DE LA QUESTION DE L`INDÉPENDANCE DES BANQUES

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DE LA QUESTION DE L`INDÉPENDANCE DES BANQUES
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DE LA QUESTION DE
L’INDÉPENDANCE DES
BANQUES CENTRALES
QUE PEUT-ON DIRE POUR LE
CAS DES BANQUES CENTRALES
AFRICAINES ?
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INTRODUCTION
Le but principal de nos discussions économiques, est de décomplexifier
des sujets considérés souvent comme assez difficiles, inabordables, et
faisant souvent l’objet de mauvaises interprétations
ou mauvaises
analyses de la part de certains grands commis de nos pays.
Si notre objectif est atteint dans ce domaine, nous serons capables de
démocratiser le débat économique dans nos pays, nous serons également
à même de faire véhiculer correctement le contenu de nos politiques en
matière de développement économique.
Dans ce papier, nous allons entamer notre propos par une présentation
des avantages et des coûts de la stabilité des prix, ensuite, nous parlerons
de la question fondamentale qui clive les pouvoirs publics et les autorités
monétaires des pays.
Après cette présentation, nous allons tirer les leçons de cette discussion
en faisant des recommandations de politiques économiques conformes
aux caractéristiques économiques de nos pays.
L’important surtout, est d’amener les pays à mieux se prendre en charge
au plan scientifique, et se libérer de la servitude volontaire.
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I. Qu’est ce que la stabilité
monétaire ?
Au sens strict, la stabilité du niveau général des prix est définie par deux
conditions : a) l’absence d’incertitude quant à son évolution à long terme
; b) un taux d’inflation anticipé nul (Ireland, 1993). En pratique, la
définition retenue est souvent moins exigeante. La seconde condition est
assouplie : en raison des problèmes soulevés pour mesurer correctement
la hausse des prix, une valeur légèrement positive du taux d’inflation
anticipé – à condition qu’elle soit à peu près constante – est jugée
suffisante. Certains vont même plus loin en se contentant de cette
dernière exigence et en abandonnant la première. La stabilité des prix est
alors définie comme une situation où « les variations attendues du
niveau moyen des prix sont suffisamment faibles et graduelles pour ne
pas influer sensiblement sur les décisions financières des entreprises et
des ménages » (Greenspan, 1989).
La condition b) – dans sa forme pure ou dans sa version amendée – est
justifiée par l’approche institutionnelle qui insiste sur la vulnérabilité des
banques centrales dans les sociétés démocratiques. Initialement proposée
par Kydland et Prescott (1977) et développée ultérieurement par Barro et
Gordon (1983), elle prend aujourd’hui la forme de l’hypothèse de la
trappe à anticipations pour expliquer la dynamique de l’inflation
(Christiano et Gust, 2000 ; Christiano et Fitzgerald, 2003). Si les agents
économiques anticipent un taux d’inflation élevé, ils cherchent à se
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protéger contre elle ; les autorités monétaires se trouvent alors face au
dilemme suivant :

- valider les anticipations par une accélération de la croissance
monétaire; l’avantage est d’éviter une récession ; mais en
contrepartie la hausse des prix est plus forte ;

- ne pas modifier la croissance monétaire ; on évite l’accélération
de l’inflation mais il y a une récession de l’activité économique.
Pour éviter ce piège et assurer la stabilité monétaire, la banque centrale
doit montrer clairement que le premier scénario est à exclure. C’est
beaucoup plus facile si elle est indépendante que si elle est sous la tutelle
de l’Etat. Mais, dans le cadre de ses statuts, tout dépend aussi de sa
stratégie. Une réaction immédiate et prononcée à une modification
sensible des anticipations de prix – aussi bien en direction de l’inflation
que dans le sens contraire – empêche le déclenchement d’enchainements
qui pourraient devenir très vite incontrôlables. En la manière, un suivi
permanent des indicateurs disponibles s’impose. L’efficacité de l’action
des autorités peut être évaluée en examinant l’évolution du taux
d’inflation anticipé mesuré au moyen d’enquêtes ou d’indicateurs
construits à partir d’informations tirées des marchés de capitaux. Le taux
d’inflation observé étant égal à moyen et long terme au taux d’inflation
anticipé, la vérification de la condition a) se traduit par la stationnarité́
du niveau général des prix (en logs) autour d’une tendance linéaire.
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II. Les coûts et les avantages de la
stabilité des prix
La stabilité des prix doit être examinée à l’aune de deux critères : a) la
stabilité des anticipations d’inflation à court et moyen termes ; b)
l’absence d’incertitude sur le niveau général des prix à long terme. En
pratique, l’évaluation des stratégies monétaires est malheureusement
trop souvent limitée au premier aspect.
- Une stratégie de ciblage de l’inflation est incomplète : si elle permet
d’assurer la stabilité du taux d’inflation à court / moyen terme, elle ne
garantit pas la stabilité monétaire à long terme. Elle doit donc être
complétée par un autre dispositif.
- Les banques centrales ayant adopté une stratégie de ciblage de
l’inflation n’ont pas précisé la nature exacte de ce dispositif, même si
certaines l’ont évoqué. En revanche, dans le cas de la BCE, dont la
stratégie peut être qualifiée de mixte, c’est la valeur de référence pour la
croissance monétaire qui doit permettre de régulariser l’évolution du
niveau général des prix à long terme.
Sans vouloir réinventer la roue, voici ce que nos confrères
Black, Donald Coletti et Sophie Monnier ont présenté :
Richard
6
Si l’on s’entend largement pour reconnaître qu’une inflation dans les
deux chiffres, comme celle observée dans les années 70, n’est pas
souhaitable,
l’opportunité
d’axer
la
politique
monétaire
sur
l’obtention et le maintien d’une très faible inflation — la stabilité des
prix — est loin de faire l’unanimité. Comme en témoignent les
travaux consacrés aux avantages d’une faible inflation sur le plan du
bien-être, les conclusions différentes bien souvent d’un auteur à
l’autre. Ces différences tiennent à une foule de facteurs, notamment la
nature de l’avantage étudié, le caractère temporaire ou permanent des
coûts de la réduction de l’inflation et la méthodologie mise en œuvre
pour chiffrer les effets d’un recul de l’inflation.
Nous nous proposons ici de réexaminer les coûts et les avantages de la
stabilité des prix. Notre méthode suit, dans les grandes lignes, celle
qu’ont retenue Howitt (1997), Feldstein (1996) et Thornton (1996). Ces
auteurs comparent la valeur actuelle des avantages d’une faible inflation
à la valeur actuelle des coûts liés à son obtention (et à son maintien). Afin
de ne pas limiter notre analyse à une estimation unique des coûts ou des
avantages d’une réduction de l’inflation, nous nous penchons sur un
large éventail d’estimations et diverses hypothèses concernant le
fonctionnement de l’économie.
II.1 Une mesure du bien-être
Avant d’évaluer les divers coûts et avantages de la stabilité des prix,
nous devons définir la manière dont nous allons mesurer le bien-être.
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Nous devons aussi déterminer la façon dont les résultats exposés dans la
littérature seront réexprimés en fonction de cette mesure et, notamment,
le moment auquel les avantages d’une faible inflation commencent à se
faire sentir. Ce dernier point revêt une importance particulière car les
avantages qui prennent du temps à se manifester n’ont pas autant de
valeur que ceux qui sont réalisés immédiatement.
II.1.1 La définition du bien-être
Nous utilisons ici comme base de la fonction de bien-être la valeur
actuelle de la consommation exprimée en logarithme. Ce choix est
motivé principalement par un désir de simplicité et par le fait que la
consommation en logarithme sert fréquemment de fonction d’utilité; de
plus, comme nous le montrerons dans la prochaine section, la conversion
et l’interprétation des résultats obtenus par les autres auteurs s’en
trouveront facilitées. La fonction de bien-être se présente ainsi :
t
(1) W = -logct, (1) 1 + 
Où c est la consommation globale réelle, et  le taux d’actualisation social. Cette
fonction de bien-être repose sur l’hypothèse que toutes les variables sont
mesurées chaque trimestre en taux de variation trimestriel.
Dans une économie fermée, le taux d’actualisation social correspond souvent au
taux d’actualisation d’un consommateur représentatif. Parmi les conditions de
premier ordre, on pose généralement que ce taux d’actualisation est égal au taux
d’intérêt réel diminué du taux de croissance. Comme l’indique Feldstein
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(1996), on peut justifier le choix d’un taux d’actualisation très faible en
adoptant par exemple comme taux d’intérêt réel le rendement réel
(moyen) des obligations d’État. C’est ce que fait Howitt (1990), qui
retient un taux d’actualisation de 1,5 %. Un choix plus prudent consiste à
baser le taux d’intérêt réel sur le rendement des actions. On obtient alors
un taux d’actualisation de 2,6 % dans le cas des Etats-Unis (Feldstein,
1996). Thornton (1996) envisage une fourchette de taux d’actualisation
variant de 3,05 à 4,5 % pour les Etats-Unis.
