudain son attention captée par
une abeille dans la pelouse familiale. «J’adore la nature; ce n’est
pas magnifique ici?»
De fortes douleurs
Un brin de tristesse passe dans
ses yeux lorsqu’elle raconte ne
plus pouvoir jardiner «comme
avant». Parfois, elle ne peut résister à son envie de s’occuper un
peu de l’extérieur de la maison.
«J’arrange un peu les talus. Cela
me prend des heures pour faire un
petit truc, mais j’ai tellement de
plaisir.» Sylvie Bastardoz sait
pourtant qu’elle paiera cher son
effort. «Le lendemain, j’ai des
douleurs encore plus fortes. C’est
comme si j’étais punie dès que je
voulais faire quelque chose.» La
quinquagénaire refuse pourtant
de s’épancher trop longuement
sur ses maux. Et préfère souligner le côté lumineux de la vie.
«J’adore rire et plaisanter. Avec nos
LES PROCHES AIDANTS
PEUVENT ÊTRE AIDÉS
L’association Proches aidants Valais vient d’être créée. Parrainée
par Laurent Bastardoz, elle compte
une cinquantaine de membres. Le
nouveau groupement, présidé par
Julien Dubuis, soutient concrètement les proches aidants, les informe et sensibilise politiques, professionnels, institutions et grand
public sur le rôle et les besoins des
proches aidants.
Informations sur: www.prochesaidants-valais.ch } CSA
six petits-enfants, je m’amuse
beaucoup», confie-t-elle. Laurent
Bastardoz la regarde alors avec
admiration. «C’est une femme incroyable avec une grande énergie
combative. Oui, j’ai de la chance.
Vraiment», conclut-il. }

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