Bonus : la SEC étudie un système de paiement différé

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Bonus : la SEC étudie un système de paiement différé
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BANQUE
FINANCE
MERCREDI 22 DÉCEMBRE 2010 LES ECHOS
BANQUE
Face à l’activisme des Européens sur le terrain de la limitation des bonus,
la Réserve fédérale américaine et la SEC encouragent un système de paiement
différé avec plus de la moitié des bonus sous forme de stock-options.
Le canadien TD Bank
achète Chrysler Financial
pour 6,3 milliards de dollars
Bonus : la SEC étudie
un système de paiement différé
L
a saison des bonus s’annonce
délicate à Wall Street. Face à
l’activisme du chancelier britannique, George Osborne, qui a
convoqué hier les banquiers de la
City pour les exhorter à la modération et aux dernières exigences de
l’Union européenne en la matière,
les régulateurs américains entendent eux aussi mettre la pression
sur les banques de Wall Street.
Selon le « Wall Street Journal », la
Réserve fédérale (Fed) et la SEC
(Securities and Exchange Commission) étudient activement un nouveau cadre réglementaire visant à
encourager les grandes banques
américaines (JPMorgan Chase,
Goldman Sachs, Morgan Stanley et
Bank of America…) à opter pour un
système de paiement différé pour
au moins la moitié des bonus de
leursdirigeants.Dansladroiteligne
de la réforme financière DoddFrank, qui a expressément confié
aux régulateurs la mission de
décourager la « prise de risques
inappropriés », ce dispositif vise à
éviter l’émergence de décalages
criants entre les régimes de rémunérationsdechaquecôtédel’Atlantique.
Eviter les distorsions
« Nousavonsencoreunproblèmede
disparité de revenus. On ne pourra
pas parler de profits et de relance
tant que la situation des foyers américains ne sera pas stabilisée », a
récemment souligné Elizabeth
Warren, la nouvelle présidente du
Consumer Financial Protection
Bureau, en insistant sur l’urgente
nécessité de limiter les bonus de
Wall Street. Avec le regain des profits des banques américaines qui
s’attendent à des résultats record en
2010 (avec un bénéfice cumulé de
28,7 milliards de dollars selon certaines estimations) malgré la
reprise incertaine, les régulateurs
BANQUE
BLOOMBERG
L
Washington DC, siège de la Réserve fédérale américaine.
américains redoutent un retour en
force aux « mauvaises habitudes ».
Officiellement, la SEC et la Fed ont
jusqu’à la fin avril pour adopter les
nouvelles règles d’encadrement
des rémunérations dont l’élaboration leur a été confiée par la loi
Dodd-Frank de juillet 2010. Mais
les régulateurs pourraient anticiper
leurs propositions le mois prochain.
Outre la fixation d’un seuil de
paiement différé de plus de 50 %, le
nouveau régime devrait recommander aux banques d’octroyer à
leurs cadres dirigeants des plans de
stock-options directement liés aux
performances (« performancebased shares »). Ces efforts visent à
prévenir l’émergence de traitements trop différenciés entre les
régimes de rémunération européens et américains au sein des
mêmes groupes bancaires. Le dialogue entre régulateurs est « parti-
culièrementimportant »àcetégard,
a récemment souligné la présidente de la SEC, Mary Schapiro. De
soncôté,leCommitteeofEuropean
Banking Supervisors (CEBS) a
recommandé de fixer à 60 % au
minimum la part de la rémunéra-
« Nous avons encore
un problème de
disparité de revenus.
On ne pourra pas
parler de profits
et de relance tant que
la situation des foyers
américains ne sera
pas stabilisée. »
ELIZABETH WARREN
PRÉSIDENTE DU CONSUMER
FINANCIAL PROTECTION BUREAU
tion différée sur trois à cinq ans,
avecunepériodederétentionséparée pour tout versement de stockoptions et un plafonnement à 20 %
de la part des bonus en numéraire.
En guise de modération, certaines banques américaines ont pris
les devants en annonçant, dans le
cas de Morgan Stanley, une réduction de 10 % à 30 % de leurs bonus
(après une hausse globale de 62 %
en 2009). De leur côté, Goldman
Sachs et JPMorgan Chase ont respectivement réduit de 21 % et 10 %
l’enveloppe globale de leurs rémunérations sur les neuf premiers
mois. Certains experts s’attendent à
une baisse globale des rémunérations de 22 % à 28 % en 2010.
PIERRE DE GASQUET
BUREAU DE NEW YORK
Lire l’éditorial de
François Vidal page 8
et « Crible » page 31
En Ukraine :
First Unkrainian International
Bank : 10 % cédés en 2005.
Kredo Bank : 28,2 % cédés
en 2007.
ProCreditBank : détient
toujours 15,2 %.
Megabank : détient toujours
15 %.
Dans le reste des pays
européens émergents :
Sur les 8 milliards d’euros
consacrés au secteur financier,
la BERD en a investi un tiers
sous forme de capital, le reste
étant sous forme de prêts
et de garanties.
