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ACADÉMIE NATIONALE DE PHARMACIE
SANTÉ PUBLIQUE - MÉDICAMENT - PRODUITS DE SANTÉ - BIOLOGIE - SANTÉ ET
ENVIRONNEMENT
Fondée le 3 août 1803 sous le nom de Société de Pharmacie de Paris
Reconnue d’utilité publique le 5 octobre 1877
Séance académique dédiée
Mercredi 1er avril 2015 à 14 h 00
Salle des Actes
Faculté des Sciences Pharmaceutiques et Biologiques
Université Paris Descartes
4 avenue de l’Observatoire Paris 6
Compte rendu
1. OUVERTURE DE LA SÉANCE
La séance est ouverte par le Président Jean-Luc DELMAS à 14 h 00.
2. ACTIVITÉS ADMINISTRATIVES DE L’ACADÉMIE
2.1 INFORMATIONS DU PRÉSIDENT

Le Président annonce le décès de Renée KISCH, membre de la 4ème section. Elle avait dû démissionner
pour raisons de santé en 2011.

À propos de la séance délocalisée de Clermont-Ferrand, qui aura lieu les 22 et 23 mai prochain, le
Président rappelle l’importance de s’inscrire le plus rapidement possible afin de faciliter
l’organisation des deux journées.

La préparation du programme du projet Galien Ibn Sina avance bien. Une réunion a eu lieu le 31
mars.

La lancement du Dictionnaire électronique a eu lieu le 25 mars dernier. Ce fut une très belle séance.

L’Académie nationale de Pharmacie a été interpellée par le Sénateur des Bouches-du-Rhône sur la
prolongation de l’exploitation du réacteur Osiris. Réponse faite.

Prochaines séances :
2.2


o
1er avril 2015 : séance dédiée sur la « Qualité et responsabilité dans le cadre de la globalisation » ;
o
15 avril 2015 : séance thématique sur « Performance et innovation thérapeutique »
o
6 mai 2015 : séance académique
LECTURE DE LA CORRESPONDANCE ET INFORMATIONS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL
Déclaration d’un poste de membre titulaire non Ile de France pour la 3ème section.
Laure LECHERTIER, Rui BATISTA (élus membres correspondants nationaux de la 5ème section) et
Daniel VASMANT (élu membre correspondant national de la 4 ème section) ont envoyé des
remerciements pour leur élection ayant eu le 4 mars dernier.
 M. François CHAST a participé à la rédaction de l’ouvrage sur « La vérité sur vos
médicaments » ou la réponse de 32 spécialistes au livre de Bernard DEBRÉ et Philippe EVEN.
Aux Éditions Odile Jacob 2015, 589 pages.

Sandrine HUREL, Députée de Seine-Maritime, s’est vue confier par le Premier Ministre une mission
parlementaire sur l’avenir de la politique vaccinale en France, sur la base notamment de l’avis du
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Haut Conseil pour la santé publique de septembre 2014. Pour cela, elle a demandé à auditionner des
représentants de l’AnP. Le Président DELMAS et Agnès ARTIGES ont rendez-vous le 7 avril à 16h30.

Toutes les vidéos concernant la séance « Alcoolisme » et la séance solennelle du 17 décembre 2014,
sont désormais disponibles sur le site de l’AnP.
Celles concernant la séance thématique sur la Dénutrition sont en cours de montage et devraient être
disponibles rapidement.
3. TRAVAUX SCIENTIFIQUES & PROFESSIONNELS
« Qualité et responsabilité dans le cadre de la globalisation »
Le Président Jean-Luc DELMAS présente cette séance dédiée.
On entend souvent parler de la mondialisation comme une sorte de phénomène tentaculaire qui met à genou
l’économie de nos vieilles puissances, en faisant émerger de nouveaux pays à la démographie galopante et des firmes
plus puissantes que nombre d’États.
Mais cette mondialisation a d’autres effets. Sous couvert de recherche de productivité et de synergies, les activités de
chaque type sont concentrées dans chaque groupe au niveau d’un petit nombre de sites dans le monde, parfois d’un
seul. Il en va des activités opérationnelles comme des centres de décision.
Aujourd’hui, nous allons entendre comment ce phénomène de concentration peut impacter les activités nationales,
notamment en terme d’approche qualité et d’exercice des responsabilités.
