C2-Usage détourné de la GBL en France_P.Nisse

30/03/2016
Usage détourné de la gamma-butyrolactone en France :
qu’en est-il 4 ans après la publication de l’arrêté
d’interdiction de vente ?
P. Nisse1, E. Puskarczyk2, I. Blanc3, J. Tison1, M. Mathieu-Nolf1,
et l’ensemble des Centres antipoison et Toxicovigilance français4
1Centre antipoison et toxicovigilance, CHRU, Lille ; 4CAPTV, CHU
Angers ; 4CAPTV, CHU Bordeaux ; 4CAPTV, CHU Lyon ; 4CAPTV, APHM
Marseille; 2,4CAPTV, CHU Nancy ; 3,4CAPTV, APHP Paris ; 4CAPTV, 4CHU
Strasbourg ; 4CAPTV, CHU Toulouse)
54ème Congrès de la Société de Toxicologie Clinique – NANCY – 29 & 30 mars 2016
Usage détourné de la gammabutyrolactone en France : qu’en est-il
4 ans après la publication de l’arrêté
d’interdiction de vente ?
1999: inscription du gamma-hydroxybutyrate
(GHB) sur la liste des stupéfiants
Conséquences: augmentation de la
consommation des précurseurs du GHB,
notamment celle de la gamma-butyrolactone
(GBL) (mais pas du 1,4-butanediol).
2010: rapport des 10 CAPTV français (2005-2019)
2011: un arrêté du ministère des Affaires
Sociales de la Santé et des Droits des femmes
interdit la vente et la cession au public de la
GBL en tant que matière première ainsi que
celle de produits manufacturés contenant
une concentration de GBL supérieure à 10%
et contenant > 100ml.
Objectif 2016: valider l’impact de l’arrêté
d’interdiction de vente de la GBL en France
au cours des 4 années suivant sa
Arrêté du 2 septembre 2011 portant application d’une partie de la réglementation des stupéfiants à la gamma-butyrolactone (GBL),
promulgation.
au 1,4-butanediol (1,4 BD) et aux produits qui en contiennent. https://www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.do?id=JORFTEXT000024540977
a
b
Gamma-butyrolactone: étude rétrospective des observations notifiées entre 2005 et 2009 ; publié en septembre 2010.
http://www.centres-antipoison.net/CCTV/index.html
1
30/03/2016
Matériel et méthode
•
•
•
•
•
L’interrogation de la Base nationale des produits et compositions (BNPC)
du système d’information commun des CAPTV: identification des
différentes entrées de produits ou d’agents impliquant la GBL
L’interrogation de la Base nationale des cas d’intoxication (BNCI) du Sicap:
période entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2015.
La recherche a porté sur les cas d’exposition humaine, volontaire ou
accidentel, et ayant pour agent, un produit à base de gammabutyrolactone fortement dosée ou la substance elle-même (potentiel
d’abus et dépendance).
Tous les dossiers issus de cette sélection ont été relus,
Ont été exclus tous les dossiers où la GBL entrait dans la composition de la
préparation commerciale comme excipient faiblement dosé (cosmétiques
notamment) et en l’absence de notion de détournement d’usage dans le
dossier
Usage détourné de la gamma-butyrolactone en
France : qu’en est-il 4 ans après la publication de
l’arrêté d’interdiction de vente ?
Rappels
•
•
•
•
•
•
•
•
CAS 96-48-0
Absorption rapide, complète, Tmax 30
mn
½ vie plasmatique < 1 mn (IV)
Transformation par une lactonase en
GHB
Plus lipophile, le pic plasmatique plus
précoce et concentrations plasm plus
importantes qu’avec une même
quantité GHB oral (1 ml GBL = 2,5 GHB)
Détection GHB: 4 à 8h sang (taux
physio <8mg/L) - < 12h urines (taux
physio < 1 mg/L)
Montée rapide: 20 à 30 min
Durée: 2 à 4 h
•
•
•
•
•
Effets recherchés: euphorie,
désinhibition, mise en confiance,
relaxation
Effets secondaires: nausées,
bradycardie, nystagmus, myoclonies,
somnolence.
Surdosage: convulsions, hypotonie,
hypoTA, coma, dépression respiratoire
Pas d’accoutumance mais une
dépendance physique assez rapide.
Sevrage: dans les 48h après dernière
prise
Prise d’alcool, amphétamine, cocaïne:
majoration (paradoxale) des effets
sédatifs et prolonge la durée du coma
2
30/03/2016
Usage détourné de la gamma-butyrolactone en France :
qu’en est-il 4 ans après la publication de l’arrêté
d’interdiction de vente ?
Résultats
•
•
•
•
•
•
74 cas expositions (GBL pour un usage privé, fortement concentré)
4 enfants
– 3 accidentels (M; 26, 27 et 36 mois)
– 1 criminel (F; 10 ans)
70 adultes (H/F 4,9) – Addiction/Festif
– Usage chronique = 25 ; 1ère fois = 3 (2nde fois: 1) ; Syndrome de sevrage = 11
– Âge: 18 – 60 ans - moyenne: 31 ans – médiane 28 ans
Lieu:
– Domicile: 80% (56); Retrouvé sur la voie publique = 10% (7) ; Boite de nuit: 3
Dose supposée ingérée: 1,5 à 3 ml,
– Pluriquotidien (5): toutes les 3 à 4h
Clinique : tous symptomatiques
– sévère: Glasgow < 6 (21); pauses respiratoires, hypotension artérielle
– Modérée: Glasgow 7-10 (10), Convulsions (6), bradycardie,
– Somnolence, vomissements, délire, myoclonies, sd confusionnel, douleurs
digestives,
Focus
•
•
Usage détourné de la gamma-butyrolactone en France :
qu’en est-il 4 ans après la publication de l’arrêté
d’interdiction de vente ?