En 2009, elle est entrée dans
le capital de 7 établissements
financiers dont des filiales
d’UniCredit, pour un total
de 249 millions d’euros,
et a accru pour 92 millions
d’euros ses participations
existantes dans cinq banques.
Elle a revendu la semaine
dernière ses participations
dans des filiales d’AXA
en Hongrie, en Pologne
et en République tchèque.
UkrSibbank est en situation difficile depuis deux ans.
tion de capital d’UkrSibbank d’un
montant total de 382 millions de
dollars. Sa maison mère, BNP Paribas, y participera à hauteur de
300 millions de dollars mais sera
diluée à cette occasion.
PIB en chute de 15 %
Début décembre, la banque française a dû en effet racheter la part
de 18,6 % détenue par l’homme
d’affaires Alexandre Yaroslavsky, ce
qui avait fait d’elle l’unique propriétaire du groupe. Une opération prévue de longue date, Baudouin Prot,
son directeur général, ayant régulièrement communiqué sur le fait
que les deux actionnaires privés
encore présents lors du rachat de
51 % d’UkrSibbank en 2006 avaient
vocation à sortir.
Reste que cette opération souligne les difficultés des banques
internationalesetnotammentfrançaises en Ukraine, pays qui a connu
en 2009 l’une des pires récessions
du monde avec un PIB en chute de
15 %. BNP Paribas a passé 769 millions d’euros de provisions pour risque de crédit entre 2008 et 2009, et
décidé de fermer 300 agences sur
les 1.000 existantes chez UkrSibbank. Au premier semestre, l’établissement évoquait encore une
contraction des revenus et une
baisse des encours.
Le Crédit Agricole, de son côté,
qui détient 99 % d’IndexBank
depuis 2006, avait annoncé une
restructuration profonde de sa
filiale avec une diminution des
effectifs de 20 %. Elle a également
participé à deux augmentations de
capital depuis 2009 pour un total de
46 millions d’euros. Enfin, la
Société Générale, présente dans le
pays par le biais d’une filiale de crédit à la consommation, avait décidé
en 2009 d’arrêter la production de
nouveaux crédits. En 2010, le PIB
devrait croître de 5 % en Ukraine.
RÉJANE REIBAUD
Cerberus avait acheté 80 % de
Chrysler en 2007 pour 7,4 milliards de dollars mais en avait
perdu le contrôle lors de la restructuration du constructeur
par l’Etat en 2009. Chrysler avait
été adossé à l’italien Fiat mais
Cerberus avait conservé les activités de crédit. Avec cette cession, le fonds d’investissement
américain solde ainsi ses mésaventures dans le crédit automobile, après son retrait de GMAC,
l’établissement de crédit de
General Motors, l’an dernier.
La transaction devrait être
finalisée au deuxième trimestre 2011. Chrysler Financial,
renommé TD, continuera à être
dirigé par Tom Gilman, son
patron actuel, à par tir de
Toronto.
Avec environ 1.850 employés
au Canada et aux EtatsUnis,
Chrysler Financial est l’une des
plus grosses sociétés de financement automobile en Amérique du Nord. Elle compte environ 1 million de clients
individuels à travers les concessionnaires clients de Chrysler
Financial.
DEUTSCHE BANK. La banque allemande a accepté de payer
553 millions de dollars à la justice américaine contre l’abandon
de poursuites pour des opérations fiscales réalisées de 1996 à
2002. Cette somme, provisionnée, n’impactera pas ses résultats
en cours, indique-t-elle.
Bruxelles autorise provisoirement les aides
à trois banques irlandaises
DIMA MAYATSKIY
LES INVESTISSEMENTS
DE LA BERD
Finalisation mi-2011
EN BREF
BNP Paribas a demandé à la Banque européenne pour la reconstruction
et le développement (BERD) d’entrer au capital de sa filiale ukrainienne à hauteur
de 15 %. Une opération qui rappelle les difficultés du secteur bancaire ukrainien.
UkrSibbank, en situation difficile
depuis deux ans. La BERD, créée en
1991 pour accompagner la transition vers l’économie de marché des
pays de l’ex-bloc soviétique, va
payer au début de l’année prochaine 82 millions de dollars pour
prendre 15 % de ce qui constitue la
cinquième banque du pays en termes de taille de bilan, confirmant
une information parue hier dans
« La Tribune ». S’y ajoutera un prêt
subordonné de 140 millions de dollars sur dix ans. « BNP Paribas est
partenaire de la BERD depuis plusieurs années dans le cadre de prêts
subordonnés à destination des
clients, explique la banque. Et nous
voulions renforcer notre coopération et pouvoir profiter de l’expertise
delaBERDpourlespaysdel’Europe
de l’Est. »
La BERD, de son côté, indique
qu’il s’agit d’une opération courante dans le cadre de son mandat :
« Il est plus facile d’atteindre nos
objectifs [de financement de l’économie, NDLR] en étant actionnaire
au lieu d’être simplement prêteur
pour être en mesure d’influencer les
décisions stratégiques », explique
l’institution aux « Echos ». En
Ukraine comme en Europe, la
BERD est régulièrement entrée
dans le capital d’établissements
bancaires et en est sortie à plus ou
moins longue échéance (lire cicontre).