Il en va au premier chef d’une préoccupation de santé publique, mais n’oublions pas que la réputation d’une firme et
même son avenir sont engagés à tout moment. La loi santé (Art.45) en débat depuis hier au Parlement n’envisage-telle pas d’élargir à la Santé les « class action » en vigueur depuis la loi Hamon ?
GEORGES FRANCE est membre de l’Académie de pharmacie, il est aussi cadre dirigeant dans un grand laboratoire
international. Il va nous expliciter la problématique de la responsabilité et de la complexité règlementaire, ses
difficultés et ses conséquences.
Introduction par Georges FRANCE (5 mn), membre de l’Académie nationale de Pharmacie
« La problématique de la responsabilité et de la complexité règlementaire dans le contexte de la
mondialisation : difficultés et conséquences ».
Le schéma symbolique ancien était essentiellement représenté par une fabrication du principe actif au même endroit
que le produit fini avec un circuit de distribution très simple, une visibilité et une traçabilité aisées pour garantir la
qualité des médicaments. Aujourd’hui, la « supply chain » est fragmentée et complexe : un principe actif restant sous
le contrôle du fabricant, une série de sous-traitants avec de nombreux intermédiaires dans des pays où le contrôle n’est
pas aisé, des transporteurs et des étapes intermédiaires nombreuses.
Par ailleurs, on assiste à une concentration des sites de fabrication qui sont amenés à distribuer leurs produits dans des
pays où les environnements réglementaires sont différents.
Il sera discuté aujourd’hui de la responsabilité des différents acteurs. Néanmoins la responsabilité finale appartient au
détenteur de l’AMM. Sera donc discuté le rôle du pharmacien responsable en France.
A quels standards se référer ? Il y a des réglementations dépendant directement des guidelines ICH (USA, Europe,
Japon), des membres observateurs avec des standards proches des régions ICH puis il y a les pays émergents qui sont
source de fabrication mais aussi source de la croissance pharmaceutique. Ils ont donc tendance à édicter leurs propres
règles qui ne sont pas toujours en harmonie avec les standards ICH (Turquie, Mexique, Corée du Sud). D’où une
multiplicité de standards ayant pour conséquence une complexité des contrôles, des temps de changement différents,
des référentiels différents, un frein à l’innovation technologique, une opportunité aux sous-standards et à la
contrefaçon. On est donc loin d’une harmonisation des standards. Les barrières au principe de convergence sont
représentées par la souveraineté nationale, le souci de la qualité, le protectionnisme. Deux régions du monde ont pris
des mesures fortes pour contrôler les importations. Ce sont les USA et l’Europe.
Enfin, on note un déséquilibre entre d’une part une pression réglementaire nécessaire mais lourde, des standards
multiples, des délais longs dus au contrôle du changement et d’autre part un marché compétitif sauvage et sous
pression économique, des acteurs multiples, parfois des sources uniques et des sous-standards. Il en résulte des
problèmes de santé publique : ruptures d’approvisionnement, difficulté d’accès au patient de certains produits.
Les points qui seront discutés en particulier aujourd’hui porteront sur :
- l’impact sur la responsabilité en France et au-delà en Europe, la « Qualified Person (QP) »
- les nouveaux éléments de la législation ayant pour objectif de faciliter l’amélioration continue et une convergence
voire une harmonisation des réglementations Qualité.
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« Exercice de la responsabilité pharmaceutique en France dans un contexte de globalisation »
Patrick TURLIER, Pharmacien, Docteur ès Sciences Pharmaceutiques, Responsable Technique et
Règlementaire, Pharmacien Responsable GlaxoWellcome Production.
De nombreux médicaments produits ou distribués en France (et en Europe) voient une partie de leurs étapes être
réalisées par des sites situés dans des pays non liés aux accords de reconnaissance mutuelle avec l’Union Européenne.
Cette tendance s’accentue depuis plusieurs années dans le cadre de la globalisation de la production pharmaceutique
au niveau mondial.
La réglementation européenne (Directive 2001/83/CE) et française (CSP art R5124-36) requièrent que la qualité des
lots mis sur le marché européen ont été certifiés par une « Qualified person » (terme européen), et en France libérés
par le Pharmacien Responsable.