Or, cette analyse est conçue dans un cadre d’économie fermée; elle ne
s’applique donc pas nécessairement au Canada car il n’y a généralement
aucune raison pour que le taux d’actualisation des consommateurs soit
égal au taux d’intérêt diminué du taux de croissance. Faisant sienne
l’interpretation de Calvo et Obstfeld (1988), Scarth (1994) soutient
toutefois qu’on peut quand même choisir le taux d’actualisation d’un
particulier comme taux d’actualisation social. Du point de vue du
planificateur central, cela se traduirait par une solution « égalitaire »,
tous les particuliers ayant la même consommation à tout moment (Calvo
et Obstfeld, 1988). C’est pourquoi Scarth utilise une valeur de 3 %,
voisine du taux d’actualisation de 3,1 % qui est incorporé au MTP. En
conséquence, nous adoptons dans le scénario de base un taux
d’actualisation de 3 %. Nous présenterons aussi une analyse de
sensibilité d’ampleur limitée.
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II.1.2 L’utilisation de la mesure du bien-être
La définition de la mesure du bien-être ne représente que la moitié (et
encore) du travail. Il faut ensuite déterminer la manière de réexprimer en
fonction de cette mesure les résultats des études passées en revue. Il
s’agit là de l’un des principaux apports de notre recherche. Le plus
commode est de grouper ces études d’après la façon dont les ré́sultats
sont présentés. Nous commençons par mettre les résultats à l’échelle de
manière qu’ils traduisent l’effet d’une baisse de 1 point de pourcentage
de l’inflation. Nous calculons ensuite la variation du bien-être au moyen
de l’une des méthodes décrites ci- après. Nous en tirons enfin une
mesure fondée sur la notion de variation équivalente.
II.1.3 Effet de l’inflation sur le niveau de la
consommation
Si la consommation augmente de x par suite d’un recul de 1 point de
pourcentage de l’inflation, le nouveau niveau de bien-être W est donné par la
formule
(2)W = -logc 1 + x 1 + t 1 = W + -log1 + x 1 + t 1+= W + -log1 +
t
x. 
(2) Il est également nécessaire, parfois, de mettre le résultat à l’échelle en
le multipliant par le rapport de la consommation au revenu. C’est le cas,
par exemple, quand les auteurs font une remarque du genre suivant : « la
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consommation augmente de 8 milliards de dollars de 1990, soit 2 % du
PIB ». Nous calculons ici le taux d’augmentation de la consommation en
divisant 2 par 0,7 (ce dernier chiffre représente la consommation en
proportion du PIB).
L’équation (2) suppose implicitement que les avantages sont obtenus
immédiatement. Il n’en est pas forcément ainsi; à la dernière section,
nous présenterons une analyse de sensibilité qui porte sur ce point. Il est
facile d’en tenir compte dans la formule exposée précédemment et dans
celle qui suit.
II.1.4 Effet de l’inflation sur le taux de croissance
de la consommation
Certains auteurs, présentent l’effet d’une baisse de l’inflation sur le taux
de croissance de la production ou de la productivité totale des facteurs.
Ils font l’hypothèse que le taux de croissance de la consommation est
influencé dans la même proportion. Dans ce cas, si x est la hausse du
taux de croissance de la consommation, le bien-être s’exprime sous la
forme
logct+i1 + xi W = - 1 + ilogct+i + ilog1 + x - 1 + i
i=0
=
i = W + log1 + x1+ (3) - 1 + i
i=0 = W + -log1 + x. 2
i=0
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II.1.5 Une mesure de la variation équivalente
Afin de faciliter la comparaison des niveaux de bien-être, nous calculons une
mesure de la variation équivalente, VE. Nous la définissons comme
l’augmentation proportionnelle de la consommation que les ménages exigent à
chaque période, dans le régime permanent (steady state) initial caractérisé par
une forte inflation, pour jouir du même niveau de bien-être que dans le régime
permanent à faible inflation. Plus précisément, la variation équivalente est
définie au moyen de la formule où W est calculé de la manière indiquée dans
l’une ou l’autre des deux sous-sections précédentes. Il faut noter que, selon
l’hypothèse du scénario de base voulant que les avantages soient perçus
immédiatement, les mesures correspondantes de VE sont lorsque x désigne une
variation du taux de croissance.
VE = x, (5) lorsque x désigne une variation du niveau et VE = 1+x 1/ x–1--,
(6)
1 W = -logc 1 + VE 1 + t 1 = W + -log1 + VE 1 + t 1+= W +
t
log1+VE, (4)
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II.2 L’évaluation des coûts de la réalisation et du
maintien de la stabilité́ des prix
Pour chiffrer les coûts liés à la réduction de l’inflation et à son maintien à
un bas niveau, nous nous servons du Modèle trimestriel de prévision
(MTP) de la Banque du Canada. Ce modèle a été décrit dans divers
rapports techniques publiés par la Banque depuis novembre 1994. Nous
passerons rapidement en revue quelques-unes de ses principales
caractéristiques.
Le MTP a été conçu avec un objectif double. Premièrement, il guide le
personnel
de
la
Banque
dans
la
préparation
des
projections
économiques. Deuxièmement, il lui sert d’outil de recherche dans
l’analyse des politiques économiques. Pour répondre à ces deux besoins
différents, les concepteurs du MTP ont emprunté à la fois aux modèles
de prévision et aux modèles plus structurels conçus uniquement pour
l’analyse des politiques.
Le modèle est étalonné de façon à rendre compte d’un large éventail de
faits stylisés caractérisant l’économie canadienne. Par exemple, des
modèle vectoriels autorégressifs ont été estimés de manière à établir des
profils de réaction aux chocs en courte période et des propriétés
cycliques qui soient compatibles avec les observations.
En outre, une foule d’études empiriques effectuées à la Banque ou
ailleurs ont servi à choisir certains des paramètres et des propriétés clés
du modèle.
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Le MTP est en fait un système composé de deux modèles. Le MTP de
régime permanent (MTPRP) représente la situation d’équilibre en longue
période. Il est basé sur le modèle de comportement des ménages de
Blanchard-Weil. Il décrit les élément determinants des choix à long terme
effectués par des entreprises maximisant leurs profits et par des
générations imbriquées de consommateurs, les politiques budgétaire et
monétaire étant données, le tout dans le cadre d’une économie ouverte
qui entretient des liens importants avec le reste du monde. Le
comportement économique de ces agents, compte tenu de leurs
contraintes budgétaires de long terme, et les conditions d’équilibre du
marché en économie ouverte déterminent l’équilibre à long terme ou
régime permanent vers lequel converge le modèle dynamique. Black,
Laxton, Rose et Tetlow (1994) fournissent une description détaillée du
MTPRP.
Le modèle dynamique du système MTP retrace l’évolution de l’économie
lorsqu’elle passe de son état initial au régime permanent défini par le
MTPRP. Le modèle dynamique présente plusieurs caractéristiques
importantes. Tout d’abord, les agents ont un comportement prospectif.
Les attentes sont formées d’anticipations prospectives conformes au
modèle et d’une composante adaptative tenant compte des données
passées. Elles jouent un rôle important dans le modèle. On fait en outre
l’hypothèse que l’ajustement des prix comme des quantités est coûteux,
ce qui confère une dimension intrinsèque à la dynamique du modèle.
L’une des caractéristiques essentielles du MTP est qu’il est stable sur le
plan dynamique et converge vers l’équilibre défini par le MTPRP. Le
système MTP comprend trois variables de stock clés : les obligations
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d’État, le capital physique du secteur privé et les avoirs étrangers nets. Les
niveaux de ces stocks en régime permanent sont conformes à la théorie économique
que reflète le MTPRP, et les flux correspondants sont provoqués par les variations
de prix relatifs. Si un choc influe sur une variable de stock, le modèle génère les
flux nécessaires pour ramener l’économie au régime permanent.
Le MTP comprend aussi des fonctions endogènes de réaction des politiques
monétaire et budgétaire. La politique monétaire a pour but de maitriser
l’inflation. Elle est mise en œuvre au moyen d’une fonction de réaction
prospective dans laquelle les autorités monétaires règlent leur instrument
d’intervention de manière à ramener l’inflation à un niveau conforme à la cible.
L’instrument d’intervention est le taux d’intérêt à court terme, qui influe sur la
demande intérieure par l’entremise de la courbe de rendement. L’équation (7)
exprime la fonction de réaction des autorités monétaires :
C où R du papier commercial à 90 jours), RL est un taux nominal à long terme
a
(celui des obligations à dix ans ou plus du gouvernement du Canada),  est le
taux d’inflation attendu par les autorités monétaires et C est le taux d’inflation
cible. Comme la politique monétaire n’exerce ses effets sur l’inflation qu’avec
un décalage, les autorités doivent s’efforcer de pronostiquer l’avenir pour
déterminer le réglage approprié de leur instrument d’intervention. Un certain
poids est également accordé à la variable dépendante retardée.
