La Banque Coop épinglée pour manipulation

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La Banque Coop épinglée pour manipulation
12 Economie
Tribune de Genève | Jeudi 30 octobre 2014
Il a dit
Le chiffre
Jeux vidéo
«J’espère un retournement
sur le front du chômage
à la mi-2015»
80
Retour au bénéfice La Suisse
net pour Nintendo arrive 20e
AFP
François Rebsamen
Ministre français du Travail
Le nombre de pays qui se sont
finalement engagés hier à Berlin
à mettre en place un échange
automatique d’informations
financières d’ici à 2017-2018.
Le grand nom japonais des jeux
vidéo a surpris hier avec un
bénéfice net au premier semestre
2014-2015 de 103 millions d’euros.
Ses ventes ont par contre chuté
de près de 13%, à 1,26 milliard.
Finance
La Banque Coop épinglée pour manipulation
Selon la FINMA,
l’institution a
soutenu de manière
illicite le cours
de ses actions
durant quatre ans
Frédéric Thomasset
La manipulation a duré quasi
quatre ans. Entre l’été 2009 et le
printemps 2013, la Banque Coop
s’est adonnée à des opérations de
rachat de ses propres titres dans le
but de contrebalancer la chute de
son cours, comme le révélait hier
l’Autorité fédérale de surveillance
des marchés financiers (FINMA).
D’après les résultats de l’enquête
de la FINMA – ouverte en mars
2014 et terminée le 24 octobre –
l’établissement financier bâlois a
«gravement enfreint l’interdiction
de manipulation du marché prescrite par le droit de la surveillance
et manqué à ses obligations d’organisation et de garantie d’une
activité irréprochable».
Interdiction d’exercer
Si aucun chiffre n’est communiqué, la FINMA parle «d’achats importants», soulignant que la banque avait notamment soutenu le
cours en Bourse des actions au porteur avant et pendant la publication de résultats, ainsi qu’en fin de
mois ou d’année. Des opérations
qui n’ont ni enrichi la banque ni
aucune personne y travaillant.
Côté sanctions, une interdiction d’exercer limitée à trois ans a
été prononcée à l’encontre de l’ancien CEO de la banque, Andreas
Waespi, qualifié de «principal responsable de la manipulation» par
la FINMA. Ce dernier a quitté la
Banque Coop au début du mois
d’août 2014, après neuf années
passées à sa tête. Quant à l’institution, elle a reçu un blâme et s’est
vu imposer des mesures contraignantes. La banque soulignait hier
dans un communiqué avoir déjà
pris ses dispositions, en «cessant
totalement le négoce de ses
propres actions dès juillet 2013».
Entre l’été 2009 et le printemps 2013, la Banque Coop s’est adonnée à des opérations de rachat de ses
propres titres dans le but de contrebalancer la chute de son cours. KEYSTONE
Victime collatérale des sanctions
Conséquence de l’interdiction
d’exercer de trois ans maximum
prononcée à l’encontre du CEO
de la Banque Coop au moment
des manipulations, Andreas
Waespi, la Banque cantonale
d’Argovie perd son futur patron.
En effet, le financier devait
succéder à l’actuel directeur
Rudolf Dellenbach en mai 2015.
Il n’en sera finalement rien.
La Banque cantonale d’Argovie
annonçait hier la rupture du
contrat la liant à l’ex-directeur
général de la Banque Coop,
précisant qu’il s’agissait
d’un «commun accord». Un
développement inattendu que la
Banque cantonale d’Argovie
affirme «regretter». En guise de
solution, Rudolf Dellenbach, qui
devait partir à la retraite à la fin du
mois d’avril, a accepté de rester
en poste jusqu’à ce qu’un nouveau
successeur soit désigné.
Le conseil d’administration de
l’établissement est sur le point
de lancer une procédure de
recrutement allant dans
ce sens. F.TH.
Il y a un an, la FINMA ordonnait la confiscation de 2,64 millions de francs de bénéfice
indûment gagnés par la Banque
cantonale de Bâle – actionnaire
majoritaire de la Banque Coop –
épinglée pour le même type
d’opération entre 2009 et 2012.
«Dans le cas de la Banque Coop, la
manipulation n’a engendré
aucun bénéfice, précise Vinzenz
Mathys, porte-parole de
l’autorité. Il n’y avait donc rien à
confisquer.»
