WU TSANG Not in my language
Transcription
WU TSANG Not in my language
UNE INSTITUTION DU POUR-CENT CULTUREL MIGROS WU TSANG Not in my language 22.11.2014–08.02.2015 Wu Tsang (*1982) est un artiste, performeur et réalisateur. Son œuvre, qui utilise divers médias, aborde en premier lieu les questions relatives à la construction de l’identité. Tsang s’intéresse particulièrement aux dimensions socio-politiques de communautés. Il s’inspire grandement de son engagement auprès de celles de la scène gay et transgenre ainsi que des groupes d’immigrés de Los Angeles. Évoquant l’« underground » comme lieu de résistance culturelle, Tsang note l’importance que revêt la fantaisie dans les représentations de mouvements sociaux. Son film Wildness (2012), par exemple, qui a reçu de nombreux prix, est un documentaire sur un lieu de fête légendaire à Los Angeles, devenu ces dernières années un point de rencontre apprécié de la communauté transgenre d’Amérique latine. À travers un réalisme magique et des récits personnels, le film propose une discussion sur les stratégies du documentaire et le contexte sociétal. La première exposition individuelle institutionnelle de Wu Tsang en Europe rassemble une sélection d’œuvres réalisées sur une période de six ans (2008–2014). Au cœur du travail de Tsang se trouve la tentative de comprendre les vides relationnels entre soi et l’autre. Pour cette raison, il travaille souvent collectivement afin de développer un langage qui ne soit pas uniquement le sien ; son œuvre porte les traces de nombreux auteurs et intègre divers points de vue. Ce processus est fréquemment lié à la remise en question des normes sexuelles et à la quête de continuités et de ruptures historiques dans les dimensions politiques de l’identité. Ainsi, l’œuvre de Tsang reprend à son compte la discussion amorcée au début des années 1990 dans l’œuvre révolutionnaire de Judith Butler, Gender Trouble (1990). Elle y avance la thèse selon laquelle les aspects sociaux et psychologiques de l’identité sexuelle sont construits et consolidés à travers une sorte de répétition rituelle inconsciente des représentations dominantes de leurs contenus, et qu’ils peuvent donc également être modifiés en brouillant ou en déplaçant cet acte performatif. Dans son œuvre, Tsang expérimente une telle déconstruction de diverses manières et explore également la façon dont ses réflexions ont elles-mêmes évolué à travers l’acte de performance. En marge de la réalisation de Wildness, Tsang produisit plusieurs courts-métrages et installations. Parmi ses premiers travaux, on pourra voir la vidéo The Shape of a Right Statement (2008) dans laquelle l’artiste se demande qui peut être considéré comme membre « à part entière » de la société et qui le décide. Son film 16 mm For how we perceived a life (Take 3) (2012) met en avant les dissonances résonnant dans chaque forme de représentation culturelle, sociale ou politique. Dans ces deux œuvres, Tsang utilise une technique d’acteur qui simule une rupture dans l’unité entre le corps et la voix, entre la chose parlée et la chose dite. Deux travaux, utilisant les moyens du cinéma narratif, sont au cœur de l’exposition. L’installation vidéo de Tsang DAMELO TODO // ODOT OLEMAD (2010/2014) s’intéresse à Teódulo Mejía, jeune réfugié du Salvador arrivé à Los Angeles à l’âge de 15 ans et qui fait du bar Silver Platter son pays d’adoption. Tsang y réunit des éléments de fiction et de documentaire et transforme le musée en un lieu hybride dans lequel les conditions formelles, conceptuelles et physiques pour la création de « safe spaces » sont bien rendues. Les constructions d’identité à l’ère numérique se trouvent au centre de sa plus récente œuvre, A day in the life of bliss (2014), qui travaille sur le langage pictural et les conventions de la science-fiction. Il y donne le rôle principal à l’artiste