Comme la banque centrale ne peut maitriser directement l’inflation, les chocs
que subit l’économie se répercutent sur celle-ci, peu importe la pondération
attribuée à l’écart entre le taux d’inflation visé et le taux d’inflation attendu dans
l’équation (7). Cela tient au retard avec lequel la politique monétaire fait sentir
ses effets. Par conséquent, les autorités ne peuvent pas maintenir l’inflation
exactement au taux visé. Il se produira des écarts qui pourraient persister
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pendant un certain temps, en raison de la dynamique intrinsèque du modèle et
des anticipations.
L’action des autorités budgétaires est également représentée de manière
endogène dans le MTP. Le secteur public regroupe les administrations fédérales,
provinciales et municipales. Il achète des biens et services, fait des transferts au
secteur privé et perçoit des recettes en imposant directement les revenus et
indirectement les transactions intérieures. Il émet également des titres d’emprunt
libellés en monnaie nationale.
Dans la version élargie du MTP retenue ici, la politique budgétaire se caractérise
par trois ratios cibles, tous définis en proportion de la production : celui de la
dette publique, celui des dépenses publiques et celui des transferts aux
particuliers.
Conformément
aux faits
stylisés
caractérisant
l’économie
canadienne, nous supposons que le ratio des dépenses publiques est le taux
d’intérêt nominal à court terme (plus précisément, le taux à court terme est
légèrement procyclique, tandis que celui des transferts aux particuliers est
anticyclique. Le taux d’imposition du revenu des particuliers et le déficit
budgétaire du secteur public s’ajustent en conséquence .
II.1 Les coûts de la désinflation dans le scénario de
base
Une méthode couramment employée pour évaluer les coûts liés à une
réduction de l’inflation consiste à estimer une courbe de Phillips et à
calculer les ratios de sacrifice correspondants. La Banque du Canada a
consacré de nombreuses recherches au ratio de sacrifice. Une bonne
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partie d’entre elles ont porté, ces dernières années, sur l’estimation de
courbes de Phillips « accélérationnistes » (Cozier et Wilkinson, 1991;
Dupasquier et Girouard, 1992).
Le ratio de sacrifice au Canada a fait l’objet de nombreuses autres
estimations, et les chiffres obtenus varient passablement. À l’examen de
la période de désinflation 1981-1982, Howitt (1990) conclut que le ratio
de sacrifice équivaut à environ 4,7 % du PIB. Ball (1994) estime le ratio de
sacrifice canadien à 2,4 % du PIB entre 1981 et 1985. Debelle (1996) établit
ce ratio à 2 % pour la même période et à 3,5 % pour les années de
désinflation 1990-1993. Cecchetti (1994), qui fait appel à la restriction de
Blanchard-Quah (1989) pour décomposer les chocs d’offre et de
demandes globales, calcule deux mesures différentes du ratio de sacrifice
au Canada. S’il postule que la production est stationnaire autour d’une
tendance, il obtient un ratio de sacrifice moyen de 1,6 % pour la période
1957-1992. Lorsqu’il fait l’hypothèse que la production est intégrée
d’ordre 1, le ratio de sacrifice estimé s’élève à 5,7 %8.
Bien qu’utile, le calcul des ratios de sacrifice au moyen de courbes de
Phillips présente de sérieuses limites. Comme l’ont souligné Buiter et
Miller (1985), l’inflation est manifestement un processus endogène, et sa
représentation au moyen d’une équation unique n’est d’aucune utilité au
décideur public. Les coûts de la désinflation dependent d’une foule de
facteurs, dont la conjoncture économique, l’état des anticipations
d’inflation, la crédibilité des autorités monétaires et la réaction des autres
responsables de la politique économique (par exemple, les autorités
budgétaires).
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C’est ce que montrent Laxton, Rose et Tetlow (1993) dans le cas du
Canada. Ils estiment une courbe de Phillips qui permet aux excédents de
la demande et de l’offre de produire des effets différents sur l’inflation.
Leurs résultats font ressortir une importante asymétrie du processus
d’ajustement des prix, une demande excédentaire créant plus de tensions
inflationnistes qu’une offre excédentaire de même ampleur ne crée de
pressions déflationnistes. Ensuite, Laxton, Rose et Tetlow incorporent
leur courbe de Phillips à un petit modèle macroéconomique qu’ils
soumettent à des simulations. Ils obtiennent deux résultats intéressants.
En premier lieu, le coût d’une réduction donnée de l’inflation dans le
court terme (mesuré par la perte cumulative de production pendant la
période de transition) est bien supérieur au gain que procure une hausse
similaire de l’inflation. En second lieu, ce coût est très sensible au facteur
de pondération attribué à la composante prospective des attentes. Étant
donné que ce paramètre n’est pas mesuré avec précision, il convient de
tenir le plus grand compte de ce facteur.
Pour l’étalonnage du MTP, le personnel a choisi un comportement qui
n’est que modérément prospectif (pondération d’environ 20 %), ce qui
produit un ratio de sacrifice à peu prés égal à trois et un « ratio de gain »
à peu prés égal à un. Cet aspect de l’étalonnage du modèle est entouré
d’incertitudes considérables. Ces propriétés sont démontrées dans les
simulations dont nous faisons état à la section suivante.
II.1.1 Choc désinflationniste de 1 point de
pourcentage
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Afin d’estimer le coût de la désinflation dans le scénario de base, nous
étudions les effets, dans le MTP, d’une réduction de 1 point de
pourcentage du taux d’inflation cible. L’analyse se limite ici aux effets
transitoires, puisque cette version du MTP ne tient pas compte des
avantages d’une baisse de l’inflation. Mis à part un effet de seigneuriage
de faible ampleur, l’inflation n’a pas d’incidence à long terme sur
l’économie réelle Pour réduire l’inflation, les autorités monétaires
relèvent les taux d’intérêt à court terme d’environ 100 points de base en
moyenne la première année. Les taux à long terme augmentent
légèrement la première année, puis diminuent par rapport à la solution
de référence, car les agents s’attendent à ce que l’inflation baisse. La
hausse des taux d’intérêt à court terme se traduit par une légère
appréciation du dollar, ce qui exerce un effet négatif sur la demande
intérieure et étrangère. L’incidence sur la demande globale culmine la
troisième année; l’écart de production cumulatif (négatif) atteint alors
plus de 1 %. L’inflation s’établit à son nouveau niveau cible au bout de
cinq ans. À ce moment-là, les taux d’intérêt à court terme sont tombés
au- dessous de leur niveau de long terme de manière à enrayer la
dynamique désinflationniste qui a commencé à s’instaurer.
En fin de compte, la production totale à laquelle il faut renoncer pour
réduire de façon permanente l’inflation de 1 point de pourcentage
représente 3 % de la production annuelle. Le passage à une inflation plus
faible s’accompagne également d’une détérioration du bien-être
équivalant à 0,14 % de la consommation.
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II.1.2 L’hystérèse sur le marché du travail et les
coûts de la désinflation
L’estimation des coûts de la désinflation dans le scenario de base repose
sur un important postulat, à savoir que la politique monétaire n’exerce
qu’un effet temporaire sur le taux de chômage. Ce point de vue
traditionnel est cependant contesté par quelques auteurs. Blanchard et
Summers (1986) en particulier ont évoqué la possibilité qu’une réduction
de l’inflation entraîne une augmentation permanente du taux de
chômage (Fortin, 1991, examine l’applicabilité de cette théorie au
Canada). Dans la présente section, nous évaluons le coût de la
désinflation sur le plan du bien- être au moyen d’une version du MTP
qui englobe un effet d’hystérèse sur le marché du travail. La taille de cet
effet est étalonnée de manière à cadré avec les résultats d’un certain
nombre d’études.
L’existence de l’hystérèse sur le marché du travail signifie que le taux de
chômage naturel varie de pair avec le taux de chômage observé.
III. L’indépendance des banques centrales
Aujourd’hui, dans la plupart des pays développés, les banques centrales,
qui sont en charge de la politique monétaire, sont indépendantes des
gouvernements ; cela est notamment le cas de la Banque centrale
européenne (BCE) et de la Réserve Fédérale américaine (FED). Or, il
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semble établi que la politique monétaire menée par A. Greenspan, lors
de son dernier mandat de gouverneur de la FED, serait une des causes
de la crise économique et financière dite des subprimes. En effet, en
maintenant les taux directeurs à des niveaux assez bas, il aurait
contribué à la formation d’une bulle immobilière et financière, puis
aurait ensuite favorisé son éclatement par le resserrement des conditions
de crédit à
partir de 2006, justifiée par le retour de tensions
inflationnistes. Dans ces conditions, il est possible de douter de
l’amplitude dans une banque centrale indépendante à mener une
politique monétaire limitant l’amplitude des cycles économiques.
La banque centrale est l’institution en charge de la politique monétaire.
Par l’intermédiaire de ses taux directeurs, elle contracte le niveau de la
masse monétaire. On lui attribue traditionnellement trois fonctions
principales : émettre la monnaie fiduciaire, assurer la supervision du
système financier et jouer le rôle de prêteur en dernier ressort en cas de
crise systémique.
La notion d’indépendance appliquée à la banque centrale recouvre à la
fois
une
dimension
politique
et
une
dimension
économique.
