LA DANSE DES MYTHES

Transcription

LA DANSE DES MYTHES
LA DANSE DES MYTHES
Compagnie Humaine
Rémy Boiron
1.
La compagnie
a. Activité
La compagnie humaine est installée dans le Lot et Garonne,
Créée en 2000, elle est passée de 26 représentations professionnelles pour 2 500 spectateurs cette
année là, à 115 représentations professionnelles dans 31 départements, l’Allemagne, la Suisse, la
Belgique pour plus de 13 000 spectateurs en 2005.
En six ans, ce sont près de 50 000 spectateurs qui ont assisté à 474 représentations dans plus de la
moitié des départements français.
C’est le fruit de notre participation régulière au festival off d’Avignon où nous jouons à guichets fermés
depuis six ans.
D’autre part, plus de 3 000 personnes ont acheté le livre de « La Luna Negra » publié à compte
d’auteur.
Enfin, de trente à soixante heures de sensibilisation sont effectuées chaque année en amont des
spectacles et nous accompagnons de trois à huit classes dans leur projet artistique.
Le tout a été réalisé par une petite équipe de un comédien, deux techniciens et une administratrice.
http://www.compagnie-humaine.org
b. Perspectives
La création et diffusion du répertoire a représenté jusque là l’activité principale de la compagnie. Ce
sont ainsi près de 4 000 kilomètres par mois qui sont parcourus.
Aujourd’hui, nous aspirons à construire des actions de territoire près de chez nous. Elles sont
l’occasion de nous inscrire dans le temps, de développer des partenariats, de combiner action sociale
et activité artistique.
C’est aussi l’occasion de transmettre notre savoir faire et d’en faire bénéficier de jeunes comédiens,
mais aussi de travailler avec d’autres compagnies.
C’est enfin l’occasion de nous adresser à des « Non-publics », c'
est-à-dire aux 93% des personnes
qui ne vont jamais au théâtre.
Par la suite, cela peut être aussi l’occasion de proposer à la diffusion des « bouquets », combinant
rencontres autour d’ateliers d’écriture, partage d’expérience, organisation de veillées, interventions en
extérieur ou lieux insolites… avec la présentation du spectacle.
Cela peut permettre, plutôt que de passer d’un lieu à un autre chaque jour, de nous poser par
périodes de semaines sur les lieux de diffusion et d’inscrire des actions dans le temps et la rencontre.
Le projet de la Danse des mythes s’inscrit dans cette démarche. Il s’inscrit sur une période dix-huit
mois, combine plusieurs formes s’adressant à différents publics et de nombreuses rencontres y sont
associées. D’autre part, il fait appel à différents partenaires, sur deux départements.
Note d’intention :
Les mythes…
« Il n’y a rien de plus beau qu’un homme qui vise les étoiles en sachant qu’il ne les atteindra jamais ».
Je ne sais pas qui est l’auteur de cette phrase.
Mais elle constitue le socle de la réflexion dans laquelle je suis.
Elle se nourrit des écrits et paroles de Théodore Monod, arpenteur d’univers, d’Hubert Reeves qui
s’interroge sur le futur de la vie terrestre, de Jean-Claude Carrière qui s’émerveille sur les mythes et
sur le Mahâbhârata, de Henri Gougaud et ses « Sept plumes de l’aigle » et ses contes du monde, de
Djalâl Al-Din Rûmî et Idries Shah, jongleurs des métaphores du soufisme. Elle fait aussi des détours
par Michel Serres, dit bonjour à Cervantès et salue le chapeau de Bergson.
1
Elle fricote un peu avec l’insolence de Mr Fo, Céline, l’atténue un peu avec Vian, la chamboule avec
Artaud.
Alors elle se repose sur les notes de Idir, les moustaches de Brassens et mélange Chaplin avec
Bergman et Keaton.
Puis elle va à la rencontre de Abdel, Pierre, Jaime, Eve, Claire, Léa, Marcel, Olive…
Des humains qui parlent de leur monde et du monde.
Comme beaucoup, je tente de m’accrocher aux branches. Je lis, je parle, j’écoute, je réfléchis, je fuis,
j’oublie, j’y reviens, je cherche.
Alors j’écris et je joue. Je n’ai rien trouvé de mieux ou de pire.
Les mythes…
J’aime beaucoup cette réflexion de Hubert Reeves :
« Il est possible qu’un des défis de l’humanité soit celui d’offrir des limites à son intelligence, pour la
survie de la nature et de lui-même.»
Et si la limite du verbe avoir était celle du verbe être ? Et si les mythes fondateurs de l’être avaient un
peu perdu de leur fonction originelle, aspirés par les mythes contemporains ?
Et s’il existait un rapport entre limite et « Lis mythe » ?
Voilà donc l’objet de mes réflexions.
Je sais que de très nombreux écrits existent à ce sujet, de nombreuses pièces du répertoire classique
et contemporain abordent ces questions.
Je souhaite les revisiter, les redécouvrir et offrir ce chemin en spectacle.
