Principes de bonne pratique
Transcription
Principes de bonne pratique
Principes de bonne pratique : Recommandations concernant l’utilisation de l’ADN aux fins de l’identification des personnes disparues et des restes humains non identifiés Le présent document a été élaboré par le Groupe d’experts d’INTERPOL sur le suivi des techniques dans le domaine de l’analyse d’ADN. Il formule un certain nombre d’observations et de recommandations essentielles à l’intention des pays membres d’INTERPOL désireux d’utiliser l’ADN pour identifier des personnes disparues et des restes humains dans le cadre d’enquêtes de police. Ce document est destiné : aux directeurs de laboratoires de police scientifique ; aux responsables de services chargés de l’application de la loi ; aux autorités législatives et aux décideurs politiques ; aux autres autorités de justice pénale. Résumé Le présent document présente des recommandations et des politiques aux pays qui mettent en place ou utilisent un programme pour les personnes disparues visant l’identification par l’ADN de ces personnes et de restes humains non identifiés conformément aux normes internationales. Ces pays sont vivement encouragés à s’assurer que les échantillons sont prélevés et analysés de manière appropriée, selon les bonnes pratiques établies, en vue d’une comparaison efficace des profils génétiques au niveau international. Date de publication : 4 novembre 2015 Langue originale : anglais Diffusion : anglais, arabe, espagnol, français Page 1/6 Recommandations INTERPOL en matière d’ADN Finalité d’un disparues programme d’identification par l’ADN des personnes Lorsque la disparition d’une personne est signalée ou lorsque des restes humains sont découverts, des mécanismes sont nécessaires au niveau national pour centraliser les informations recueillies et procéder à des comparaisons. L’une des composantes essentielles du processus d’identification est en effet la comparaison de l’ADN prélevé sur des restes humains non identifiés avec celui de personnes disparues. En dépit des efforts considérables déployés jusqu’à présent pour fixer des normes en matière d’ADN et améliorer l’état de préparation des pays aux opérations d’identification des victimes de catastrophes (IVC), la question des procédures à mettre en œuvre en matière d’ADN dans le cadre d’enquêtes sur les personnes disparues n’a pas été abordée. Un certain nombre de pays ont mis en place des programmes nationaux d’identification par l’ADN des personnes disparues ; cependant, la coordination de l’analyse scientifique dans le cadre d’enquêtes menées au niveau international doit faire l’objet d’une réflexion appropriée qui tienne compte des normes requises pour procéder à des identifications normalisées et efficaces. La coopération internationale dans les enquêtes sur les personnes disparues est vivement conseillée, compte tenu : de la facilité avec laquelle il est possible de franchir les frontières à des fins privées ou professionnelles ; de l’accroissement des migrations au niveau mondial ; des conséquences de l’augmentation de la criminalité internationale, notamment du trafic d’êtres humains ; de la vulnérabilité des migrants et des réfugiés, et de la probabilité élevée qu’ils soient victimes d’actes criminels ; de la souffrance des membres de la famille d’une personne disparue qui ne savent pas où se trouve l’être cher et de l’impossibilité pour eux d’obtenir un certificat de décès (ce qui peut avoir des implications financières) ; du droit fondamental des familles à savoir et de leur droit à la justice lorsque la personne disparue est décédée à la suite d’un acte criminel. Recommandation Le Groupe d’experts d’INTERPOL sur le suivi des techniques dans le domaine de l’analyse d’ADN encourage tous les pays membres à mettre en place un programme pour les personnes disparues suivant les normes internationales recommandées qui sont exposées dans le présent document. Il souligne que les efforts d’identification devront s’appliquer à tous de manière égale, abstraction faite du niveau économique des personnes concernées, de leur appartenance ethnique ou des circonstances de leur disparition. Les pays doivent reconnaître l’importance de l’identification des personnes disparues et décédées, et fournir les ressources adéquates pour la résolution de ces affaires, en sus de celles destinées aux enquêtes standard. Bien que la présente recommandation ne concerne que l’ADN, elle ne suggère pas qu’un programme d’identification des personnes disparues Page 2/6 Recommandations INTERPOL en matière d’ADN doive être exclusivement consacré à l’identification par l’ADN : tous les éléments d’identification généralement acceptés – dents, empreintes digitales et ADN – doivent être pris en compte et examinés aux côtés d’autres informations telles que les données médicales, les caractéristiques physiques, les tatouages et les effets personnels. Des orientations supplémentaires sont fournies dans les documents existants sur l’identification des victimes de catastrophes, tels que le Guide INTERPOL sur l’IVC, les orientations de l’International Society of Forensic Genetics, et les Guidelines for missing persons casework du Scientific Working Group on DNA Analysis Methods (SWGDAM) (voir les références). Recueil d’informations sur les