L’indépendance politique traduit l’absence d’interférence du pouvoir
politique sur les décisions prises par la banque centrale mais aussi
l’absence d’influence de celui-ci sur l’organisation institutionnelle de la
banque centrale, notamment sur la nomination et la révocation des
dirigeants, sur les statuts de la banque centrale, etc.
De plus, la longueur du mandat du gouverneur de la banque centrale
ainsi que la nature des responsabilités qui lui sont confiées sont un indice
de cette indépendance politique.
21
Quant à elle, l’indépendance économique traduit à la fois le libre choix
des objectifs fixés (quantifiés ou non) et des instruments utilisés par la
banque centrale mais aussi l’impossibilité de financer le déficit
budgétaire des gouvernements par la création monétaire.
Pour opérationnaliser la notion d’indépendance de la banque centrale,
les économistes ont tenté de la mesurer à l’aide de différents indicateurs,
dans le but de pouvoir apprécier la performance relative des différentes
banques centrales dans la conduite de leur politique monétaire. Il est
traditionnellement distinguée par une mesure de :
• L’indépendance légale de la banque centrale, réalisée principalement
dans la littérature économique à l’aide de deux indices : l’indice
GMT, du nom de ses concepteurs Grilli, Masciandaro, et Tabellini
(1991), qui mesure l’indépendance politique et économique de
manière binaire et l’indice de Cukierman (1992), qui a plus
contribué
à
donner
de
manière
plus
précise
le
degré
d’indépendance ;
• L’indépendance réelle de la banque centrale qui tente d’évaluer
l’indépendance effective, et non a priori, de la banque centrale, à
l’aide des indicateurs comme la faible fréquence de changement
des gouverneurs de banque centrale ou encore l’absence de cycles
électoraux. Ces deux indicateurs constitueraient la preuve d’une
indépendance plus marquée de la banque centrale.
Par ailleurs, la question de l’indépendance des banques centrales se pose
ici sous l’angle de l’impact qu’elle aurait sur les politiques économiques,
qui peuvent être définies comme l’ensemble des instruments dont
disposent les pouvoirs publics pour atteindre certaines finalités à long
terme, les principales étant d’assurer le bien-être maximum pour les
22
générations présentes et futures, de garantir la solidarité nationale et de
limiter les inégalités sociales.
Il est coutume de distinguer les politiques conjoncturelles qui visent à
réguler l’activité économique en poursuivant les quatre objectifs
principaux mis en évidence dans le « carré magique » de N. Kaldor
(croissance économique, plein-emploi, stabilité des prix et à l’équilibre
du commerce extérieur), et les politiques structurelles qui visent à agir
sur les caractéristiques fondamentales de l’économie (garantir la
concurrence et la liberté des prix, améliorer la compétitivité des
industries. Le sujet nous amène naturellement à focaliser notre attention
sur les politiques budgétaire et monétaire, donc sur le versant
conjoncturel des politiques économiques, et notamment sur leur
efficacité que nous appréhendons comme leur capacité à atteindre les
objectifs qu’elles se fixent.
Au départ, l’indépendance des banques centrales, qui s’est très
largement généralisée depuis le début des années 1990, surtout dans les
pays développés, est un choix guidé par la volonté d’améliorer la
conduite de la politique monétaire. Mais quelles sont les conséquences
en termes de politique budgétaire de ce choix ? Est-il pertinent si l’on
conçoit la régulation conjoncturelle comme le fruit de l’interaction entre
les politiques budgétaire et monétaire et non pas comme un
cloisonnement de celles-ci ? L’indépendance des banques centrales
permet-elle vraiment d’améliorer l’efficacité de la politique économique
conjoncturelle ?
Nous présenterons dans un premier temps les avantages théoriques
supposés de l’indépendance des banques centrales en termes de
politiques monétaire et budgétaire. Puis, dans un second temps, nous
23
pointerons du doigt les limites de cet arrangement institutionnel quant à
la capacité de la politique économique à réguler efficacement l’économie.
III.1 - L’indépendance des banques
centrales est censée, en théorie,
améliorer l’efficacité des politiques
économiques
Les fondements théoriques de l’indépendance de la banque centrale
partent
de
l’idée
gouvernements
qu’une
n’est
pas
politique
monétaire
dynamiquement
aux
efficace
mains
(A).
des
Rendre
indépendante la banque centrale permettrait non seulement de redonner
de l’efficacité à la politique monétaire mais aussi à la politique
budgétaire (B).
A) A la base, l’inefficacité de la politique
monétaire aux mains des gouvernements
On peut faire reposer le point de départ de l’analyse théorique menant à
la proposition que l’indépendance des banques centrales est un
arrangement institutionnel souhaitable du point de vue de l’efficacité de
la politique économique sur la critique de Lucas (1976). Il est le premier
à avoir mis à l’évidence le fait que les anticipations des agents
économiques s’adaptent aux politiques économiques menées, qui en
retour doivent elles aussi s’adapter. Ainsi, toute politique économique
discrétionnaire menée par un gouvernement générera une adaptation du
comportement des agents qui viendra conditionner son efficacité, celle-ci
24
dépendant de la nature des anticipations des agents (anticipations
extrapolatives, adaptatives, rationnelles. Cette critique a ouvert la porte
à deux débats différents concernant la politique économique, et plus
précisément la politique monétaire : celui concernant l’opposition entre
politique de règle et politique discrétionnaire, et celui concernant
l’indépendance de la banque centrale.
L’approche de Lucas, et avec lui des Nouveaux Classiques, a mis en
difficultés la conduite par les gouvernements d’une politique monétaire
discrétionnaire efficace. Supposons que les deux principaux objectifs
d’un gouvernement soient l’emploi et la stabilité des prix. Dans ce cas, le
gouvernement peut utiliser la politique monétaire pour chercher à
atteindre l’un ou l’autre de ces objectifs. Notamment, dans le cadre de la
courbe de Phillips revisitée par Solow et Samuelson (1960), il existe un
arbitrage possible entre inflation et chômage. Or, dans la version de la
courbe de Phillips augmentée des anticipations (Friedman, 1968), cet
arbitrage n’est possible qu’à
court terme en cas d’anticipations
adaptatives (les agents sont alors victimes d’illusion monétaire) et, à
long terme, la politique monétaire perd son efficacité. On retrouve alors
la dichotomie Classique entre sphère réelle et sphère monétaire, avec un
retour au taux de chômage d’équilibre mais avec un niveau d’inflation
plus élevé. Certains comme Sargent et Wallace (1975) vont même plus
loin en montrant, sous l’hypothèse d’anticipations rationnelles des
agents qui prennent leurs décisions en se basant sur toute l’information
disponible et connaissent les « lois » traduisant le fonctionnement de
l’économie, et de parfaite flexibilité des prix, qu’une politique monétaire
expansionniste n’est jamais efficace. En effet, les agents anticipent
parfaitement l’annonce des gouvernements et adaptent instantanément
25
leurs comportements. On retrouve la neutralité de la monnaie même à
court terme. Pour Sargent et Wallace, seule une politique discrétionnaire
visant à surprendre les agents économiques pourrait être efficace à court
terme pour rétablir l’arbitrage inflation-chômage. Mais ce type de
politique ne fonctionnerait qu’une seule fois, les agents « sanctionnant »
le
gouvernement
en
élevant
définitivement
leurs
anticipations
d’inflation. On se retrouve alors face au problème d’incohérence
temporelle des décisions de politique économique mis en évidence la
première fois par Kydland et Prescott (1977) : dans ce cas, la politique
économique qui maximise le bien-être social à court terme ne serait plus
celle socialement optimale à long terme. Barro et Gordon (1983) ont
appliqué ce raisonnement à la conduite de la politique monétaire. Pour
eux, le gouvernement serait tenté de « tricher » en menant une politique
monétaire plus expansionniste que celle qui lui permettrait de respecter
la cible d’inflation annoncée au départ. Une fois les salaires nominaux
fixés par négociation collective entre les partenaires sociaux, ce type de
« surprise » permettrait de diminuer à court terme le niveau des salaires
réels, et donc le chômage, au prix d’une inflation un peu plus élevée.
Cependant, à plus ou moins long terme, selon que les partenaires
sociaux formulent des anticipations rationnelles ou non quant à la
« stratégie » menée par le gouvernement, cette politique perdrait de son
efficacité et se traduirait par un niveau d’inflation beaucoup plus élevée,
pour un taux de chômage revenu à son niveau naturel. Ainsi, en
l’absence de pré-engagement de l’Etat quant à une règle stricte de
politique monétaire, les tensions inflationnistes seraient plus importantes
et plus fréquentes.