performeuse américaine boychild. Les travaux de Wu Tsang ont été exposés à la Tate Modern (Londres), au Stedelijk Museum (Amsterdam), au Whitney Museum, au Museum of Modern Art et au New Museum (New York), au MCA (Chicagco) et au MOCA (Los Angeles). En 2012, Tsang participa à la Withney Biennial et à la New Museum Triennial (New York), à la Biennale de Gwangju (Corée du Sud) et à la Biennale de Liverpool (Grande-Bretagne). Son film documentaire Wildness a été primé à de nombreuses reprises, il a notamment obtenu le prix du Grand Jury à l’Outfest de 2012. Commissaire : Raphael Gygax, Commissaire, Migros Museum für Gegenwartskunst Dans le cadre de l’exposition une publication sera éditée en printemps 2015 chez JRP|Ringier en coopération avec Kunsthalle Düsseldorf. MIGROS MUSEUM FÜR GEGENWARTSKUNST LIMMATSTRASSE 270 POSTFACH 1766 CH–8005 ZÜRICH T +41 44 277 20 50 F +41 44 277 62 86 [email protected] MIGROSMUSEUM.CH POURCENT-CULTUREL-MIGROS.CH UNE INSTITUTION DU POUR-CENT CULTUREL MIGROS L’installation vidéo de Wu Tsang DAMELO TODO // ODOT OLEMAD (2010/2014) réunit des éléments de fiction et des éléments de documentaire et se penche sur la construction de « safe spaces » et sur leur fonction. Le film s’inspire d’une part d’une nouvelle de Raquel Gutierrez et d’autre part des expériences rassemblées par Tsang, comme organisateur de la manifestation Wildniss dans le bar Silver Platter, dans la communauté latino-américaine transgenre. Il y relate l’histoire du jeune réfugié du Salvador Teódulo Mejía, qui arrive à 15 ans à Los Angeles. Il trouve au Silver Platter un pays d’adoption et le moyen de s’affirmer. Depuis plusieurs dizaines d’années, le bar a une réputation de havre pour les migrants latino et sud-américains, et particulièrement pour les homosexuels et les transgenres. Régulièrement, Tsang interrompt sa narration par des passages documentaires jusqu’à ce que finalement la réalité rattrape la fiction. Utilisant des miroirs et des projections, qui invoquent l’esprit du Silver Platter, Tsang transforme le musée en un lieu hybride dans lequel les conditions formelles, conceptuelles et physiques nécessaires à la création de « safe spaces » sont rendues – notamment la question de l’authenticité supposée d’un tel lieu ainsi que celle de savoir quels sont ceux qui y trouvent leur place. Dans The Shape of a Right Statement (2008), Wu Tsang propose une nouvelle mise en scène du manifeste d’Amanda Baggs, In my Language (2007), diffusé sur YouTube. Elle s’y engage pour une meilleure compréhension des autistes et pour la défense de leurs droits. Tsang ne se contente pas de réciter mais il imite, au moyen d’une technique d’acteur qu’il appelle « full body quotation », l’intonation, le débit et la façon de s’exprimer de Baggs en utilisant une voix générée par ordinateur. Le but de cette imitation la plus fidèle possible est de poser la question de l’authenticité et de l’intention des locuteurs et de proposer une autre lecture du contenu initial en changeant le contexte. Dans son appropriation et son interprétation, Tsang dégage les structures linguistiques cachées derrière de nombreuses formes de discrimination. L’appel spécifique à la tolérance envers l’autisme devient une déclaration aux multiples interprétations. Le film en boucle 16 mm For how we perceived a life (Take 3) (2012) renvoie au documentaire marquant de Jennie Livingston Paris Is Burning (1990). La réalisatrice y dresse le portrait des membres de la scène culturelle des « bals » new yorkais. Dans cette culture underground principalement dominée par les populations noires et latinos, les compétitions de drag queens sont l’occasion de moquer les normes sociales et politiques courantes. Dans le film de Livingston, les parodies expriment également, avec nostalgie, une volonté d’évasion vers une vie meilleure, souvent perçue dans le glamour de