L’opération entre en fait dans le
cadre plus large d’une augmenta-
fera l’acquisition des anciens
services financiers de Chrysler
aux Etats-Unis, et la maison
mère achètera Chrysler Financial au Canada. Cela ne nécessitera pas d’« effort majeur d’intégration », a souligné Ed Clark.
La banque canadienne va
financer cette acquisition sur
ses fonds propres et n’entend
pas lever de capital à cette occasion. Celle-ci aura un effet neutre sur son bénéfice 2011 et relutif de 100 millions de dollars en
2012, la première année pleinement opérationnelle.
L. B.
L’Ukraine reste un sujet épineux
pour les banques françaises
B
NP Paribas a fait appel à la
Banque européenne pour la
reconstruction et le développement (BERD) pour entrer dans le
capital de sa filiale ukrainienne
a consolidation repart pour
les banques gagnantes de la
crise. Après les acquisitions
en série de l’espagnol Santander, c’est au tour d’une canadienne, l’une des rares banques
au monde à avoir conservé sa
notation triple A, de prendre
son bâton de pèlerin. TorontoDominion (TD Bank), la
deuxième banque du pays par
les actifs, a annoncé hier le
rachat pour 6,3 milliards de dollars de Chrysler Financial, l’exbranche financière du constructeur automobile américain,
au fonds d’investissement Cerberus Capital.
L’acquisition, révélée lundi
soir par le « Wall Street Journal », comprend des actifs nets
d’une valeur de 5,9 milliards de
dollars et environ 400 millions
de dollars en survaleur. « Cette
transaction représente une occasionuniqued’acquériruneexcellente plate-forme de croissance
en Amérique du Nord à un prix
intéressant », a déclaré hier Ed
Clark, président du groupe TD,
qui espère un retour sur capital
investi de 20 % d’ici à trois ou
quatre ans.
Aux termes de l’accord, la
filiale américaine de TD Bank
La Commission européenne a donné hier son feu vert provisoire
pour des aides publiques accordées à trois banques irlandaises.
«Anglo Irish Bank et INBS devront soumettre début 2011
[àBruxelless] un plan prévoyant leur démantèlement, tandis
qu’Allied Irish Bank devra soumettre un plan de restructuration
révisé», a indiqué Joaquin Almunia, le commissaire à la
Concurrence. La banque centrale irlandaise avait déjà indiqué
fin novembre qu’elle travaillait sur un plan qui pourrait aboutir à
la disparition pure et simple d’Anglo Irish Bank, la plus en
difficulté des banques du pays après le transfert de ses actifs les
plus sains dans une autre structure. En attendant, Bruxelles a
donné son feu vert provisoire aux nouvelles aides publiques
accordées aux trois banques, à savoir une recapitalisation de
près de 5 milliards d’euros pour Anglo Irish, 2,7 milliards pour
INBS et jusqu’à 9,8 milliards pour Allied Irish Bank.
Le Crédit Mutuel s’est délesté
de ses créances sur Lehman Brothers
La banque fédérative du Crédit Mutuel, qui chapeaute
cinq caisses du Crédit Mutuel ainsi que le CIC, a cédé ses
créances sur la banque américaine en faillite Lehman Brothers
lors du deuxième trimestre 2010, selon un document
mis en ligne par le groupe et révélé par « L’Agefi » hier. La banque
indique que le montant brut des créances s’élève à 598 millions
d’euros et que leur cession a dégagé un gain avant impôt
de 121 millions d’euros. D’après le quotidien, l’acquéreur
pourrait être Morgan Stanley, déjà présent au printemps dernier
sur la cession d’une partie des actifs du portefeuille de Natixis.
UniCredit cède MedioCredito Centrale aux
Postes italiennes pour 136 millions d’euros
Après plusieurs mois de négociations, le groupe bancaire
UniCredit a vendu sa filiale MedioCredito Centrale (MCC)
aux Postes italiennes, pour un montant de 136 millions d’euros.
Contrairement à ce qui était prévu initialement, Iccrea (crédit
coopératif) ne participera pas au rachat. L’opération, souhaitée
par le gouvernement Berlusconi, préfigure la constitution d’une
nouvelle Banque du Mezzogiorno à laquelle participeront, outre
les Postes, certaines banques coopératives et banques
populaires. Le dossier va maintenant pouvoir être examiné par la
Banque d’Italie. D’ici à deux ou trois mois, elle devrait être
finalisée. Au ministère de l’Economie, on espère boucler le tour
de table de la Banque du Mezzogiorno au printemps prochain.