26
Dans la vision que nous venons de présenter, c’est la manière dont est
mise en oeuvre la politique monétaire, son caractère discrétionnaire, qui
pose problème. Or d’autres économistes ont mis en avant que le
problème pouvait aussi venir du fait que ce soit le gouvernement qui
gère la politique monétaire. Pour Nordhaus (1975) mais aussi Alesina et
Roubini (1993), c’est l’existence de cycles électoraux qui justifierait de
confier la politique monétaire à une banque centrale indépendante afin
d’éviter la mise en oeuvre de politique monétaire déstabilisante. Pour la
première citée, les gouvernements choisiraient de mener, à l’approche
des élections, des politiques monétaires accommodantes afin de réduire
le chômage et ainsi faciliter leur réélection. Une fois celle-ci acquise, ils se
lanceraient dans une politique de rigueur afin de réorienter les
anticipations d’inflation à la baisse. Cet enchaînement traduit les
politiques de stop and go que les gouvernements de certains pays
comme la France et le Royaume-Uni ont menés de 1945 au début des
années 1970. Pour Alesina et Roubini (1993), ce serait davantage
l’alternance politique entre des partis de gauche « pro-emploi » et des
partis de droite « anti-inflation » qui expliquerait l’existence de ces cycles
électoraux. Ces deux interprétations conduisent à la même conclusion :
la politique monétaire dans les mains des gouvernements ne peut être
conduite efficacement.
Confier la politique monétaire à une banque centrale indépendante du
pouvoir politique et lui affecter comme unique objectif la stabilité des
prix est apparu comme la solution la plus à même de redonner de
l’efficacité à la politique monétaire, compte tenu des deux problèmes
évoqués précédemment. On peut noter à ce stade que d’autres solutions
ont été proposées, notamment celle de Rogoff (1985) pour qui la
27
nomination d’un gouverneur de banque centrale ayant une très forte
aversion à l’inflation (plus forte en moyenne que celle de la population)
pourrait permettre d’assurer la crédibilité de la politique monétaire et
garantir la stabilité des prix, sans rendre nécessaire l’indépendance de la
banque centrale ni le recours à une politique de règle. Dans la pratique,
cette solution n’a pas été perçue comme étant substituable mais plutôt
complémentaire à l’indépendance de l’institut d’émission de monnaie.
Nous allons maintenant expliquer les raisons de la plus grande efficacité
supposée
des
politiques
monétaires
par
une
banque
centrale
indépendante.
B) Les avantages attendus de
l’indépendance des banques centrales
a. En termes de politique monétaire
Que ce soit en raison de l’incohérence temporelle de ses décisions ou de
sa
propension
à
générer
des
cycles
politico-économiques,
un
gouvernement aurait une tendance naturelle à gérer peu efficacement la
politique monétaire, eu égard à l’objectif de stabilité des prix. Il serait à
l’origine d’un biais inflationniste provenant de son incapacité à ancrer
les anticipations des agents économiques privés à un niveau bas. C’est
ce manque de crédibilité du gouvernement que le transfert de la
politique monétaire à une banque centrale indépendante est censé
28
pallier. En effet, la théorie prête à une banque centrale indépendante la
crédibilité qu’un gouvernement n’a pas concernant la gestion de la
monnaie. Par cette décision, non seulement le gouvernement se « lie les
mains » quant à la possibilité de créer de l’inflation surprise mais, de
plus, le fait de ne confier à cette institution qu’un unique objectif de
stabilité des prix vient drastiquement réduire la tentation de chercher à
relancer l’économie réelle au prix d’une inflation plus forte. Si l’on ajoute
que, le plus souvent, est nommé à
sa tête un gouverneur assez
conservateur, on comprend qu’une banque centrale indépendante
contribue à réduire et à stabiliser l’inflation. Or, contenir la hausse
générale des prix permet de limiter les perturbations qui affectent les
agents économiques lorsqu’ils prennent leurs décisions d’épargne, de
consommation et d’investissement.
Cet argument, qui repose sur les fondements théoriques évoqués plus
haut, a été testé empiriquement dans un certain nombre de travaux, le
plus connu de tous étant celui d’Alesina et Summers (1993). En
régressant des indicateurs mesurant l’indépendance des banques
centrales sur des variables réelles (le chômage, la croissance économique,
les taux d’intérêts réels) et monétaire (l’inflation), ces derniers trouvent
que si l’indépendance des banques centrales se traduit par de meilleure
performance en termes de stabilité des prix (inflation moyenne plus
faible), en revanche, elle n’aurait aucun impact sur l’économie réelle en
longue période. On retrouverait donc empiriquement la dichotomie
entre sphère réelle et monétaire, qui viendrait légitimer, en retour, le
choix d’attribuer à la politique monétaire le seul objectif de stabilité des
prix. Il ressortirait donc de cette analyse qu’avoir un instrument unique
29
d’indiquer un seul objectif de politique économique constituerait un
avantage certain.
Si ces travaux s’accordent à
montrer qu’une banque centrale
indépendante est mieux à même de maîtriser l’inflation sans influencer
les variables réelles, il existe cependant un canal par lequel celles-ci
pourraient se trouver impactées par la politique monétaire, et qui
permettrait d’améliorer l’efficacité de la politique monétaire en termes de
croissance économique. En effet, la crédibilité des banques centrales
contribuerait aussi à la modération des taux d’intérêt nominaux et réels
à long terme. Pour atteindre la même cible d’inflation, les marchés
financiers exigeraient une « prime de risque » plus faible, ce qui se
traduirait par un niveau de taux d’intérêt plus faible propice à stimuler
l’investissement productif, source de croissance, sous l’hypothèse, bien
entendu, que l’économie n’ait pas atteint son taux de croissance
potentielle. La politique monétaire pourrait donc permettre d’atteindre
simultanément les objectifs de stabilité des prix et de croissance
économique. Son efficacité s’en trouverait donc améliorée. De même, cela
permettrait de rendre moins couteuses les politiques de désinflation tout
en augmentant, en retour, la légitimité de l’indépendance de la banque
centrale (Blinder, 2000). Au-delà de ce premier effet, l’indépendance de
la banque centrale peut aussi influencer la politique budgétaire restée
aux mains des gouvernements.
b.En termes de politique budgétaire
30
L’indépendance de la banque centrale permettrait principalement
d’améliorer l’efficacité de la politique budgétaire en ce qu’elle inciterait
les gouvernements à une plus grande discipline budgétaire. En effet,
l’indépendance politique est souvent accompagnée de l’interdiction du
financement monétaire du déficit et de la dette publics. La banque
centrale ne peut plus faire fonctionner la « planche à billets » (c’est-à dire augmenter la masse monétaire) pour alléger le poids réel de la dette
publique (on qualifie cette pratique de seigneuriage). En effet, l’inflation
peut contribuer à faire baisser la valeur réelle de la dette si le taux
d’inflation est supérieur au taux d’intérêt nominal. Dans ce cas, le taux
d’intérêt réel devient négatif ce qui allège mécaniquement le poids de la
dette en réduisant le service de la dette. La perte de cet instrument
comme moyen de faire face à un endettement excessif devrait conduire
les gouvernements à plus de prudence et de modération dans la mise en
oeuvre de leur politique budgétaire. Cela d’autant plus que la banque
centrale peut aussi jouer un rôle actif et « faire payer cher » les
gouvernements dispendieux en relevant ses taux directeurs. Ce jeu non
coopératif entre gouvernements et banque centrale aurait tendance à
venir renforcer le caractère disciplinant de l’indépendance de la banque
centrale en termes de politique budgétaire. L’efficacité de celle-ci
reposerait entièrement sur l’obligation qu’auraient les gouvernements de
garantir la soutenabilité de la dette et de se constituer des « réserves » en
période faste afin de conserver des marges de manœuvre en période de
récession.
Banassy-Quercy
et
Pisani-Ferry
(1994)
ont
cherché
à
vérifier
empiriquement l’impact disciplinant de l’indépendance des banques
centrales sur les finances publiques. En régressant des indicateurs
31
d’indépendance de banque centrale sur le solde primaire (déficit public
hors charge d’intérêts), ils confirment a minima l’influence positive
d’une banque centrale indépendante sur les dérapages budgétaires des
gouvernements : les pays ayant connu une forte hausse de leur solde
primaire sont ceux dont les banques centrales sont faiblement ou
moyennement indépendantes, alors que les pays ayant respectés une
certaine discipline budgétaire sont plutôt ceux s’octroyant une banque
centrale indépendante (à l’exception du Japon).
A l’issue de cette première partie, il semble donc que les arguments
théoriques appuyant l’idée d’une indépendance des banques centrales
comme
facteur
d’amélioration
des
politiques
économiques
conjoncturelles soient aussi confortés par quelques travaux empiriques
dont les résultats sont cependant à prendre avec précaution. A ce titre, la
situation de la zone euro, l’indépendance de la banque centrale
européenne (BCE) coïncide avec des situations budgétaires peu
reluisantes pour certains pays membres, apparaît comme un contreexemple amenant à s’interroger sur les limites de l’indépendance des
banques
centrales
comme
vecteur
d’efficacité
des
politiques
économiques au niveau budgétaire, mais pas uniquement.