Interrogé sur la durée de l’enquête, ce dernier a estimé que la
FINMA s’était montrée «efficace»:
«Il n’est pas interdit pour une entreprise de racheter ses titres, par
conséquent le caractère illicite de
l’opération n’est pas forcément visible en Bourse. Le prouver nécessite souvent une longue enquête
ciblée et documentée.»
Recours possible
Hier, la Banque Coop annonçait
avoir «pris acte» de cette décision,
précisant que la FINMA n’avait
pas «constaté d’actes passibles de
poursuites pénales». Quant a son
ancien directeur Andreas Waespi,
il signifiait à l’ATS trouver son interdiction d’exercer «infondée» et
«disproportionnée» et pourrait
faire recours. Il a néanmoins
quitté avec effet immédiat la
présidence de Swisscanto.
Business
La Suisse s’est hissée
de deux rangs (20e place)
au palmarès 2015
des pays proposant
le meilleur climat pour
y faire des affaires.
Où trouver le meilleur climat pour faire
des affaires (top 5 des pays)
Singapour NouvelleZélande Hong1
kong
2
3
Danemark Corée
du Sud
4
5
SOURCE: BANQUE MONDIALE
Hausse de 0,9% des
salaires prévue en 2015
Selon une enquête d’UBS, la
fiche de paie augmenterait
en moyenne de 0,9% l’an
prochain en Suisse, contre
0,8% sur le plan cantonal
Quelle hausse de salaire
les entreprises comptent
verser en 2015
Augmentation en %
Les salaires devraient augmenter
en moyenne de 0,8% dans le canton, contre une hausse de 0,9%
sur le plan national (selon UBS) et
de 1,2% dans le canton de Vaud,
selon une enquête menée par la
Chambre vaudoise du commerce
et de l’industrie (CVCI).
Plus d’un tiers des entreprises
genevoises ne comptent cependant pas augmenter les salaires en
2015. Et près d’un tiers des firmes
compte octroyer une hausse située entre 1% et 1,9%. Enfin, un
troisième tiers pense augmenter
les salaires de plus de 2%.
Après avoir augmenté de 1%
cette année, les salaires devraient
progresser en moyenne de 0,9%
l’an prochain sur le plan national,
confirme une seconde étude, réalisée cette fois par UBS. Corrigée
de l’inflation – que le numéro un
bancaire helvétique anticipe à
0,3% en 2015 –, la hausse réelle
(celle du pouvoir d’achat) devrait
s’inscrire à 0,6%, contre 0,9% en
2014.
Dévoilée hier, l’enquête annuelle «CIO Wealth Management
Research» a été menée auprès de
370 entreprises et fédérations
d’employeurs et de salariés, dans
22 secteurs d’activité, précise
UBS. Contrairement à cette année, l’augmentation réelle attendue pour l’an prochain se révélera
inférieure à la moyenne de 0,8%
enregistrée ces dix dernières
années.
Dans son commentaire, UBS
attribue les augmentations intervenues cette année à l’ajustement
«forcé» des salaires minimaux et à
la réduction des discriminations
en la matière. Ces deux facteurs
ont prioritairement bénéficié aux
salariés les moins bien lotis.
Toutefois, le personnel spécialisé
a aussi profité de hausses individuelles afin de le retenir.
Le rebond conjoncturel modéré prévu pour l’économie
suisse comme pour celle de
l’Union européenne (UE) pourrait
avoir favorisé les prochaines hausses salariales, note l’établissement
aux trois clefs. Mais la reprise demeure modeste dans la zone euro
et l’incertitude quant aux conséquences d’un éventuel abandon
Genève
Pourcentage
d’entreprises
37%
0%
De 0,1 à 0,9
5%
De 1 à 1,9
29%
De 2 à 2,9
19%
De 3 à 3,9
3%
+ de 4
7%
Vaud
35%
0%
De 0,1 à 0,9
7%
De 1 à 1,9
31%
De 2 à 2,9
16%
De 3 à 3,9
5%
+ de 4
6%
GL. DONNÉES: RR. SOURCE: CVCI, CCIG.
de la libre circulation des personnes avec l’UE pourrait assombrir
le tableau, nuance la grande
banque.
Evolution par secteur
L’évolution salariale diffère cependant considérablement selon
les secteurs. Selon UBS, seules les
entreprises actives dans l’informatique, les télécommunications
et l’industrie électrique devraient
connaître l’an prochain des hausses de salaires supérieures à celle
de cette année.
