laturquie,lepaysdesimprevus - Armen

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LA TURQUIE, LE PAYS DES IMPREVUS !
Après avoir conquis pendant plusieurs siècles des pays en Europe et en Afrique du Nord, l’Empire
ottoman fut disloqué, ébranlé par les luttes de libération menées des peuples opprimés. Cet empire
de plus de 21 millions de Km² de superficie se réduisit à 770 000 Km², et c'est à partir de ce qui devait
devenir la Turquie que Mustafa Kemal Atatürk fonda une République laïque en 1923. La population
turque est majoritairement musulmane, les non-musulmans ne représentent qu’une minorité.
Né à Salonique, en Grèce, Atatürk dota le pays d'une structure républicaine et créa un parti
politique, le Parti Républicain du Peuple ou Cumhuriyet Halk Partisi (C.H.P.), dont le sigle est figuré
par 6 flèches symbolisant : Républicanisme, Populisme, Laïcité, Révolutionnarisme, Nationalisme et
Etatisme.
Anticlérical, Atatürk voulut métamorphoser la société turque en la modelant à son image. Il fit
supprimer le port du Fès (couvre-chef), autorisa la consommation de l’alcool dans les lieux publics.
Souvent, Atatürk se rendait à l’improviste en divers endroits d’Istanbul en particulier au Park Otel ou
Yıldız Park. Un dimanche, les deux frères Azarian avaient accompagné leur sœur Zaruhi à un bal.
Soudain surgit Atatürk accompagné de ses gardes du corps. Il s’installa à une table et commanda une
boisson. Puis, il invita Zaruhi à danser un tango que l’orchestre interprétait.
Brusquement, la musique s’arrêta. Intrigué, Atatürk en demanda la raison au chef d’orchestre. Celuici lui répondit que c’était l’heure de la prière et la musique ne devait pas couvrir la voix du muezzin
appelant à la prière. Atatürk ordonna de reprendre le morceau de musique.
Il est certain que du jour au lendemain le régime politique d’un pays peut changer suite à une
Révolution, mais le changement des mœurs et des coutumes ancrés en chacun depuis des
millénaires demande plusieurs siècles d’évolution sociale et éducative. Par conséquent, malgré le
changement de régime en 1923, la société turque est restée profondément marquée par ses
coutumes ancestrales et sa culture musulmane.
Conscients de cette réalité, les chefs de certains partis politiques en Turquie ont exploité l’intégrisme
islamiste de la population et mené une politique diamétralement opposée aux principes laïcs
instaurés il y a 90 ans. Depuis la création de la République turque, l’armée était garante de la laïcité.
Elle était considérée comme la colonne vertébrale du pays. Lors des menaces de dérives dans le pays,
l’armée organisait un coup d’Etat. Cette situation perdura pendant toute une période jusqu'à ce que
tout risque soit écarté. Alors, l’armée regagnait ses casernes tout en gardant un œil sur la politique
notamment lors de nouvelles élections.
Le parti AKP d'Erdogan démantela cette armée. Plusieurs dizaines de militaires de hauts rangs furent
destitués ou éloignés des postes de commandement.
Les manifestations déclenchées au Gezi Park d’Istanbul se sont propagées aux autres villes du pays.
La police ne peut arrêter ces révoltes. Le premier ministre Erdogan a-t-il toujours le soutien de
l’armée ? N’y a-t-il pas une force occulte qui peut surgir à tout moment dans le pays pour soutenir ou
démolir Erdogan? Un vieil ami d’Istanbul me disait à l’époque : La Turquie est le pays des imprévus.
Souhaitons que ces imprévus ne se transforment pas en cauchemar surtout pour les minorités nonmusulmanes qui ont subi, il y a presque un siècle des déportations de masse qui se transformèrent
en génocide.
Nersès Durman-Arabyan
Paris juin 2013
www.armen-progres.com