Devant la multiplicité des situations possibles issues de cette globalisation de la production, l’exercice de la
responsabilité pharmaceutique reste complexe mais pas impossible en s’appuyant sur les systèmes qualité développés
sous l’impulsion d’ICH Q10 (management de la qualité) repris en partie III des BPF européennes et sur une solide
expérience pratique que le Pharmacien Responsable devra se construire dans les dix à quinze premières années de sa
carrière professionnelle. Ces années doivent être mises à profit pour aborder des disciplines pharmaceutiques variées
(production, contrôles, validation, réglementaire, développement etc…), lesquelles sont régies par des règles et
réglementations dont il doit avoir connaissance sinon la maîtrise. Le développement de cette expérience globale, en
complément de sa formation universitaire scientifique initiale de pharmacien, permet d’utiliser à bon escient l’analyse
de risque dans l’exercice de la responsabilité pharmaceutique, car la globalisation de la chaîne de production requiert
de plus en plus l’évaluation du partage des responsabilités au sens large.
« La Personne Qualifiée Européenne (EU QP), variabilité de ses responsabilités et de l’application de
la " QP Discretion " en Europe »
Céline MASSOTTE, Senior Director Global Quality Assurance & Supply Chain Compliance THEMEDCO
La règlementation spécifie qu’aucun lot de produit pharmaceutique médicinal ne peut être libéré pour la vente ou
l’approvisionnement des marchés européens s’il n’a pas été au préalable certifié par la Personne Qualifiée (QP) et
qu’il est conforme aux exigences règlementaires. Conformément à la loi européenne, les directives fixant les
responsabilités de la personne qualifiée doivent être transposées dans les législations et réglementations nationales des
États membres. Bien que le rôle et le statut de la Personne Qualifiée doivent être les mêmes dans tous les États
membres de l'UE, il est évident qu'il existe des différences. Ce fait, combiné avec les différentes cultures d'entreprise
et les Personnes Qualifiées elles-mêmes, conduit à d'importantes variations possibles dans l'interprétation du rôle de
la Personne Qualifiée et des interprétations différentes de la position de la Personne Qualifiée dans la structure de
l'organisation. Dans un monde globalisé, la Personne Qualifiée doit être impliquée dans de très nombreux processus
liés à la qualité dans la chaîne d'approvisionnement. Son niveau de connaissance doit être élargi et confirmé, afin de
prendre les bonnes décisions et agir de manière éthique pour in fine protéger et servir le patient.
« Qualité et difficultés règlementaires : freins à la conformité des dossiers d’AMM, variations, projets
ICH et modifications post AMM (Post approval changes) »
Dr. Jean-Louis ROBERT, Pharmacien, membre coopté du CHMP, Président du QWP (EMA-Londres),
Président de la Commission de Ph. Eur., correspondant européen de l’Académie nationale de Pharmacie
Ces quinze dernières années, des discussions ont été menées au niveau international (la conférence internationale
d’harmonisation – ICH) afin d'apporter une approche plus transparente et plus scientifique au développement
pharmaceutique et permettre au fabricant plus de flexibilité, par exemple au niveau de la fabrication. Ceci s'est reflété
dans quatre notes explicatives: le développement pharmaceutique (produit fini Q8 et principe actif Q11), la gestion
du risque (Q9) et le système qualité (Q10).
Avons-nous atteint cet objectif notamment en ce qui concerne les changements post-autorisation ?
Comme ces recommandations s’adressent essentiellement au développement du médicament, pour parfaire le tout, il
a été décidé de rédiger au niveau ICH une note explicative sur le plan de la gestion du cycle de vie d'un médicament
(ICH Q12). Le but de cette note est entre autres de faciliter pour le détenteur d’AMM, les changements post
autorisation du produit et du procédé de fabrication tout en gardant la traçabilité du dossier d'AMM.
Cette présentation va montrer la situation courante dans l’Union Européenne, l’état actuel des discussions au niveau
ICH, les possibilités et les défis d’une telle approche.
TABLE RONDE ANIMÉE PAR Thierry BOURQUIN ET Jacques MORENAS, membres de l’Académie
nationale de Pharmacie, avec la participation des conférenciers.
Thierry BOURQUIN, présente les membres de la table ronde. Outre les conférenciers, sont invités Jean-Pierre PACCIONI,
Président de la section B de l’Ordre des pharmaciens, Sabine KOPP, Directeur à l’OMS d’un groupe représentant
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l’Assurance Qualité médicaments et Jacques MORENAS, pharmacien inspecteur, Directeur adjoint à l’ANSM,
représentant l’Inspection.
