HOMELIE DE MGR CASTET pour la MESSE DU VENDEE GLOBE

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HOMELIE DE MGR CASTET pour la MESSE DU VENDEE GLOBE
HOMELIE DE MGR CASTET pour la MESSE DU VENDEE GLOBE
le 21 octobre 2012 en l’église Notre Dame)
Monsieur le Maire,
Monsieur le Député,
Messieurs les élus,
mes bien chers frères et sœurs.
Il est des hommes et des femmes que la Providence nous donne pour être – pardonnez-moi, c'est l'habitué de la
montagne qui parle, ce n'est pas exact ici, mais cela peut s'appliquer aux skippers - pour être des "premiers de
cordée" et comme "premiers de cordée" pour donner à l'humanité un horizon qui va au-delà de ce que l'homme,
de ce que la femme peut vivre dans son quotidien. Il est des hommes et des femmes qui élargissent notre horizon. Il
est des hommes et des femmes qui, en nous, ravivent ce désir d'aller plus loin, de ne pas se contenter de la
répétition, de ne pas se laisser abattre par ce qui est lourd, de ne pas croire ni au poids des déterminismes, ni en
des balivernes comme le sens de l'histoire. Il est des hommes et des femmes qui nous invitent à relever la tête, à
avancer, à entrevoir dans le quotidien des chemins à prendre, alors que nous croyons que nous ne pouvons pas, que
nous sommes fatigués, ou que c’est pour d’autres.
Lorsque nous vivons ici, dans cet environnement du Vendée Globe, nous pensons bien sûr à ceux et celle qui vont
entreprendre l'aventure, à ce temps de solitude qui confine au spirituel, à l’effort physique mais, si j'osais dire, un
peu comme dans un noviciat, pour ceux qui l'ont vécu ici, effort qui n'est rien, comparé au travail intérieur, au jeu
des solitudes, aux désirs, aux affections attachantes. Nous pensons à eux et, d'une certaine manière, nous les
remercions de vivre cela parce que ce qu'ils vivent d'une façon exceptionnelle, est aussi ce que nous vivons dans
d'autres expériences. Nous ne les regardons pas simplement en curieux, même si cela importe, en amoureux de la
voile et de la mer, ce qui est la moindre des choses pour un Sablais, mais également pour ce qu’ils révèlent de
l’homme, de ses potentialités et, sans doute, de sa nature spirituelle. Car l’homme qui n’est pas spirituel, collé à la
terre dans un avenir court, se laisse facilement satisfaire, jusqu’au jour où le non-sens cogne à sa porte, où la mort
lui dit l'absurde. Or l'homme est naturellement spirituel et même lorsque l'on le lui cache, lorsque l'on construit une
société de sécurité, de précaution, de peur, il sait qu'il y a plus, et qu'il ne doit pas avoir peur, pour aller plus loin.
Parmi les enseignements que nous apporte ce que nous vivons déjà, en attente, et surtout en accompagnement,
dans quelques semaines, voici qu'il y a cela : "l’homme dépasse l’homme". L'homme avec toutes ses capacités, cet
homme, créé par Dieu ne se définit pas simplement par ce qu'on peut dire de lui, par la connaissance qu’on peut
en avoir, par les catégories qu'on plaque sur lui mais il est toujours un au-delà de lui-même, comme si l'être
spirituel ou l'icône de Dieu, mis en lui à la création, se manifestait par-delà les pauvretés du temps, les fragilités de
la nature humaine, les complexités de la relation, les échecs des vies, comme dans ses réussites apparentes, selon
les hommes.
Oui, aujourd'hui nous sommes réunis, à l’occasion de ce grand évènement qu'est le Vendée-Globe, mais nous le
sommes ici, dans cette église. Nous le sommes parce qu'il a quelque chose de spirituel, et aussi parce que la mer,
l’isolement en mer, le combat qu'elle nous permet de mener, est comme en connotation forte avec l’expérience
de l’homme croyant. Nous accompagnerons nos amis par la prière. Pourquoi ne pas vivre cette chose si simple
même si vous ne les connaissez pas : ne pas simplement suivre un skipper mais en porter un, dans la prière, pas
forcément celui que vous aimez - c'est plus facile - mais un autre, par la prière de chaque matin, en prononçant son
nom. Il, elle, ne le saura pas mais nous savons que dans la communion des saints, cette présence de ceux qui
aiment est un soutien qui passe toute épreuve.