III.2 - Les vertus de l’indépendance des banques
centrales connaissent certaines limites
La décision de rendre la banque centrale indépendante du pouvoir
politique n’est pas exempte de limites et ne garantit donc pas
nécessairement
une
amélioration
de
l’efficacité
des
politiques
32
conjoncturelles. Tout d’abord, ce choix organisationnel repose sur un
certain nombre d’hypothèses dont on peut discuter la pertinence et qui
pourraient conduire à en relativiser l’intérêt (A). D’autre part, certains
arguments et certains faits peuvent amener à remettre en question
l’efficacité de l’indépendance réelle des banques centrales en termes de
régulation macroéconomique (B).
A) Les limites liées aux hypothèses sous-jacentes
à l’indépendance
Les fondements théoriques de l’indépendance de la banque centrale visa -vis du pouvoir politique reposent sur l’idée que l’inflation est
exclusivement un phénomène monétaire, qu’une politique de règle est
bien plus efficace qu’une politique discrétionnaire pour la maîtriser, mais
aussi et surtout, qu’elle trouve son origine dans l’existence de cycles
électoraux.
a. L’inflation comme un phénomène exclusivement
monétaire et ses limites
Selon la formule de M. Friedman (1963), l’inflation serait « toujours et
partout
un
phénomène
monétaire ».
Les
théories
préconisant
l’indépendance de la banque centrale comme moyen d’assurer la stabilité
des prix ont adoptée cette position consistant à supposer, à plus ou
moins long terme, la neutralité de la monnaie et l’existence d’une
33
dichotomie entre sphère réelle et sphère financière. Or, il ne faut pas
oublier que derrière cette idée se cache l’hypothèse implicite de plein
emploi des facteurs de production, hypothèse qui n’est pas toujours
satisfaite. Un équilibre de sous-emploi est en effet une situation possible,
notamment pour les économistes keynésiens. Par conséquent, dans le cas
une économie n’aurait pas atteint son niveau de croissance potentielle,
une politique monétaire discrétionnaire, qu’elle soit menée par une
banque centrale indépendante ou bien même par un gouvernement,
pourrait affecter l’économie réelle et réduire le chômage.
Dans le même ordre d’idée, lorsqu’ne banque centrale indépendante suit
une politique de règle dans le domaine monétaire, comme la BCE qui
s’est fixée comme objectif de ne pas dépasser un taux d’inflation annuel
moyen de 2%, elle se trouve démunie face à un choc d’offre. Par
exemple, en cas de choc d’offre négatif, à l’image des deux chocs
pétroliers de 1973-74 et 1979-80 qui ont tiré vers le haut les coûts de
production, donc les prix, et réduit le niveau d’emploi, une politique de
règle est inefficace car elle conduit à assurer la stabilité des prix au
détriment d’une plus grande variabilité de la production et de l’emploi.
Ce type de politique se traduit dans ce cas par une plus faible
adaptabilité de l’économie (Mourougane, 1998). En revanche, une
politique discrétionnaire entretenant l’ambigüité sur la priorité à
accorder aux objectifs de croissance économique et de stabilité des prix
retrouve de l’efficacité, même si elle rend possible l’apparition de cycles
politico-économiques.
b. Les causes politiques de l’inflation et ses limites
34
La décision de rendre indépendante la banque centrale repose
fondamentalement sur l’idée que la compétition électorale est un des
principaux déterminants de l’inflation. En effet, nous avons vu que les
travaux de Nordhaus (1975) puis d’Alesina et Roubini (1993)
préconisaient ce choix organisationnel pour mettre fin à l’existence de
cycle électoraux, générateurs d’une grande instabilité des prix. Accorder
une place prépondérante aux déterminants politiques impactant la
conduite de la politique monétaire, en mettant au second plan les autres
facteurs traditionnellement retenus pour expliquer l’inflation (rôle de la
demande, des coûts, de facteurs structurels comme les structures de
marchés), est un peu réducteur. Cela contribue finalement à limiter la
portée des résultats et donc les cas ou l’indépendance de la banque
centrale correspond à une solution réellement pertinente. De plus,
comme le met en avant Steiner (2003), cela revient à considérer que la
démocratie, en tant que régime politique marqué par un fort degré de
compétition électorale, possède un biais inflationniste. Pour lui, cela pose
problème à
deux niveaux. Premièrement, réduire la compétition
électorale a peu de chances d’avoir un effet significatif sur l’inflation.
Historiquement, les régimes dictatoriaux des généraux d’Amérique
latine dans les années 1960-70 ont connu un haut niveau d’inflation.
Deuxièmement, cela revient à placer l’origine d’un des principaux
déséquilibres macroéconomiques hors du champ de l’économie.
Par
ailleurs,
un
autre
argument
de
l’argumentaire
conduisant
logiquement à l’indépendance de la banque centrale comme solution à
la stabilité des prix pose problème. En effet, principalement dans le
modèle de Barro et Gordon (1983), mais aussi dans tous les modèles qui
35
font reposer l’indépendance de la banque centrale sur l’incohérence
temporelle de la politique monétaire, on retrouve l’idée qu’une fixation
des salaires nominaux par négociation collective entre les partenaires
sociaux, pourrait déboucher sur une boucle prix-salaires inflationniste,
en raison du comportement opportuniste des gouvernements. Or, une
telle représentation du mode de fixation des salaires réels peut aussi
paraître réductrice. Dans les faits, certains syndicats, notamment
allemands et japonais, ont apporté la preuve que les négociations
collectives pouvaient conduire à une certaine modération salariale, dans
le cadre d’une politique générale de désinflation compétitive. De plus,
certains économistes (Hall, 1994 ; Hall et Franzese, 1998) sont venus
appuyer ces faits empiriques en mettant en évidence le rôle des
négociations collectives comme mécanisme permettant de limiter les
tensions inflationnistes. Enfin, les travaux de l’école de la régulation ont
donnés un rôle différent aux négociations collectives, en insistant sur
l’importance du rapport salarial, et de sa relation avec le système
financier en vigueur, comme forme institutionnelle permettant d’assurer
l’équilibre du régime d’accumulation. Pour eux, le rapport salarial
correspond à
l’arbitrage conflictuel qui existe entre, d’un coté,
l’amélioration du niveau de vie des travailleurs et le nécessaire soutien à
la demande, et de l’autre, le maintien du taux de profit par compression
des coûts, notamment salariaux. Ils mettent en avant que, dans le cadre
d’un régime d’accumulation dominé par une finance libéralisée, qui
favorise intrinsèquement une inflation basse et stable au détriment de
l’accumulation du capital, le rapport salarial apparaît comme un
contrepoids permettant d’assurer l’équilibre d’un tel régime. On sort
alors de la logique déstabilisatrice des négociations collectives. Aux
36
limites provenant des hypothèses sous-jacentes à l’adoption d’une
banque centrale indépendante comme solution au biais inflationniste
occasion à une politique monétaire gérée par les gouvernements,
viennent
s’ajouter
celles
reposant
sur
les
conséquences
de
l’indépendance réelle des banques centrales, notamment en termes de
crédibilité, de transparence et de policy mix.
B) Les limites liées à l’exercice de l’indépendance
Si l’indépendance de la banque centrale semble, en théorie, garantir une
plus grande efficacité des politiques monétaire et budgétaire, dans la
pratique, son indépendance réelle peut présenter certaines limites ayant
trait à la crédibilité et à la responsabilité démocratique de l’institution
(A) mais aussi soulever certains problèmes relatifs à la coordination des
politiques économiques conjoncturelles (B).
a. Les limites liées aux questions crédibilité et de
responsabilité
L’un des arguments justifiant l’indépendance de la banque centrale serait
la capacité de cette dernière à garantir la crédibilité de la politique
monétaire, c’est-à -dire d’ancrer à un niveau bas les anticipations
d’inflation à moyen/long terme des agents économiques. Or, rien ne
garantit que le transfert à la banque centrale de la politique monétaire
37
active automatiquement la crédibilité de cette dernière. Dans les faits,
d’ailleurs, il existe des contre-exemples à la relation négative entre le
degré d’indépendance des banques centrales et le niveau d’inflation :
celle-ci ne serait pas vérifiée pour les pays en développement ni pour
certains pays développés comme la Belgique, le Danemark ou encore le
Japon, ce dernier ayant connu depuis 1945 une inflation relativement
faible et stable alors que sa banque centrale est loin d’être indépendante
du pouvoir politique. De plus, Barro (1995) ne trouve pas de lien
statistiquement significatif entre indépendance des banques centrales et
stabilité des prix pour l’ensemble des pays à l’échelle mondiale.
Il existe différents moyens pour rendre crédible la politique monétaire
menée par la banque centrale : nommer un gouverneur de banque
centrale fortement averse à l’inflation (Rogoff, 1985), miser sur la
transparence (« annoncer la politique menée et mener la politique
annoncée », par exemple en affichant clairement la règle suivie ; rendre
public les débats du conseil des gouverneurs à mettre en place un contrat
incitatif liant la rémunération du banquier central à l’atteinte des
objectifs fixés (Walsh, 1995).