Jacques MORENAS apporte un éclairage sur la coordination européenne des inspections des systèmes qualité et un
éclairage international.
Depuis le 1er janvier 1992 a été mis en place un guide européen des bonnes pratiques d’inspection avec une base de
données européenne (EUDRAD-GMDP) où sont recensés les fabricants, demain les distributeurs, les certificats BPF
(Bonnes Pratiques de Fabrication) et demain BPD (Bonnes Pratiques de Distribution). On y trouve les « non
compliance statements », c’est-à-dire les sites non conformes aux BPF. L’objectif est d’informer les autorités
européennes et leurs partenaires (Suisse, Canada, Australie …). Pour coordonner ces activités, un groupe de travail
(Inspector working group) basé à Londres à l’EMA se réunit 4 fois par an. Un « compliance group » s’occupe de la
conformité réglementaire des industriels ainsi que des systèmes d’inspection. Cela maintient la confiance au sein de
l’U.E. Au niveau international, on a mis en place depuis 42 ans un système de coopération en matière d’inspection
des produits pharmaceutiques [Pharmaceutical Inspection Convention Scheme (PICS)] dans lequel on fait de
l’harmonisation de standards et des formations d’inspecteurs (séminaires annuels) pour harmoniser les pratiques. À
partir de l’automne prochain, fonctionnera une académie virtuelle par « webinars » pour renforcer la coordination de
la formation des inspecteurs. De même, il y a volonté d’échange d’informations d’autres chefs d’agence ICMRA
(International coalition of Medicine regulatory authority) entre autorités compétentes. L’OMS coordonne des process
d’inspection. Depuis quelques années, les USA qui étaient réservés sur l’éclairage d’information deviennent
aujourd’hui très coopératifs.
Thierry BOURQUIN, rappelle que la formation des inspecteurs s’harmonise. Ces derniers deviennent très performants
au Mexique, en Corée ou au Japon. Ainsi une harmonisation et une reconnaissance mutuelles des inspections sont les
bienvenues.
Sabine KOPP, correspondant étranger de l’Académie va apporter un éclairage sur l’OMS. L’an dernier, l’OMS a pris
une résolution sur les systèmes de réglementation dans les différents pays en attirant l’attention sur l’harmonisation et
la convergence des standards. Elle rappelle que beaucoup de pays dans le monde n’ont pas encore de réglementation
pour la mise sur le marché des médicaments. Le travail est d’autant plus compliqué qu’il y a des écarts importants
entre pays avec des niveaux et des ressources différents. Dans ces résolutions, il est fait état de collaboration,
d’échange d’information et de travail en commun. Toutes les initiatives comme ICH sont reconnues par tous comme
très importantes.
Les réunions portent sur les projets de collaboration des autorités réglementaires, les projets de mise sur le marché des
génériques, un forum international des régulateurs. Les ressources doivent toutes converger pour être profitables au
patient. En ce qui concerne les pharmacopées, de nombreux pays ont déjà signalé que l’OMS devrait s’occuper et
étudier les standards internationaux pour aller vers une convergence. En 2012, 30 pays possédant des pharmacopées
se sont réunis à Genève. Une résolution a été de voir comment développer des bonnes pratiques pour une convergence
des monographies. Les pharmacopées ont une vision future certaine de convergence et donc veulent poursuivre leur
travail en commun. Au niveau international, le sujet abordé aujourd’hui par l’Académie est très actuel. Il doit permettre
une collaboration et être efficace pour protéger les patients et leur permettre d’accéder aux médicaments essentiels.
QUESTIONS - RÉPONSES – COMMENTAIRES
Thierry BOURQUIN à Jean-Pierre PACCIONI (Q) : Faut-il être irresponsable pour cumuler une fonction de pharmacien
responsable (PR) aujourd’hui ?
Jean-Pierre PACCIONI (R) : Non bien sûr. Il faut avoir des bases et une expérience les plus larges possibles. Il faut
aussi bien connaître tous les points de la délégation. Il est impossible au PR de tout voir. Par la délégation, il doit
faire confiance, c’est-à-dire qu’il doit contrôler. Il est responsable en se basant sur la chaine de responsabilité des
pharmaciens.