personnes disparues Le recueil de données inclura, chaque fois que possible, des échantillons directs de la personne déclarée disparue et des échantillons de référence prélevés sur les membres de la famille biologique proche (échantillons familiaux). Le tableau N°1 dresse la liste des bonnes sources d’échantillons directs. Les échantillons directs sont préférables pour effectuer des comparaisons avec les profils d’ADN de cadavres non identifiés. Néanmoins, l’expérience montre que l’objet disponible aux fins de la comparaison (une brosse à dent, par exemple) a parfois été utilisé par quelqu’un d’autre. Il est donc vivement recommandé d’utiliser les échantillons familiaux pour confirmer l’authenticité des échantillons directs. Parmi les sources fiables d’échantillons directs, citons les échantillons médicaux tels que ceux obtenus lors de tests de dépistage sur les nouveaunés ou de biopsies. Tableau N° 1 : Guide de prélèvement d’échantillons d’ADN de référence pour les personnes disparues Parents biologiques Échantillons personnels Prélever des échantillons sur les membres de la famille biologique proche tels que les parents, les enfants, et les frères et sœurs. Si possible, essayer d’obtenir des échantillons provenant d’au moins deux membres de la famille. Les prélèvements buccaux et les échantillons de sang déposés sur des papiers FTA permettent d’obtenir des profils de qualité. Il est possible d’obtenir des profils d’ADN personnels de bonne qualité à partir des éléments suivants : - Objets personnels Dents de lait extraites ou troisièmes molaires (dents de sagesse) extraites Échantillons provenant de banques de ressources biologiques nationales ou de programmes de don de moelle osseuse Gouttes de sang obtenues lors d’un dépistage néonatal de la phénylcétonurie (PKU) Autres échantillons cliniques sanguins ou sériques Banques de données de la police judiciaire, laboratoires effectuant des tests de paternité, échantillons de référence provenant de membres de l’Armée Échantillons provenant de banques du sperme Cordon ombilical séché Préparations histopathologiques incluses dans de la paraffine Exemples d’objets personnels à partir desquels il est possible d’extraire de l’ADN : - Brosses à dents Rasoirs et lames de rasoir Brosses à cheveux et peignes Rouges à lèvres, déodorants Tasses et verres utilisés Sous-vêtements portés Mégots de cigarette et pipes Casques de moto et autres casques, casquettes et bonnets de sport Bouchons d’oreilles, casques audio Lunettes Bijoux Montres Informations tirées du Guide INTERPOL sur l’IVC (2014) Page 3/6 Recommandations INTERPOL en matière d’ADN Gestion de la qualité Les échantillons familiaux recueillis doivent comprendre de nombreux échantillons (de préférence, au moins deux) des membres de la famille les plus proches de la personne disparue, accompagnés d’une description adéquate de leur lien biologique avec celle-ci. Les recommandations existantes citées dans les références offrent de bons conseils. Le recueil d’échantillons de référence sera effectué après obtention d’un consentement éclairé et écrit, reconnaissant l’usage prévu des échantillons et des profils, et les risques y afférents. En outre, le formulaire de consentement mentionnera explicitement la possibilité d’un échange de données international, le cas échéant. Dans certaines circonstances, la coopération avec des organisations non gouvernementales peut être un bon moyen d’obtenir l’accès à des informations sur la personne disparue. Il se peut que ces organisations posent des conditions supplémentaires à la communication d’informations. Recueil d’informations sur des personnes ou des restes humains non identifiés Des protocoles de recueil d’échantillons sur des personnes ou des restes humains non identifiés seront mis en place. Ces protocoles devront respecter les normes approuvées, qui sont présentées en détail dans les documents de référence listés à la fin du présent document. Un échantillon d’ADN doit être prélevé sur les personnes incapables de s’identifier ellesmêmes telles que les nourrissons, les jeunes enfants ou les personnes souffrant de certains problèmes de santé (par exemple d’amnésie). Des frottis buccaux ou des échantillons de sang doivent être recueillis et préservés selon les bonnes pratiques établies. Pour les restes humains non identifiés, le tableau N° 2 dresse une liste des prélèvements recommandés en fonction de l’état du corps. Il est recommandé de prélever plusieurs échantillons afin de fournir une série d’options de tests. Tableau N° 2 : Prélèvement d’échantillons sur des restes humains non identifiés État du corps Échantillon recommandé Cadavre complet, non décomposé Sang (sur du papier FTA ou sur un écouvillon) et frottis buccaux (oraux) Cadavre mutilé, non décomposé Si présent : sang et tissu musculaire rouge profond (~1,0 g) Cadavre complet, en état de décomposition ou restes mutilés Échantillon prélevé sur des os longs et compacts (sections de 4 - 6 cm, fenêtre de découpe, pas de séparation de la diaphyse), ou Dents saines (de préférence molaires), ou Cadavres grièvement brûlés Tout autre os disponible (~10 g, si possible ; de préférence os cortical avec tissu dense) Tous les échantillons ci-dessus, plus dents incluses ou racines dentaires, si elles sont présentes, ou Frottis de