La banque centrale peut aussi chercher à améliorer sa réputation en
pratiquant une politique très restrictive ayant pour objectif d’envoyer un
signal fort aux agents économiques, pendant une durée plus ou moins
longue, afin d’orienter leurs anticipations d’inflation vers la cible
souhaitée. Cette politique de désinflation visant à asseoir la crédibilité de
la banque centrale pourrait se révéler très coûteuse en termes de
croissance et d’emploi (ratio de sacrifice élevé). Or, par effet d’hystérèse
(Phelps, 1972), cette hausse du chômage à court terme pourrait se
transformer en une hausse durable du chômage. La crédibilité de la
38
banque centrale peut donc avoir un coût macroéconomique non
négligeable.
On peut noter au passage que le niveau de crédibilité accordé à la
banque centrale concernant sa capacité à stabiliser les prix dépend
fortement de la conception que l’on se fait de la monnaie. Si l’approche
en termes de monnaie exogène, selon laquelle la banque centrale
maîtrise totalement la masse monétaire, est compatible avec l’idée d’une
politique monétaire apte à contenir l’inflation, ce n’est plus vraiment le
cas dans l’approche en termes de monnaie endogène, selon laquelle la
masse monétaire est fortement influencée par la demande de monnaie
des agents qui est plus ou moins stable.
Par ailleurs, une politique monétaire trop restrictive dans un contexte ou
le gouvernement fait face à un niveau de déficit et d’endettement très
important peut avoir un effet contreproductif sur la crédibilité de la
banque centrale. En effet, les agents économiques anticiperont que cette
politique n’est pas tenable à long terme, et qu’en aggravant la situation
des finances publiques, elle se condamne à engendrer un niveau
d’inflation élevée. Non seulement la banque centrale ne gagnera pas en
crédibilité mais le niveau d’inflation anticipée a de grande chance
d’augmenter, ce qui risque de se traduire par un effet opposé à celui
recherché.
Surtout, de manière générale, assigner principalement aux banques
centrales l’objectif de stabilité des prix et ne percevoir l’inflation que
comme un phénomène monétaire pose deux questions. Tout d’abord,
celle de la définition de la monnaie et de sa mesure par les agrégats
monétaires, qui a été bouleversée par les innovations financières ayant
permis d’accroître le degré de liquidité d’un certain nombre d’actifs.
39
Mais aussi celle des variables devant intégrer l’indice des prix servant de
base au calcul de l’inflation : faut-il continuer d’exclure de l’indice des
prix ceux de l’immobilier par exemple ? A ce titre, de connecter l’objectif
de stabilité des prix à la consommation de celui plus général de stabilité
financière peut déboucher sur ce que certains nomment le « paradoxe de
la crédibilité » (Borio et al. 2003). La crédibilité des banques centrales qui
parviennent à maintenir l’inflation à un niveau faible, peut conduire à
un excès d’optimisme de la part des agents économiques et donc à un
excès de liquidité poussant à la hausse les prix de l’immobilier et le
cours des titres boursiers. Si l’inflation reste maîtrisée, l’instabilité
financière s’accroît sans que la banque centrale n’y prête vraiment garde
jusqu’au jour ou, en raison de l’effet richesse transmettant l’euphorie des
marchés financiers et immobiliers à l’économie réelle, les anticipations
d’inflation remontent justifiant un resserrement de la politique
monétaire. Ici, c’est la crédibilité de la politique monétaire qui génère
une instabilité du système économique débouchant avec retard sur une
hausse de l’inflation.
Enfin, au-delà de la problématique relative à la crédibilité d’une banque
centrale indépendante, il convient aussi de s’interroger sur le degré de
responsabilité démocratique de cette dernière, nécessaire contrepartie de
son indépendance. En effet, l’indépendance ne doit pas consister à
concentrer le pouvoir monétaire dans les mains d’une institution, sans
contrer le politique, et encore moins sans l’obligation de rendre des
comptes aux citoyens ou à leurs représentants. Le libre choix laissé à la
banque centrale dans la définition de ses objectifs et des moyens pour y
parvenir devrait s’accompagner logiquement d’une justification ex post
de la politique menée, indépendance ne devant
pas signifier
40
irresponsabilité. Sur cette question, la BCE semble faire preuve d’un
déficit démocratique, notamment vis-a -vis de la FED. En effet, si cette
dernière doit rendre compte annuellement de sa politique devant le
Congrès des Etats-Unis, qui a de plus le pouvoir de modifier ses statuts,
la BCE n’a véritablement de compte à rendre à personne, y compris au
Parlement européen. De plus, les pays membres de l’Union européenne
ont laissé la BCE quantifier seule l’objectif de stabilité des prix, ce qui ne
serait pas conforme aux exigences démocratiques et pourrait nuire à sa
crédibilité (Fitoussi, 2002). Cet exemple illustre bien l’idée que derrière
l’indépendance des banques centrales se cachent des réalités diverses qui
rendent moins automatiques la meilleure performance en termes de
régulation macroéconomique de ce type d’arrangement organisationnel.
Par ailleurs, la déconnexion totale entre l’autorité monétaire et les
autorités budgétaires pourrait contribuer à relativiser encore davantage
cette idée.
b. Les limites liées au “policy mix”
L’indépendance de la banque centrale s’accompagne le plus souvent du
choix de fixer la stabilité des prix comme objectif principal (voire unique
pour la BCE, par exemple) de la politique monétaire. Il en résulte donc
une séparation claire des objectifs relevant de la politique monétaire et
de la politique budgétaire : à la première, la lutte contre l’inflation ; à la
seconde, la croissance économique et le plein-emploi. Or, le fait de dédier
un instrument à un objectif particulier se traduirait, pour certains
41
économistes, non seulement par une perte de marges de manœuvre
pour la politique économique mais aussi par un poids trop grand
accordé aux variables nominales, notamment en cas de récession
économique accompagnée d’une faible inflation (Le Cacheux, Mathieu,
Sterdyniak, 1992).
De plus, l’indépendance de la banque centrale peut aussi poser un
problème en termes de coordination des politiques économiques
conjoncturelles
puisque
les
politiques
monétaire
et
budgétaire
relèveraient alors de deux entités différentes. Or, en l’absence de
coopération entre la banque centrale et le gouvernement, un jeu non
coopératif peut s’instaurer et déboucher sur un policy mix sous optimal.
Ce serait par exemple le cas si la banque centrale et le gouvernement
jouaient un « jeu de la poule mouillée » (ou “chicken game”) dans lequel la
banque centrale pratiquerait une politique monétaire restrictive afin de
pousser le gouvernement à un certaine discipline budgétaire, alors que
ce dernier serait engagé dans une politique budgétaire expansionniste.
Non seulement, les effets de ces deux politiques se compenseraient, ce
qui empêcherait une relance efficace de l’économie, mais cela
dégraderait très rapidement les finances publiques si le niveau des taux
d’intérêt réels était supérieur au taux de croissance de l’économie (effet
« boule de neige » de la dette créé par un accroissement du service de la
dette).
Enfin, la configuration institutionnelle de la zone euro, ou la politique
monétaire unique est gérée par la BCE et les politiques budgétaires
menées par les gouvernements des dix-sept pays membres, rend encore
plus
complexe
la
question
de
la
coordination
des
politiques
conjoncturelles. En effet, pour mettre en oeuvre une politique monétaire
42
adéquate, la BCE est dans l’obligation de tenir compte des situations
économiques et budgétaires de chaque pays membre. Or, Jean-Claude
Trichet doit composer avec des économies dont la synchronisation des
cycles conjoncturels n’est pas garantie et dont la convergence réelle est
loin d’être assurée. Cela rend délicate la gestion de la politique monétaire
au sein de la zone euro, particulièrement en l’absence de mécanisme de
coordination efficace : du Pacte de stabilité et de croissance, relative
inefficacité des Grandes orientations de politique économique (GOPE)
décidées par le Conseil de l’Union européenne, difficulté des politiques
structurelles
à
rapprocher
des
économies
aux
caractéristiques
différentes.
Au final, si un certain nombre d’arguments semble plaider pour
l’indépendance de la banque centrale comme arrangement institutionnel
permettant de rendre plus efficace la politique monétaire (la crédibilité
de la politique monétaire permettant d’orienter les anticipations
d’inflation à la baisse) et la politique budgétaire (notamment car
l’absence de financement monétaire du déficit public incite à
discipline budgétaire), il existe cependant certaines limites
la
qui
pourraient questionner l’avantage que présenterait l’indépendance des
banques centrales en termes de régulation conjoncturelle. Des limites
théoriques telles que le problème de coordination des politiques
monétaire et budgétaire, le manque de souplesse à cause de l’attribution
ex ante d’un instrument à un seul objectif, ou encore l’hypothèse
réductrice d’une inflation perçue uniquement comme un phénomène
exclusivement monétaire. Mais aussi des limites empiriques assez bien
illustrées par l’exemple de la Banque du Japon (BoJ) qui, bien que peu
43
indépendante du pouvoir politique, a connu de bonnes performances en
termes de maîtrise de l’inflation.