Thierry BOURQUIN (Q) : Certains PR rencontrent des difficultés à exercer leurs fonctions. Comment appréhendezvous ce problème ?
Jean-Pierre PACCIONI (R) : Malheureusement des confrères sont dans des situations difficiles. Si le PR a une position
de mandataire social, il doit pouvoir l’assumer. Cela est plus facile à dire qu’à faire.
Le Conseil de l’Ordre a mis en place un système de parrainage et tout PR qui a un souci éthique et qui le souhaite
peut parler en toute confiance et avoir des conseils. Le Conseil de l’Ordre peut aussi organiser un rendez-vous avec
la hiérarchie. Lorsqu’un PR a été démis de ses fonctions, il peut saisir l’Ordre. Il s’agit d’une procédure un peu
lourde mais devant les prud’hommes le Conseil de l’Ordre est écouté.
Devant une telle responsabilité civile, pénale et ordinale, il vaut mieux que le PR anticipe plutôt qu’un jour il soit
obligé de se retrouver devant un juge. Le juge n’a pas de sentiments, il applique des textes. Il vaut mieux donc discuter
avec l’Inspection qui est très à l’écoute et l’Ordre. Au terme de l’article 5124-36, si le PR est en désaccord avec les
règles dictées par l’entreprise, il doit informer le Directeur Général de l’ANSM et l’Inspection après discussion avec
le Président ou le patron « monde » de l’entreprise dans laquelle il exerce.
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François BOURILLET (Q) : A propos des contrôles en cours de fabrication, quelles sont les exigences actuelles pour les
matières premières et les produits finis dans le cadre de la globalisation ?
Jean-Louis ROBERT (R) : Les contrôles en cours de fabrication se sont faits dans le passé, se font aujourd’hui et se
feront demain. L’entreprise doit définir sa stratégie de contrôle. Ce qui change aujourd’hui, c’est l’apparition de
méthodes plus sophistiquées comme l’Infra Rouge proche qui permettent de monitorer la qualité d’un produit et de
libérer le lot en temps réel sans avoir à faire de tests sur le produit fini.
Monique ADOLPHE (Q) : Le rôle du pharmacien responsable (PR) est complexe. Il a besoin d’avoir des adjoints.
Comment sont formés les adjoints en France et ailleurs ?
Jean-Pierre PACCIONI (R): La formation du PR ou ses adjoints demande une expérience pratique. De même pour la
Personne qualifiée en Europe, le chemin de formation est calqué sur la formation du pharmacien industriel. En
France, l’expérience pratique est de deux types : l’une spécifique au laboratoire fabricant avec analyses qualitatives
de médicaments et quantitatives de principes actifs. D’autre part, pour les laboratoires exploitants (ceux qui ne
fabriquent pas), l’expérience est spécifique : elle est basée sur un temps minimum de deux ans porté à six mois selon
le cycle de formation du pharmacien sur le suivi des lots, la traçabilité, les réclamations … avec une expérience
minimum de pharmacovigilance. Pour les laboratoires qui ont quatre à six usines fabriquant des produits stériles, des
poudres inhalées, des antibiotiques …, ces temps d’expérience pratique limitée ne sont pas suffisants. Il faut connaître
la spécialisation et «tourner » dans les différentes usines pour comprendre les machines et l’outillage, connaître les
problèmes de distribution, de transport, les problèmes de température de la chaîne du froid et leur impact sur les
vaccins par exemple. Tout cela ne s’acquiert pas en six mois ou deux ans. Ce qui est choquant, ce sont les attestations
de complaisance. Le pharmacien industriel à l’obligation de former et cet investissement de formation ne se fait pas
au dernier moment. On ne nomme pas un pharmacien délégué, un pharmacien responsable intérimaire si on ne s’est
pas assuré de son chemin de formation de pharmacien responsable.
Georges FRANCE (R) : Le système de l’entreprise est très complexe. Un autre volet est très important c’est le système
qualité globale poussé par la législation Q10. Il faut avoir des process qualité harmonisés, qui sont appliqués et que
l’on doit faire vivre. Il faut une visibilité au plus haut niveau. Mais attention trop de législation tue la législation. Il
faut savoir garder du bon sens.
Patrick TURLIER (Q) : Qu’attendent les autorités de la QP ou du PR en France ? En France, l’indépendance du PR
amène une approche de réponse. C’est le pouvoir de dire oui et non. C’est même le devoir de dire non.