Comme je souhaite pour cela rencontrer des « Non public » et partir avec eux de cette base là, avec
leurs mots et à partir de leurs interrogations.
A travers des rencontres, des ateliers d’écriture, des présentations partielles du chantier. Plus on est
de fous…
Je pense interroger les uns et les autres sur
« Les premières fois », ces rites de passage moments qui ont marqué le temps,
Leur souvenir des mythes classiques, sur ce que représente un mythe pour eux,
Ce que représente pour eux l’éthique ;
Ce qu’ils aimeraient transmettre à leurs enfants ;
Ce qu’ils pensent de la place de l’homme dans le monde, sur la Terre ;
etc
Et m’inspirer aussi de cela pour la création de « La danse des mythes ».
2.
Le spectacle : « La danse des mythes »
a. Sa forme
Je souhaite y donner deux formes :
Une forme légère, « La petite danse » adaptable dans des petites salles, sur des petites
scènes, avec une lumière fixe et une petite sonorisation. Je commence à développer cette
forme à partir des textes que j’ai déjà et je vais continuer à le faire, dans de petites salles des
fêtes, dans des halls de théâtre, sous des granges… C’est la forme souple, ouverte, où il est
aussi possible d’expérimenter de nouveaux textes et situations. C’est elle qui nourrit la grande
forme ;
Une forme spectaculaire, « la grande danse » adaptable en salle de spectacle, avec une
lumière écrite, des effets sonores, une trame précise : bref, le spectacle de théâtre pour les
centres culturels… et petites salles, ce qui fait l’objet de mon travail de résidence.
Il est possible que la forme spectaculaire ne soit pas toujours frontale et que l’agencement de
scène n’y soit pas tout à fait académique.
b. La distribution
Par une combinaison de choix et de raisons économiques, je joue souvent seul sur scène depuis
plusieurs années.
Il est donc naturel d’appréhender cette création à partir de ma solitude.
2
Cela dit, je souhaite élargir ce projet.
Je ferai appel à un ou plusieurs regards extérieurs, que cela soit pour l’écriture, la mise en scène et la
scénographie, la chorégraphie, en accordant une place plus ou moins importante selon le choix
d’investissement des uns et des autres… et les moyens dont je pourrai disposer pour cela.
Je vais confier la création musicale à un compositeur et la création lumière à un éclairagiste.
J’envisage plusieurs personnes, mon choix n’est pas encore arrêté.
D’autre part, j’envisage la présence d’une autre personne sur scène, sous une forme originale. Là
encore, mon choix n’est pas définitivement arrêté.
La distribution fait elle-même partie de la création et de ses dix-huit mois de travail.
c. Son contenu
Je vois dans ce spectacle un personnage et un lieu pivot, autour duquel vont graviter des
personnages temporels et intemporels.
Pour le pivot, je pense à priori à un teinturier, hors du temps. Il va bientôt prendre sa retraite. Il est là,
dans son magasin avec autour de lui des vêtements de différentes époques, du vestige de peau de
bête aux textiles d’avant-garde fabriqués à partir des nano tubes, en passant par la culotte des sans
culotte. Il connaît l’histoire de chacun des propriétaires à travers l’évolution des vêtements qu’il lui a
confié en lavage.
Il sait si l’enfant est devenu brigand ou cadre commercial. Il suppose aussi la fin, quand le dernier
vêtement reste là, suspendu à jamais.
La question de l’évolution de l’enveloppe humaine et de son évolution au fil du temps est là.
On peut même envisager de voir suspendu des tubes de verre pour rappeler l’enveloppe originelle in
vitro de certains, sans préjugés, comme une évidence du monde d’aujourd’hui.
Et je vois ces personnages préoccupés par le manque de mythes et de « lis mythes », plus ou moins
conscients de cela et qui tentent de se dépatouiller de cette préoccupation, par la quête, la fuite, les
arrangements, les confusions, les silences.
Avec peut-être ce petit truc qui fait que l’homme est encore parfois beau : un désir de bien faire, une
éthique adroite ou maladroite, une bonne foi très mauvaise ou une très bonne mauvaise foi.
Avec aussi une urgence : la Terre va mal et de plus en plus mal. S’agit-il de rejoindre les étoiles ou de
garder les pieds sur terre ?
« Il n’y a rien de plus beau qu’un homme qui vise les étoiles en sachant qu’il ne les atteindra jamais ».
Limites et « lis mythes »…
Pour ce travail, comme je l’ai déjà évoqué au début, je me nourris d’écrits, de réflexions mais aussi et
surtout de témoignages. Je pars donc à la rencontre d’enfants, d’adolescents, d’adultes, de personnes
âgées, de normalisés et moins normalisés.
Une des bases d’échange se situe autour des « premières fois » : la première fois que vous avez
enfilé les vêtements que vous portez, puis par digression, la première fois que… au choix.
Bien sûr, pour le pivot, je m’inspire aussi d’un véritable teinturier qui va bientôt prendre sa retraite. Il
entend confier à la compagnie les vêtements que le temps a laissés dans son magasin.
C’est le destin.
3