Mais au-delà de cette problématique, il convient aussi de s’interroger
sur le véritable degré d’indépendance des banques centrales dans les
pays développés, même pour les banques centrales ayant admis la
preuve de la crédibilité de leur politique monétaire comme la BCE ou la
FED. Sont-elles vraiment indépendantes lorsqu’elles jouent leur rôle de
prêteur en dernier ressort comme dans le cas de la dernière crise
systémique dite des subprimes ? Le phénomène bien connu d’aléa moral
entre elles et les banques de second rang ne vient-il pas amoindrir de fait
leur degré d’indépendance, en tout cas vis-a -vis des acteurs privés ?
Plus récemment encore, la BCE est-elle vraiment indépendante
lorsqu’elle accepte de financer la dette grecque, mais aussi irlandaise et
portugaise, en assouplissant les conditions auxquelles elle accepte
comme « collatéral », en contrepartie des liquidités fournies, les « titres
pourris » (junk bonds) attachés à la dette souveraine de ces pays, cela
sous la pression des gouvernements européens et du Fonds monétaire
international (FMI) ?
CONCLUSION
Au vu de tous ces développements et analyses, il ressort qu’un travail
bien fouillé a été fait par des économistes très pénitents sur cette
question assez sensible.
44
Le problème est de savoir si nos économies, à travers nos Banques
centrales peuvent et doivent être dans ces fourchettes d’analyses
proposées ci-haut
Voici ce que nous proposons comme recommandations de politiques
économiques :
 La récente expansion des activités bancaires panafricaines est à
l’origine d’une nouvelle vague d’intégration financière qui, si elle
apporte de multiples bénéfices à la région, pose aussi, pour les
Banques centrales et les autorités de contrôle, de nouveau défis en
matière de surveillance et de gestion des risques.
 Les banques centrales doivent jouer
un rôle clé dans le
développement des marchés obligataires locaux. L’expansion des
marchés obligataires en monnaie locale est essentielle au
développement financier de l’Afrique et à sa résilience aux chocs.
Les politiques budgétaires et gestion de la dette ne doivent pas
nuire à l’efficacité de la politique monétaire ; une bonne politique
macroéconomique requiert des mécanismes de coordination
appropriés, qui évitent les conflits d’intérêt.
 Les dispositifs de stabilité financière doivent être renforcés. Les
Banques centrales ont leur mot à dire dans la politique de stabilité
financière laquelle est étroitement liée à la politique monétaire. La
Banque est naturellement l’institution officielle la plus proche des
marchés financiers. Cependant, elle doit partager presque toujours
la responsabilité de la stabilité financière avec d’autres organes.
Quelles que soient les modalités de ce partage qui diffèrent d’un
pays à l’autre, les autorités de contrôle ont besoin d’indépendance
45
et de pouvoirs suffisants pour prendre des mesures rapides et
impartiales.
 La période prolongée durant laquelle les produits de base
affichaient des cours à la moyenne, qui s’est souvent accompagnée
d’entrées massives de capitaux, a certes dopé la croissance, mais
pourrait aussi avoir vu naître des risques pour la stabilité
financière. Dans ce contexte, une approche macroprudentielle de
l’élaboration des politiques qui s’efforce d’appréhender dans leur
globalité ces mouvements longs des cours des produits de base
peut aider à s’attaquer aux risques systémiques potentiels.
 La coordination entre la gestion de la dette et la politique
monétaire est une autre question importante. La première mission
des gestionnaires de la dette est de maintenir les charges et les
risques de financement de l’Etat au bas. Mais leurs décisions sur le
volume et l’échéance de la dette ont de profondes implications
pour la courbe des rendements et les conditions monétaires. La
coordination entre la Banque centrale et le Gouvernement est donc
essentielle si l’on veut que la politique monétaire soit transmise
efficacement, et la stabilité financière, préservée.
 L’efficacité de la politique monétaire en Afrique a longtemps été
limitée par le manque de profondeur du système financier. Il
importe de noter que l’Afrique est un continent diversifié
présentant, à cet égard, une grande variété de situations, allant des
pays émergents, comme le Maroc et l’Afrique du sud, aux pays en
démarrage financier comme le Tchad en passant par les pays en
décollage (Ghana, Kenya, Ouganda). Les indicateurs de la
profondeur du système financier
Ratio Crédit au secteur
46
privé/PIB et intermédiation des dépôts/prêts sont bas par rapport
à d’autres régions du monde. En Afrique, les systèmes bancaires se
caractérisent,
en
outre,
par
une
marge
d’intermédiation
relativement importante, signe d’une infrastructure financière
lacunaire (agences de notation, par exemple), d’une faible
concurrence entre banques nationales et du caractère risqué de
l’activité de prêt conjugué à la fragilité des droits de propriété. Les
conditions d’une politique monétaire efficace sont notamment le
recours aux taux d’intérêt pour allouer l’épargne et le crédit, et la
présence de marchés secondaires fonctionnant bien pour influer
sur la valeur des grands indicateurs financiers, comme le taux
d’intérêt interbancaire.
 En lisant très bien notre papier, le premier constat est que la
plupart des auteurs ont travaillé sur l’indépendance des Banques
centrales, ont fait leurs vérifications empiriques sur des économies
très avancées, qui ont déjà la croissance, les infrastructures de base,
l’éducation, la santé, bref, ces économies ont atteint un certain
niveau de stabilité, en termes de réduction de la pauvreté relative.
 Ce qui manque à nos pays,
ce n’est pas absolument l’absence
d’indépendance des Banque centrales, le problème est au niveau
des éléments suivants qui caractérisent la politique de la plupart
des Banques centrales :
 l’absence d’objectif de croissance ;
 l’absence d’objectif de
réduction du chômage, donc un
manque d’arbitrage cohérent entre l’inflation-croissance,
inflation-chômage ;
47
 présence absolue de conflits d’objectifs de politiques :
comme la stabilité des prix et la compétitivité.
Il n’est donc pas très opportun de trop tirer sur cette question
d’indépendance qui pour le moment n’a aucun sens, il existe un défi plus
important au niveau de ces Banques centrales qu’il faut pouvoir relever à
savoir : le manque d’objectif de croissance, l’incapacité à spécifier des
politiques pouvant amener le financement des économies, réduire le
chômage, et chercher à travers des politiques optimales la réduction de la
pauvreté relative.
Si vous ne financez pas votre économie, il vous manquera la croissance,
et la croissance est positivement corrélée avec les recettes, si vous n’avez
pas cette croissance, il vous sera également difficile d’avoir un budget
cohérent avec vos objectifs de dépenses.
Par manque de recettes vous êtes dans l’obligation de comprimer vos
dépenses donc, vous ne financez plus votre économie.
Avec l’absence de financement de la production (croissance), il vous sera
également impossible de soutenir votre monnaie nationale pendant
longtemps causée par un manque de réserves puisque vous êtes dans
l’incapacité d’exporter.
Quel que soit le niveau de réserves au niveau de la Banque centrale, elles
vont s’épuiser et le financement permanent des importations aboutit
également à une incapacité de stabiliser vos prix car l’économie étant
assez ouverte, vous êtes exposé aux chocs négatifs (exogènes).
48
Il est tout à fait normal pour un gouvernement qui est à la recherche de
la croissance pour son économie d’obtenir le policy-mix optimal contre le
policy-mix sous optimal, cela ne peut pas constituer un frein à une
véritable politique monétaire cohérente.
John Hicks et A. Hansen analysent les impacts des politiques
économiques à l’aide de leur modèle IS-LM. Ce modèle met
définitivement fin à l’analyse dichotomique entre la sphère réelle et la
sphère monétaire et permet de juger de l’efficacité des politiques de
relance de type keynésien.
D’après les résultats du modèle IS-LM, les politiques de relance
conjoncturelles semblent revêtir une certaine efficacité.
En particulier, la relance est maximale lorsque les pouvoirs publics
mènent une politique monétaire d’accompagnement de la politique
budgétaire.
Sous ces conditions, la politique de dépenses publiques n’engendre pas
d’effet d’éviction à l’égard des investissements privés. En situation de
sous-emploi, l’Etat peut mener des actions conjoncturelles visant à
réduire le chômage.
La poursuite des travaux de A. W. Phillips par P.A. Samuelson et R. M.
Solow permet de mettre en évidence une relation négative entre le taux
d’inflation et le taux de chômage. Cette lecture keynésienne de la courbe
de Phillips fonde les politiques de relance menées par certains pays.
49
Les pouvoirs publics décident de réduire le chômage au moyen d’une
politique monétaire expansionniste de nature inflationniste, soit ils
choisissent la rigueur monétaire pour maintenir les prix stables au
détriment d’une baisse du taux de chômage. Ces politiques ont été
qualifiées de « Stop and Go », rigueur monétaire en cas de surchauffe des
prix, expansion monétaire en situation de montée du chômage.
Enfin, le dernier point porte sur le travail que doit faire nos Banques
centrales, pas toutes car plusieurs l’ont déjà fait, c’est celui d’estimer le
taux d’inflation optimal, défini comme le taux en dessous et au-delà
duquel la croissance est affectée.
Sur le dernier point, il faut absolument avoir des chiffres crédibles pas
dopés, sinon les résultats également seront biaisés, il va donc se poser un
problème de fiabilité des statistiques que nous avions par le passé
signalé dans nos précédentes publications.
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