Jacques MORENAS (R) : Le PR relève d’une réglementation très ancienne en France. La QP en dérive en partie. Il est
essentiel pour l’administration d’avoir un interlocuteur unique, beaucoup de gens pensent que c’est l’administration
(en France l’ANSM) qui est responsable de la qualité des produits mis sur le marché. Ce n’est absolument pas vrai ;
c’est l’industriel en France qui est responsable, le titulaire de l’AMM, le PR. Il est responsable de la qualité et de la
sécurité des produits qu’il met sur le marché. On essaie parfois de faire porter cette responsabilité en partie sur
l’Agence. Il faut bien comprendre la séparation des responsabilités et la notion d’interlocuteur unique, privilégié pour
l’Administration capable aussi de prendre rapidement des décisions lorsque nécessaire (ex : rappel de lots).
Philippe GERMANAUD (Q) : Quelle est l’attractivité du PR ? On a du mal à recruter sur cette fonction. L’hyper
réglementation qui conduit à une hyper complexification ne se retourne-t-elle pas finalement contre le patient ?
Jean-Pierre PACCIONI (R): Le recrutement se prépare dans l’entreprise. Il faut préparer et former les adjoints. Je ne
suis pas tout à fait d’accord avec votre assertion. Il y a des candidats en attente de poste de PR. Aujourd’hui aucun
laboratoire n’a de problème de recrutement de PR. Bien sûr, il faut trouver la bonne personne, le bon candidat. Il
faut qu’il soit capable de se tenir autour d’une table d’un comité de Direction, capable de comprendre les
investissements industriels et discuter avec le directeur financier. D’où l’intérêt de le faire cheminer dans l’entreprise,
l’envoyer aux finances …. Il faut qu’il soit cohérent avec la charge qu’il va avoir.
Anne CARPENTIER (Q) : En cas de besoin d’effectuer une modification portant sur une étape d’un procédé de
fabrication qui doit être rapportée à plusieurs autorités à l’aide d’une variation d’AMM, comment réussissez-vous à
concilier qualité, amélioration continue des procédés et conformité réglementaire ? Quel est le rôle de la QP ou du PR
dans la prise de décision d’appliquer la modification même si tous les pays n’ont pas rendu leur avis ?
Thierry BOURQUIN, Georges FRANCE, Jean-Louis ROBERT, Sabine KOPP (R): C’est le bazar. Parfois on est obligé de
gérer
Deux ou trois procédés simultanément en période intermédiaire avec aucun bénéfice pour le patient (risque de rupture
de stock). Il y a beaucoup d’attente sur ICH Q12, en progressant pas à pas et en essayant aussi d’impliquer les pays
non ICH. Les forums OMS et l’Assemblée mondiale de la santé cherchent à les impliquer. Les BRICS ont maintenant
aussi leur mot à dire.
Jean-Roger CLAUDE (Q) : La formation des futurs PR doit se faire sur le terrain. Mais est-ce que l’Université forme
bien le pharmacien de base ou peut-elle mieux faire ?
Patrick TURLIER (R): La réponse est oui. Tout ce qui a été appris pendant les études servira un jour. Mais il faut aussi
aller à l’étranger voir ce qui s’y passe, découvrir de nouvelles cultures et pratiques. Il faut donner envie aux jeunes
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d’aller vers cette formation de PR et expliquer pourquoi et à quoi ça sert.
Jean-Pierre PACCIONI (R) : L’Université française forme bien les jeunes pharmaciens comparativement à ce qui se
passe dans d’autres pays. La formation avec pré-spécialisation et stages obligatoires a été une heureuse décision de
l’Université. Le système français est globalement très bon à tel point que nos jeunes diplômés partent s’installer en
Belgique et UK.
En réponse à Jean Pierre MANGEOT, Jean-Pierre PACCIONI, complète sa réponse : l’internat en pharmacie fait bien
sûr partie de l’expérience pratique reconnue notamment lorsque l’interne a effectué ses stages en stérilisation, en
production de médicaments. En garde, il a acquis une capacité à se débrouiller, à se responsabiliser.