Après une hausse marquée de
1,5% en 2014, les salaires nominaux dans le secteur de la chimie
pharmacie devraient afficher l’an
prochain une augmentation limitée à 1,3%. La branche sera détrônée par celle de l’informatique,
laquelle verra les rémunérations
augmenter de 1,6% en 2015.
La plupart des secteurs devraient présenter une évolution
stable, avec des hausses de salaires de 1%. Dans le tourisme, les
rémunérations devraient stagner
l’an prochain, après la légère progression de 0,5% enregistrée cette
année, suite à l’ajustement des
minima salariaux.
L’activité touristique est
particulièrement exposée à la
vigueur du franc et à la conjoncture anémique dans le reste de
l’Europe, explique UBS. Une
hausse des charges salariales ne
ferait qu’aggraver sa situation
économique. R.R. avec ATS
L’or pousse la Banque nationale suisse à s’engager dans l’arène politique
L’institut d’émission
monétaire s’inquiète des
répercussions économiques
que pourrait avoir l’initiative
«Sauvez l’or de la Suisse»
Le peuple suisse se prononcera le
30 novembre sur l’initiative populaire de l’UDC (Union démocratique du centre) intitulée «Sauvez
l’or de la Suisse». Ce scrutin inquiète la Banque nationale suisse
(BNS). A tel point qu’un de ses
directeurs a décidé de s’engager
dans le débat public précédant la
votation. «Avec l’initiative sur l’or,
Contrôle qualité
les montants versés aux cantons
diminueraient de façon continue», prévenait hier Fritz
Zurbrügg, dans une interview
publiée par les quotidiens
Südostschweiz et Nordwestschweiz.
Rappelons que l’initiative de
l’UDC impose des règles strictes en
matière de gestion du métal jaune.
Parmi elles, celle qui réclame que
les réserves d’or constituent au
moins 20% des actifs de la BNS.
L’institut d’émission ne serait
ensuite plus autorisé à en vendre.
Enfin, l’initiative demande que l’intégralité de ses stocks d’or soit
maintenue sur le territoire suisse.
«Normalement nous ne nous
exprimons que discrètement sur
des votations. L’initiative sur l’or
est une exception, car son adoption aurait une influence directe
sur les activités de la BNS, estime
Fritz Zurbrügg. Elle nous empêcherait de remplir le mandat que
nous confère la Loi sur la Banque
nationale.» Du coup, en tant
qu’actionnaires, les cantons en
pâtiraient sérieusement. Et la région de l’arc lémanique paraît
particulièrement concernée.
Le printemps dernier, la BNS
avait déjà réussi une première malheureuse: elle n’avait pas versé de
dividende à la Confédération et
aux cantons au titre de l’exercice
écoulé, Il en avait coûté un manque à gagner de 39 millions de
francs pour l’Etat de Genève, finalement intégré dans les comptes
de 2013. Souvenir amer, quel que
soit le montant, puisque la dette
publique du Canton de Genève
devrait s’élever à 13,2 milliards de
francs l’an prochain, soit plus
de 27 000 francs par habitant.
Les citoyens vaudois ne devraient pas être insensibles non
plus aux avertissements de Fritz
Zurbrügg, même si la dette publique de leur canton se limite
actuellement à 423 millions de
francs. Le Canton de Vaud avait en
effet subi un manque à gagner de
50 millions de francs le printemps
dernier, lorsque la BNS avait
confirmé sa décision de fermer le
robinet des dividendes au titre de
l’exercice écoulé. «Nous espérons
que la BNS revienne à meilleure
fortune cette année et qu’un dividende soit versé l’an prochain»,
nous confiait le 7 mars le chef du
Département vaudois des finances,
Pascal Broulis.
La prospérité de la BNS et le
versement de dividendes nécessitent précisément un haut degré
d’indépendance pour l’établissement. Surtout lors de défis comme
le maintien d’un cours plancher de
l’euro par rapport au franc depuis
le 6 septembre 2011. Simultanément, l’institut d’émission détient
les plus importantes réserves d’or
du monde par rapport au nombre
d’habitants (1040 tonnes). Alors
que la valeur du kilo de métal
jaune a chuté de 30% au cours de
l’exercice écoulé. Tenant compte
de ces réalités, la Fédération patronale vaudoise use de mots très
durs au sujet de l’initiative sur
l’or: «Inutile, dangereuse et contreproductive.» Philippe Rodrik