la vessie. Informations tirées du Guide INTERPOL sur l’IVC (2014) Page 4/6 Recommandations INTERPOL en matière d’ADN Manipulation et analyse des échantillons Pendant toute la durée du transport et du stockage, l’intégrité des échantillons doit être assurée et maintenue. Un identifiant unique sera attribué à chaque échantillon de manière à disposer d’une chaîne de preuves incontestable. L’analyse des échantillons doit inclure le typage des séquences répétitives courtes (STR) à l’aide de tous les marqueurs disponibles dans les kits de prélèvement les plus modernes utilisés dans les différentes régions du monde. De manière générale, l’utilisation combinée de l’ensemble européen de référence (ESS) de loci, des marqueurs recommandés dans le système CODIS (Combined DNA Index System) des États-Unis, ainsi que du marqueur D6S1043, permettra d’obtenir un profil très riche. Des protocoles adaptés doivent être mis en place pour l’analyse d’échantillons complexes (par exemple les os, les dents, les tissus inclus en paraffine). Des échantillons doivent être conservés pour permettre la réalisation de tests complémentaires (par exemple les marqueurs d’ADN non autosomique, suivant les orientations de l’International Society of Forensic Genetics ; voir les références), en particulier lorsque les résultats concernant les STR sont incomplets ou lorsque les marqueurs de lignage doivent être analysés. La conservation des échantillons sera également utile à la recherche internationale et permettra de procéder à une analyse de confirmation si les résultats sont remis en question. Les laboratoires procédant aux analyses doivent être agréés conformément à la norme ISO 17025 ou à une norme nationale équivalente. Traitement et comparaison des données Tout traitement des données doit assurer leur intégrité et leur protection contre tout accès non autorisé. Des politiques de conservation et de divulgation doivent être mises en place. Le traitement électronique des données doit être compatible avec les formats d’échange de données génétiques internationaux, idéalement ceux décrits dans les normes ISO/CEI. Une base de données doit être créée, permettant de procéder aussi bien à des comparaisons directes qu’à des comparaisons familiales. La possibilité de comparer les profils d’ADN de restes humains non identifiés avec des profils figurant dans d’autres bases de données, constituées par exemple à partir d’échantillons prélevés sur des malfaiteurs et sur des scènes de crime, doit être évaluée. Des critères minimaux doivent être établis pour déterminer dans quels cas un recoupement est jugé significatif et nécessite d’être signalé en tant qu’identification potentielle. Les règles relatives aux comparaisons et aux signalements doivent prévoir les cas où les liens de parenté ne sont pas biologiques. Comparaison de données au niveau international En ce qui concerne la recherche internationale, la stratégie la plus efficace consiste à demander aux pays d’envoyer à INTERPOL chaque fois que possible, le profil d’ADN confirmé de la personne dont la disparition a été signalée. Lorsqu’un échantillon direct de la personne Page 5/6 Recommandations INTERPOL en matière d’ADN disparue n’est pas disponible, les profils d’ADN de parents proches peuvent être envoyés à INTERPOL, avec leur consentement. Les pays sont encouragés à mettre en œuvre leur programme pour les personnes disparues national conformément aux principes établis en matière de recherche internationale. Il sont par ailleurs vivement encouragés à utiliser les moyens d’échange existants au niveau international en matière d’ADN concernant les personnes disparues et les restes humains non identifiés, tels que les notices jaunes et noires d’INTERPOL, et la base de données génétiques d’INTERPOL. Références Gusmao L., Butler JM., Carracedo A., Gill P., Kayser M., Mayr WR., Morling N., Prinz M., Roewer L., Tyler-Smith C., Schneider PM. (2006), Commission DNA of the International Society of Forensic Genetics (ISFG): an update of the recommendations on the use of Y-STRs in forensic analysis, Forensic Science International 157, 187-97 INTERPOL Disaster Victim Identification Guide, 2014. Voir : http://www.interpol.int/fr/INTERPOL-expertise/Forensics/DVI-Pages/DVI-guide ISFG guidelines: http://www.isfg.org/Publications/DNA+Commission ISO/IEC 19794-14:2013. Technologies de l'information -- Formats d'échange de données biométriques -- Partie 14 : Données ADN Parson W., Gusmao L., Hares DR., Irwin JA., Mayr WR., Morling N., Pokorak E., Prinz M., Salas A., Schneider PM., Parsons TJ. (2014), DNA Commission of the International Society for Forensic Genetics: revised and extended guidelines for mitochondrial DNA typing. Forensic Science International: Genetics 13, 134-142 Prinz, M., Carracedo, A., Mayr, W.R., Morling, N., Parsons, T.J., Sajantila, A., Scheithauer, R., Schmitter, H., Schneider, P.M. (2007). DNA Commission of the International Society for Forensic Genetics (ISFG): Recommendations regarding the role of forensic genetics for disaster victim identification. Forensic Science International: Genetics, 1(1), 3-12 Scientific Working Group on DNA Analysis Methods (SWGDAM): Guidelines for missing persons casework. Voir : http://swgdam.org/SWGDAM_Guidelines_for_MP_Casework_APPROVED_01092014.pdf Page 6/6