Jérôme BAILLY qui est un jeune PR dans une entreprise de biotechnologie innovante (Q) : La formation de base
pluridisciplinaire est une chance. Recommander six mois de contrôles qualité pour un PR est le seul moyen de voir
disparaitre le PR devant une PQ. Que va-t-on mettre en place pour que le PR ne disparaisse pas au profit de la PQ ?
Jean-Pierre PACCIONI (R) : Je parle d’un parcours de 8-10 ans pour connaître l’entreprise du « sol au plafond». Le
PR était contesté au sein de l’Europe. La France a pu conserver sa position et a demandé que la PQ ait la même
expérience. Demander cinq ans en France d’expérience quand la PQ peut l’être au bout de six mois, cela pose un
problème d’harmonisation au niveau de l’Europe.
Jacques MORENAS (R): Au niveau de l’ANSM, on se doit d’appliquer les textes. On est dans un processus où la France
est plus exigeante que les autres pays avec le monopole pharmaceutique. C’est une exception ancienne. On aurait
beaucoup plus de mal à négocier aujourd’hui la fonction de PR par rapport aux autres pays européens avec la PQ
qui peut être n’importe quel scientifique.
Par ailleurs, je voulais signaler que nous avons autant de difficultés à recruter les pharmaciens inspecteurs. La prise
de décision de l’ANSM se base sur le constat du pharmacien inspecteur. C’est un problème de responsabilité. La
fonction de pharmacien inspecteur est mal connue alors que c’est un beau métier.
Yvette POURCELOT (Q) : Par le passé les fonctions de PR et de pharmacien inspecteur étaient assimilées à législation,
réglementation, alors qu’elles nécessitent la compréhension des différentes phases et points critiques du médicament
et sont très intéressantes sur le plan international. Donc il y a une publicité à faire sur ces fonctions.
Par ailleurs, pouvez-vous préciser la notion de « QP discretion » ?
Georges FRANCE (R) : La « QP discretion » vient du fait que dans certains cas on peut laisser à la discrétion de la
QP de décider de libérer un lot si une erreur peut être considérée sans conséquence. Comme ce n’est pas une
recommandation, officielle, elle n’est donc pas appliquée de manière cohérente d’un pays à l’autre. Par exemple,
UK peut autoriser une entreprise, lorsqu’il y a un problème, à libérer le lot dans des conditions acceptables. En
dehors de UK, ce type de procédure est laissé à la discrétion de chaque autorité nationale.
Martine CLARET (Q) : Quelle serait la responsabilité du PR ou du dispensateur en cas de problème de santé lié à la
RTU d’AVASTIN® en Ophtalmologie ?
Jean-Pierre PACCIONI (R): Si l’industriel prouve qu’il a délivré un produit conforme au dossier, c’est déjà important.
Ensuite, il y a la responsabilité liée aux préparations magistrales. Vraisemblablement, il y aurait des coresponsabilités.
Thierry BOURQUIN remercie l’ensemble de l’assemblée pour la pertinence des questions posées et les réponses
apportées par le panel des participants.
Clôture par le Président Jean-Luc DELMAS
Une assemblée aussi nombreuse montre que le sujet abordé aujourd’hui a été mobilisateur, passionnant et compliqué.
Un grand merci à Georges FRANCE, Anne CARPENTIER, Thierry BOURQUIN, Pierre POITOU pour avoir pris l’initiative
de cette séance et l’avoir aussi bien organisée. Bravo à nos trois orateurs pour avoir dressé un tableau aussi objectif
de la situation, merci également à nos collègues, Jacques MORENAS pour l’ANSM, Jean-Pierre PACCIONI pour l’Ordre
des Pharmaciens d’avoir exprimé l’opinion de la tutelle dans ce contexte compliqué.
Il y a une grande logique et beaucoup de complémentarité dans notre programme. Après la sécurité du médicament
co-traitée en janvier - à savoir la prise en compte des intolérances spécifiques et l’information du patient -, nous avons
mis en avant aujourd’hui la volonté des industriels de conserver le contrôle de la qualité des médicaments qu’ils
fabriquent et commercialisent. Début juin, nous verrons comment progresse techniquement la détection des
contrefaçons.
La sécurité sanitaire, un axe fort de la santé publique, est bien une priorité de notre Académie !
La séance est levée à 17 h 30
*
*
*
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Jean-Luc DELMAS
Président
Agnès ARTIGES
Secrétaire Général
CR séance académique dédiée 01.04.2015 VF
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