Aujourd’hui, vous l'avez peut-être remarqué par la prière d'ouverture que j'ai chantée, l’Eglise nous donne de vivre
le dimanche de la "mission universelle" au terme d'une semaine qui porte le même nom. Le chrétien ne peut pas
être quelqu'un qui se tait, ça n'existe pas. Le mandat du Christ nous a été donné dès notre baptême lorsque nous
avons été qualifiés "de prêtres, de prophètes et de rois" et singulièrement, en notre temps, me semble-t-il, de
prophètes. Cette mission universelle se décline peut-être, mais c'est artificiel - comme dit saint Augustin : « je fais
les distinctions vaille que vaille, les distinctions, c'est pour aider les hommes à penser » - cette mission se décline
en deux réalités : la mission au lointain, toujours aussi urgente puisque, comme l'affirme le concile Vatican II, le
dialogue ne nous dédouane pas de l'annonce claire et de la Révélation du Christ, unique Sauveur des hommes ;
mais aussi ce que, dès le début du concile, Jean XXIII appelait "la joyeuse annonce autour de nous". Ou encore,
ce à quoi réfléchissent les évêques du monde, au cours du Synode de la nouvelle évangélisation. Cette nouvelle
évangélisation, c'est l'appel toujours actuel, pressant du Christ, non seulement à être, mais à dire explicitement le
mystère du salut dans ce que Jésus annonce, pas en l'arrondissant, bien entendu, en disant ce qui, au cours des
siècles a mis en route des millions d’hommes et de femmes jusqu’à produire des figures de sainteté. Et la
prédication chrétienne, comme vous savez, tient au recto d'une carte professionnelle, donc c'est court. Ce
qu'annonce le Christ, c’est que la mort est vaincue et que la vie est plus forte que la mort - tout le reste, ce qu'on
raconte à côté, est là pour approfondir cette annonce. La mort est vaincue et la vie est plus forte que la mort, c'est
le cœur même de la foi chrétienne, ce n'est pas un vague humanisme sympathique - l'humanisme découle de cela mais c'est la force de la vie. « Nous ne pouvons pas nous taire sur ce que nous avons vu et entendu » et, comme le
dit l'apôtre : « Malheur à moi, si je n’annonce pas l’Evangile». Et parfois cette annonce de l'évangile va conduire à
être comme en porte à faux par rapport au monde, par rapport à la pensée toute construite que l'on trouve souvent
autour de nous. Les chrétiens ne doivent pas s'isoler dans le domaine du privé. C'est une erreur. Les chrétiens qui
vivent leur foi dans le privé seulement, ne sont plus chrétiens. La foi s'annonce hors des cercles.
Et voici que dans un pays qui est une démocratie, comme le nôtre, et dans le légitime concert des opinions, il est
nécessaire que la voix des chrétiens s’entende dans une cité, dans la réflexion autour des textes législatifs, dans la
vision de la famille, dans le respect de la vie à tous les âges, de la conception à la mort. Bien entendu, nous n’avons
pas la prétention de le faire seuls. Nous sommes en démocratie, dans le libre concert, la libre expression de toutes
les opinions. Mais il importe que nous-mêmes, et y compris dans le domaine de la politique, nous soyons présents.
La Vendée a une tradition forte de mission dans les lointains encore aujourd'hui. Mais il importe que cette même
mission, avec la même vigueur, soit vécue aujourd'hui là où nous sommes.
La réunion que vivent les évêques autour du Saint Père, n'est pas simplement une réunion de piété qui va produire
un Nième texte et, comme l'on est tenté de dire lorsque les années passent et c'est mon cas, "ça va glisser" puis on
parlera d'autre chose, après. Là, nous sommes au cœur de la foi chrétienne, au cœur du mystère, au cœur du
baptême. L’Eglise est née pour être missionnaire. Elle n’est pas comme d'autres systèmes religieux, un système
clos où se retrouvent les membres pour être contents d’être ensemble. Elle pense qu'elle porte un message pour tout
homme, qu'elle le porte sur le mode de la proposition, que cette proposition doit être accueillie librement et non pas
sous la contrainte, bien entendu, sous l'assénement. Mais il importe que nous soyons en éveil pour être ces témoins
dont le monde a besoin pour les générations actuelles et pour les nouvelles générations.
Nous avons le bonheur de vivre ici. Le bonheur de vivre dans cette ville qui n'est pas parmi les plus désagréables
du monde, comme vous avez eu l'occasion de le vérifier. Nous avons le bonheur de vivre des évènements comme
celui qui nous est donné ces jours-ci. Que ce bonheur qui porte aussi par lui-même des qualités spirituelles, nous
donne la force, parce qu'il est souvent apaisant, d'être ces témoins dont le monde a besoin.
+ Alain Castet, évêque de Luçon
D’après la transcription de l’équipe de communication de la paroisse Sainte-Marie des Olonnes

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