l’univers des célébrités. De même, le documentaire montre que ces bals offrent un lieu sûr aux membres de diverses communautés pour pouvoir y donner libre cours à leur personnalité. Dans la culture pop, on retrouve aujourd’hui encore des éléments de cette culture underground, comme dans l’adaptation du « Voguing » de Madonna. Tsang aborde ces récupérations, parfois vécues par les protagonistes de cette culture des bals new yorkais comme une exploitation, en faisant incarner à ses acteurs des voix qui ne sont pas les leurs mais qui proviennent d’extraits et de rushs du film de Livingston ou de documents issus d’autres recherches. Cette double appropriation d’une subculture met en lumière les dissonances qui résonnent dans chaque forme de représentation culturelle, sociale ou politique. Au final, la question posée reste toujours la même : qui a le droit de parler au nom de qui ? L’œuvre de Wu Tsang A day in the life of bliss (2014) utilise le langage et les conventions de la science-fiction pour évoquer le thème de la construction de l’identité. Dans un monde imaginé par l’artiste, dans lequel nos personnalités virtuelles développeraient leur propre conscience et prendraient le pouvoir, la caméra suit une journée dans la vie de la protagoniste BLIS, interprétée par l’artiste de performance américaine boychild. L’installation vidéo relate des scènes du quotidien à travers des performances dansées, qui commentent et complètent l’action. Simultanément, la projection sur deux canaux est doublée par deux grands miroirs afin de transcrire dans l’espace d’exposition les différents niveaux d’action entre réalité numérique et « réelle ». Tsang démontre les conséquences possibles de notre perception actuelle de la sphère privée et de la communication en opposant la désincarnation de ces processus aux mouvements corporels intuitifs de boychild. De même, les alter egos androgynes numériques présentent un avenir qui se fond de plus en plus avec le présent. Aujourd’hui, à travers les réseaux sociaux, il est possible à tout un chacun d’exprimer toute une diversité d’identités et de construire son Moi à travers le langage et la performance des codes sociaux. MIGROS MUSEUM FÜR GEGENWARTSKUNST LIMMATSTRASSE 270 POSTFACH 1766 CH–8005 ZÜRICH T +41 44 277 20 50 F +41 44 277 62 86 [email protected] MIGROSMUSEUM.CH POURCENT-CULTUREL-MIGROS.CH UNE INSTITUTION DU POUR-CENT CULTUREL MIGROS DAMELO TODO // ODOT OLEMAD 2010/2014 Single channel video on monitor (color, sound), rear projection foil, wooden structure, carpet, bench 25:0 min., 320 x 506 x 506 cm Production Still Paris Has Burned 2012/2014 Digital print in light box 29 x 50 x 8 cm Courtesy of the artist, Galerie Isabella Bortolozzi, Berlin, and Clifton Benevento, New York Courtesy of the artist, Galerie Isabella Bortolozzi, Berlin, and Clifton Benevento, New York For how we perceived a life (Take 3) 2012 16 mm film projection 9:34 min., loop Safe Space 2014 Wooden crate, neon writing, mirror, twoway mirror, acrylic 143 x 211 x 46.5 cm Courtesy of the artist, Clifton Benevento, New York, and Galerie Isabella Bortolozzi, Berlin Courtesy of the artist, Galerie Isabella Bortolozzi, Berlin, and Clifton Benevento, New York The Shape of a Right Statement 2008 Single channel video on monitor (color, sound), plith 5:0 min., 182 x 68.5 x 40 cm Courtesy of the artist, Clifton Benevento, New York, and Galerie Isabella Bortolozzi, Berlin A day in the life of bliss 2014 2-channel video projection on screens, two-way mirror and mirror (color, sound), marley floor, beanbag chairs 20:0 min., dimensions variable Courtesy of the artist, Galerie Isabella Bortolozzi, Berlin, and Clifton Benevento, New York MIGROS MUSEUM FÜR GEGENWARTSKUNST LIMMATSTRASSE 270 POSTFACH 1766 CH–8005 ZÜRICH T +41 44 277 20 50 F +41 44 277 62 86 [email protected] MIGROSMUSEUM.CH POURCENT-CULTUREL-MIGROS.CH