Enfants
– 1 cas de soumission chimique par le père: Liquide pour nettoyer des jantes,
achat sur internet; appelle les secours car le tableau est plus sévère: Glasgow 7,
IOT par le smur; analyse: GBL 99%
– 2 cas accidentels similaires: GBL préparé dans un verre pour la consommation de
l’un des parents, contenu en partie bu par les 2 garçons; coma, IOT, surveillance
24h en réa pédiatrie
– 1 cas accidentel: produit (pour jantes) déconditionné et dilué dans un verre pour
nettoyer des pinceaux. Une gorgée bue par le garçon de 36 mois, a présenté
uniquement des vomissements.
Sevrage:
– 2 F et 9 H,
– âge de 22 à 50 ans (moy: 36,5 – médiane: 37,5)
– Apparition après un arrêt de 24h (2), 36h (1), 48h (8)
– Consommation pluriquotidienne (2), quotidienne
– Durée: consommation depuis un an (6)
– Clinique: tremblements, insomnie, hallucinations visuelles et auditives, angoisse,
agitation, confus, convulsions
– Thérapeutique: benzodiazépine, baclofène (1)
3
30/03/2016
Focus
•
•
•
•
Usage détourné de la gamma-butyrolactone en France :
qu’en est-il 4 ans après la publication de l’arrêté
d’interdiction de vente ?
Usages
– Pour faire la fête: 5 - pour se détendre: 2
– Antalgique: 1 - à visée hypnotique: 3
Cas particuliers:
– Commande au décours d’une hospitalisation avec livraison à l’hôpital (2)
– Fils, usager chronique, prise quotidienne chaque soir pour dormir; le père essaye
à son tour: Glasgow 3, IOT et séjour de 24h en réa.
– Changement de site de commande: goût différent, sensation brûlure dès la prise
et ulcération buccale
Traitement:
– Intubation (23), ttt symptomatique
– Benzodiazépines +/- baclofène (sevrage)
Evolution:
– Tous ont été vus par un médecin
– Durée d’hospitalisation: 8 à 48 heures
– Guérison 100%
Focus
Usage détourné de la gamma-butyrolactone en France :
qu’en est-il 4 ans après la publication de l’arrêté
d’interdiction de vente ?
•
La consommation de GBL était associée à
– une prise d’alcool dans 11 cas,
– de cocaïne dans 6 cas,
– de dérivés amphétaminiques dans 5 cas,
– de cathinone dans 4 cas,
– de poppers dans 3 cas,
– de cannabis dans 2 cas.
•
L’achat sur l’internet: 26 cas (35%)
•
Dans 18 cas, un produit « nettoyant » de jantes (clean easyTM, top cleanersTM, multi
cleanerTM, starcleanerTM ou BASF gammabutyrolactone distilléTM)
dosé à 99,9% en GBL
4
30/03/2016
Usage détourné de la gamma-butyrolactone en
France : qu’en est-il 4 ans après la publication de
l’arrêté d’interdiction de vente ?
Avant l’arrêté d’interdiction,
2005 – 2009: le rapport portant sur les données des
10 CAPTV français collectées sur ces 5 années, paru
en 2010
33 cas d’utilisation de la GBL dans un contexte
d’ingestion volontaire (29 cas de toxicomanie et 4 de
soumission chimique)
2012 – 2015 : 74 cas sur 4 années (70 cas de
toxicomanie, 1 soumission, 3 accidentels)
Les régions les plus impactées : Ile de France (18),
Provence-Alpes-Côte d’Azur (13) et Rhône-Alpes (10)
L’âge de la population: vieillissement entre les 2
périodes avec un glissement de la tranche d’âge des 1019 ans vers les tranches plus âgées et l’apparition de cas
chez les plus de 50 ans.
Chez les plus de 50 ans, usage chronique fréquent,
parfois quotidien et inversement, chez les plus jeunes
(moins de 30 ans), un usage festif occasionnel.
2012-2015
2005-2009
10 – 19 ans
2005 – 2009
2012 - 2015
20 – 29 ans
30 – 39 ans
40 – 49 ans
20,5 %
25 %
38,6 %
15,9 %
5%
35 %
28 %
26 %
> 50 ans
6%
Usage détourné de la gamma-butyrolactone en
France : qu’en est-il 4 ans après la publication
de l’arrêté d’interdiction de vente ?
Conclusion :
Malgré la promulgation d’un arrêté visant à réduire
ou à interdire la vente de la GBL fortement
concentrée au grand public,
1- la notification de cas d’intoxication par la GBL
auprès des CAPTV n’a pas diminué depuis 2011.
2- la GBL reste toujours accessible, très facilement,
bon marché (7 à 14 cent d’€ le ml) notamment par
l’internet, pour un usage privé.
3- presque tous les liquides vendus pour du GHB sont
en réalité du GBL
??
5
30/03/2016
54ème Congrès de la Société de Toxicologie Clinique – NANCY – 29 & 30 mars 2016
6