L`intégration régionale en Amérique Latine
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L`intégration régionale en Amérique Latine
L’intégration régionale en Amérique Latine Olivia Mazzoccoli, TES Le mercredi 6 février 2013 nous avons accueilli Kevin Parthenay, qui est doctorant à Sciences Po et spécialiste sur l’Amérique Latine. Il commença sa présentation en nous expliquant que l’intégration régionale en Amérique Latine est très forte, car la coopération est décisive pour pouvoir la stabilité de la région. Cette intégration commença en 1823 avec la création de la fédération Centre-Américaine. Celle-ci fut enclenchée par l’indépendance récente des Etats centre-américains (1815-21) et leur souhait de s’autonomiser. La première grande question que M. Parthenay souleva était comment est-ce que cette intégration se faisait, et pourquoi ? Il précise que pour comprendre les relations internationales en profondeur, il faut comprendre les régions du monde. Plusieurs accords sont passés tel que l’UNASUR et la CELAC, facilitant ainsi l’intégration. Les pays d’Amérique Latine ont eu tendance à privilégier l’idée d’intégration régionale afin d’éviter le retour des pays colonisateurs. Ils ont donc décidé d’utiliser leur avantage comparatif pour prouver aux pays colonisateurs (Espagne, Portugal) qu’ils ne dépendaient plus d’eux. Cependant, ce qui commence à poser problèmes dans les années 1950 est que leur économie repose presque exclusivement sur les matières premières, ce qui rend cette dernière très vulnérable. La volonté d’intégration découle de ce souhait de sortir de cet était de vulnérabilité, donc notamment de s’industrialiser. Des organisations d’aide à l’intégration furent créées dans les années 1950 afin de promouvoir et diffuser cette logique d’intégration. Ainsi il apparu des organisations tel que la CEPAL (Commission Européenne Pour l’Amérique Latine), basée sur les théories de Raul Prebisch, économiste argentin. En 1951 la création de l’ODECA (Organisation des Etats Centre-Américains) a pour but d’entrainer l’harmonisation des marchés et la coopération fiscale. Cependant, M. Parthenay souligne que les USA restent réfractaires à ces progrès. Une région faible leur permet de garder le contrôle sur la région, ils ont donc intérêt à conserver une Amérique Latine non développée car le développement de cette zone remet en cause leur capacité d’intervention. Les USA limitent donc leur aide. Cette première vague d’intégration est donc majoritairement une intégration économique plutôt que politique étant donné que l’Amérique Latine ne peut pas encore tenir tête aux US. Beaucoup d’autres organisations gouvernementales ont vu le jour, tel que le Latin American Free Trade Agreement (LAFTA). Bien que beaucoup de progrès puissent être constatés au début des années 1960, un problème majeur persiste. Aucune instance supranationale n’existe pour calmer les potentiels conflits. Cela a été témoigné lors de la « guerre du football » entre l’Honduras et le Salvador. Personne n’a voulu intervenir dans ce conflit. Lorsque j’ai demandé pourquoi les Nations Unies n’ont pas fait intervenir le conseil de sécurité, M. Parthenay m’a répondu que les USA étant en guerre froide, leur attention était focalisée ailleurs que sur un conflit en Amérique Latine. Dans les années 1970, l’Amérique Latine subit une grave crise agricole. Ces pays se rendent compte que les instances qu’ils avaient créées ont de nombreux défauts, et sont donc obligés de les remettre en question. Puis, à la fin de la guerre froide dès les années 1980, le néolibéralisme modifie en profondeur le système économique, qui peut désormais être qualifiée de « régionalisme ouvert ». Cependant, ça n’est pas synonyme d’abdication complète de la souveraineté nationale comme cela fut plus ou moins le cas avec la création de l’UE. La cession de la souveraineté nationale induit l’inter-gouvernementalisme (convergence des gouvernements), un prix que l’Amérique Latine n’est pas encore prête à payer. La question de la souveraineté nationale est au cœur de la troisième vague d’intégration qui a eu lieu dans les années 1990. Dans quelle mesure une instance supranationale peut-elle réguler une société ? Ayant bien compris que pour atteindre un niveau de développement se rapprochement de celui de l’UE, l’Amérique Latine se libéralise. Le Mercosur (1991) se développe et crée le FOCEM (Fondo de Convergencia Estructural del MERCOSUR) qui sont des fonds de coopération, et d’aide au développement des infrastructures. Une cour de Justice de l’Amérique Latine a été créée, qui intervient lorsque le problème posé est au dessus des compétences de l’Etat, et le groupe Andin (Bolivie, Equateur, Colombie, Pérou) peut produire des politiques à travers son secrétariat général. Cela modifie donc les rapports de pouvoirs. Il est très important de constater que les Etats ne sont plus les seuls à intervenir en politique puisqu’il y a également les organisations régionales. Au lieu de faire des pactes entre Etats, il y a des pactes entre organisations régionales. Une quatrième vague d’intégration fait son apparition, celle-ci étant plus d’actualité. De nouveaux systèmes ont étés créés tel que l’UNASUR, la Celac et l’Alba (par Chavez). Cette intégration prend une dimension sociale. L’intégration touche de plus en plus de sujets, tels que la protection de l’enfance, la fourniture de médicaments… Les blocs régionaux interviennent plus que les Etats eux-mêmes. Les coopérations sont de plus en plus idéologiques. Mais un problème de représentation freine la coopération. Par exemple, les idéaux du Venezuela de Chavez. S’il meurt, ses idéaux mourront avec lui, et la coopération devra être repensée. Ce problème est propre à toute l’Amérique Latine. Les Etats reposent sur les leaders politiques ce qui crée une instabilité. Les nouveaux leaders sont incapables d’assumer les mandats des leaders antérieurs. Le succès de l’intégration est relatif dans le domaine économique, mais pas politique car il n’y a pas d’instances supranationales pouvant se mettre au dessus des Etats, créant ainsi une cohésion. L’administration en Amérique Latine est très faible, il y a un manque de professionnalisation qui donne un caractère informel à la région. De plus, elle est extrêmement dépendante des ressources internationales et reçoit beaucoup d’aides financières, notamment du FMI et de la Banque Mondiale. L’Amérique Latine reste dépendante de la coopération financière et technique, et le manque de professionnalisme affaiblit la capacité de formation des Etats, car les personnes qualifiées vont voir ailleurs (les débouchés professionnels sont donc très nombreux!) La réticence à céder de sa souveraineté remet en cause le respect des normes qui ne sont pas appliquées et les engagements ne sont pas respectés. Cela montre également une incapacité à concilier les intérêts politiques. Après sa présentation, M. Parthenay nous a demandé si nous avions des questions. Juliette Dusautoir se demandait pourquoi est-ce que le Mexique n’avait pas été évoqué. M. Parthenay a répondu que le Mexique coopérait mais de facto a travers le CELA. Mais l’Amérique Latine avait toujours coopéré sans le Mexique, avec notamment la création de l’UNASUR qui exclut totalement le Mexique. On évoqua également la vision bolivarienne de cette intégration, où Bolivar (surnommé le « Libérateur ») parcourut entre 1825 et 1840 toute l’Amérique Latine afin de prôner l’idée de fondation d’une Nation Sud-Américaine. Cette idée ne se concrétisa jamais. Enfin, Louna Charlot demanda si M. Parthenay pensait que l’arrivée de Dilma Rousseff au pouvoir au Brésil allait avoir des répercussions sur les politiques sud-américaines. Il répondit que les conséquences étaient inévitables étant donné l’instabilité politique de la région.